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Vinaigrette et Pousse-Rapière: Ou les aventures « tribulatoires » d'Arnaud de Villelouet
Vinaigrette et Pousse-Rapière: Ou les aventures « tribulatoires » d'Arnaud de Villelouet
Vinaigrette et Pousse-Rapière: Ou les aventures « tribulatoires » d'Arnaud de Villelouet
Livre électronique251 pages3 heures

Vinaigrette et Pousse-Rapière: Ou les aventures « tribulatoires » d'Arnaud de Villelouet

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À propos de ce livre électronique



L’histoire d’Arnaud de Villelouet se situe au sein d’une société en pleine mutation où cohabitent personnages célèbres de l’histoire de France et le peuple qui, lui aussi, a contribué à sa manière, à façonner l’histoire de notre pays. L’auteur met ici en relief ces femmes et ces hommes de toutes classes sociales sous le règne du Roi Soleil et mêle avec savoir faire le quotidien de ceux-ci aux tourments et bouleversements de l’histoire de France.



EXTRAIT

— Père ! Père ! Un courrier.
Clame, Aimé, le fils d’Arnaud de Villelouet, gentilhomme de petite noblesse paysanne installée à Paris depuis une trentaine d’années.
Aussitôt alertée, la maisonnée se met en branle car, recevoir une lettre procure toujours, excitations et questionnements :
Que recèle le pli ? Bonne ou mauvaise nouvelle ?
Et comme à l’accoutumée, la première personne à manifester sa curiosité se nomme, « Bhavana », la servante du logis :
— Un courrier ?
— Si fait ! Il vient de nous être remis, à l’instant. Et c’est un valet de l’Hôtel de Juigné qui vient de me remettre cette lettre.
— À coup sûr, une invitation.
— Tu crois, Bhavana ?
— Pour sûr, mon petit. Et tu vas pouvoir faire de belles rencontres. L’Hôtel de Juigné est connu pour rassembler de bien précieuses personnes. Et surtout, de belles demoiselles, en quête d’un bon parti.
— Et d’héritiers fortunés, ce qui ne sera jamais mon cas, ma bonne, Bhavana.
— Tu possèdes bien plus que la fortune, mon petit, tu es le descendant de Pierre de Villelouet, l’illustre et vaillant militaire, héros du siège de la Rochelle.
— C’est bien là le problème.
— Pourquoi dis-tu cela ?
— Oh, rien ! Tu ne comprendrais pas. Et puis, sache que mon cœur est déjà pris, Bhavana.
— Encore avec cette histoire ?
— Là où la raison s’en fait une, le cœur ne répond, lui, qu’à son aspiration.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Au bel octave du titre gouleyant, sa plume alerte séduira la fibre artistique des bretteurs d’aujourd’hui . En ravisse ces derniers, ses chimères captiveront aussi tout lecteur vers un monde ou la réalité se mêle à la fiction, dans le langage vif de son attachante personnalité. [...] – Une histoire dans l’Histoire – Du rythme, des cliquetis et du verbe – Vinaigrette et Pousse-Rapière : jusqu’à la lie, nous le dégusterons ! - Michel Carliez, Maître d’Armes et Coordinateur de Cascades

À PROPOS DE L'AUTEUR

Auteur, scénariste, metteur en scène et directeur artistique pour la création de plus d’une vingtaine de spectacles d’Arts Croisés (Château Royal de Blois, Château de Maintenon, Donjon de Montrichard, Château d’Apremont, Cathédrale de Luçon, Abbaye Royale de Fontevraud, Logis de la Chabotterie …), Laurent Tixier est fait chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres, en 2008. Il participe à de nombreuses tournées en France et à l’enregistrement de près de 40 albums discographiques, dont plusieurs avec distinctions. Il vit à Saint-Gilles-Croix-de-Vie.
LangueFrançais
Date de sortie13 mars 2020
ISBN9791035308674
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    Aperçu du livre

