Ta Parole est la Lumière de mes pas: La Lectia Divina à la lumière de saint Augustin
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À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTEUR
Jaime García Álvarez osa appartient à l’Ordre de Saint-Augustin. Il est docteur en Philosophie, Professeur à la Faculté de Théologie du nord de l’Espagne: Burgos. Professeur invité à l’Université de Strasbourg, au Grand Séminaire de Reims et au Centre d’Études du Saulchoir de Paris. Il a été directeur de la revue Burgense et est actuellement le directeur de La Ciudad de Dios-Revista Agustiniana (Madrid). Il est membre du Conseil de Rédaction de la revue Connaissance des Pères de l’Église (Paris). Il a dirigé l’édition espagnole du Dictionnaire de saint Augustin (Monte Carmelo, Burgos 2001). Il anime et dirige des cours et de récollections sur la spiritualité augustinienne en France.
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Aperçu du livre
Ta Parole est la Lumière de mes pas - Jaime Garcia Alvarez osa
Ta Parole est la Lumière de mes pas
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saintlegerproductions.fr
© Saint-Léger éditions, 2022.
Tous droits réservés.
Jaime García Álvarez, osa
Ta Parole est la Lumière de mes pas
La «Lectio Divina» à la lumière de Saint Augustin
Abréviations utilisées dans les textes de saint Augustin
C. Faust. Contre Faust le manichéen
Cat. rud. La catéchèse des débutants
Conf. Confessions
En. Ps. Sermons sur les psaumes
Ep. Io. tr. Homélies sur la première épitre de saint Jean
Io. eu. tr. Homélies sur l’Évangile de saint Jean
S. Sermons
Sol. Les soliloques
Trin. La Trinité
Vera rel. La vraie religion
Virg. Sur la virginité
Introduction
Nous sommes aujourd’hui dans un monde en changement. La société où nous vivons et travaillons n’est pas stable. Bien des valeurs et des formes de vie sont en train de changer. Face à cette ambiance qui nous entoure, nous ne cessons pas de nous poser des questions sur notre place dans le monde et dans l’Église d’aujourd’hui.
Nous sommes bien conscients que notre société passe par une crise des valeurs. Or, dans une situation de crise, on ne sait pas quoi faire, plus encore on ne sait pas quoi penser. Il semble que nous marchons dans l’obscurité, à tâtons, sans aucun point de repère. Nous vivons plus ou moins dans la peur, et surtout dans le désarroi et l’angoisse. Nous craignons les dangers qui peuvent nous menacer. Les situations de crise sont toujours difficiles à gérer : les valeurs sur lesquelles nous avons fondé notre vie sont mises en doute, et bien souvent, on les méprise, on ne tient pas compte d’elles. Les nouvelles valeurs qu’on nous propose ne nous semblent pas assez solides pour leur accorder notre confiance. Nous marchons donc, sinon dans l’obscurité, tout au moins dans la pénombre.
Cette situation culturelle dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui ne nous permet pas de vivre enracinés, incarnés dans le présent.
Face à cette crise des valeurs qui menace notre vie de foi nous pouvons et nous devons savoir réagir tout autrement.
En effet, le mot « crise » vient du verbe grec krinein qui signifie « discerner », « décider », « choisir ». La crise est donc le moment où nous sommes provoqués à réfléchir sur ce qui nous arrive, à prendre en main notre réalité sans perdre la tête, à discerner ce que nous devons faire et les décisions à prendre.
Or, pour y arriver, nous avons besoin de critères sûrs, solides qui éclairent nos décisions, nos comportements. Notre attitude face à des situations difficiles, voire pénibles, doit être celle de la Vierge Marie au moment de l’Annonciation : « À ces mots, elle fut très troublée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation » (Lc 1, 28) ; « Quant à Marie, elle retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Lc 2, 19).
