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En Conditionnelle: Release, #1
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Livre électronique381 pages4 heures

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À propos de ce livre électronique

On dit qu'un homme peut toujours rentrer chez lui. Alors après avoir purgé sa peine, Sage Redding se dirige vers le ranch de sa famille situé dans le nord-est du Texas afin d'aider son père malade à s'occuper des chevaux de cutting.

Adam Winchester, surnommé Win, est adjoint au shérif ainsi que le cousin d'un des hommes qui ont perdu la vie dans l'accident qui a envoyé Sage en prison pendant presque une décennie. Alors que les oncles de Win, Jim et Teddy, sont déterminés à faire payer Sage et la famille Redding tout entière pour cette perte, Win pense simplement que Sage a payé son dû et a peut-être besoin d'un ami. Peut-être qu'il a besoin de plus qu'un ami. En fait, Win compte bien là-dessus.

Tout le monde est d'accord sur le fait que Sage est un repris de justice qui est allé en prison pour homicide involontaire. Malgré tout l'amour qu'il porte à son père, il est revenu en sachant qu'il y avait de grandes chances pour que les choses se passent mal pour lui. Peut-être qu'un homme peut toujours rentrer chez lui, mais il n'est pas toujours en mesure d'y rester.

LangueFrançais
Date de sortie7 juil. 2021
ISBN9781951532994
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    Aperçu du livre

    En Conditionnelle - BA Tortuga

    Chapitre 1

    — F ils, il faut que je te parle.

    Sage eut un soupir suffisamment bas pour que personne ne puisse l’entendre. Sa mère n’appelait pas souvent – une fois par semaine – et elle lui parlait pendant exactement quinze minutes. Il ignorait si ces appels étaient une habitude pour lui ou pour elle, mais ils étaient ce qu’ils étaient et lui permettaient de réduire les frais de son téléphone à carte prépayée. Si elle l’appelait un samedi matin, alors qu’elle savait qu’il avait travaillé sur les quais toute la nuit, cela devait être important.

    — Bien sûr, Maman. De quoi as-tu besoin ?

    Il se rallongea sur son lit et regarda par la petite fenêtre. Ses yeux suivirent la fissure qui remontait le long du verre. Certains jours, il pensait que cette courte ligne bizarre et tortueuse voulait être un mot ou quelque chose comme ça. Une image. Pas aujourd’hui. Aujourd’hui, ce n’était qu’un endroit à escalader pour une minuscule araignée. Seigneur, ce qu’il était fatigué. Les camions avaient été remplis de centaines de petits cartons lourds et ses muscles ne demandaient que du repos. Pas de sommeil, pas encore. Il ne viendrait pas avant onze heures environ. Ce n’était pas comme s’il rentrait chez lui dormir une fois que ses pieds avaient retrouvé leur chemin dans le désordre des rues et des petites bandes de connards nocturnes présents dans les coins, qui attendaient que les connards de jour, plus téméraires, les provoquent. C’était la première partie de sa soirée, après tout. Il prenait une tasse de café et un livre de Louis L’Amour qu’il n’avait pas encore lu et qu’il avait trouvé dans une benne à ordures en rentrant du travail quelques jours auparavant. C’était tellement agréable.

    — Est-ce que tu m’écoutes, Sage Marlowe Redding ?

    — Quoi ? Pardon, Maman, j’ai dû m’assoupir un peu. La nuit a été longue. Est-ce que tu peux répéter ?

    — Il faut que tu rentres à la maison.

    Il se redressa et fronça les sourcils. Son cœur eut un petit hoquet désagréable, puis tangua, ce qui signifiait qu’il était en train de se passer quelque chose de pourri.

    — Qu’est-ce qui s’est passé ?

    — Eh bien, rien de vraiment urgent. Par contre, ton père, ses mains… Il ne peut plus autant s’occuper des chevaux.

    Sage ferma les yeux. Putain de maladie de Parkinson. Papa luttait contre elle depuis presque huit ans, mais c’était un combat perdu d’avance.