    Vinaigrette et Pousse-Rapière - Laurent Tixier

    Couv.jpg

    vinaigrette

    et Pousse

    rapiÈre

    Ou les aventures

    « tribulatoires »

    d’Arnaud de Villelouet

    © – 79260 La Crèche

    Tous droits réservés pour tous pays

    www.gesteditions.com

    Laurent Tixier

    vinaigrette

    et Pousse

    rapiÈre

    Ou les aventures

    « tribulatoires »

    d’Arnaud de Villelouet

    Du même auteur :

    La Vielle en Vendée – Ethnomusicologie. Éditions CAD – 1985

    La Tragédie des Acteurs ou Scène de Guerre – Éditions Charles Corlet – 2015 (Trophée Coup de Cœur 2016 du Prix Pierre Jakez Hélias de l’AEB)

    D’Ames en Lames ou les Grands Duels de l’Histoire – Éditions Charles Corlet – 2016 (Prix « Thalie » 2017 au 16e Concours Littéraire International du CEPAL – Centre Européen pour la Promotion des Arts et des Lettres) – (Prix « Anne de Bretagne » du Roman Historique 2017 de l’Association des Écrivains Bretons)

    Déculture et Déconfiture – Essai polémique. Éditions Charles Corlet - 2017.

    Préface

    Au plaisir d’une demande s’ajoute parfois celui de répondre à une invitation.

    Pour l’occasion je troque donc l’épée pour la plume ; à une cascade de gestes, quelques filets de mots.

    Artiste polyvalent, le parcours de Laurent Tixier en est le témoin !

    Maniant la voix et la musique, l’écriture et la scène, l’épée de St Michel s’immisca entre ses doigts, et lui permit de composer quelques habiles quatrains mouchetés de prose.

    En âme de lames ou lamé par le besoin de récits originaux, son esprit empanaché de belles couleurs vives et fantasques porta souvent ses pensées vers quelques destinées chevaleresques.

    Lesquelles lui offrirent en prime, Les Arts et Les Lettres.

    À n’en pas douter, il connaît les subtilités d’une quinte juste, et assurément aussi la parade qui inverse les critiques. Il nous offre aujourd’hui son 5e opus à tonalité de cape et d’épée.

    Au bel octave du titre gouleyant, sa plume alerte séduira la fibre artistique des bretteurs d’aujourd’hui !

    En ravisse ces derniers, ses chimères captiveront aussi tout lecteur vers un monde ou la réalité se mêle à la fiction, dans le langage vif de son attachante personnalité.

    Je ne pourrais terminer ma prose sans emprunter quelques mots d’un autre chevalier – Claude Carliez – qui, Laurent me l’apprît, inspira l’intitulé du CNEA.

    « Mille bravos à Laurent Tixier », pour nous proposer son nouvel ouvrage !

    – Une histoire dans l’Histoire

    – Du rythme, des cliquetis et du verbe

    – Vinaigrette et Pousse-Rapière : jusqu’à la lie, nous le dégusterons !

    Michel Carliez

    Maître d’Armes et Coordinateur de Cascades

    La France au xviie siècle

    Pour aborder les grandes lignes qui font la spécificité de cette époque, nous devons avant tout re-situer le contexte :

    Une France exsangue sort d’un conflit civil et international qui aura duré près de 50 ans. La population « huguenote » a diminué de moitié laissant quelques 10% de religionnaires sur le territoire national. L’avènement du Roi de Navarre amorcera bien un début de réconciliation, mais les rancœurs sont encore tenaces et chacun se méfie de l’autre.

