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Yggdrasil l'Arbre monde
Yggdrasil l'Arbre monde
Yggdrasil l'Arbre monde
Livre électronique288 pages3 heuresLes Chroniques de Midgard

Yggdrasil l'Arbre monde

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À propos de ce livre électronique

Frey est une guerrière qui traverse le nord de la France du Moyen Âge pour accomplir sa mission. Elle est envoyée par les frères de l'abbaye de Couvin qui lui demandent de se rendre au Tronc Béranger. Björn, un autre guerrier de grande taille et son jeune apprenti devront se rendre jusqu'en Écosse pour lui venir en aide ainsi que Freyja, une déesse de la mythologie nordique dotée de pouvoirs magiques. Il y a bien sûr un méchant en la personne de Myrddin, un magicien d'origine bretonne qui risque de répandre le chaos dans le monde. De leurs actions dépendra la survie du monde, tout cela sur fond d'amitié, d'amour et d'aventures extraordinaires.
LangueFrançais
ÉditeurBooks on Demand
Date de sortie22 juil. 2020
ISBN9782322196425
Yggdrasil l'Arbre monde
Auteur

Sébastien Julian

Sébastien Julian, né dans la région parisienne, découvre l'univers des comics books et de la littérature fantastique à travers des oeuvres telles que Franc-Sorcier ou Dune. Fasciné par l'imagination de ces auteurs qui lui permettent de s'évader, il se prend de passion pour les civilisations antiques, leurs mythes, leur influence sur les religions dites modernes et sur l'histoire de ces dernières. Sa quête de savoir le guide vers une étude approfondie de sa région, de ses légendes et de ses anecdotes véridiques qui jalonnent aujourd'hui son oeuvre. Celle-ci est le fruit mure de vingt années de réflexion après une première tentative de rédaction avortée. A travers les Chroniques de Midgard, vous découvrirez des personnages attachants et méconnus du nord de la France et de l'Écosse du Moyen Âge, lieux et époque dans lesquels il situe l'action de ce roman épique.

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    Aperçu du livre

    Yggdrasil l'Arbre monde - Sébastien Julian

    CHAPITRE 1

    L’EMBUSCADE

    La nuit était tombée sur la forêt d’Arrouaise¹ et avec son linceul de ténèbres le froid avait anesthésié toute la vallée Mulâtre. Cela faisait deux jours qu’elle avait quitté les frères de la bonne ville de Couvin pour rejoindre le lieu-dit le Tronc-Béranger et si les conditions atmosphériques avaient été favorables, elle y serait déjà arrivée. Malheureusement, depuis son départ un épais brouillard l’avait empêchée d’avancer à une allure convenable. Il n’y avait rien de pire que de voyager sur de longues distances sans visibilité, mais malgré le manque de repères, elle savait qu’elle avait au moins parcouru plus de la moitié du chemin. Pour le moment, ce qui comptait c’était de trouver un endroit sûr pour passer la nuit et si elle n’avait pas été retenue par cette bande de maraudeurs, elle serait déjà en train de manger et de boire.

    C’est à la sortie du bois de Mennevret² que la dizaine d’individus lui étaient tombés dessus. Ils n’avaient pas pris la peine de feindre la chute d’un arbre ou de faire comme si un fermier s’était fait attaquer par un loup alors qu’il cherchait du bois pour réchauffer sa chaumière. Non, ils avaient repéré ce voyageur solitaire emmitouflé dans sa cape qui serrait les brides de sa monture et luttait contre le froid. Elle n’était pas de nature frileuse, mais tout comme la brume, le froid qui s’était abattu sur tout l’empire n’avait rien de normal et même elle qui était habituée à des températures basses le sentait pénétrer jusque dans ses os. Pour cette bande de voleurs de bas étage, il n’était certainement pas nécessaire de surprendre ce voyageur isolé, car, même si l’inconnu était armé, ils étaient dix contre un et ils allaient le faire passer de vie à trépas en espérant y gagner une ou deux pièces d’argent.

