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Les vautours n'ont pas le choix
Les vautours n'ont pas le choix
Les vautours n'ont pas le choix
Livre électronique248 pages3 heures

Les vautours n'ont pas le choix

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À propos de ce livre électronique

Un jeune et talentueux dirigeant d’entreprise, emporté dans la tourmente de la mondialisation, semble avoir perdu tout sens moral. Serait-il devenu incapable de penser face aux injonctions d’un système qui lui impose ses règles ? Un chercheur en chimie, aussi fidèle qu’idéaliste, résiste aux tentatives de séduction d’une riche héritière passionnée d’archéologie tandis que son épouse aide les victimes de plans de restructuration à se reconstruire après un licenciement.
Entre Lyon, Dubaï et Marrakech, un petit groupe de quadragénaires dont les vies et les destins s’entrecroisent tente d’apporter quelques éléments de réponses pratiques aux interrogations de notre époque. Au cours de leurs rencontres et de leurs discussions, ils échangent idées, réflexions et souvenirs sur des thèmes aussi variés que le management des entreprises, les relations amoureuses, l’écologie ou la religion.
LangueFrançais
Date de sortie22 juin 2016
ISBN9782312044798
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    Aperçu du livre

    Les vautours n'ont pas le choix - Benoît Cartuset

    cover.jpg

    Les vautours n’ont pas le choix

    Benoît Cartuset

    Les vautours n’ont pas le choix

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2016

    ISBN : 978-2-312-04479-8

    1

    Ce matin, comme chaque jour, le réveil sonne à cinq heures pour Christian. Il allume sa lampe de chevet, repousse vigoureusement son drap et se lève tout de suite. Il n’est pas du genre à flâner au lit, il appartient à la catégorie des gens qui pensent que le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt. Il passe en vitesse dans la salle de bain attenante à sa chambre, il se douche et se rase en écoutant les dernières informations du matin. Il ouvre la penderie où il se choisit un costume gris, une chemise et une cravate rayée dont il s’habille rapidement, puis il jette un dernier œil à sa valise préparée la veille. Il ne risque pas de réveiller son épouse puisqu’ils font désormais chambre à part. Elle aime souvent veiller et elle se couche rarement avant une heure du matin, trouvant toujours un article ou un livre à lire, quelques mots à écrire ou une émission de télévision à regarder, aussi était-elle lassée de ces réveils matinaux. Elle en avait surtout assez de partager le lit d’un homme qu’elle n’aime plus et dont la présence à ses côtés lui devenait chaque jour de plus en plus pesante.

    Christian descend sans bruit l’escalier et se dirige vers la cuisine. Il se prépare un café qu’il avale d’une seule gorgée, il aura bien le temps de prendre un vrai petit-déjeuner à l’aéroport ou dans l’avion. Il attrape ses bagages dans le hall, referme la porte de la villa derrière lui et sort vers le garage. Il n’a pas jugé nécessaire de repasser par la chambre de sa femme pour la saluer avant de partir puisqu’ils se sont vus hier, mieux vaut lui laisser tranquillement finir sa nuit. Elle sait qu’il doit s’absenter pour une petite semaine, elle n’est pas certaine de savoir vers quelle destination, mais à quoi bon ? S’en soucie-t-elle encore ? Ils n’ont plus beaucoup de choses à se dire depuis bien longtemps, ils n’ont pas eu d’enfants pour souder leur couple, pas de loisir commun à partager durant leur temps libre et il y a longtemps qu’ils n’ont plus les mêmes opinions. Après la grande passion de leurs débuts, ils ne sont plus liés désormais que par des intérêts communs, un lien de plus en plus fragile mais dont les deux semblent finalement bien s’accommoder.

     Il revérifie une dernière fois qu’il a bien pris son passeport, son billet d’avion et ses cartes de crédit et il sort la voiture du garage. Sur le chemin de l’aéroport, il doit passer par son bureau pour traiter quelques dossiers avant d’envoler vers Dubaï.

