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L’esprit du peuple chinois
L’esprit du peuple chinois
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Livre électronique156 pages2 heures

L’esprit du peuple chinois

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À propos de ce livre électronique

J’ai écrit ce livre pour expliquer l’esprit de la civilisation chinoise et pour en montrer la valeur. Il me semble que, lorsqu’on veut estimer la valeur d’une civilisation, on ne doit pas considérer si elle a construit ou si elle peut construire de grandes cités, de magnifiques maisons, de belles routes, si elle a su imaginer des meubles beaux et confortables, inventer des outils et des instruments utiles et ingénieux. On ne doit même pas s’attacher aux institutions, aux arts et aux sciences qu’elle a créée. Ce qu’il faut examiner avant tout, c’est le type d’humanité qu’elle a su produire, le caractère des hommes et des femmes qu’elle a formés. Seul, l’être humain, l’homme aussi bien que la femme, révèle l’essence, la personnalité, l’âme de la civilisation dont il est issu. J’ajouterai que le langage parlé par cet être humain révèle son essence, sa personnalité, son âme. C’est un fait bien connu des Français, qui aiment à répéter que « le style c’est l’homme ».
Les Américains, qu’on me permette de le dire, ne comprennent pas facilement les Chinois parce que si, dans l’ensemble, ils ont l’esprit étendu et simple, ils manquent de profondeur. Les Anglais ne peuvent pas comprendre la Chine : leur esprit est profond et simple mais il manque d’étendue. Les Allemands, eux non plus, ne peuvent pas nous comprendre car, surtout lorsqu’ils sont cultivés, ils possèdent la profondeur et l’étendue, mais n’ont pas la simplicité.

LangueFrançais
ÉditeurEHS
Date de sortie7 févr. 2023
ISBN9782381115986
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    L’esprit du peuple chinois - Kou Houng-Ming

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    L’esprit du peuple chinois.

    L’esprit du peuple chinois

    Kou-Houng-Ming

    Traduction de P. Rival

    Humanités et Sciences

    Préface

    J’ai écrit ce livre pour expliquer l’esprit de la civilisation chinoise et pour en montrer la valeur. Il me semble que, lorsqu’on veut estimer la valeur d’une civilisation, on ne doit pas considérer si elle a construit ou si elle peut construire de grandes cités, de magnifiques maisons, de belles routes, si elle a su imaginer des meubles beaux et confortables, inventer des outils et des instruments utiles et ingénieux. On ne doit même pas s’attacher aux institutions, aux arts et aux sciences qu’elle a créée. Ce qu’il faut examiner avant tout, c’est le type d’humanité qu’elle a su produire, le caractère des hommes et des femmes qu’elle a formés. Seul, l’être humain, l’homme aussi bien que la femme, révèle l’essence, la personnalité, l’âme de la civilisation dont il est issu. J’ajouterai que le langage parlé par cet être humain révèle son essence, sa personnalité, son âme. C’est un fait bien connu des Français, qui aiment à répéter que « le style c’est l’homme ». J’ai donc consacré les trois premiers chapitres de ce volume à l’homme chinois, à la femme chinoise, à la langue chinoise.

    J’ai fait suivre ces trois chapitres de deux essais dans lesquels j’ai essayé de montrer comment et pourquoi certains étrangers, qui sont considérés comme des autorités en cette matière, ne comprennent pas exactement l’homme chinois et la langue chinoise. Le révérend Arthur Smith, qui a décrit les mœurs chinoises, ne saisit pas le véritable caractère de l’homme de mon pays. C’est que le révérend Smith est Américain, et les Américains n’ont pas assez de profondeur pour comprendre les Chinois. Le Dr Giles, qui est considéré comme un grand sinologue, n’entend pas exactement la langue chinoise ; il est Anglais et ne possède pas la pénétration philosophique nécessaire, la largeur d’esprit que donne cette pénétration. J’aurais voulu joindre à ce volume un article que j’ai écrit en 1911 à propos du livre de J. B. Bland et de Brackhouse sur la fameuse Impératrice Douairière. Mais cet article avait été publié alors dans la National Review de Shanghaï, et je n’ai pas pu en retrouver le texte. J’avais essayé d’y montrer que J. B. Bland et Blackhouse ne pouvaient pas comprendre le véritable caractère de la femme chinoise, et notamment celui de l’Impératrice Douairière, qui est le type de femme le plus élevé qu’ait produit la civilisation chinoise. Des hommes comme J. B. Bland et Blackhouse ne sont pas assez simples. Ils sont trop savants et, comme tous les hommes modernes, ils ont l’intelligence déformée ; ils ont perdu la simplicité de l’esprit. Au fond, pour comprendre le Chinois et la civilisation chinoise, il faut avoir l’esprit profond, étendu et simple, car les trois traits principaux du caractère chinois et de la civilisation chinoise sont : la profondeur, l’étendue et la simplicité.

