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Khaos: Itinéraire d'un quidam
Khaos: Itinéraire d'un quidam
Khaos: Itinéraire d'un quidam
Livre électronique288 pages3 heures

Khaos: Itinéraire d'un quidam

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À propos de ce livre électronique

"Khaos – Itinéraire d’un quidam" est le témoignage de l’auteur qui, à l’aube de ses cinquante-huit ans, décide de raconter son parcours de vie exceptionnel, motivé par un événement assez singulier. Découvrez comment il a pu surmonter des obstacles plus intenses les uns que les autres, tant sur le plan personnel, sentimental, que professionnel, à travers le monde.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Stéphane Vedovato-Mauge est convaincu que les vraies histoires sont le meilleur moyen de se reconnecter à sa propre humanité. Dans cet ouvrage, il se livre complètement au lecteur en partageant ses propres péripéties de vie.
LangueFrançais
ÉditeurLe Lys Bleu Éditions
Date de sortie24 juin 2024
ISBN9791042222727
Khaos: Itinéraire d'un quidam

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    Aperçu du livre

    Khaos - Stéphane Vedovato-Mauge

    Prologue

    « Le tercio de muleta »

    Je me réveille encore angoissé. Depuis trois semaines, je suis comme un boxeur sur un ring, les mains attachées dans le dos, obligé de subir sans relâche les coups de son adversaire. Mettre un genou à terre, se relever. Encore et encore.

    Ce matin, les messages pleuvent sur mon iPhone. C’est un nouveau déversement d’agressions, de haine, de violence, d’allégations mensongères, de menaces, de contrevérités, où l’obsession de la vengeance déforme la réalité. Tout y passe. Mes actes manqués répréhensibles moralement sont noyés dans un torrent de boue. Attestations, plaintes, associations pour les victimes, poursuites, dénonciations… Rien ne semble pouvoir arrêter cette marche en avant.

    Une personne normalement formatée serait sous antidépresseurs ou pire. Je résiste. Lutte. Sans broncher. Je regarde devant moi. Cherche une solution. Mon silence est mon armure.

    Depuis des années je veux écrire. C’est le moment. Je dois écrire. Soulager mes maux et toute cette fureur en affrontant une page blanche. Poser ma tête pour me lancer. Impossible.

    Marie-Christine a entamé une politique de destruction massive, le tertio de muleta, une mise à mort. Elle est en mission. Elle n’est pas seule. Je la connais suffisamment pour savoir que des forces obscures lui servent de conseil. Ceux et celles qui depuis toujours restent dans l’ombre, prêts à me sauter à la gorge. Ceux et celles qui par petites touches chirurgicales, comme le picador pique le taureau avant la crucifixion par le toréador, ont toujours semé le doute dans son esprit. Ceux et celles aussi qui retournent leur veste.

    C’est mal me connaître. J’encaisse. Je souffre.

    « Tout ce qui ne me tue pas me rend plus fort. » Je t’entends Papa.

    Cette citation de Nietzche dans le « Crépuscule des idoles » est un mantra qui m’accompagne depuis mon adolescence dès que j’ouvre les yeux, une manière singulière de défier le cours des choses, savoir résister, se battre, agir.

    J’efface de ma mémoire tout ce qui est lié à un passé corrosif en m’accrochant à ce qui est du vivant, du sacré, tout ce qui donne du sens à la vie.

    Je suis abîmé. Mais je ne vous donnerai pas satisfaction, vous qui espérez me voir tomber. Baisser les bras n’est pas dans mon ADN. Je ne suis pas plus fort qu’un autre, je survis par instinct.

    Mes fils. Ils sont ma lumière. Je dois me tenir droit pour eux.

    Si mon corps encaisse et se courbe, mon esprit doit rester combatif, résistant, résilient. Le vent souffle toujours plus fort au sommet de la montagne. Je sais que le temps un jour est oubli.

    Marie-Christine et tout son entourage essayent avec une agressivité et une animosité déconcertantes de me couvrir d’opprobre doublée de menaces constantes. On veut entacher ma réputation. On veut me coller une image, me salir, me priver de ma liberté.

    « Une image, c’est un boulet qu’on traîne. En permanence, pas comme une ombre. Le boulet reste là après le coucher du soleil. ». Cette phrase de Keith Richards des Rolling Stones a tout son sens aujourd’hui. Elle me permet de résister, de dire ma vérité le temps venu.