L’Église nous invite aujourd’hui à revenir à la Sainte Écriture pour y trouver la lumière dont nous avons besoin pour cheminer au milieu de l’obscurité et pour nourrir notre espérance. Déjà le Seigneur dans les Psaumes nous dit : « Comment jeune garder pur son chemin ? En observant ta parole » (Ps 118, 9). « Une lampe sur mes pas, ta parole, une lumière sur ma route » (Ps 118, 105). Et saint Pierre revient sur cette même idée : « Aussi nous tenons plus ferme la parole prophétique : vous faites bien de la regarder, comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour commence à poindre et que l’astre du matin se lève dans nos cœurs » (2 P 1, 19).
La Sainte Écriture, feu de Dieu
À plusieurs reprises, l’Écriture nous parle de la méditation de la Parole de Dieu comme d’un feu. Or, le feu est chaleur et lumière, il brûle et il éclaire. Il y a une chaleur qui assouplit, préserve de l’endurcissement et de la glaciation, qui entretient la vie, mais il y a aussi une chaleur qui brûle, qui consume et dévore.
La Parole de Dieu, sa méditation, réchauffe notre cœur comme elle a réchauffé les cœurs des disciples d’Emmaüs, et, à la fois, elle détruit dans notre cœur tout ce qu’il y a en lui de nuisible et d’inutile. Elle purifie le cœur. « Dans ma méditation, un feu s’enflamme » (Ps 38, 4). On attribue à Jésus cette phrase qui, par ailleurs, ne se trouve pas dans l’Écriture : « Qui est près de moi est près du feu ». De la Parole de Dieu, nous devons nous approcher comme nous nous approchons du feu : en nous laissant brûler. Le feu, on le connaît par la brûlure. Connaître le feu, comme par ailleurs méditer l’Écriture, c’est nous laisser brûler par elle.
« Moi aussi, je médite les paroles du Seigneur et je les étudie ; mais je ne sais pas si je suis tel que, dans ma méditation, un feu jaillissant de chaque parole de Dieu, embrase mon cœur et enflamme mon âme pour me faire accomplir ce que je médite » (Origène, Hom. Sur les Ps 36 à 38).
En nous approchant de l’Écriture, nous devons la laisser nous purifier : « Dieu est un feu dévorant » (Lv 6, 18-19). Dieu brûle nos péchés, les détruit, les consume. La méditation de la Parole de Dieu purifie notre cœur. Dieu nous transforme en lui. Dans une certaine mesure, il nous divinise. La présence de Dieu dans la Bible est comme une perpétuelle venue de Dieu à nous. À travers l’Écriture, Dieu se livre entre nos mains. « Quand tu lis, c’est Dieu qui te parle ; quand tu pries, c’est avec Dieu que tu parles » (En. Ps. 85, 7).
S’approcher de l’Écriture a des caractéristiques très particulières. Une lecture vise normalement à maîtriser le plus qu’il nous est possible la langue, les expressions, à nous approprier ce qui se trouve dans le livre. Or, quand il s’agit de l’Écriture, le but n’est pas de la maîtriser mais de nous laisser maîtriser par elle ; le but n’est pas de la questionner mais de nous laisser questionner par elle, de nous laisser atteindre et saisir par ses questions. Il faut laisser la Parole de Dieu faire son œuvre en nous.
Mais la Bible ne nous purifie pas de son feu exclusivement, elle nous éclaire aussi, elle illumine notre esprit. Elle nous révèle à nous-mêmes. Saint Augustin nous dira :
« Dieu a fait de son Écriture un miroir pour toi. C’est un miroir qui t’est proposé dans cette lecture ; vois donc si tu es ce qu’elle a dit ; et si tu ne l’es pas, gémis afin de l’être » (En. Ps. 103, I, 4).
Ce miroir qui nous montre le vrai visage de notre esprit est un regard de Dieu sur nous. Le regard de Dieu décèle, montre nos ténèbres mais surtout, il nous montre notre visage présent et notre visage futur. L’Écriture est la lumière qui éclaire non seulement ce que nous sommes, mais aussi ce que nous devons être et comment y arriver.
Dans l’obscurité, nous nous sentons désorientés, perdus, égarés. Nous ne savons pas où diriger nos pas. Nous manquons les points de repère qui nous permettent de nous orienter. Nous ne voyons pas clair. Nous marchons dans les doutes, les hésitations et surtout dans la solitude.