    Avant les heures de pointe, il n’y a pas encore de bouchons pour descendre en direction du centre-ville et il roule rapidement dans les avenues désertes à bord de sa rutilante Porsche Cayenne. En moins de quinze minutes, il atteint les nouveaux bureaux flambant neufs de la Coprepha. Christian gare son véhicule bien en vue devant le bâtiment, réflexe stupide à cette heure matinale où personne ne sera là pour le remarquer et l’admirer, et il pénètre dans le hall. Il est à peine 6h30 et les locaux sont encore vides. Il dispose d’une petite heure pour revoir rapidement la liste des principales affaires en cours et laisser quelques instructions afin que les dossiers urgents puissent être traités pendant son absence par ses plus proches collaborateurs.

    Lorsque tout est enfin prêt, il appelle un taxi, transfère ses bagages et se fait conduire à l’aéroport. La circulation est déjà un peu plus dense mais le taxi roule rapidement. Le chauffeur lui débite quelques rengaines pour briser la glace et tester les réactions de son interlocuteur. Il raconte les banalités habituelles sur le climat pourri et les travaux en ville avant de glisser vers le terrain plus glissant de la politique et des élections. Il continue donc par une avalanche de lieux communs, sur le thème du tous pourris, pas un pour racheter l’autre. Il explique que s’il était à leur place… à oui s’il était à leur place, il remettrait de l’ordre, parce qu’il connaît le monde et la vraie vie, il a l’habitude d’en voir, lui ! Alors que tous ces bureaucrates, ils sont déconnectés, ils n’y connaissent rien. Au moment où le nouveau président vient de prendre ses fonctions, Christian se met à imaginer ce que serait un gouvernement constitué d’un échantillon de ces râleurs perpétuels : son chauffeur de taxi irait certainement au ministère de l’intérieur qui serait pour l’occasion rebaptisé ministère de l’ordre, de la morale et de l’immigration !

    – Là, ça rigolerait pas, j’vous dis. J’te mettrais toute cette racaille dehors ! Moi, j’ai qu’un principe, tu bosses et tu te tiens à carreau, sinon tu te casses. Vous trouvez pas qu’y en a marre de tous ces parasites et de toutes ces feignasses qui ne pensent qu’à toucher des allocs ?

    Bien sûr, en de telles circonstances, Christian juge préférable de ne pas commenter mais son silence et son absence totale de réaction restent sans effet sur la logorrhée du chauffeur. Il semble que rien ne puisse interrompre ce condensé de tous les lieux communs racistes, xénophobes et populistes du plus bas étage. Il repart de plus belle dans son monologue

    – Du bouleau y’en a si on en veut ! Faut s’en donner la peine, faut s’lever le matin et pas avoir peur d’se salir les mains. Mais maintenant y veulent tous faire des grandes études pour aller glander à la fac, même s’il y a rien derrière. Et on voit où ça nous mène ! Vous voyez, moi,  par exemple, j’ai commencé à bosser à quinze ans, j’suis debout à quatre heures du mat’ et je tourne parfois jusqu’à dix ou onze heures. Je dors et je mange quand je peux, mais j’ai pas une pointeuse aux fesses. Ah ! Bien sûr, c’est plus facile d’aller pointer à la sécu et de se tourner les pouces toute la journée. Mais vous voyez, j’en ai marre de payer pour tous ces fainéants.  Et tous ceux qui sont pas d’ici, j’te renverrais tout ça à la mer…avec quand même une gourde et une bouée pour leur laisser une chance !

    Christian n’écoute même plus et regarde défiler la banlieue derrière la vitre en attendant impatiemment de voir apparaître le bâtiment de l’aéroport. Le taxi s’immobilise enfin. Christian paye sa course, récupère sa valise et entre dans l’aérogare. Il consulte rapidement le tableau des départs et vérifie que son vol pour Francfort est bien à l’heure. Il est arrivé bien en avance et dispose donc d’assez de temps pour pouvoir reprendre un café avant de passer les contrôles de sécurité. De nombreux groupes de touristes en quête de chaleur et de soleil forment de longues files devant les comptoirs d’enregistrement, mais le billet Business de Christian lui donne droit au tapis rouge et à un guichet prioritaire. En revanche, il n’échappe pas à la fouille corporelle et au contrôle méticuleux de son bagage à main. Dans la salle d’embarquement, il a enfin le temps de s’attabler pour manger un croissant en feuilletant le journal.

