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Millionnaire et célibataire
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Livre électronique237 pages3 heures

Millionnaire et célibataire

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Mais qu'en est-il d'une millionnaire de la loterie qui bascule soudainement dans le monde des célibataires ? C'est l'une des nombreuses questions auxquelles j'aimerais bien trouver une réponse. Les compromis sont-ils plus difficiles ? Et s'ils n'étaient plus nécessaires puisque l'argent est maintenant de la partie. Plus aucune concession, terminées les déceptions ! Est-ce que les millions font en sorte que l'on refuse désormais de croire aux illusions du couple ? Je m'apprête à expérimenter un tout nouvel itinéraire, celui d'une célibataire millionnaire.
LangueFrançais
ÉditeurBéliveau
Date de sortie30 oct. 2013
ISBN9782890926233
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    Aperçu du livre

    Millionnaire et célibataire - Simon Joanne

    promet !

    Introduction

    JE SUIS AU SALON DU LIVRE, ET DEUX FEMMES S’APPROCHENT DE MOI. Visiblement, le sujet les interpelle. « Vous savez, moi, je n’aimerais pas gagner à la loterie, parce que l’argent rend malheureux ! » me confie l’une d’elles. Avant que j’aie le temps de dire quoi que ce soit, son amie répond : « C’est facile de dire ça, tu en as de l’argent, toi ! »

    Cet épisode illustre parfaitement bien l’étrange relation que nous avons avec l’argent. Et le lien que nous faisons avec le bonheur. Il n’est donc pas étonnant que le sujet me passionne depuis qu’un billet gagnant s’est retrouvé entre les mains de ma famille.

    En fait, je crois que l’argent ne change pas vraiment les gens, il ne fait qu’accentuer leur vraie nature. Ainsi, un amoureux du pouvoir verra dans l’argent un outil supplémentaire pour arriver à ses fins. Alors que celui dont la philosophie de vie est de vivre au jour le jour aura tendance à dilapider les fonds très rapidement.

    Évidemment, notre vision de l’argent est influencée par d’autres facteurs, comme notre degré de maturité et nos expériences passées. Mais la base fondamentale de notre rapport à l’argent se situe incontestablement au niveau de nos valeurs, celles-là mêmes qui nous ont été transmises par nos parents et notre entourage. S’ajoutent à cela les possibles réactions totalement irrationnelles qui peuvent survenir lorsqu’une somme impressionnante tombe du ciel. Malheureusement, personne n’est à l’abri de cette calamité ! Bien entendu, cela ne relève que de mes observations personnelles.

    Mais qu’en est-il d’une millionnaire de la loterie qui bascule soudainement dans le monde des célibataires ? C’est l’une des nombreuses questions auxquelles j’aimerais bien trouver une réponse.

    Toute rupture est une étape difficile à traverser, cela va de soi. Je profite de la mienne pour amorcer cette réflexion. Plusieurs interrogations sont à l’ordre du jour, comme l’impact de la quarantaine. Les expériences passées laissent leurs marques et font peut-être en sorte que la flexibilité n’est plus celle d’avant. En somme, on sait ce que l’on veut, mais surtout ce que l’on ne veut pas. Les compromis sont-ils plus difficiles ? Et s’ils n’étaient plus nécessaires, puisque l’argent est maintenant de la partie. Plus aucune concession, terminées les déceptions ! Est-ce que les millions font en sorte que l’on refuse désormais de croire aux illusions du couple ?

    L’un des changements majeurs qui suivent le gain à la loterie est la sécurité financière. Donc l’indépendance ! Est-ce suffisant pour rayer complètement de la carte l’option vie de couple ? Il est probablement moins contraignant de s’en tenir aux « très bons amis occasionnels ». Certaines femmes célibataires indépendantes préfèrent régler le problème en socialisant entre elles. Ce petit cercle fermé, hermétique aux hommes, est une autre possibilité. Encore une avenue à explorer !

    Quant au billet de loterie gagnant, celui qui a changé ma vie, garder le secret est sans doute primordial. À moins que le candidat soit digne de confiance. Encore faut-il être en mesure de juger. Et, puisqu’on y est, faut-il évaluer la situation financière de monsieur ? Juste pour s’assurer qu’il ne profitera pas de la situation et qu’il pourra suivre le rythme.