« En nous détournant de Dieu pour nous jeter dans l’iniquité, nous perdons de vue les rayons de la lumière d’en haut : aussitôt que nous revenons à lui, l’éclat de cette lumière vient à nouveau frapper nos yeux. Il n’y a aucune similitude entre la lumière qui vient nous éclairer et nous-mêmes ; car cette lumière ne se détourne pas d’elle-même et ne perd jamais rien de son éclat, parce qu’elle est essentiellement la lumière » (Io. eu. tr. 21, 4).
« Tombe dans l’aveuglement celui qui s’éloigne de la lumière véritable, c’est-à-dire de Dieu. » (S. 117, 5).
Le péché nous fait oublier la loi intérieure que Dieu a mise dans notre cœur comme une sorte de lampe allumée pour éclairer nos pas.
« Ô hommes, ne soyez pas ténèbres, ne soyez pas infidèles, injustes, ennemis de l’équité, ravisseurs, avares, amateurs du siècle ; être tels, c’est être ténèbres. La lumière n’est pas absente, mais c’est vous qui êtes absents par rapport à la lumière. Le soleil est présent pour l’aveugle sur qui tombent ses rayons ; mais l’aveugle est absent par rapport au soleil. Ne soyez donc pas ténèbres » (Io. eu. tr. 3, 5).
Face à cette obscurité, le Seigneur, par sa Parole, vient illuminer nos pas : « Ta Parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route » (Ps 118, 105). La lampe a comme fonction d’éclairer, de dévoiler, de faire prendre conscience de tout ce qui nous entoure afin que nous ne tombions pas par terre. Elle nous permet de voir les dangers que nous pouvons rencontrer autour de nous. Si nous marchons dans l’obscurité, notre marche deviendra dangereuse et nous risquons de tomber à tout moment. Or, lorsque nos pieds sont éclairés, notre marche se fait sûre et nous pouvons faire route en sécurité. Le Psaume dit : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut ; de qui aurais-je crainte ? » (Ps 27, 1). « Ta parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route » (Ps 118, 105).
Saint Augustin exprime bien cette idée en disant que l’Écriture n’est pas une parole abstraite, mais une lettre que Dieu nous adresse pour nous indiquer la route qui mène à lui et que nous devons suivre afin de ne pas nous égarer.
« De cette cité céleste vers laquelle nous cheminons en pèlerins, des lettres nous sont parvenues ; ce sont les Écritures elles-mêmes qui nous exhortent à bien vivre » (En. Ps. 90, II, 1).
Il nous faut donc entretenir la lampe de l’Écriture par la « Lectio divina », par la méditation, comme nous devons aussi savoir nous arrêter, regarder l’Écriture pour savoir où nous sommes, où nous devons aller et par quel chemin nous devons y aller.
La lumière de l’Écriture éclaire l’âme. Elle l’éclaire dans la lecture spirituelle, dans la « Lectio divina ». La parole de l’Écriture est une parole brûlante et la lecture de cette parole nous transmet la flamme de Dieu.
La lecture contemplative de la Parole de Dieu suppose un temps de silence, c’est-à-dire une vie soustraite à la présence des événements et à l’urgence qu’ils suscitent d’avoir à y répondre. Cette lecture méditative de la Parole de Dieu est le lieu où le feu de Dieu nous arrive, nous rejoint, nous atteint et nous brûle.
***
Je tiens à remercier vivement Mlle Radegonde Hurault et Mlle Marion Cabrol. Avec une grande gentillesse elles ont accepté de lire d’un œil critique le manuscrit. Leurs conseils ont permis de peaufiner le texte que j’offre aujourd’hui aux lecteurs.
La traduction des textes de saint Augustin est tirée des « Œuvres complètes de saint Augustin » ; traduction de M. Raults, Bar-le-Duc 1864-1873. Bien souvent nous avons corrigé et adapté la traduction des textes cités.
Les textes bibliques sont tirés de « La Bible-AELF ». Traduction liturgique officielle en français de l’Association Épiscopale Liturgique pour les pays Francophones.