    Elle tomba nez à nez sur la bande de scélérats qui jaillit de derrière quelques arbres et bosquets en hurlant, leur arme à la main. Ils n’eurent pourtant pas le temps de l’encercler qu’elle avait déjà mis pied à terre dans un jeté de jambe qui aurait impressionné petits et grands si elle avait été déguisée en indien et poursuivie par un cowboy dans un spectacle de rodéo. Mais non, ce que ces hommes dont le destin était déjà scellé virent face à eux lorsqu’elle rejeta en arrière sa cape sombre, ce n’était pas un artiste de foire habile. Ce n’était pas non plus un simple voyageur ni même un soldat de retour d’une expédition quelconque qui allait dépenser sa solde en beuverie. Non, la guerrière qui se tenait devant eux avait un corps massif et portait sur des hanches larges une épée longue à double tranchant qu’aucun d’entre eux n’aurait pu garder plus de cinq minutes en position médiane, même en la tenant à deux mains.

    Son corps semblait avoir été sculpté dans une pièce d’acier et le corset de cuir qui maintenait ses deux seins laissait apparaître des épaules et des bras gras et à la peau laiteuse. Mais personne ne s’y serait trompé, sous cette couche de graisse s’entremêlaient des muscles entraînés et un corps d’athlète. Elle portait une jupe qui descendait à mi-cuisses et des bottes en cuir pour seule protection. Ses cuisses et ses genoux étaient aussi impressionnants que tout le reste de son corps et finissaient de faire d’elle une amazone au visage doux et à la chevelure blonde tressée qui tombait sur des reins généreux.

    Ils n’eurent pas non plus le temps de finir leur manœuvre d’encerclement qu’elle brandissait déjà Moordenaar³ hors de son fourreau. Moordenaar, la pourfendeuse, émettait une vibration étrange et inquiétante. Cette vibration c’était la soif que ressentait cette arme lorsque le combat commençait. Elle avait soif de chairs et d’os bien sûr, mais si on la surnommait la pourfendeuse c’est parce qu’elle était le juge et le bourreau et qu’elle avait le pouvoir de trancher jusque dans l’âme et l’esprit.

    Ils se jetèrent tout de même sur elle frénétiquement, sans se douter une seule seconde de l’issu du combat. Les deux premières victimes furent littéralement coupées en deux au niveau de la taille avant même qu’elles n’aient pu abaisser leurs armes sur elle. Elle poursuivit son geste en tenant son épée à deux mains et coupa une jambe puis le bras de deux autres bougres qu’elle achèverait plus tard. Le sang appelle le sang. Elle eut juste le temps de parer un coup de hache qui venait de la droite dans une clameur métallique puis d’esquiver un autre assaut. Malgré son corps massif, elle effectuait une chorégraphie d’une rare élégance et, si le prix n’avait pas été la vie de ces dix hommes, cela aurait bien mérité une salve d’applaudissements. Les quatre suivants offrirent plus de résistance, mais elle en vint malgré tout à bout en laissant leurs corps inanimés s’allonger les uns après les autres sur le tapis de feuilles mortes dans des positions peu propices au sommeil. Il ne restait plus que deux assaillants qui avaient pris conscience de leur erreur et s’étaient mis en retrait durant cet échange de coups. C’est elle qui se jeta sur eux pour en finir. Le premier reçut la lame de la pourfendeuse sur le haut du crâne qui eut pour effet de le tuer net avant même qu’elle ne s’enfonce entre ses deux oreilles et finisse par le couper en deux morceaux qui tombèrent de chaque côté. Le second fut moins chanceux, car elle dut s’y reprendre à deux fois avant de lui ôter la vie tandis que ces intestins se vidaient sur ses bottes.

    Une fois la bande de brigands mise hors d’état de nuire, elle ne s’accorda que le temps de nettoyer Moordenaar avant de la ranger dans son fourreau. Elle ramassa son manteau pour le poser sur ses épaules avant de rejoindre sa monture qui avait trouvé un carré de prairie à l’écart du champ de bataille et broutait allègrement en attendant sa maîtresse. Elles reprirent toutes les deux la route à pas d’homme et trouvèrent Bohain⁴ en moins de deux heures. Le bourg allait certainement offrir à l’une le souper et le coucher et à l’autre une écurie et du bon fourrage. Elles y passeraient la nuit et au matin elles reprendraient leur route vers l’Artois.