    J’entreprends ma période de réflexion en ne sachant pas ce qu’il y a devant. Je n’ai absolument aucune attente. Je prends le train pour une destination inconnue. Des escales se présenteront certainement en cours de route. J’ai le goût de visiter tous ces relais pour découvrir leurs richesses, ce qu’ils ont à offrir. Je m’apprête à expérimenter un tout nouvel itinéraire, celui d’une célibataire millionnaire.

    Chapitre 1

    Le mur de la réalité,

    quel choc !

    JE TIENS MON VERRE DE CAFÉ COMME S’IL ÉTAIT MA BOUÉE DE SAUVEtage. Il est froid. Même à travers le carton, je peux sentir qu’il ne me communique plus aucune chaleur. D’ailleurs, j’ai l’impression que c’est plutôt l’inverse. Mes mains sont tellement glacées qu’aucun liquide chaud n’aurait pu conserver ses degrés pendant ces minutes interminables, mais il est hors de question que je m’en débarrasse. Cette idée ne m’effleure même pas l’esprit. Pour l’instant, il représente pour moi ce qu’il y a de plus réconfortant à des milliers de kilomètres à la ronde. Parce que, ici, tout me semble hostile, je dirais même froid, malgré les trente-deux degrés Celsius au mercure. Ce n’est pas du tout ce que j’imaginais. Oh non ! Lorsque j’ai planifié tout cela, je ne devais certainement pas me retrouver dans cet état ! Encore une fois, je devrai m’adapter. De toute façon, je l’ai fait toute ma vie, ce n’est pas comme si c’était nouveau. Je vais réussir, j’en suis convaincue. J’ai juste besoin d’un peu de temps, mais ça va aller. Il le faut, je n’envisage aucune autre possibilité.

    Le regard dirigé droit devant, comme si rien n’existait autour, je me dirige vers la sortie du terminal trois de l’aéroport de Fort Lauderdale. Mon allure doit certainement donner l’impression d’une femme pleine d’assurance qui sait exactement où elle s’en va. Pourtant, mon avenir ne m’est jamais apparu aussi nébuleux. Ces pas, je les ai faits et refaits à maintes reprises depuis quelques années. Je connais bien cet endroit. Comment dirais-je... changement de contexte, changement de perception ! J’essaie encore de m’accrocher aux fameuses certitudes qui me tenaient les deux pieds bien ancrés dans l’assurance et la confiance en moi. Mais on dirait que le béton s’effrite, malgré toute ma bonne volonté. Je ne sais pas qui a le contrôle de la machine, mais ce n’est pas moi ! Il manque quelque chose, un élément fondamental. Un ingrédient mystérieux qui permettrait l’amalgame parfait de tous les constituants de ma petite personne. J’ai beau chercher à comprendre ce qui m’arrive, mais je ne trouve pas. Où est cette force, celle qui m’a permis de traverser quelques petites tempêtes dans ma vie ?

    Les portes automatiques s’ouvrent devant moi, et je me concentre. Ouf ! un avion vient de décoller. Ce qui déclenche une étrange réaction en chaîne. J’ai l’impression d’avoir un étau dans le ventre. Je me sens littéralement attaquée sur tous les fronts. Une lance me transperce la poitrine d’un coup. Je suis submergée par une vague de sueur, mon côlon irritable s’emballe, et mon ventre gonfle à la limite de l’éclatement. Une lutte psychologique s’engage entre mon système nerveux et mes jambes qui semblent vouloir capituler. Non, pas tout de suite. Il faut que je tienne le coup. Juste trois minutes.