    La vie m’a appris que même les pires tempêtes ont une fin.

    Je sais que Marie-Christine, dans un futur plus ou moins lointain, regrettera. Regrettera d’être celle qu’elle est aujourd’hui.

    Non pas regretter pour avoir déversé sur moi une colère légitime à un instant « t », mais regrettera une colère exutoire d’un passé de violence qui ne me concerne pas, une colère où la méchanceté et la haine atteignent un degré « méphitique », une colère, fruit d’une omerta reine dans sa famille, chez ses amis, refusant toute vérité par lâcheté, une colère dictée par la volonté de faire disparaître ce qui a été sublime entre nous pour essayer de survivre en acceptant in fine d’être malheureuse, une colère pour être celle qu’on lui demande d’être, une colère pleine de jugements égarés, destructeurs, alimentée par des tiers malveillants et malhonnêtes.

    Regrettera pour essayer de croire que je ne l’ai pas aimée. Regrettera, car serais-je le seul à l’avoir vraiment aimée ?

    Ce jour sera sans moi.

    J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé. C’est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui.

    Alfred de Musset

    Chapitre 1

    Vachères

    « Philippe, Marie-Christine. Je peux te parler ? »

    « Je suis en réunion. Je reviens vers toi aussi vite que possible. »

    « Merci. »

    Je suis dans le Luberon depuis le début de la Covid. « Lubeuron » et non Lubéron comme disent les Parisiens. Il n’y a pas un Luberon, mais plusieurs Luberon.

    Géographiquement, de L’Isle-sur-la-Sorgue jusqu’à Apt, c’est un Luberon où les villages perchés, Bonnieux, Mesnerbes, Gordes, Lacoste, regorgent de propriétés sorties des cahiers d’architectes et publiées dans les revues chics, où les belles voitures sont conduites par de belles personnes, où juillet et août ressemblent à un parc d’attractions avec un flot discontinu de touristes. Apt marque une frontière après laquelle un Luberon sauvage se dessine. Celui des amoureux de la nature, des villages plus rustiques, mais si vrais, Simiane la Rotonde, Viens, Reillanne, Banon, Vachères, où forêts et champs forment des mosaïques de couleurs l’été, où les crêtes balayées par le Mistral découvrent un paysage qui semble avoir encore échappé à une civilisation de perfection.

    Le Luberon, c’est aussi le plus beau ciel d’Europe. Plus qu’en d’autres lieux, ce ciel est sur la terre. Il suffit de voir, d’entendre, et de sentir, puis de lever les yeux pour être en communion avec le Cosmos.

    Il y a le Luberon de René Char à l’Isle-sur-la-Sorgue, hanté par « les sept parcelles », celui où Albert Camus trouvait inspiration, refuge, et venait échanger avec son ami voisin, avant de trouver la mort en 1960 en quittant sa maison de Lourmarin lorsque sa Facel Vega heurte un platane. Il y a le Luberon de Jean Giono, né à Manosque, figure dominante de la littérature du vingtième siècle et pourtant à part, mêlant un humanisme naturel à une révolte violente contre la société, où la ruralité provençale domine, comparant le Luberon à « une grosse baleine bleue ».

    J’ai la chance d’y avoir dans ce Luberon une maison de famille à Vachères, petit village perché à huit cents mètres d’altitude, célébré par Jean Giono dans les premières lignes de son roman « Regain », « Quand le courrier de Banon passe à Vachères, c’est toujours dans les midis. »

    Le regain c’est l’herbe qui repousse dans les prés après la première fauchaison, c’est le renouveau, c’est l’espoir. Après mon retour de Montréal et le décès de mon beau-père, mon père, Alain, je n’y ai pas remis les pieds. Impossible d’affronter son fantôme. Son empreinte est trop forte et son souvenir trop douloureux. Il aimait pourtant me rappeler à de nombreuses occasions combien cette maison était son refuge. Un endroit protégé de tout et de tous où il pouvait se ressourcer. C’est aussi le mien. Mais son absence est trop violente.

    Lorsque le monde s’arrête avec la Covid, je m’installe dans cette grande maison. Plus de cinq cents mètres carrés articulés en forme de « u » autour d’une cour intérieure, des espaces de vie pour chaque génération, des chambres pour loger plus de vingt personnes, un salon immense avec au centre une cheminée ouverte, une table en chêne massif réalisée sur commande par un ébéniste, ancien élève de l’école Boulle, un ping-pong, une piscine.