    — Maman, je…

    — Fils, ce Teddy Dale, il va nous prendre la terre. Tu sais qu’il le fera. Il attend. Il faut que tu joues les gros bras et que tu rentres. Maintenant.

    — Teddy Dale est la raison pour laquelle je ne rentre pas à la maison, Maman. Ce type déteste quand on parle de moi.

    Pas que Sage en veuille à ce vieux connard bourru. Angelo, son fils unique et la prunelle des yeux de sa mère, était mort dix ans auparavant alors qu’il était avec Sage. Du moins, c’était la version officielle et ce qui avait été accepté comme la vérité.

    Il y avait de cela dix ans, dix mois, quinze jours et… quatorze heures et demie.

    — Eh bien, nous devons être capables d’entraîner ces chevaux. Ton père a un contrat. S’il peut le remplir dans les délais, nous pourrons payer les factures pendant six mois. Ta sœur me fait le coup de tomber enceinte, fils. Elle et le bon à rien qu’elle a épousé se sont bien trouvés.

    — Je n’ai même pas de voiture, Maman et je n’ai certainement pas l’argent pour prendre le bus maintenant. Je serai payé dans deux semaines.

    Rosie, un bébé ? Seigneur, quand avait-il pris un tel coup de vieux ? Il jeta un coup d’œil au calendrier.

    — Je peux prendre un autobus de ligne alors, si mon agent de probation me le permet.

    Ils avaient des règles pour les hommes comme lui et il les suivait parce qu’il n’avait pas l’intention d’y retourner.

    Il ne le pouvait pas.

    — Je peux te faire un virement.

    Elle eut un soupir et reprit plus bas.

    — Perdre cet endroit tuerait ton père.

    — Je sais. Je viendrai. Il faut que je prenne mes dispositions, Maman. Tu le sais.

    — Je sais que tu as déjà payé ta dette à la société, mon chéri, pour quelque chose qui n’aurait jamais dû reposer sur tes épaules.

    — J’ai payé ma fichue contribution, c’est certain.

    Il eut un bref sourire.

    — Laisse-moi voir ce que dit mon agent de probation et je te rappellerai.

    — D’accord. Il… Il te laissera rentrer à la maison, n’est-ce pas ?

    — Il faudra que j’aille devant le juge. Tu le sais.

    Ça craignait, mais c’était comme ça que ça fonctionnait.

    — Je sais, fils. Peut-être que tu auras le juge Shannon. Il n’est à la botte de personne, en tout cas dans mes souvenirs.

    — Peut-être. Il faudra que tu m’envoies les informations du médecin pour que je puisse tout mettre en marche.

    — Je peux te l’envoyer dans la nuit, à moins que tu aies une de ces imprimeries à proximité. Je peux te l’y envoyer par fax.

    — Il faudra que je te rappelle, Maman. Je ne sais pas. Il devrait y avoir un annuaire dans le bureau de la direction.

    — D’accord. J... Je suis désolée, fils.

    Il entendait les larmes, là dans sa gorge. Il détestait quand sa mère pleurait.

    — Merde, pourquoi ? Ce n’est pas toi qui as fait de moi un raté, ni rendu Papa malade et ce n’est pas toi qui as décidé Rosemary à faire des enfants que son barge de mari ne peut pas nourrir. C’est plutôt nous qui devrions te présenter des excuses.

    Elle renifla, mais son petit rire se faisait tout aussi fort maintenant.

    — Je t’appellerai avec le numéro de la boutique. Plus tard. Je dois travailler tout le week-end, mais j’irai voir Jack lundi.

    Si cela lui était possible.

    — Merci, mon chéri. Je suis désolée. Je sais que ça t’apporte des ennuis, mais j’ai besoin de ton aide.

    — Ne t’en fais pas, je suis là, Maman. Je ne te laisserai pas tomber.