    Sans en prendre pleinement conscience, je me mêle aux nombreux voyageurs qui sont affairés ici. Après tout, nous sommes lundi de Pâques. J’essaie de m’assimiler à la foule qui grouille de vie, qui arbore le teint basané de ceux qui sont sur le point de s’envoler après quelques jours de répit sous un soleil réconfortant. Mais il n’y a rien à faire, je suis persuadée d’être aussi incognito qu’une extraterrestre dans un poulailler ! Ma démarche est plus rapide que la leur. Je dois certainement fuir une menace qu’ils ne voient pas. Mais qu’ils ne se réjouissent pas trop rapidement, car ils la connaîtront un jour. Dans toute son horreur. Ma tête est basse. Rien à voir avec tous ces regards heureux et ces visages souriants. La gravité me pèse tellement, fouler le sol de cette planète est un effort immense. Mes lèvres sont scellées et c’est bien ainsi, parce que les sons qui réussiraient à se frayer un chemin ne seraient pas des mots. Mon dos est courbé. Avec raison, je porte toute ma vie sur mes épaules. Et comme si ce n’était pas suffisant, je n’y vois rien. Bien sûr ! Les stationnements à étages sont tellement lugubres et sombres. Pas question d’enlever mes lunettes solaires noires. Je ne devrais assurément pas les porter, mais ai-je vraiment le goût de réduire à néant mon dernier rempart ?

    Enfin, je remercie le ciel ! J’ai réussi à atteindre mon but ultime, l’objectif totalement irréaliste que je m’étais fixé. Pour aujourd’hui. Me rendre à ma voiture, mon bunker. Demain, on verra. C’est encore loin. Je verrouille les portes immédiatement. C’est presque trop tard, les larmes ont déjà commencé à ruisseler. Mais j’ai réussi à limiter les dégâts, juste à voir le déluge qui me ravage maintenant. Quel soulagement indescriptible ! C’est à croire que mes glandes lacrymales peuvent produire indéfiniment. Mon corps est secoué de spasmes incontrôlables et foudroyants. J’ai peine à reconnaître les sons qui sortent de ma gorge. Impossible, ça ne peut provenir de mes organes internes ! Je n’ai plus aucune conscience du monde extérieur. Ce qui se passe de l’autre côté de la structure de métal de ma voiture louée n’a plus aucune importance, ni à l’intérieur. Je n’ai aucun contrôle. La crise est à son paroxysme. Assez d’émotions refoulées, la machine vient de disjoncter. Je suis en plein duel avec mes démons. La solitude.

    Gagner à la loterie, est-ce que ça change le monde ? Dix millions huit cent mille dollars et presque dix années plus tard, je suis convaincue que la réponse est non. Aujourd’hui, la réalité me crève les yeux. Je me souviens très bien, comme si c’était hier ! Le billet gagnant de mon père et toute l’euphorie qui s’en est suivie. Les premières paroles de mes parents, je ne les oublierai jamais : « Les problèmes d’argent, c’est terminé, Joanne, ton avenir est assuré. » Il faut juste imaginer un instant l’impact d’une telle phrase dans une famille où l’insécurité financière est héritée génétiquement ! Juste après la couleur de nos yeux ! Il y avait vraiment de quoi marquer mon imaginaire à tout jamais. D’autant plus que mes parents, des salariés de la classe moyenne, avaient tout mis en œuvre pour assurer à leurs deux filles un accès aux études universitaires et une qualité de vie respectable. Une telle somme, qui arrivait au tout début de leur retraite, c’était totalement inespéré. Et c’était le moment d’offrir le cadeau ultime à leurs descendants ! Un avenir exempt de soucis financiers pour leurs enfants et petits-enfants, le rêve de tous les parents !

    Bien sûr, le talon du chèque ne comportait aucun mode d’emploi ! Mais sachant très bien lire entre les lignes, ils étaient pleinement conscients des implications de recevoir une telle somme aussi soudainement, sans aucune préparation. Et il faudrait bien mal connaître la nature humaine pour ne pas penser que quelqu’un, occasionnellement, par pure bonté, ne leur rappelait pas les dangers et tous les risques qui viennent habituellement avec ce genre de cadeau. Parce que c’est la norme. Les gagnants de montants importants à la loterie finissent inévitablement par être malheureux ! Tout le monde le sait. Et nous le savions aussi. Il est possible de prendre une grande variété de placements au rendement garanti. Par contre, le bonheur, lui, ne l’est pas. D’ailleurs, parmi tous les conseillers financiers rencontrés grâce à notre nouveau statut de client privilégié, aucun n’affichait, dans sa liste interminable de compétences, le titre de spécialiste chevronné en évitement de faux pas conduisant à la déchéance ! Nous devenions donc autodidactes en la matière, c’est-à-dire que nous devions procéder par la bonne vieille méthode « essais et erreurs ». Et, si possible, il était préférable d’apprendre rapidement ! Le moins de faux pas possible. Cela semble superflu de l’écrire. Mais, dans la réalité, c’est primordial. En fait, c’est extrêmement simple, c’est la différence entre l’horreur et le bonheur !