Lectio Divina
« Ta Parole est la lumière de mes pas, la lampe de ma route » (Ps. 118, 105)
La « Lectio divina » a été presque inconnue jusqu’à la moitié du XXe siècle, sauf dans les monastères. Aujourd’hui, elle est reconnue par tout le monde, elle est même à la mode¹.
L’expression « Lectio divina » a été employée, pour la première fois, par Origène (185-253). Dans une lettre adressée à l’un de ses élèves, Grégoire le Thaumaturge, il l’encourage à mettre toute son attention à la lecture et l’étude de l’Écriture.
« Toi donc, mon seigneur et fils, applique-toi, principalement à la lecture des divines Écritures : applique-toi bien à cela. Car nous avons besoin de beaucoup d’application lorsque nous lisons les livres divins, de peur de prononcer quelque parole ou d’avoir quelque pensée trop téméraire à leur sujet. En t’appliquant à les lire avec l’intention de croire et de plaire à Dieu, frappe, dans ta lecture, à la porte de ce qui est fermé, et il t’ouvrira, le portier dont Jésus a dit : À celui-là le portier ouvre
. En t’appliquant à cette divine lecture, cherche avec droiture et avec une confiance inébranlable en Dieu le sens des divins Écrits, caché au grand nombre. Ne te contente pas de frapper et de chercher, car il est absolument nécessaire de prier pour comprendre les choses divines. C’est pour nous y exhorter que le Sauveur a dit non seulement : Frappez et l’on vous ouvrira
et Cherchez et vous trouverez
, mais aussi Demandez et l’on vous donnera
. J’ai osé parler ainsi à cause de mon amour paternel pour toi. S’il est bon ou non de l’avoir osé, Dieu seul peut le savoir, et son Christ, et celui qui participe à l’Esprit de Dieu et à l’Esprit du Christ. Toi aussi, puisses-tu y participer, et accroître sans cesse ta participation, afin de dire non seulement : Nous sommes devenus participants du Christ
, mais aussi : Nous sommes devenus participants de Dieu » (Origène, Lettre à Grégoire le Thaumaturge, 4).
Le mot « lectio » fait, tout d’abord, référence à la « lectio » des auteurs anciens. Or, aujourd’hui, la lecture est un acte individuel et personnel et que tout le monde peut faire. En revanche, dans l’Antiquité, lire, faire la lecture était un acte minoritaire, non seulement parce que peu de monde savait lire et était capable de comprendre un écrit, mais aussi et surtout parce que le livre était un objet d’une très grande valeur. Il y avait très peu de personnes qui possédaient la capacité financière d’acheter un livre.
Par ailleurs, lire était un acte public : on lisait à haute voix. En hébreu, le verbe lire signifie « crier », « proclamer », « acclamer » et, seulement à la troisième acception, signifie « lire », et toujours en indiquant que « lire » signifie « lire à haute voix ».
« Lire » avait comme but de s’instruire sur ce qu’on ne connaissait pas. C’est par l’écoute attentive qu’on arrive à s’instruire de ce qu’on proclame par la lecture. C’est pour cette raison qu’on traduit bien souvent « lectio » par « étude » au lieu de « lecture ».
La « Lectio divina » a un sens bien différent. Elle est une « lecture orante », une « lecture priée et vécue » de la Bible. C’est « prier la Parole de Dieu ». Saint Grégoire le Grand dit, à propos de la « Lectio divina » : la « Lectio divina » c’est « apprendre à connaître le cœur de Dieu dans la Parole de Dieu » (Ep 4, 31). Origène explicite bien sa nature.
Tout d’abord, chercher avec droiture et avec une confiance inébranlable en Dieu le sens des divins Écrits, caché au grand nombre. Ensuite, ne pas se contenter de frapper et de chercher, car il est absolument nécessaire de prier pour comprendre les choses divines. Enfin, participer à l’Esprit de Dieu et à l’Esprit du Christ et accroître sans cesse en nous cette participation, afin de dire « nous sommes devenus participants de la vie de Dieu ».