    Le encore une fois, même s’il n’était pas exprimé, était sous-entendu.

    — Je t’aime, fils.

    — Je t’aime aussi, Maman. Je te rappelle plus tard.

    Il raccrocha et il resta assis là. Sa tête lui faisait mal. Il avait l’impression qu’elle était aussi enflée qu’un melon en état de décomposition. Bien qu’il détestât la Californie, il haïssait encore plus l’idée de supplier un juge du Texas de le laisser rentrer chez lui.

    Seigneur, quelle galère.

    — Merde, Angel. Toi et moi, nous avons tout gâché et il a fallu que tu meures et que tu n’assumes rien.

    Angel ne lui répondit pas, ce qui était une bonne chose, puisqu’il était mort. Cela aurait été gênant qu’il traîne encore ici.

    Sage eut un gloussement et se frotta le front, puis mit son réveil. Il dormirait quelques heures et ensuite, il irait travailler.

    Il avait le sentiment qu’il allait avoir beaucoup à faire.

    Chapitre 2

    Sage descendit du bus, aussi fatigué que d’habitude. L’odeur de terre rouge, de moisissure et de bouse de vache le frappa, à la fois effroyable et réconfortante.

    Il était passé devant le juge à Los Angeles. Il avait dit ce qu’il avait à dire à propos de son père et du ranch. Sa mère et son cousin Rich l’avaient également défendu. Il avait étalé sa vie devant tous ces gens pour qu’ils l’étudient et l’observent avec mépris. Il avait l’impression que sa tête était remplie de coton. Il voulait simplement reposer son corps un instant.

    Un véhicule de police se trouvait là et le shérif Jim Dale le fixait du regard. Sage l’ignora. Il ne cherchait pas les ennuis et n’avait pas l’intention de les trouver. Il n’était pas là pour en créer. Il était là pour travailler et s’assurer que son père puisse garder le ranch. C’était tout, bon sang.

    Sa mère arriva et le grondement familier de son vieux pick-up résonna profondément en lui.

    Elle se gara entre lui et le shérif et il posa son sac en toile à l’arrière du véhicule avant de monter à l’intérieur.

    — Maman.

    — Fils. Bienvenue à la maison.

    Sage survola le parking des yeux, jusque là où se trouvait Jim, qui lui lançait un regard noir. L’oncle préféré du pauvre Angel leva la main et montra son index à Sage, le pouce levé comme un pistolet. C’est cela. Bienvenue à la maison.

    — Merci, Maman.

    Cette dernière rendit à Jim son regard furieux, puis se pencha pour embrasser la joue de Sage.

    — Ne le laisse pas t’atteindre.

    — Je ne veux pas d’ennuis. Je ferai profil bas, comme je te l’ai promis.

    Il n’allait causer de tensions à personne. Pas question. Il se contenterait de travailler et de dormir.

    — Je crois que c’est lui qui devrait faire profil bas.

    Sage haussa les épaules.

    — Ne t’en fais pas, Maman. Je vais m’occuper de cette m… De tout ça.

    — Bien. Tu es un brave garçon.

    Elle démarra le pick-up et le fit avancer.

    — J’ai préparé un rôti de porc.

    — Est-ce que Rosie et son mari viennent ?

    Greg, le mari de Rosie, détestait Sage d’une haine ardente et fougueuse.

    Sa mère baissa la tête.

    — Pas ce soir. Rosie a dit qu’elle viendrait bientôt pour te dire qu’elle t’aime. Tu sais comment est cette petite merde qu’elle a épousée. Il a inventé une raison à la con pour ne pas venir.

    — Ce n’est rien.

    Il tendit le bras et lui tapota la main.

    — Je sais, hein ? Ça craint d’avoir un fils de merde.

    — Tais-toi. Tu es mon fils, peu importe ce que tu as fait ou n’as pas fait, et je t’aime.

    Ce qu’elle pouvait être féroce, sa mère.

    — Oui, madame.