    En 1610, le règne du Vert Galant s’achève sous la lame scélérate d’un illuminé. Nous sommes donc au xviie siècle et la Renaissance n’est déjà plus qu’un souvenir. Pourtant, peu de choses ont changé dans les relations confessionnelles, malgré l’Édit de Nantes, dit de tolérance (en référence à la dernière ville française hostile à tout accord avec les protestants). Catholiques et protestants se regardent toujours en chiens de faïence. Et c’est avec le retour d’une monarchie forte (mais pas encore absolue) que se distingue à nouveau le clivage entre les ennemis d’hier. La célèbre bataille de l’Île de Riez, à la lisière du Marais Breton Vendéen, menée par Louis XIII contre les protestants de la Rochelle, révèle une paix des plus fragiles où les antagonismes sont toujours biens présents. Le siège, puis la prise de la cité portuaire rebelle en est le point d’orgue qui verra la branche huguenote perdre ses acquis au profit d’une situation sociale terriblement aléatoire. Au bout du compte, Henri IV aura eut beau décréter l’Édit de Nantes, l’annonce de sa mort manque de peu de voir renaître le spectre des « Guerres de Religions ».

    Finalement, ce sera son fils et plus encore, son petit-fils, Louis XIV, qui souffleront sur les dernières braises de « l’hérésie ».

    La période dite, du Grand Siècle ou, « baroque », inaugurée au début du règne de Louis XIII et qui connaît son apogée zénithal sous le règne du Roi Soleil, reflète bien à la fois une société finissante et renaissante, qui s’amorce en 1685.

    Les aventures « tribulatoires », d’Arnaud de Villelouet, héros, s’il en est, de notre histoire, se situent donc au sein d’une société en pleine mutation. N’oublions pas que les personnages célèbres ont été les contemporains de tout un peuple qui, à sa manière, à façonné l’histoire de notre pays. Aussi, ce sont ces hommes et ces femmes, vivant sous le règne du Roi Soleil, que nous avons souhaité mettre en relief.

    Ainsi le scénario mêle t-il étroitement le quotidien des « petites gens » dans les tourments de l’histoire de France. Tout cela, en ouvrant une fenêtre sur l’intimité d’une communauté d’individus dévoilant déjà la période dite, « des Lumières », qui effraie déjà la monarchie absolue.

    L’Histoire est en route, avec sa roue de la fortune qui tourne et élève les uns, tandis que disparaissent les autres.

    Les aventures « tribulatoires », d’Arnaud de Villelouet, héros, s’il en est, de notre histoire, se situent donc au sein d’une société en pleine mutation. N’oublions pas que les personnages célèbres ont été les contemporains de tout un peuple qui, à sa manière, à façonné l’histoire de notre pays. Aussi, ce sont ces hommes et ces femmes, vivant sous le règne du Roi Soleil, que nous avons souhaité mettre en relief.

    Ainsi le scénario mêle t-il étroitement le quotidien des « petites gens » dans les tourments de l’histoire de France. Tout cela, en ouvrant une fenêtre sur l’intimité d’une communauté d’individus dévoilant déjà la période dite, « des Lumières », qui effraie déjà la monarchie absolue.

    L’Histoire est en route, avec sa roue de la fortune qui tourne et élève les uns, tandis que disparaissent les autres.

    Laurent TIXIER, Maistre des Réjouissances

    Mardi 12 octobre 1685,

    Hôtel particulier de la famille de Villelouet

    « Tireur » d’élite 

    — Père ! Père ! Un courrier.

    Clame, Aimé, le fils d’Arnaud de Villelouet, gentilhomme de petite noblesse paysanne installée à Paris depuis une trentaine d’années.

    Aussitôt alertée, la maisonnée se met en branle car, recevoir une lettre procure toujours, excitations et questionnements :

    Que recèle le pli ? Bonne ou mauvaise nouvelle ?

    Et comme à l’accoutumée, la première personne à manifester sa curiosité se nomme, « Bhavana », la servante du logis :

    — Un courrier ?

    — Si fait ! Il vient de nous être remis, à l’instant. Et c’est un valet de l’Hôtel de Juigné qui vient de me remettre cette lettre.

    — À coup sûr, une invitation.

    — Tu crois, Bhavana ?