La « Lectio divina », même si elle est très présente chez les Pères de l’Église et surtout chez les Pères qu’on appelle « Pères du désert » : saint Antoine (270-356), saint Pacôme (+346), Cassien (360-435), ce sera surtout saint Benoît (480-547) qui la fait connaître. Mais c’est au XIIe siècle, avec Guigues II le Chartreux (+1188), qu’elle est systématisée et qu’elle aura un certain ordre dans sa pratique. Guigues l’ordonne en plusieurs étapes. Il prend la « Lectio divina » comme un chemin qui nous conduit jusqu’à l’union avec Dieu. Il s’inspire du texte biblique sur le songe de Jacob.
« Il eut un songe : voilà qu’une échelle était dressée sur la terre et que son sommet atteignait le ciel et des anges de Dieu y montaient et descendaient ! Voilà que Yahvé se tenait devant lui et dit : Je suis Yahvé, le Dieu d’Abraham ton ancêtre et le Dieu d’Isaac
» (Gn 28, 12-13).
La « Lectio divina » est donc l’échelle par laquelle « les moines montent de la terre au ciel » (Scala I, 293). Cette échelle a plusieurs marches, ou étapes, non isolées les unes des autres, mais toutes bien unies, reliées entre elles. Chaque marche de l’échelle est une étape dans l’ascension vers la rencontre de Dieu. Guigues propose quatre étapes : Lectio, meditatio, oratio, contemplatio.
Dans la vie monastique, la « Lectio divina » était considérée comme la forme habituelle de faire oraison. Avec elle, on cherchait à faire une lecture plus expérimentale qu’intellectuelle de la Bible. On cherche à vivre la Sainte Écriture bien plus qu’à s’informer. La « Lectio divina » est donc une démarche pour faire l’expérience de Dieu, une rencontre mystique avec Lui.
Aujourd’hui, la « Lectio divina » est prise comme une forme particulière de prier qui repose sur la Sainte Écriture. Or, la « Lectio divina » est bien plus qu’une méthode de prière, elle est surtout un « itinéraire spirituel » avec plusieurs étapes qui nous mènent à faire une rencontre avec Dieu. Comme tout pèlerinage ou toute marche, elle exige un effort. Elle est un exercice, un travail bien réglé pour arriver à une écoute personnelle de la Parole de Dieu. Elle n’est donc pas une méditation de la Parole de Dieu, pas plus qu’elle n’est une lecture privée de la Bible orientée à la comprendre. Elle n’est pas une étude ou une recherche de la Parole de Dieu. Elle est un exercice contemplatif, un exercice qui conduit ou mène à l’oraison, à la contemplation.
L’Exhortation Apostolique Verbum Domini fait un exposé très clair sur la « Lectio divina. »
La « Lectio divina » est capable d’ouvrir au fidèle le trésor de la Parole de Dieu, et de provoquer ainsi la rencontre avec le Christ, Parole divine vivante. Je voudrais rappeler brièvement ici ses étapes fondamentales :
1.Elle s’ouvre par la lecture (lectio) du texte qui provoque une question portant sur la connaissance authentique de son contenu : que dit en soi le texte biblique ? Sans cette étape, le texte risquerait de devenir seulement un prétexte pour ne jamais sortir de nos pensées.
2.S’ensuit la méditation (meditatio) qui pose la question suivante : que nous dit à nous le texte biblique ? Ici, chacun personnellement, mais aussi en tant que réalité communautaire, doit se laisser toucher et se remettre en question, car il ne s’agit pas de considérer des paroles prononcées dans le passé mais dans le présent.
3.L’on arrive ainsi à la prière (oratio) qui suppose cette autre demande : que disons-nous au Seigneur en réponse à sa parole ? La prière comme requête, intercession, action de grâce et louange est la première manière par laquelle la Parole nous transforme.
4.Enfin, la « Lectio divina » se termine par la contemplation (contemplatio), au cours de laquelle nous adoptons, comme don de Dieu, le même regard que Lui pour juger la réalité, et nous nous demandons : quelle conversion de l’esprit, du cœur et de la vie le Seigneur nous demande-t-il ? […]
5.Il est bon, ensuite, de rappeler que la « Lectio divina » ne s’achève pas tant qu’elle ne débouche pas dans l’action (actio), qui porte l’existence croyante à se faire don pour les autres dans la charité » (Benoît XVI, Verbum Domini 87).