    Il n’avait pas le cœur à regarder le paysage pendant qu’elle conduisait, voir ce qui avait changé et ce qui était resté identique. Pourtant ses yeux, eux, étaient curieux et déterminés à tout observer. La pharmacie McCallum était toujours là et le cinéma Ridgeway aussi, même si c’était devenu un cinéma à bas prix maintenant, qui diffusait les conneries qui passaient à la télévision pour ceux qui n’avaient pas le satellite. À la place de la salle de patinage à roulettes se trouvait un magasin de grande distribution bas de gamme. Il y avait à peu près cinq ans de cela, ils avaient également construit une de ces supérettes mexicaines, ainsi qu’une boutique qui ressemblait à un vidéoclub. Dieu merci, le glacier n’avait pas bougé.

    — Ils te laissent toujours fumer là-bas ?

    — Oui. La ville en a fait tout un foin, mais cet endroit est situé à cinq mètres de l’extérieur des limites.

    Son regard se fit scrutateur, puis elle le porta sur lui.

    — Tu ne fumes pas, n’est-ce pas ?

    — Non, madame. J’ai arrêté.

    Pas parce qu’il en avait eu envie, mais parce qu’il ne pouvait pas se le permettre. Il ne pouvait se permettre aucun vice ces derniers temps, alors il était devenu un fichu parangon de vertu.

    — Eh bien, c’est une bonne chose pour toi.

    Elle eut un soupir et regarda la rue presque vide dans le rétroviseur, ses mains se détendant sur le volant et Sage comprit. Personne ne les suivait, Dieu soit loué.

    Plus ils s’éloignaient de la ville et moins Sage voyait de changements. La maison des Shield se tenait toujours au centre du bosquet de pacaniers le plus noueux au monde, les Pecina tenaient toujours leur entreprise de maroquinerie et le plus grand nid de poule existant était toujours là. Sa mère ne le remarqua même pas tandis qu’elle le contournait.

    — Ils ne l’ont toujours pas réparé, hein ?

    — Nan. Je ne pense pas qu’ils le feront un jour, fils. Il n’y a que quatre familles dans cette rue et elles sont toutes pauvres. Le département se fiche des personnes âgées.

    — Tu n’es pas vieille, Maman.

    Même s’il savait qu’elle devait se sentir aussi vieille que lui-même ces derniers temps, quand son corps le faisait souffrir.

    — Je ne suis plus toute jeune.

    Elle eut un rire, mais il était forcé.

    — Je vais arranger ça, Maman. Je ne te laisserai pas tomber.

    Une fois de plus, Sage ne prononça pas le encore une fois. Il n’avait pas besoin de le dire. Tous deux savaient qu’il était là.

    — Je sais que tu t’en sortiras bien.

    Elle s’arrêta à la route qui menait chez eux et descendit le chemin de terre.

    Il faudrait qu’il aplanisse la route une fois qu’il aurait fini de réparer de la clôture. Le portail avait l’air suffisamment solide et le passage canadien, qui faisait un bruit de ferraille sous les pneus tandis que le gros 4x4 avançait lentement dessus, était toujours entier.

    La maison lui sembla si familière qu’il en eut mal au ventre, et lorsque le pick-up s’arrêta, il eut la sensation d’être paralysé.

    — C’est ta maison, Sage Redding. Chez toi. Rien ne pourra changer ça.

    On aurait dit que sa mère était sur le point de s’effondrer mentalement et il ne pouvait pas le gérer.

    — Nous t’avons installé un petit mobil home derrière les granges, pour que tu aies ton coin à toi.

    — Vous n’étiez pas obligés…

    — Tais-toi. Un homme adulte a besoin d’autre chose que sa chambre d’enfant. C’est vraiment agréable. Ton père l’a échangé contre ce vieux tracteur dont plus personne n’avait d’utilité.

    Il se pencha et déposa un baiser sur sa joue.

    — Merci. Est-ce que Papa est dans la grange ou dans la maison ?