    « Comment avez-vous fait ? » ou « Pourquoi avez-vous réussi là où d’autres ont échoué ? » « Êtes-vous vraiment plus heureux ? » ou encore « Faut-il être universitaire pour éviter le cauchemar ? » étaient toutes des questions légitimes qui méritaient une réponse. Encore fallait-il la connaître, la solution miracle à cette énigme. Tout cela nécessitait une bonne réflexion. Après avoir vécu dix années selon les nouveaux paramètres de cette vie de millionnaire, j’en étais arrivée au point où, moi aussi, j’avais envie de trouver ces réponses. De cette démarche, j’ai donc fait un livre ! Ma conclusion était sans équivoque, il n’y avait aucun doute dans mon esprit. Mes parents avaient donc réussi là où la majorité avait échoué. Ils étaient parvenus à transformer des millions de dollars en millions de petits bonheurs pour leur famille.

    Et où se trouve l’élément clé ? La vie trépidante qui découle de ce petit chèque qui se dépose au compte de banque soudainement amène son lot d’expériences nouvelles. La voile sur le lac Champlain et à Antigua, bien sûr que la magie opère ! Que dire des terrains de golf incroyables que j’ai découverts en Floride et dans les Caraïbes ? Assister aux premiers exploits de mon fils adolescent pilotant un Cessna, et voir ma fille évoluer avec les chevaux, cela vaut de l’or pour moi. Découvrir Paris, c’est merveilleux ! S’éterniser un petit moment à Cannes pour découvrir la Côte d’Azur. Rapporter des souvenirs inoubliables de Monaco, se prélasser à Saint-Tropez, admirer les bateaux de croisière dans la baie idyllique de Villefranche-sur-Mer. Des marinas de rêve où des yachts de luxe s’alignent... de toute beauté ! L’endroit où j’adore prendre un moment pour faire le point, la Promenade des Anglais à Nice... incroyable ! Le shopping, c’est à New York que je le préfère ! Ce ne sont que quelques exemples des changements qui s’opèrent dans la vie de nouveaux gagnants à la loterie. À première vue, tout semble merveilleux. Et ça l’est ! Mais il faut aller plus loin que ce qui saute aux yeux.

    Ce sont les pensées qui traversent mon esprit. Pendant que je reprends graduellement le contrôle de mes émotions, le calme envahit mon espace. Quel bien-être ! Le contraste est frappant, d’autant plus que je peux encore ressentir les traces de la tempête. Mes mains tremblent lorsque je reprends mon verre de café. D’un geste automatique, j’en prends une bonne gorgée. Ouf ! non, ce n’est pas mon Grand Marnier ! Vraiment épouvantable ! La température du liquide est dans une zone indescriptible, plus aucune chaleur, plutôt glacial même. Mais le goût s’est décomposé en quelque chose de totalement insipide. À un point tel qu’il est difficile de croire qu’à l’origine, sa vraie nature était chaude et réconfortante. Comme moi. Je prends quelques secondes pour jeter un regard autour de moi. Étonnamment, la terre a continué de tourner. Il n’y a que mon petit monde qui est secoué. Ça crève les yeux que, là-bas, à l’extérieur de ma voiture, tout va pour le mieux. Non, je reformule. En fait, ces gens réussissent beaucoup mieux que moi à donner l’impression que tout est parfait. Alors, suivons l’exemple ! Reprenons nos esprits et agissons comme si la vie était rose. Après tout, aucune raison d’être malheureuse, je suis millionnaire !