La « Lectio divina » est bien souvent présentée comme une échelle avec quatre temps ou étapes de progression vers Dieu.
Première étape : La « Lectio »
La « Lectio » est une recherche sur le sens du texte biblique. Il faut nous poser cette question : Que dit ce texte biblique que je suis en train de lire ? Il s’agit donc de lire avec attention le passage choisi de la Bible en cherchant son sens authentique. Il faut le lire avec attention, souligner les mots ou les phrases intéressants pour reconnaître les éléments les plus importants, ceux qui attirent notre attention. C’est une information sur le sens de ce passage biblique.
Les commentaires bibliques de ce texte et les dictionnaires bibliques peuvent nous aider à faire la « Lectio ». Nous pouvons nous référer aussi aux notes de la Bible ou à d’autres passages bibliques.
Deuxième étape : La « meditatio »
Dans cette étape, nous devons nous poser cette question : Que me dit à moi, ce texte biblique ? La « meditatio » est un temps d’arrêt intérieur, d’intériorité, de recueillement où nous nous tournons vers Dieu en cherchant à comprendre ce que cette parole nous dit à nous aujourd’hui, pour notre vie concrète. On passe donc de l’étude de la Parole biblique à la compréhension de ce que Dieu veut me dire à moi personnellement, par ce texte. Dieu nous parle, s’adresse à moi, par ce texte de la Bible. Qu’est-ce qu’Il veut me dire ? Il faut nous laisser questionner par cette parole de Dieu.
Troisième étape : L’« oratio »
L’« oratio » est un entretien avec Dieu dans un dialogue direct, intime avec Lui. C’est la réponse à cette demande : Et maintenant qu’est que je peux dire au Seigneur en réponse à sa parole ? Quelle est ma réponse au questionnement que Dieu me fait dans ce passage biblique ? Dieu m’adresse sa Parole ; maintenant c’est moi qui m’adresse à Dieu. L’« oratio » peut prendre la forme de louange, d’action de grâces, de demande de pardon ou de demande d’aide. Elle est notre réaction face à la parole que Dieu nous adresse. Elle est surtout un dialogue avec Dieu.
Quatrième étape : La « contemplatio »
La « contemplatio » nous aide à maintenir notre cœur attentif à la présence du Christ. Au cours de la « contemplatio », nous adoptons le regard même de Dieu pour juger la réalité. Elle tend à créer en nous une vision de la réalité conforme à celle de Dieu, à former en nous « la pensée du Christ » (1 Co 2, 16), à conformer notre cœur à son cœur. En elle nous nous demandons : quelle conversion de l’esprit, du cœur et de la vie, le Seigneur me demande-t-il ? La « contemplatio » est la dernière étape, l’accomplissement de la « Lectio divina ». Elle permet de nous sentir contemplés par Dieu, ressentir sa présence pleine d’amour pour nous. Dans la « contemplatio », la Parole de Dieu devient une « lampe brillant dans l’obscurité, jusqu’à ce que paraisse le jour et que l’étoile du matin se lève dans nos cœurs » (2 P 1, 19).
Cinquième étape : L’« actio »
Or, la plupart des auteurs ajoutent aujourd’hui une nouvelle étape : l’« actio ». Benoît XVI nous en parle clairement : « La lecture, l’étude et la méditation de la Parole de Dieu doivent déboucher sur l’adhésion d’une vie conforme au Christ et à ses enseignements. Saint Jacques nous avertit : "Mettez la Parole en application, ne vous contentez pas de l’écouter : ce serait vous faire illusion. Car écouter la parole de Dieu sans la mettre en application, c’est ressembler à un homme qui se regarde dans une glace, et qui, aussitôt après, s’en va en oubliant de quoi il avait l’air. Au contraire, l’homme qui se penche sur la Loi parfaite, celle de la liberté, et s’y tient, celui qui ne l’écoute pas pour l’oublier, mais l’applique dans ses actes, heureux sera-t-il d’agir ainsi" (Jc 1, 22-25). Celui qui écoute donc la Parole de Dieu et y fait constamment référence, fonde son existence sur des bases solides. "Tout homme qui écoute ce que je vous dis là et le met