    — Il devrait être dans la grange. Nous dînons dans une demi-heure.

    — Oui, madame.

    Il porterait son sac en toile dans le mobil home plus tard. Il allait d’abord se mettre au travail.

    — Je vais l’aider et nous viendrons manger après.

    — À tout à l’heure alors.

    Elle esquissa l’ombre d’un sourire, puis se dirigea vers la maison, le laissant seul.

    Sage descendit d’un bond et avança jusqu’à la grange, sifflant suffisamment fort pour que les bêtes et son père puissent l’entendre et ne soient pas surpris. Il jeta un coup d’œil aux pâturages sur son chemin. L’herbe était en train de jaunir, preuve que l’on était à la fin de l’été extrême du Texas. La fin du mois de septembre pouvait être mortelle, chaude et humide, avec un air qui donnait l’impression d’avoir du sirop dans les poumons.

    Son père était en train de chanter. Il bafouillait un peu sur les mots, mais sa voix était haute et forte. Sage le rejoignit, chantant de vieilles chansons de Bob Wills comme s’il rentrait chez lui après être allé au magasin une demi-heure auparavant et pas presque onze fichues années.

    Son père releva très vite la tête, mais Sage ne vit aucune réprimande, aucune déception, rien qu’un immense sourire et ils se lancèrent dans le grand final ensemble, yodlant comme des imbéciles.

    Les chevaux secouaient la tête et renâclaient comme s’ils chantaient vraiment en cœur. Les imbéciles.

    Le père de Sage vint lui taper dans le dos lorsqu’ils eurent terminé.

    — Fils !

    — Je suis de retour.

    Quoi qu’il en soit, il était rentré à la maison.

    — Oui et il était temps.

    — Oui, monsieur.

    C’était effectivement le cas.

    — Maman dit que le dîner est dans une demi-heure. Que faut-il que je fasse ?

    — Il faut déplacer cette botte de foin et puis il reste un millier de petites choses à faire.

    — Je vais m’y mettre.

    Il se mit au travail, les gestes et le rythme gravés si profondément dans ses os que les années, même nombreuses ne pourraient pas les rouiller. Il observa son père du coin de l’œil, dont les mains noueuses tremblaient maintenant. C’était indéniable. Dieu était un chronométreur méchant, malveillant et Sage pensa qu’Il trichait la plupart du temps.

    Ils finirent leur travail à temps pour le dîner et se dirigèrent vers la maison, le vent se levant.

    — On dirait qu’il va y avoir de l’orage.

    Son père eut un hochement de tête.

    — Est-ce que tu as un de ces téléphones hyper sophistiqués pour te dire quel temps il va faire ?

    — Non, monsieur.

    Il ne pouvait pas se permettre d’en acheter un et il n’avait pas de crédit. Il avait un téléphone à carte prépayée acheté au supermarché.

    — Bien.

    Son père cracha sur le sol sec.

    — Le connard qui sert de mari à Rosie en a un attaché à sa foutue paume. Un gros con bon à rien.

    Sage haussa les épaules. Ses genoux lui disaient lorsque la situation allait devenir vraiment mauvaise. C’était son seul souvenir vraiment douloureux de la prison. Au moins, on lui avait donné le choix : les dents ou les genoux. Il avait pensé que personne ne pourrait faire pire que ce dont était capable un cheval et il avait eu raison. Il pouvait persévérer en dépit des difficultés.

    Ses dents avaient coûté trop d’argent à ses parents pour qu’il laisse quelqu’un les lui enlever à coup de poing…

    Sa mère ouvrit la porte d’entrée et il se força à simplement entrer et faire comme s’il était à sa place. Nom d’un chien, absolument rien n’avait changé, du moins pas au premier coup d’œil. Le plancher était toujours en bois et les murs du vestibule étaient toujours d’un vert reinette. Des paires de bottes en caoutchouc se tenaient toujours dans la caisse de lait que sa mère avait achetée lorsqu’il avait huit ans lors du vide-grenier et de l’exposition d’art de Noël organisés par la paroisse locale.