    Le bourg avait la réputation d’être imprenable et servait à la défense de la frontière du Saint Empire Romain. Il s’agissait en tout et pour tout de quelques fermes éparpillées sur une terre calcaire et protégées par les prémisses d’un château fort. Cette fortification fabriquée en pierre servait de garnison aux soldats envoyés par les évêques de Dinan pour le compte de l’empereur fraîchement couronné sur le trône de Charlemagne. Il y avait aussi une église autour de laquelle une centaine d’âmes avaient bâti leurs maisons. On y trouvait naturellement une taverne pour accueillir les quelques voyageurs et marchands qui venaient régulièrement sur la place du marché échanger et vendre depuis l’autre bout de l’empire. C’est ainsi que les plus grandes fables traversaient le temps et l’espace, par l’intermédiaire de marchands venus de royaumes lointains et colportant des histoires plus folles les unes que les autres. C’est ainsi qu’on racontait encore, presque deux mille ans plus tard, que Rome était née de deux jumeaux et d’une louve. C’est ainsi qu’un pachyderme albinos nommé Abûl Addas avait vécu à la cour du premier roi des Francs et c’est ainsi que pendant des années, du nord au sud et de l’est à l’ouest, on raconterait l’histoire de cette guerrière nordique qui avait traversé tout l’empire pour mettre à mal l’envahisseur aux portes du Vermandois ; plus de mille hommes en tout dans un combat qui dura toute une nuit.

    Après avoir trouvé un abri pour sa monture, elle entra dans la taverne. C’était un endroit sombre, au plafond haut, éclairé par quelques bougies et par les flammes d’un feu qui se consumait en continu dans une grande cheminée ouverte. Un mélange de pisses et de sueur montait du sol et l’obligea à déglutir. Un grand homme à la panse prédominante et avec une patate à la place du nez passait de table en table avec un pichet de mauvais vin à la main. Il remplissait au hasard les verres vides de quelques soldats venus entre deux gardes se remonter le moral. Dans un autre coin, une jeune fille en haillons gardait la tête basse et faisait des allers-retours pour récupérer les verres et les plats vides sur les tables inoccupées.

    Frey traversa la salle sans que personne ne remarque sa présence et alla s’asseoir en face de l’âtre. À la lumière du feu qui faisait vaciller ce côté de la pièce, elle retira ce qui était apparu comme une simple cape noire à ses assaillants de la forêt et qui, en réalité, était un superbe manteau parfaitement façonné en plumes de faucons. Le manteau la recouvrait jusqu’à mi-bottes et on aurait pu le confondre avec deux grandes ailes aux reflets bleutés prêtes à se déployer. Avant de prendre place sur le banc crasseux, elle jeta ses ailes sur la table en bois massif et retira sa ceinture ainsi que le fourreau de son épée qu’elle déposa par-dessus.

    Le gros homme qui l’avait aperçue depuis son entrée s’approcha d’elle après avoir fait un détour pour attraper un verre presque propre.

    - Bien le bonjour ma p’tite dame.

    Il déposa le verre sur la table en face d’elle et le remplit d’un liquide rougeâtre qui ressemblait à du vin.

    - Vous voudrez autre chose ?

    - Apporte-moi à manger ce que tu as et prépare-moi une chambre pour la nuit !

    - C’est pas une heure pour voyager ma p’tite dame ; même avec une épée comme la vôtre…

    - Par l’œil de mon père ! Apporte-moi à manger !

    Elle avait parlé assez fort pour sortir de leur léthargie deux soldats qui retournèrent aussi vite à leurs rêveries. Un troisième hoqueta dans un relent de boisson et s’affala sur la table en faisant sursauter un verre vide.

    - Ça va, ça va…

    Il s’éloigna en grommelant tout en traînant les pieds de mécontentement. Le feu crépita.

    Elle était bien loin de chez elle. Bien loin des siens aussi. Ici il n’y avait pas de grandes salles lumineuses remplies de tablées joyeuses. Il n’y avait pas non plus de grands guerriers ivres de sang et d’hydromel. Pas d’histoire de conquête ou de mer déchaînée. Pas de chants non plus.

    Nous voilà de retour, Notre-Dame

    Pour manger et festoyer

    Pour boire et pour chanter

    Nos défaites et nos victoires

    Mais surtout nos victoires

    Une moitié pour toi

    Et l’autre pour Odin

    Ici les gens étaient gris et pour la plupart ils transpiraient la couardise. Ils attendaient jour après jour que la mort les surprenne sans aucun but sinon celui de survivre le plus longtemps possible, et en attendant l’échéance, boire le plus possible pour oublier la tristesse de cette existence. Elle repensait à cette bande qui l’avait surprise. Elle se disait que ses sens étaient quelque peu émoussés et que cela n’était pas seulement dû à la fatigue.