    — Pour sûr, mon petit. Et tu vas pouvoir faire de belles rencontres. L’Hôtel de Juigné est connu pour rassembler de bien précieuses personnes. Et surtout, de belles demoiselles, en quête d’un bon parti.

    — Et d’héritiers fortunés, ce qui ne sera jamais mon cas, ma bonne, Bhavana.

    — Tu possèdes bien plus que la fortune, mon petit, tu es le descendant de Pierre de Villelouet, l’illustre et vaillant militaire, héros du siège de la Rochelle.

    — C’est bien là le problème.

    — Pourquoi dis-tu cela ?

    — Oh, rien ! Tu ne comprendrais pas. Et puis, sache que mon cœur est déjà pris, Bhavana.

    — Encore avec cette histoire ?

    — Là où la raison s’en fait une, le cœur ne répond, lui, qu’à son aspiration.

    Apercevant son père au sortir du logis, Aimé de Villelouet, qui s’apprête à le rejoindre, se retourne attiré par la bruyante animation soudaine.

    La petite cour de l’hôtel particulier retentit des appels du valet de maison : Donnadieu, originaire des comptoirs du Sénégal, s’en revient de chez le charron de la rue voisine. À la demande de son maître, ce grand gaillard a fait changer une roue de la vinaigrette, le véhicule à traction humaine de la maison. Il était temps, la dite roue menaçait de se disloquer.

    La satisfaction sonore qui émane de Donnadieu a tôt fait de distraire le sieur de Villelouet qui descend du perron où il se trouve, laissant, pour l’heure, son fils avec la lettre toujours cachetée.

    S’approchant du petit véhicule, Arnaud de Villelouet constate la réparation avec un semblant d’expertise qui ne trompe que lui :

    — Certes, le bougre semble avoir bien œuvré, mon bon, Donnadieu.

    — Oh oui, mon bon Maître. À ce propos, le sieur Baudry vous fait dire que la roue de gauche devra être changée sous peu et que…

    — Et que nenni, Donnadieu, celle-ci ne présente aucun risque pour l’heure. Fie t’en à mon sens de l’estimation.

    — Oui, mais, il est bien aise de vous faire savoir que si vous souhaitiez faire un échange de véhicule, il serait en mesure de vous proposer quelque chose… d’intéressant.

    — D’intéressant ? Et, donc ? Se méfie déjà le sieur de Villelouet, bien au fait que le mot « intéressant » revêt dans son orthographe tout le contre-sens de ce qu’il dissimule.

    — La vinaigrette… contre une chaise à porteurs. Ce… C’est intéressant, non ?

    — Intéressant ? Sans intérêt, oui ! Me prendrait il pour un bilboquet, ce marchand ?

    Cette indignation de la part d’Arnaud de Villelouet peut vous paraître surprenante mais en vérité, un changement de cette nature engendrerait un surcoût économique conséquent pour la maison de Villelouet. Notons qu’une vinaigrette n’est tractée que par un seul porteur. « Tireur », serait le terme plus exact. Alors qu’une chaise à porteurs nécessite deux individus soulevant par-devant et par derrière, des brancards permettant l’élévation de l’habitacle. Ainsi, deux hommes portent le voyageur qui est obligé de se pourvoir d’un valet supplémentaire contrairement à la vinaigrette.

    Pour Arnaud, cette proposition fleure le complot et il ne tarde pas à en lever le voile, du moins, s’en persuade t-il :

    — Oh, mais je vois clair, à présent, gredin ! C’est toi qui as dû inspirer cette fallacieuse idée à cet escroc de charron, afin de tirer au flanc, à défaut de tirer ma vinaigrette, comme tu sais le faire, ou plutôt, ne pas le faire ? Hein ? Avoue ?

    — À vous ? Vous voulez dire, à moi ?

    — C’est cela ! À toi ! Avoue, toi !