    D’une certaine manière, cela avait la même odeur, un peu comme le porc salé et les haricots, le pain de maïs et le chili.

    Tandis qu’ils entraient, il remarqua de petites différences. Il y avait des photos des bébés des cousins là où se trouvaient auparavant celles de classe de Rosie et les siennes. Un petit écran plat se trouvait également sur le meuble de rangement de la télévision.

    Il put enfin respirer vraiment, puis sourit. Le temps avançait bel et bien.

    — Entre et assieds-toi. Est-ce que tu veux du lait ou du thé, fils ?

    Sa mère avait déjà donné à son père son eau et son lait et une tasse de café était posée près de son assiette.

    — Du thé, s’il te plaît.

    Il lui vint à l’esprit de manière un peu vague que jamais il ne s’était assis à cette table pour boire une bière. Pas une seule fois et il était presque certain que cela n’arriverait jamais.

    — Voilà pour toi.

    Elle lui tendit un verre et tout à coup il eut envie de hurler, de briser la banalité de cette petite scène.

    Au lieu de quoi il s’assit.

    Son père pria et ils mangèrent. La nourriture était bonne, familière et rassasiante. Son corps allait se fissurer en plein milieu, comme une assiette de tarte qu’on aurait laissée tomber.

    Lorsque le repas fut enfin terminé, il se releva, refusant la proposition de s’asseoir et de regarder les informations du soir. Il se sentait irritable et il ne pensait pas pouvoir supporter ça, sa mère en train de faire du crochet et son père la sieste devant la télévision, une émission futile après l’autre.

    — Voilà la clé du mobil home, fils. Il y a la plomberie, le gaz, l’électricité. Je les ai installés pour toi.

    — Merci, Maman, Papa.

    Il prit les clés ainsi que l’assiette où étaient emballés les restes.

    — Je vous verrais demain matin au saut du lit.

    — Nous serons là.

    Sa mère lui sourit et son père eut un hochement de tête, même si cela aurait pu être imputé à la maladie.

    Sage sortit, se dirigea vers le pick-up et se saisit de son sac en toile, content que l’orage ne les ait pas encore trouvés. Il porta son sac jusqu’au mobil home. Il se tint devant lui et l’observa pendant un long moment. Bon sang. Il était vraiment beau. Il y avait même un tout petit auvent.

    Il ne vit le pitbull assis là qu’après qu’il ait monté les marches. Petite et triste, sa queue se mit à remuer comme la lanière d’un fouet en faisant un bruit sourd. Il fronça les sourcils.

    — Copper ?

    C’était impossible. Lorsqu’il était parti en Californie, c’était déjà une chienne âgée. Cela devait faire longtemps qu’elle était enterrée. Pourtant, le chiot était son portrait craché et portait un collier avec un médaillon. Il posa son sac par terre et l’assiette sur la rambarde de l’auvent, puis il se pencha.

    — Qui diable es-tu, le chiot ?

    Sur sa médaille était écrit Penny. Il ne put s’empêcher d’arborer un grand sourire. Sa mère avait toujours eu un sens de l’humour tordu ¹.

    Elle lui lécha le visage, se contentant de battre de la queue. Seigneur. On dirait qu’il allait avoir de la compagnie.

    — Viens, entre alors, mais tu as intérêt à ne pas pisser par terre.

    Il aimait avoir une maison propre. Jamais il ne vivrait dans la crasse. Plus jamais.

    Elle entra en trottant à ses côtés, sans sauter sur quoi que ce soit et se contenta de s’installer sur le panier pour chien dans un coin du petit salon.

    La pièce était simple et impeccable, avec un téléviseur, un petit lecteur DVD, ainsi qu’un canapé. La cuisine était équipée sommairement et Sage savait que s’il le vérifiait, il trouverait dans le garde-manger des cornflakes, des cannettes de chili et de la semoule de maïs facile à préparer.