    Les Américains, qu’on me permette de le dire, ne comprennent pas facilement les Chinois parce que si, dans l’ensemble, ils ont l’esprit étendu et simple, ils manquent de profondeur. Les Anglais ne peuvent pas comprendre la Chine : leur esprit est profond et simple mais il manque d’étendue. Les Allemands, eux non plus, ne peuvent pas nous comprendre car, surtout lorsqu’ils sont cultivés, ils possèdent la profondeur et l’étendue, mais n’ont pas la simplicité. Je crois que ce sont les Français qui ont le mieux compris les Chinois, qui sont le plus aptes à apprécier la civilisation chinoise {1}. Les Français, il est vrai, n’ont pas la profondeur des Allemands, ni la largeur d’esprit des Américains ni la simplicité des Anglais ; mais ils ont à un degré tout à fait supérieur une qualité qui manque aux trois autres peuples que nous avons mentionnés, une qualité nécessaire avant tout pour comprendre la Chine, c’est la délicatesse. Car aux trois traits principaux de la civilisation chinoise, je dois en ajouter un quatrième, la délicatesse, qui est le plus caractéristique. Cette délicatesse, les Chinois la possèdent à un degré si éminent qu’on n’en trouve nulle part l’équivalent, excepté peut-être chez les anciens Grecs.

    D’après ce que j’ai dit, on peut comprendre que les Américains, s’ils étudient la civilisation chinoise, manqueront de profondeur, que les Anglais manqueront de largeur d’esprit, et les Allemands de simplicité et qu’en outre ces trois peuples manqueront d’une qualité qu’ils ne possèdent pas à un degré éminent : la délicatesse. Quant aux Français, ils manqueront tout à la fois de profondeur, de largeur d’esprit et de simplicité ; ils manqueront même d’une certaine délicatesse d’un ordre encore supérieur à celle qu’ils possèdent actuellement. Aussi, je suis amené à penser que l’étude de la civilisation et de la littérature chinoises sera certainement profitable à tous les peuples d’Europe et d’Amérique.

    J’ai fait entrer dans ce volume un article sur les études chinoises, un plan d’études que je traçai pour moi-même, à mon retour d’Europe, il y a exactement trente ans de cela, lorsque je commençai à appliquer mon esprit à la civilisation de mon pays. J’espère qu’il pourra être utile à tous ceux qui voudront étudier le Chinois et la civilisation chinoise.

    Enfin, on trouvera à la fin du volume un article sur « La guerre et le moyen d’en sortir ». Je sais combien il est dangereux d’entrer dans le champ des luttes politiques ; j’ai pourtant écrit cet article afin de prouver la valeur de la civilisation chinoise. J’ai voulu montrer comment l’étude de cette civilisation peut aider le monde à résoudre le problème devant lequel il se trouve, problème qui est celui du salut de la civilisation européenne menacée de faillite. Je veux montrer que l’étude de la littérature chinoise n’est pas seulement un amusement pour les sinologues.

    Dans cet article, j’ai essayé d’indiquer les causes morales qui ont amené le conflit, car, tant que ces causes morales ne seront pas connues et écartées, il ne faut pas espérer trouver un moyen de finir la guerre. Ces causes morales sont l’adoration de la plèbe en Angleterre et l’adoration de la force en Allemagne. J’ai beaucoup plus insisté sur l’adoration de la plèbe en Angleterre que sur l’adoration de la force en Allemagne. C’est que, si j’examine la question d’une manière impartiale, il m’apparaît que c’est l’adoration de la plèbe en Angleterre qui est la cause de l’adoration de la force en Allemagne. En fait, c’est l’adoration de la plèbe dans toutes les nations européennes, et particulièrement en Angleterre, qui a créé ce militarisme allemand que, maintenant, chacun déteste et dénonce.

    Qu’on me permette de dire avant tout que c’est la fibre morale de la nation allemande, son amour intense de la justice, sa haine de toute injustice et de tout désordre (Unzucht und Unordnung) qui amènent le peuple allemand à croire en la force et à l’adorer. Tous les hommes qui aiment ardemment la justice, qui haïssent l’injustice, sont portés à croire en la force et à l’adorer. L’Écossais Carlyle, par exemple, croyait en la force et l’adorait. Pourquoi ? Parce que Carlyle, qui avait en lui la fibre morale allemande, haïssait intensément l’injustice. Or, si je dis que l’adoration de la plèbe en Angleterre est la cause de l’adoration de la force en Allemagne, c’est parce que la fibre morale, la haine intense de l’injustice et du désordre amènent la nation allemande à haïr la plèbe, l’adoration de la plèbe et les adorateurs anglais de la plèbe. Le jour où la nation allemande a vu comment la plèbe, l’adoration de la plèbe et les politiciens anglais adorateurs de la plèbe faisaient la guerre du Transvaal, sa haine instinctive de la plèbe {2}, de l’adoration de la plèbe et des adorateurs anglais de la plèbe lui a fait accepter de lourds sacrifices ; et la nation allemande a consenti à se réduire toute entière à la famine pour créer une flotte, dans l’espoir d’abattre la plèbe, l’adoration de la plèbe et les adorateurs anglais de la plèbe. La nation allemande, on peut bien le dire, se trouvait entourée de tous les côtés par la plèbe, l’adoration de la plèbe et les adorateurs de la plèbe, encouragés par l’Angleterre dans toute l’Europe. Ceci amena l’Allemagne à croire en la force comme au seul moyen de salut de l’humanité. C’est cette adoration allemande de la force, créée par la haine de la religion anglaise de la plèbe, qui a créé ce monstrueux militarisme allemand qu’aujourd’hui chacun déleste et dénonce.