    Cette maison est vivante. Elle a une odeur. Un doux mélange de pierre, de bois, de cire, de feu, de cuisine, de vie heureuse tout simplement.

    Des dizaines de kilomètres de nature sauvage à perte de vue où les sommets du Luberon jouent avec la lumière tout au long de la journée. Les animaux sauvages, sangliers, chevreuils, renards, sont de plus en plus nombreux et n’hésitent pas jusqu’aux premières lueurs du jour à venir sur les différentes terrasses.

    J’ai besoin de vivre l’inconnu dans un endroit isolé dans lequel je me sens en paix. Cette ancienne bergerie restaurée au fil des années n’est pas simplement un lieu de villégiature. C’est le témoin « vivant » de notre histoire de famille depuis une cinquantaine d’années, là où nous avons la certitude de tous nous retrouver une ou deux fois par an, un pèlerinage incontournable et nécessaire pour chacun d’entre nous.

    Les chaînes d’information diffusent en boucle des nouvelles de plus en plus inquiétantes. Le monde semble perdre pied. Je suis sensible aux mouvements, aux odeurs, aux sons des villes, des pays. Plus rien. Plus une voiture, plus un avion, plus une ombre qui se déplace. Des scènes apocalyptiques de fosses mortuaires sur Manhattan creusées en urgence, la bénédiction du pape François le 15 mars devant une place Saint-Pierre vidée de ses fidèles, des canards dans les rues de Paris, calme plat sur le grand canal de Venise d’habitude encombré par les gondoles et autres embarcations, silence terrifiant.

    La vie s’est arrêtée pour lutter contre la propagation du coronavirus dont les formes les plus graves touchent chaque jour de plus en plus de malades. Une étrange course contre la montre a commencé. Personne ne sait encore quand elle s’arrêtera. Nous devons rester cantonnés dans nos appartements, maisons, et ne ressortir qu’en portant des masques à des heures précises pour faire nos courses. La planète entière retient son souffle. Le chaos semble en marche et sans le savoir encore, ma vie ne sera plus jamais la même.

    Emmanuel Macron lors d’une allocution déclare : « Les circonstances exceptionnelles appellent des décisions extraordinaires, dont la privatisation temporaire de libertés pour chacun d’entre nous, car nous sommes en guerre ».

    Ce qui est compliqué pour beaucoup est simple pour moi. Je suis dans un endroit magnifique, au milieu de nulle part, ne souffrant aucunement des contraintes imposées dans les villes. J’ai l’impression d’être en vacances.

    Je ne suis pas témoin des fake news qui se multiplient sur les réseaux sociaux et autres canaux d’informations, aux manipulations de certains pour déstabiliser un monde en sursis. Je n’aime pas les Facebook, Instagram et autre TikTok, ces outils qui déshumanisent l’individu et le « prostituent » aux yeux de tous dans un mode relationnel et de fonctionnement virtuel, véritable arène de laquelle il est impossible de s’échapper, conduisant au pire, le « Metavers » de Mark Zuckerberg.

    J’entends qu’un exode urbain a lieu et que les campagnes sont prises d’assaut. J’entends que les villes ressemblent à des prisons. J’entends que cette pandémie fait des milliers de morts sur la planète. J’entends que les plus grands chercheurs du monde travaillent pour trouver un vaccin. J’entends que…

    Mais je vis dans ma bulle. Seul et apaisé. Je peux écouter tout le répertoire de Franck Sinatra, Serge Gainsbourg, Léonard Cohen, les sonates de Schubert, revoir pour la énième fois « Le Parrain » de Francis-Ford Coppola, les films de Clint Eastwood, Claude Sautet, Henri Verneuil, relire les romans de Stefan Zweig, Paul Auster, Hemingway, Jack London, Tom Wolfe, m’évader avec les dessins de Hugo Pratt ou Jean Giraud.

    Un week-end sur deux, muni de mon acte de divorce prouvant que mes enfants habitent à Meudon et moi à Vachères (je me suis marié dans cette maison vingt ans auparavant), je prends la route pour les retrouver. Je ne manque jamais ces moments avec mes fils, Nathan et Niels. Traverser la France pratiquement seul sur l’autoroute, une sensation de fin du monde.