    Les échanges entre Villelouet et son valet ont toujours été emprunts d’incompréhension, liés, bien sûr, à l’abîme culturel qui sépare les deux hommes. Ce qui fait que de manière récurrente, c’est une sorte de dialogue de sourds qui s’installe le plus souvent entre nos deux interlocuteurs. Mais au bout du compte, chacun retrouve ses marques pour le plus grand bonheur d’une société hiérarchisée et compartimentée à souhait. Et Donnadieu, après avoir subit le sermon rituel, de ranger promptement la vinaigrette dans la sellerie, à l’abri des intempéries.

    Sitôt passée cette scène digne d’une comédie de Monsieur Molière, le fils du noble Villelouet finit par tendre la missive reçue, à ce père enfin disposé.

    — Qu’est-ce donc, mon fils ?

    — J’imagine… Une invitation, père ?

    — Et, de qui, je vous prie ?

    — Elle porte la marque de l’Hôtel de Juigné.

    — De Juigné ? Grand Dieu ! Pour sûr, une invitation de madame de Chambon.

    Le valet qui n’a rien perdu de la scène rétorque fièrement :

    — De jambon ? Ah ! Ah ! Ah ! D’un rire qu’il imagine communicatif.

    — Ah ! Ah ! Ah ! D’un autre bien moins complaisant. Que tu es d’un drôle, Donnadieu ! Retourne-t’en donc vaquer à tes occupations, plus vite que cela. Et à lui-même : De « jambon », le vil ignorant.

    — Père, la lettre. S’impatiente le jeune homme.

    — La lettre ? Ah, oui ! Le maître de la maison décachette le courrier et tout aussitôt, à son fils : Bien ! Il s’agit là d’une invitation, comme je l’avais pressentie. Aussi, Aimé, il nous faut bâtir une stratégie.

    — Une stratégie ?

    — Eh bien, oui, car s’il s’agit bien là, d’une invitation. Il ne faudrait surtout pas rater cette si belle occasion qui nous est offerte pour, premièrement, trouver une bonne et riche épouse. Ça, c’est pour toi. Et en ce qui me concerne, me faire quelques nouveaux amis qui pourraient plaider en ma faveur.

    — Plaider en votre faveur ?

    — Afin d’espérer une augmentation de la pension royale. En effet, depuis la mort héroïque de mon pauvre père, à la Rochelle, les ministres n’ont guère valorisé la prime dote accordée par le roi à notre famille et sans l’appui d’un favori auprès de notre monarque, nous pourrions bien voir notre rente diminuer.

    — Et vos affaires, avec le grand « Gib » ?

    — Tu parles ! Nous n’avons toujours pas de nouvelles du « ventru » depuis son départ des Indes. M’est avis que la « Sirène » a dû tomber aux mains des pirates, tiens. Et notre investissement avec. De la soie que nous aurions pu vendre un bon prix, c’est certain. Misère ! Mais nous allons nous refaire, en concentrant tous nos efforts sur le bal qu’offre Madame de Chambon.

    — Nous aurions peut-être pu organiser nous-même ce bal, père ?

    — Tu plaisantes ? Notre logis ne peut guère accueillir plus de 60 personnes, en réception.

    Certes. Le logis des Villelouet présente un bâti carré avec une petite cour au centre qui fait à la fois office de cour d’honneur et de basse cour. Le tout sur terre battue. Un corps principal flanqué de deux dépendances adjacentes et une petite tour à trois pans en hors d’œuvre à l’intérieur de laquelle se déploie un escalier en vis. Une échauguette au-dessus de la porte cochère témoigne encore d’une histoire tumultueuse tirée d’un passé récent. La porte cochère en plein cintre, donnant sur la rue, est jumelée à une porte piétonne plus petite. Le bâtiment qui s’appuyait sur les portes d’entrée a disparu en 1581, suite à un incendie survenu lors des guerres de religions. Enfin, ultime empreinte d’un passé révolu, une petite fenêtre géminée trône au-dessus de la porte lancéolée ou dite à accolade, du corps principal, rappelant les origines médiévales de la maison des Villelouet. Certes, ce vieux logis possède une âme et aussi… dit-on… l’esprit du baron, Guy le Beau de Vieillevigne, qui hanterait toujours les lieux depuis sa mort brutale, au siècle dernier.

