L'Éthique est l'un des livres les plus fascinants qui aient jamais été écrits. Son ambition est sans égale: il s'agit d'acquérir une parfaite connaissance de Dieu, de nous-mêmes et des choses. Sa forme est étrange: il s'agit d'un traité de mathématique qui commence par définir des termes abstraits, puis accumule des propositions dont les démonstrations ont un aspect affreusement répétitif. Sa réputation est pourtant séduisante: Casanova, Diderot Goethe, Deleuze ou Bergson témoignent sur un ton inhabituel, souvent très affectueux, de leur immense amour pour un livre qui a changé leur vie.
NE PAS TOUT COMPRENDRE
Le plus souvent, notre de Spinoza, ce serait trop pour nous, que c'est un livre trop difficile qui ne s'adresse qu'à des spécialistes, voire qui demande une intelligence exceptionnelle. Attention! Lorsque ces pensées nous viennent, elles nous font participer d'un affaiblissement général contre lequel nous luttons d'habitude. Qui d'entre nous ne s'est pas lamenté de la bêtise télévisuelle ou des vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux? Ne pas s'effrayer devant l'aspect étrange de l', c'est accepter une lecture où il n'est pas possible de comprendre tout, tout de suite. Bien sûr, lire sans comprendre est parfois pénible. Mais réciproquement, vouloir tout comprendre dans ce qu'on lit est une dangereuse exigence: car c'est elle, justement, qui enferme notre époque dans une infantilisation progressive. Allons! Quelle image avons-nous de nous-mêmes pour renoncer à nous confronter à un texte réputé « difficile »?