    J’ai comme seul contact avec les villes, Manosque où je fais mes courses une fois par semaine et Meudon deux fois par mois pour voir mes enfants.

    Cette solitude me convient. Elle me permet de faire le point sur ma vie.

    J’en profite aussi pour me lancer dans une psychothérapie à distance sous la forme de visioconférence. J’ai déjà essayé quelques années plus tôt à Montréal lorsque notre couple avec Aline tangue. Mais je ne suis pas prêt. Je refuse de dire les choses, la vérité, et raconte ce que je veux entendre. Après trois séances, je cesse. Plus exactement, la thérapeute met fin à nos échanges.

    Mais cela est différent maintenant. J’ai vieilli, mûri, affronté un certain nombre de séquences compliquées. Je suis père. Seul. Le monde à l’arrêt. C’est le bon moment.

    J’écoute « Popsicle Toes » de Michael Franks.

    Chapitre 2

    Meetic

    « Marie-Christine, Philippe. Excuse-moi, je ne pouvais pas te répondre. Je t’écoute. »

    « Je voulais te parler de Stéphane. Tu es au courant que nous nous sommes séparés il y a trois semaines et que notre mariage est annulé. »

    « Bien évidemment. »

    Meetic. Je connais de nom. Mais qui peut objectivement trouver l’âme sœur via internet. Absurde. Les algorithmes remplacent les rencontres fortuites. Il n’y a plus de hasard, ce concours de circonstances inattendu et inexplicable. Absurde, mais comment rencontrer quelqu’un lorsque tout est à l’arrêt ? Le seul lien avec le monde extérieur est internet. Les apéros où chacun chez soi ouvre une bouteille et la partage virtuellement avec d’autres qui font de même devant l’écran de leur ordinateur.

    Pire. Ces rendez-vous à vingt heures où les balcons de toutes les villes du monde se remplissent pour des applaudissements qui semblent dire « merci » à « nous sommes encore vivants ».

    Mais « bordel », sommes-nous devenus aussi mécaniques que de simples machines programmées et conditionnées ? Un coup de sifflet général par un arbitre, et le match est terminé. Le match de la vie. « Garde à vous. »

    Cette planète marche sur la tête. Nous sommes déjà dans un monde où nous ne maîtrisons plus rien. La fiction nous rattrape.

    Je me résigne néanmoins à m’inscrire. Je remplis le questionnaire, donne mon pedigree, ajoute trois photos, et indique le profil de l’idéal féminin recherché.

    Tout ce qui est beau dans une rencontre, ces moments de solitude complète avant d’aller aborder l’autre, les premiers regards, le cœur qui bat la chamade, il n’y a plus rien.

    Je clique. Et voilà, c’est parti. Je suis en une seconde en contact avec un catalogue rempli de visages féminins. Quête terrible où chacun regarde, envoie ou non un cœur, passe très vite. Addictif. Les premiers échanges. Je n’aime pas ce supermarché de l’amour. Ce n’est pas moi. J’ai besoin de sensations fortes. Je vais éteindre mon ordinateur lorsque je reçois quelques mots pour échanger.

    Le ton est direct. Je tombe sur les photos d’une femme blonde, superbe, à l’allure sportive. Je ne sais pas pourquoi, je suis attiré, intrigué. Par une image. Je réponds par l’affirmative, un premier échange a lieu. Marie-Christine. Très vite, en quelques minutes, je ressens quelque chose. Improbable. Je suis en train de converser via mon ordinateur avec une femme que je ne connais pas. Je ne suis pas indifférent. Marie-Christine me propose d’échanger nos numéros de téléphone, de nous appeler le lendemain. Sans hésitation, je lui communique le mien, lui souhaite de passer une belle soirée.

    Je pose mon ordinateur, laisse mon imagination me porter. Je regarde à nouveau ses photos, quelque chose d’intrigant se dégage. Son visage est lumineux, son allure dynamique, son corps parfait. Ce n’est pas ça.

    Réveille-toi Stephane. Tu es dans le Luberon, en plein Covid, tu t’imagines que le premier contact virtuel serait les prémices d’une histoire.

    J’éteins mon ordinateur, monte me coucher. Je ne dors pas bien. Les échanges de mots avec Marie-Christine, ses photos, me perturbent. Va-t-elle vraiment m’appeler demain soir ? Une légère apnée m’envahit, signe qui ne me trompe pas. Cela fait très longtemps que ce sentiment si

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