    Singulièrement, je ressens une grande sérénité. Dans les moments difficiles, il faut se secouer et se regarder en face. Être courageuse, ne pas avoir peur de confronter ses démons ! Ou alors ce bien-être est-il seulement l’effet secondaire d’une crise de larmes ? Quoi qu’il en soit, c’est merveilleux, j’ai repris le contrôle de mon état ! Tout va pour le mieux maintenant, je suis guérie ! Armée de toute ma détermination, je regarde autour de moi pour m’assurer d’être bien consciente du monde réel et je démarre la voiture. Je m’empresse de mettre en marche l’air conditionné, ce qui est contraire à mes habitudes puisque j’adore la chaleur. Mais, en ce moment, je suffoque, je transpire. Mais tout va bien, je crois. Je sors du stationnement et, tout de suite, je suis à même d’apprécier la chance que j’ai d’être ici. Le soleil brille comme jamais je ne l’ai vu, le ciel est d’un bleu immaculé et les palmiers s’alignent sur la route fédérale devant moi. Fort Lauderdale veut me réconforter !

    À quel endroit devrais-je écouler les prochaines heures, elles sont critiques, après tout. N’importe où, pourvu que je ne sois pas seule. J’ai besoin d’être entourée, même des étrangers feront l’affaire. La réponse ne se fait pas attendre très longtemps. Elle me saute au visage comme la plus évidente des réalités. Un centre commercial... mon centre commercial. Mais, plus encore, je dois absolument trouver une façon d’occuper mon esprit. Il tourne à la vitesse maximale et ça me fait horriblement peur. Bien sûr ! La fête des Mères ! Le cadeau de maman, il me faut focaliser sur cette pensée. Je suis maintenant investie d’une mission qui nécessitera toute mon attention. Alors, d’un geste assuré, je me dirige vers l’est sur le boulevard Sunrise. Et en face de l’avenue Bayview, je tourne à droite devant la magnifique façade de Galleria. Des palmiers partout ! C’est ce que j’adore de la Floride. Ce majestueux édifice, où le blanc domine, rappelle indéniablement l’architecture du sud. Petit clin d’œil pour me rappeler, encore une fois, que je n’ai aucune raison de me plaindre. N’était-ce pas mon propre choix ?

    J’ai adoré cet endroit dès l’instant où je l’ai vu la première fois. C’était il y a six ans. Ma nouvelle vie me permettait maintenant d’élargir mes horizons. J’ai adopté l’endroit et il est devenu une destination annuelle. Pendant que les souvenirs m’inondent et que la mélancolie m’accompagne comme une fidèle amie, j’arpente lentement les allées. Je me laisse séduire par les boutiques mais aucun achat encore. Puis, sans aucune raison apparente, mon errance m’entraîne chez Macy’s. Je jette un coup d’œil distrait aux parfums, Viktor & Rolf ne m’attire pas aujourd’hui. Je déambule parmi les sacs à main et les chaussures. Une conseillère au teint parfait, tenue parfaite et coiffure parfaite s’approche dangereusement de moi. Avec une diction parfaite, elle me demande dans sa langue : « Puis-je vous être utile, madame ? » Je colle mon sac à main sur ma hanche et je prends brutalement conscience de mon teint vert, de ma tenue très ordinaire et de mes cheveux négligés. « Non, merci, tout est parfait ! »

    Ma promenade intérieure m’amène jusqu’à l’escalier roulant. Tout le deuxième étage s’offre à moi, d’un coup. Je choisis de me diriger vers les accessoires de maison. À leur vue, je m’immobilise complètement. Pourtant, ils n’ont rien d’extravagant, rien de particulier, en fait. Mais ces napperons me frappent en plein cœur. Exactement comme un détonateur. Et les images m’assaillent tout d’un coup, sans aucun avertissement. Je vois ma mère, mon fils, ma fille, mon père, ma sœur. Non ! Ça recommence !

    Lorsque le gain à la loterie a frappé notre famille, j’étais en couple avec mon conjoint depuis deux ans seulement. Je m’étais très bien adaptée à tout ce que suppose le fait d’avoir un nouvel homme dans ma vie. D’ailleurs, mes jeunes enfants semblaient parfaitement s’accommoder de la situation, et nous formions une belle équipe. Une relation enrichissante et bienfaisante à plusieurs niveaux. D’autant plus que les années précédentes avaient été particulièrement éprouvantes, semble-t-il. Du moins, à en croire mon entourage, il aurait été parfaitement compréhensible que je m’en sorte avec quelques séquelles. Mais ça,

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