    Le gros tavernier la surprit dans ses pensées.

    - Voilà ma p’tite dame !

    Il avait apporté une assiette pleine d’une bouillie brunâtre et épaisse dans laquelle on pouvait distinguer ce qui avait dû être des morceaux de viande et certainement quelques racines. Le tout trempait dans une sauce que le marmiton avait rallongée jour après jour en y rajoutant certainement des morceaux de pain rassis et du vin ainsi que des épices pour relever le goût amer, mais aussi, et surtout pour enlever l’aigreur. Le tout macérait toute la journée dans un grand chaudron suspendu dans un coin du feu au-dessus de quelques braises. Il avait ensuite rempli le verre et avait repris son chemin de ronde entre les tables et les corps pleins de lassitude de ces bonhommes qui attendaient jour après jour, saison après saison, que rien ne se passe.

    Elle engloutit son plat et en commanda un second qu’elle avala aussi vite puis elle se leva. La nourriture non plus n’avait rien de comparable avec les plats qu’on lui servait jadis à la cour. Elle se rappelait entre autres les tablées d’après bataille où l’on servait aux braves du veau et du mouton accompagnés de navets, radis, poireau et de champignons. Il y avait aussi le fromage de chèvre et le skyr⁵ dont elle raffolait.

    Elle débarrassa la table de ses ailes et de son épée et jeta sur la table une pièce bien façonnée et plutôt blanche. Sur l’une des faces, on pouvait distinguer un faucon et Freyja⁶ inscrit en écriture runique. L’aubergiste lui indiqua une porte derrière laquelle elle trouverait une pièce qui servirait sinon de chambre au moins de couchage. Elle disposait d’un matelas rembourré avec de la paille et d’une couverture crasseuse et rêche. Un chandelier était allumé sur un petit tabouret à trois pieds qui avait dû servir à la traite dans une autre vie et qui éclairait d’une lumière chancelante la petite pièce sans fenêtre. La pièce était étrangement assez chaude ; certainement parce qu’elle se trouvait entre la grande salle et l’écurie dans laquelle son cheval tenait compagnie à quelques bêtes de somme. Dans toute sa vie, elle avait dormi partout où cela était possible de dormir et même si elle reconnaissait bien volontiers les vertus du satin elle n’avait jamais éprouvé le moindre mal à s’endormir.

    Frey ferma la porte et la cala avec son épée. Elle se jeta sur la couche et s’endormit donc d’un sommeil lourd, mais agité.


    ¹ Forêt d’Arrouaise est le nom d’une forêt connue au Moyen-Âge dans le nord de la France.

    ² Le Bois de Mennevret se trouvait près de la ville de Bohain-en-Vermandois et faisait partie au Moyen-Âge de la forêt d’Arrouaise.

    ³ Moordenaar est le nom d’une épée magique. Vient certainement du mot néerlandais qui signifie tueur ou assassin.

    ⁴ Bohain (Bohain-en-Vermandois) est un village du Vermandois dans le nord de l’Aisne actuel.

    ⁵ Le Skyr est un dessert norvégien à base de lait entier qui se situe entre le yaourt et le fromage blanc.

    ⁶ Freyja est une déesse importante du panthéon nordique.

    CHAPITRE 2

    FREYJA ET L’HOMME EN BLANC

    Un faucon survolait Fólkvangr⁷. Il battait de temps en temps des ailes et se laissait porter par les courants ascendants en faisant de larges huit au-dessus de la vallée. Il avait l’envergure d’un faucon pèlerin, mais son plumage avait des reflets bleutés. De temps en temps, il battait des ailes pour reprendre de l’altitude puis il se laissait porter à nouveau.

    Au nord de Fólkvangr une forêt dense, principalement composée de pins et d’épicéas, s’étendait sur un terrain vallonné qui avait pour seule limite de grands massifs couverts de neiges éternelles. Cette vallée verdoyante était le domaine de Dame Freyja. Il s’étendait sur plusieurs lieues d’est en ouest. À l’est, un manoir aux multiples tours était accroché en haut de la falaise qu’un fjord avait creusée. Une vapeur blanche montait perpétuellement d’une eau bleue et transparente qui serpentait jusqu’à la mer.