    En conséquence si l’Angleterre, les nations européennes et l’Amérique veulent abattre le militarisme allemand, elles doivent d’abord s’efforcer d’abattre chez elles l’adoration de la plèbe {3}. A tous les peuples de l’Amérique, et aussi de la Chine et du Japon, qui parlent aujourd’hui de liberté et demandent la liberté, j’oserai répondre que le seul moyen d’obtenir la liberté, la vraie liberté, est de bien se conduire, d’apprendre à se conduire décemment. Rappelez-vous la Chine avant la Révolution. Il y avait plus de liberté parmi les Chinois : pas de prêtre, pas de policier, pas d’impôt municipal, pas d’impôt sur le revenu pour les molester. Il y avait plus de liberté que chez tous les autres peuples de la terre. Et pourquoi ? Parce que, avant cette Révolution, les Chinois savaient se conduire eux-mêmes ; ils savaient se conduire en bons citoyens. Mais aujourd’hui nous avons moins de liberté en Chine. Et pourquoi ? Parce que les Chinois modernes, qui ont coupé leur natte, les Chinois dernier cri, les étudiants qui ont vécu en Occident, ont appris des peuples d’Europe et d’Amérique et de la plèbe européenne de Shanghaï à se mal conduire, à se conduire non plus comme de bons citoyens, mais comme une plèbe, une plèbe encouragée, flattée et adorée par les diplomates anglais et par l’Inspecteur général des Douanes de Pékin qui est, lui aussi, Anglais {4}. Ce que je veux dire ici, c’est que si les peuples de l’Europe continentale et le peuple d’Angleterre veulent abattre le militarisme allemand, le militarisme prussien, ils doivent maintenir l’ordre dans la plèbe de leurs propres pays ; ils doivent faire que cette plèbe se conduise d’une manière convenable ; ils doivent abattre la religion de la plèbe et les adorateurs de la plèbe.

    Cependant, maintenant que j’ai dit que le peuple anglais est le principal auteur responsable de l’adoration de la force en Allemagne, je dois reconnaître que, si j’examine à nouveau cette question, il m’apparaît que la responsabilité directe de cette guerre pèse plus lourdement sur le peuple allemand, sur la nation allemande que sur toute autre nation.

    Pour faire bien comprendre ceci, il faut avant tout que je fasse l’histoire du militarisme allemand en Europe. Après la Réforme et la Guerre de Trente ans, les nations germaniques, les peuples de race germanique, avec leur fibre morale, avec leur amour de la justice et leur haine de l’injustice et du désordre, le peuple allemand, tenant le militarisme comme un glaive dans sa main, devint le gardien loyal de la civilisation en Europe. En d’autres termes, la charge de maintenir l’ordre (Zucht und Ordnung) en Europe, l’hégémonie morale de l’Europe fut dévolue au peuple allemand. Après la Réforme, Frédéric le Grand, comme Cromwell en Angleterre, dut se servir du glaive du militarisme allemand pour faire régner l’ordre en Europe, et il réussit dans l’Europe du Nord. Examinons maintenant ce qui se passa après. Son successeur ne sut pas se servir de ce glaive pour maintenir et pour protéger la civilisation de l’Europe. Il se montra incapable de garder l’hégémonie morale. Le résultat fut que l’Europe entière, et même les cours de l’Allemagne, devinrent un puits insondable d’abominations que couvrait à peine l’apparence de la civilisation ; si bien qu’à la fin, les populations souffrantes, les hommes et les femmes simples de France se soulevèrent, la pique en main, pour protester contre ces abominations. Ces rebelles devinrent bientôt une plèbe, et cette plèbe trouva enfin un grand et habile chef Napoléon Bonaparte {5}, qui les emmena piller, massacrer et ravager toute l’Europe jusqu’à ce que les nations européennes, se ralliant autour du petit noyau du solide militarisme allemand persistant en Europe, mirent fin dans les champs de Waterloo à la carrière du grand conducteur de la plèbe. Après cela, l’hégémonie morale de l’Europe aurait dû revenir au peuple de race germanique, aux Prussiens, l’épine dorsale des nations germaines. Mais la jalousie des autres races qui formaient l’Empire d’Autriche sut l’en empêcher. Le résultat fut, la nation allemande étant affaiblie, qu’en 1818 la plèbe se souleva furieusement pour briser la civilisation de l’Europe. Puis la nation allemande — l’épine dorsale des nations germaniques, les Prussiens avec leur fibre morale et le glaive du militarisme allemand — sauva de

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