    Mais voilà, l’édifice ne se prête que timidement aux grandes réceptions en vogue, d’où la remarque d’Arnaud, son actuel propriétaire.

    Remarque qui n’émeut guère un fils qui s’apprête déjà à filer :

    — Bien, père. Je vous abandonne séant, car j’ai rendez-vous, matines, avec Cosme d’Elinière. Ensuite nous devons déjeuner, tous deux, chez Maître Jacques.

    — Tu veux plutôt dire que tu as rendez-vous avec un aventurier, à la taverne d’à côté ?

    — Ne soyez pas chagrin, père. Nous ne faisons rien de mal, et puis, Cosme qui s’en revient du Brésil souhaite partager avec moi son expérience qui semble fort prometteuse.

    — Ah ! Ne voilà t-il pas que mon fils va passer la sainte journée avec un coureur des bois. Clame, Villelouet le père, à qui veut bien l’entendre.

    — Père, sachez, tout d’abord, que le Brésil ne ressemble pas à la Neuve France. On n’y chasse pas le castor, au Brésil. On y trouve de l’or, des pierres précieuses et bien d’autres choses encore. Allez ! J’y vais ! Et dans l’élan de sa course, de rajouter : Des perroquets ! On y trouve également, des perroquets.

    — Des pierres précieuses. Pff ! Bah ! Bougonne en lui-même, ce père contrarié. Et ce Cosme, que faisait-il, au pays des perroquets ?

    Alors qu’Aimé s’éloigne à grand pas des recommandations paternelles, Arnaud, lui, rumine ses dires. Ce que déteste par-dessus tout notre gentilhomme, c’est surtout cette maudite taverne, tapageuse, où se rend régulièrement son fils. Un antre que tient Maître Jacques, individu que l’on ne voit pas souvent à la messe, d’ailleurs, constate le sieur de Villelouet. Fort heureusement, Scaramella, l’épouse du tavernier, une italienne, est une pieuse personne qui ne rate aucune occasion de louer son banc chaque semaine, au grand bonheur de la trésorerie du curé de la paroisse. Cette femme rachèterait-elle l’âme pervertie de son commerçant de mari ? Bref, en un mot comme en cent, cette taverne représente tout ce qu’il y a d’infréquentable pour Arnaud de Villelouet. Et notre homme s’est toujours juré de n’y mettre jamais les pieds.

    Alors qu’il finit, enfin, par sortir de ses songeries, notre gentilhomme convoque son valet :

    — Donnadieu ! Viens par ici.

    — Oui, maître ?

    — Nous allons chez le perruquier Saint Yves, rue d’Ulysse.

    — Rue du Lys ?

    — C’est cela, rue d’Ulysse. Et Arnaud de déclamer à l’intention de son valet : « Heureux, qui comme, Ulysse… »

    — Hein ?

    — Du Bellay ! Donnadieu. Du Bellay !

    — Du balaie ?

    — Mais, non ! Bougre d’âne ! À ce valet qui s’apprête à tourner les talons. Reste ici ! Et, heu… Non ! Vas plutôt nous chercher la vinaigrette, tiens !

    Et l’on ressort la vinaigrette de la sellerie d’où l’on venait de l’y ranger cinq minutes auparavant. Donnadieu d’ouvrir la porte de l’habitacle, et le noble homme de s’installer aussitôt sur le siège, à l’intérieur du petit véhicule, sans omettre de préciser à son valet que :

    — Pour ce faire nous prendrons le « grand parcours sécurisé » !

    — Le « grand parc… », Hein ?

    — « G » comme : grand, « P » comme : parcours et « S » comme : sécurisé ». Je ne veux pas que l’on traverse le territoire du roi d’Argot, moi. C’est tout, farceurs, trousse monnaie, bateleurs et autres

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