    Bon sang, il y avait même un bocal de conserve rempli de bonbons aromatisés à la pomme verte.

    Oh, doux Jésus. Il était rentré chez lui.

    Ses genoux se dérobèrent sous lui et si cet adorable chiot venait lécher ses larmes sur ses joues, eh bien tant pis, il n’y aurait pas âme qui vive pour le dénoncer.

    Pour la première fois en dix ans, personne ne l’observait.

    Chapitre 3

    Adam Dale Winchester, également connu sous le nom de Win, entra dans le bureau du shérif et inspecta le tableau pour voir où était tout le monde. Le shérif était dans son bureau, ce qui était une bonne chose, parce que Win pensait qu’il fallait qu’ils parlent tous les deux.

    — Salut. Où étais-tu la nuit dernière ? demanda-t-il à son oncle lorsqu’il entra dans le bureau, puis ferma la porte. Je pensais que tu étais en service.

    — En quoi est-ce que ça te regarde, mon garçon ? grogna Jim sans même relever la tête.

    — Parce qu’on m’a appelé pour un accident de la route alors que je n’étais pas en service, voilà pourquoi.

    Les gens pensaient qu’il avait obtenu son emploi parce qu’il était le neveu de Jim Dale. Merde, s’il l’avait obtenu, c’était bien en dépit de son lien de parenté avec lui. Ce type était un petit tyran.

    — Tu aurais pu appeler Barb.

    Mais bien sûr, parce que Barb, mère célibataire d’un enfant handicapé et d’un autre de moins de quatre ans, avait besoin de recevoir un appel à vingt-deux heures. Connard.

    — Ou tu aurais pu être en service. Mais putain, qu’est-ce qui était si important pour que tu disparaisses ?

    — Surveille ton putain de langage, ou je t’en colle une.

    Win eut un ricanement.

    — Tu peux toujours essayer.

    Il n’avait pas passé tout ce temps à l’armée pour rien. Ces derniers temps, aucun de ses oncles ne pouvait ne serait-ce qu’envisager de lever la main sur lui comme ils l’avaient fait après la mort de son père.

    — Écoute, j’étais en train de suivre une piste, hein ? On a un meurtrier qui vient juste d’arriver en ville. Je m’assurais seulement que ce type ne posait pas de problèmes.

    Win releva un sourcil.

    — Un meurtrier ?

    Jim hocha la tête.

    — Cet enculé qui a tué ton cousin Angel. Tu sais, le fils de ton oncle Teddy.

    Connard et sarcastique. Non. Non, il ne se souvenait pas d’Angel.

    Oh. Oh mince. Tu parles d’un bordel. Win secoua la tête, se demandant ce qu’il avait manqué à propos de la famille Redding. Quelle urgence avait bien pu ramener leur fils chez lui ?

    — Tu penses vraiment qu’il y a besoin de surveiller ce type ?

    — Il a tué cinq personnes.

    Win leva les yeux au ciel.

    — Il a été condamné pour homicide involontaire parce qu’il était le seul survivant lorsque le laboratoire de méthamphétamine a explosé et tu le sais pertinemment.

    Il avait lu les rapports après son retour de l’étranger, essayant d’aider sa famille à trouver un sens à tout cela. De la manière dont il voyait les choses, Sage avait été traité de manière injuste, mais c’était une opinion assez mal vue. Merde, Win se souvenait à peine de lui quand ils étaient à l’école.

    — C’est une putain de tarlouze, un toxicomane ! Et il a corrompu ton cousin et ça, tu ferais mieux de bien t’en souvenir. Les voisins des deux côtés de ce ranch ont des enfants.

    — Il a corrompu Angel ?

    Il ferma soudainement la bouche. Ce n’était pas une bonne chose de dire du mal des morts et cela ne ferait qu’empirer la situation de Sage Redding si Win continuait à le défendre.

    — Eh bien,

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