    Il est maintenant neuf heures, probablement un peu trop tôt pour appeler Patricia. Fidèle à ses habitudes, elle a du faire la fête une bonne partie de la nuit et en considérant le décalage horaire, il se pourrait même qu’elle ne soit pas encore couchée ! Ou alors elle est couchée en bonne compagnie dans une situation peu convenable pour répondre au téléphone. Christian se dit donc qu’il l’appellera plutôt de Francfort avant d’embarquer pour Dubaï. Cela lui permettra de revérifier le programme dans l’avion afin de pouvoir lui donner ses toutes dernières instructions.

    Après l’embarquement, l’avion rejoint l’extrémité de la piste, s’élance et  décolle. Lorsque l’altitude de croisière est atteinte, une hôtesse passe pour servir les petits-déjeuners. On devine facilement à la mine défaite de la jeune femme et à son absence totale de sourire qu’elle a dû avoir une nuit courte. Christian avale rapidement un jus d’orange et quelques biscuits puis récupère ses dossiers dans le coffre à bagages. Cette escapade à Dubaï n’est pas vraiment un voyage d’affaires puisqu’elle n’a pas officiellement de lien direct avec son activité professionnelle, cela sera plutôt une sorte de parenthèse pendant laquelle il retrouvera l’espace d’une soirée son premier métier, celui qui l’avait propulsé dans le monde où il gravite aujourd’hui. L’idée d’organiser cette grande fête lui était venue en discutant avec son ami Kamal, un homme d’affaires libanais avec qui il est en relation depuis près de dix ans. Mais loin des petites soirées qu’il animait autrefois, il va maintenant jouer dans la cour des grands, des très grands ou plutôt des très riches.

    Que de chemin parcouru depuis qu’il avait commencé à animer des bals, des fêtes et des mariages avec sa petite sono et sa caisse de disques, en vinyle à cette époque. Lui qui était parti de rien ou presque, avait gravi tous les échelons depuis ce soir où il avait rencontré celle qui allait devenir sa femme. Il se souvient encore qu’il avait remplacé son copain François au pied levé pour animer une fête chez un gros industriel dont la fille fêtait ses dix-huit ans. Cela se passait dans la grande propriété familiale du Beaujolais et c’était bien, voire très bien payé. Mais François avait préféré un plan ciné-restau-plumard avec sa copine et il avait laissé à Christian cette soirée qualifiée de super-bourge avec un max de tune. Le buffet avait été préparé par un des meilleurs traiteurs de la région et le champagne avait coulé à flots. Le programme de danse avait commencé comme d’habitude avec les grands classiques : Village People, Boney M et autres grands succès de l’époque disco. Puis il avait enchaîné avec les derniers tubes du moment et des rocks, beaucoup de rocks. Les garçons commençaient à tomber les cravates quand la fille de la maison, déjà un peu éméchée avait commencé à s’intéresser ostensiblement à lui. Après le gâteau, les cadeaux et la chanson nulle composée par les copines et péniblement interprétée par une chorale cacophonique, il avait passé sa fameuse série de slows italiens : une arme de drague d’une efficacité redoutable : l’estocade ! Ensuite, le scénario était bien rôdé. Il avait toujours avec lui une cassette de compilations préenregistrées, une heure trente de musique non-stop qui lui laissait le temps de prendre l’air sur la terrasse, de faire un peu de baratin à sa nouvelle proie et de conclure. Le plus souvent l’aventure se terminait dans la semaine suivante et durait très rarement plus d’un mois, mais cette fois-là il avait été pris au piège d’une passion aussi soudaine que dévorante et six mois plus tard ils étaient en ménage ! Déjà plus de vingt ans, comme le temps passe… et comme ils ont changé tous les deux !