    De sa hauteur l’oiseau de proie observait la longue file qui venait de l’ouest, composée de milliers d’hommes venus recevoir les honneurs. Freyja se tenait debout à l’entrée de son palais et les regardait, elle aussi, répondre à son invitation. Il y avait deux destinations pour les hommes qui étaient morts bravement au combat. Ceux qui avaient combattu dans un esprit de conquête et qui étaient morts sur le champ de bataille avec leur arme à la main étaient conduits au Valhöll⁸ par les Valkyries et Odin, le père de tous les dieux, les recevait avec honneur et les préparait pour le combat final, le Ragnarök⁹. Les autres, qui avaient été au combat pour défendre leur famille et leur village et qui avaient aussi fait preuve de bravoure, étaient accueillis par la première de Valkyries, Dame Freyja, dans son domaine et elle leur rendait à eux aussi les honneurs, mais cette fois-ci pour un repos bien mérité.

    Comme il l’aurait fait pour voir un lapin ou un chat des forêts plus en détail, le rapace s’arrêta dans le ciel en vol stationnaire qu’il maintenait en battant des ailes rapidement. Il zooma sur l’un des personnages en poussant des cris stridents. L’homme n’avait rien à voir avec le reste des guerriers qui s’effaçaient en même temps que le regard de l’oiseau se concentrait sur lui. Il était de belle stature et n’avait rien à envier aux autres. Son teint était plutôt pâle, son visage émacié et ses cheveux longs et lisses plus noirs que l’ébène tombaient sur des épaules larges. Il n’avait pas non plus les habits traditionnels d’un Viking. Un pantalon en chanvre gris ou marron tenu par une ceinture en cuir. Une chemise dans les mêmes teintes et un manteau en laine approximativement blanc. Il n’avait pas non plus à la main une longue épée ou une hache, pas plus qu’un casque ni de bracelets de force aux poignets. Non, l’inconnu avait pour seul habit une simple toge blanche fabriquée dans une unique pièce de lin et tenue à la taille par une corde nouée sur un côté. À ses pieds, pas non plus de bottes en cuir de nubuck ajustées sur le mollet par cinq sangles, mais une paire de Nike Air Max.

    Alors qu’elle regardait la scène au travers des yeux de l’oiseau, l’homme leva son regard vers le ciel pour lui signifier qu’il se savait observé puis il se tourna vers le manoir et tendit un bras dénudé devant lui. De l’index il pointa la déesse de la guerre qui à l’autre bout de la vallée sentit la peur descendre comme un frisson le long de sa colonne vertébrale.


    ⁷ Fólkvangr est une plaine où règne la déesse Freyja et où se retrouve la moitié de ceux qui meurent au combat.

    ⁸ Le Valhöll est dans la mythologie nordique le paradis réservé aux combattants qui sont morts bravement.

    ⁹ Le Ragnarök est un récit de la mythologie nordique qui raconte la fin du monde.

    CHAPITRE 3

    LE MAUVAIS RÊVE

    Frey se réveilla en sursaut.

    Bien qu’elle n’eût pas encore repris tous ses esprits, elle se jeta hors de la couche et roula sur le sol en attrapant au passage l’épée encore dans son fourreau. Le tabouret bascula avec le manteau sur le sol qui accueillit aussi la femme dans une roulade improvisée.

    Elle resta un instant assise par terre, adossée à la porte. Toute cette gymnastique n’avait été qu’un simple réflexe. Elle avait sorti son épée du fourreau qu’elle avait jeté sur le côté et la tenait devant son visage face à l’homme en blanc qui s’évanouissait en même temps qu’elle revenait à elle.

    Elle était maintenant bien réveillée, mais garda tout de même la position jusqu’à ce qu’enfin elle se décida à plier ses affaires pour reprendre la route.

    CHAPITRE 4

    LA SOURCE DE LA RIVIÈRE BRILLANTE

    Elle avançait toujours en direction de l’ouest et avait marché à pas d’homme devant sa monture dont elle avait tenu la bride serrée. L’animal avait été agité dès lors qu’elle avait quitté la ville. Par un temps pareil, elle n’aurait pas été plus vite en la chevauchant.

    Elle avait repris la route depuis le lever du soleil et n’avait parcouru que trois lieues tellement la vallée était recouverte de cette brume qui ne lui permettait pas de voir à plus d’un jet de pierre.

    Malgré tous ses efforts pour chasser l’image de sa tête, elle restait hantée par l’homme en

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