    On approche de Francfort, l’avion commence sa descente, on rattache les ceintures et l’hôtesse toujours aussi bien réveillée demande de relever les sièges et tablettes, elle annonce la température extérieure et souhaite une bonne journée à tous les passagers. L’avion se pose et rejoint le terminal, on arrime la passerelle de débarquement. Il y aura encore deux heures d’attente avant de repartir. Il évite d’appeler Patricia tout de suite pour ne pas la réveiller et traverse l’aéroport jusqu’au salon des business class. Il commande un café, puis compose le numéro de son assistante.

    Au timbre de sa voix, il comprend immédiatement qu’il ne s’est pas trompé sur ses activités nocturnes, de toute évidence elle a eu une nuit active et un sommeil rapide.

    – Ouais... répond une voix sépulcrale.

    – Allo, ici Christian !

    – Ouais…

    – Allo, je suis à Francfort, j’embarque dans une heure

    – Ouais… et alors ?

    La voix de Patricia est tellement rauque et traînante que Christian croit sentir à distance les effluves de Cognac et de Margherita qui s’échappe de sa bouche.

    – Et alors, je te rappelle qu’on a du pain sur la planche ! Je te rappelle qu’on organise la plus énorme fête que personne n’ait jamais vue ! Alors tu écoutes ce que j’ai à te dire et éventuellement tu vires le mec qui tape encore l’incruste dans ton lit.

    – Comment t’as deviné ? l’interrompt-elle.

    – Je te connais assez pour imaginer comment tu as terminé ta nuit ! Après tu iras te foutre sous la douche froide, tu avaleras un litre de café bien serré et tu te mettras au boulot. Avant que j’arrive, il faut que tu retournes à l’hôtel pour vérifier la salle, l’installation du buffet, compter les caisses de champagne, t’assurer que les mecs ont bien installé la sono, les éclairages et les effets spéciaux. Il faut aussi revoir le service d’ordre et t’assurer qu’il n’y aura pas d’embrouille. On va avoir du beau linge et je te rappelle qu’on investit un max de pognon sur cette soirée. Ça peut rapporter une fortune si on s’y prend bien, sans compter la pub que ça nous fera. Mais ça peut aussi nous mettre à poil si on se plante !

    – OK, je sais, je sais… ça fait un mois que tu me rabâches tout ça ! Bon, je m’occupe de tout et ensuite je vais presto te chercher à l’aéroport. A quelle heure déjà ?

    La voix commence à reprendre un peu de vigueur et le timbre redevient presque féminin.

    – Normalement on arrive vers 23h locale, répond Christian après une légère hésitation.

    – Ne t’inquiète pas, j’y serai. Allez, bon voyage, à ce soir !

    Elle a raccroché sans un mot de plus. Christian sait qu’il peut avoir confiance. Patricia est une vraie fêtarde, la qualifier de libertine serait un doux euphémisme, mais lorsqu’il s’agit du travail, elle est d’une fiabilité et d’une efficacité à toute épreuve. Il sait qu’elle aura parfaitement préparé tout ce qui est prévu et qu’il pourra profiter pleinement des six heures de détente que lui offrira le vol vers Dubaï.

    Soudain, un détail lui revient, il rappelle :

    – Allo, Patricia ?

    – Ouais ! Qu’est-ce qu’il y a encore ? répond la voix qui s’est un peu plus éclaircie.

    – J’ai oublié de te demander si tu as eu des nouvelles de Katrina ?

    – Katrina ? C’est qui ça déjà ?

    – La responsable de l’agence d’escorts avec qui on travaille à Genève, tu sais bien !

    – Ah oui ! La maquerelle !

    – Elle t’étriperait si elle t’entendait utiliser ce mot, mais on peut effectivement utiliser ce terme pour désigner son activité.

    – Et alors, qu’est-ce que tu lui veux ?

    – Je lui ai demandé d’envoyer une douzaine de filles pour agrémenter un peu la soirée et occuper les mecs qui pourraient en avoir besoin. Tu vois ce que je veux dire ?

    – Oui, oui, je vois… mais elles viennent d’où ?

    – Normalement de son agence à Genève. Je lui ai demandé un petit assortiment avec quelques filles de l’Est, trois ou quatre métisses et quelques asiatiques. Tu sais, il en faut pour tous les goûts !

    – Et en quoi ça me regarde ?

    – Normalement, les filles devraient arriver demain matin, il faut juste t’assurer que Katrina a bien confirmé l’expédition.

    – OK, je la rappelle, j’imagine que son numéro est dans le dossier. Je te tiens au courant s’il y a un problème. Sinon, bon voyage.

    – Tu es la meilleure ! A tout à l’heure !

    On appelle pour l’embarquement. Les voyageurs s’alignent devant le petit comptoir où l’hôtesse vérifie leurs passeports puis ils rejoignent l’avion. Christian s’installe dans son siège de business class, boit sa petite coupe de bienvenue et tapote un peu sur l’écran multimédia. Autour de lui on se prépare pour le voyage, on range ses bagages dans les coffres puis on s’attache pour le décollage.  Ensuite vient ce moment hors du temps, hors du monde, où l’on est suspendu au-dessus des nuages dans cette boîte de métal, où le monde se restreint à une image lointaine et plate vue au travers d’un hublot. Le voisin de Christian est un homme d’affaires américain, taille XXL avec un fort accent texan et dont la barbe naissante est à la mesure du temps qu’il vient de passer dans les avions. Epuisé par le décalage horaire, il s’est endormi immédiatement et depuis le décollage, il n’a pas cessé d’émettre un puissant ronflement qui couvre presque le bruit des moteurs. Après le repas gastronomique, Christian s’accorde un petit verre d’Armagnac en regardant un film sur son écran individuel. Il s’assoupit un moment et se réveille lorsque commence la descente vers Dubaï. Par le hublot, il aperçoit au loin le magnifique spectacle de la ville illuminée.

    L’avion se pose au milieu de la nuit exactement à l’heure prévue. Christian récupère ses bagages et passe la douane avant de retrouver Patricia. Comme convenu, la jeune femme l’attend avec le chauffeur de la limousine qui les conduira à leur hôtel.

    Malgré l’usage local qui interdit de louer une chambre à un couple non marié, Patricia n’a pas jugé utile de réserver deux chambres. Ils s’installent rapidement puis redescendent prendre un cocktail au bar en écoutant la musique gluante et sirupeuse d’un malheureux pianiste dont toute l’assistance se moque éperdument. Mais cela fait partie du folklore, que serait le bar d’un quatre étoiles sans son éternel pianiste ? Personne ne l’écoute, très peu l’entendent, mais s’il n’était pas là, on sentirait un manque… Alors il joue des banalités, des rengaines, retiré dans son petit univers de pianiste ignoré qui ne joue que pour lui. Il ne demande rien, n’attend rien d’autre que le départ du dernier client et le clin d’œil discret du barman qui lui signifiera que la soirée est terminée, qu’il peut enfin regagner sa chambrette où il sera encore seul, toujours seul, loin du luxe qu’il côtoie pourtant à longueur de soirées.

    – Est-ce que tu as eu Katrina au téléphone ? demande Christian.

    – Oui tout est OK

    – C’est-à-dire ?

    – Elle m’a confirmé que les douze filles arriveront bien ensemble par le même vol, demain en fin de matinée. Rien que du premier choix ! La plupart sont déjà bien habituées à ce genre d’escapades dans les émirats, elles savent à quoi s’attendre et elles sauront être à la hauteur. Elle m’a dit que vous étiez d’accord sur les tarifs et les prestations.

    – Exact ! Et qui les récupère à l’aéroport ?

    – Elles auront un chaperon pour les amener directement en minibus jusqu’à leur hôtel, puis à la fête. Donc a priori on ne les voit pas avant la soirée… enfin je veux dire le dernier briefing juste avant la soirée.

    – Super ! Et tu t’es occupée du champagne ?

    – Ca va couler à flots ! dit Patricia en levant les bras en l’air pour essayer de mimer les chutes du Niagara. On croirait qu’il y en a pour toute la ville. Il y aura des bouteilles à cinq mille dollars et d’autres à dix mille. J’ai goûté les deux, je ne fais pas la différence, et je crois que personne ne la fera. Par contre, je peux te parier que les bouteilles les plus chères partiront les premières.

    – Evidemment, je n’en doute pas une seconde ! Et d’ailleurs c’est bien dans ce but

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