New frontiers of antitrust 2013: Comptetition Law in times of Economic Crisis - In Need of adjustement ?
Par Nicolas Charbit
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À propos de ce livre électronique
After a key note paper from Commissionner Joaquin Almunia on the state of competition policy enforcement in the EU in 2013, the papers adress four main issues :
• Opening competition in protected sectors: Should new entrants be protected?
• Personal data: Will competition law collide with privacy?
• Private enforcement: Will the wave be coming from Brussels, London, Paris or… elsewhere?
• Industrial policy: Can a pro-competition industrial policy exist?
The volume ends by a contribution of Fleur Pellerin on innovation and competition.
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Aperçu du livre
New frontiers of antitrust 2013 - Nicolas Charbit
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© Groupe Larcier s.a., 2013
Éditions Bruylant
Espace Jacqmotte
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Tous droits réservés pour tous pays.
Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent ouvrage, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
ISBN : 978-2-8027-4527-3
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New frontiers of antitrust 2012, Edited by Joaquín Almunia, Eric Barbier de La Serre, Olivier Bethell, François Brunet, Guy Canivet, Henk Don, Nicholas Forwood, Laurence Idot, Bruno Lasserre, Christophe Lemaire, Cecilio Madero Villarejo, Andreas Mundt, Siun O’Keeffe, Mark Powell, Martim Valente, Richard Wish, 2013.
New frontiers of antitrust 2011, Edited by Frédéric Jenny, Laurence Idot and Nicolas Charbit, 2012.
Abus de position dominante et secteur public. L’application par les autorités de concurrence du droit des abus de position dominante aux opérateurs publics, Claire Mongouachon, 2012.
Reviewing vertical restraints in Europe. Reform, key issues and national enforcement, Edited by Jean-François Bellis and José Maria Beneyto, 2012.
Droit de la concurrence et droits de propriété intellectuelle. Les nouveaux monopoles de la société de l’information, Jérôme Gstalter, 2012.
L’action collective en droit des pratiques anticoncurrentielles. Perspectives nationale, européenne et internationale, Silvia Pietrini, 2012.
Table of contents
Présentation
La concurrence au service de l’achèvement du marché unique
Part I
Opening competition in protected sectors: should new entrants be protected?
La protection des nouveaux entrants en droit de l’Union européenne
Bernard Amory
Laurent De Muyter
I. Introduction
II. Définitions préliminaires
1. Secteurs protégés
2. Nouveaux entrants
III. La raison d’être de l’assistance à l’entrée sur le marché
1. Aide sélective ou économie de marché ?
2. Libéralisation des secteurs protégés
3. Double protection
4. Effet utile de la libéralisation dans les industries de réseaux
5. Égalité des chances
6. Conclusion
IV. Réglementation sectorielle
1. La réglementation asymétrique
2. La gestion des ressources rares
V. L’approche individuelle sur la base du droit de la concurrence
1. Application cumulative de la réglementation et du droit de la concurrence
2. Article 101 TFUE
3. Article 102 TFUE
3.1. L’existence d’une position dominante
3.2. La prise en compte des coûts d’un opérateur moins efficace (test du concurrent raisonnablement efficace)
3.3. Absence de nécessité de démontrer la possibilité de récupérer ses pertes
3.4. L’assistance aux nouveaux entrants comme remède
4. Contrôle des concentrations
4.1. L’appréciation stricte en cas de marchés libéralisés
4.2. La théorie du franc-tireur
4.3. Remèdes
VI. Conclusions
1. Caractère temporaire de l’aide
2. Seuils
The economist point of view
Andrea Lofaro
Jan Peter Van der Veer
Introduction
I. The role of entry in competitive markets
II. The role of entry in markets characterised by a dominant firm
III. The role of entry in recently liberalised markets
IV. What role for the « reasonably efficient competitor test » under Article 102?
Conclusion
Part II
Personal data: will competition law collide with privacy?
Le point de vue de l’autorité française de la concurrence
Bruno Lasserre
Introduction
I. Les intersections entre le droit de la concurrence et la protection des données personnelles
II. Les objectifs communs à la régulation concurrentielle et à la protection des données personnelles
III. Un risque de collision et de divergence entre protection des données personnelles et dynamisme concurrentiel qu’il convient de relativiser
IV. L’internationalisation des pratiques et des acteurs : un défi partagé
Le point de vue de la commission nationale de l’informatique et des libertés
Isabelle Falque Pierrotin
I. Introduction
II. Constat initial
1. Les données personnelles sont entrées de plein pied dans le champ économique
2. L’entrée de la concurrence dans le champ d’activité des autorités de protection des données se manifeste également à un niveau géostratégique
3. L’individu et ses nouveaux droits de l’individu, facteur de concurrence
III. Comment réguler le numérique entre « privacy » et concurrence ?
1. La distinction entre les champs d’application respectifs des règles de « privacy » et de celles de concurrence
2. L’intégration par le régulateur de la vie privée de la nouvelle dimension concurentielle de son action
3. Une nécessaire conciliation de la dimension économique et des libertés fondamentales : vers l’inter-régulation
IV. Conclusion
Competition law and personal data: Preliminary Thoughts on a complex issue
Damien Geradin
Monika Kuschewsky
I. Introduction
II. The acquisition of personal data as a key success factor for online service providers
III. Competition law and the accumulation of personal data
1. Anticompetitive acquisition of data
1.1. Exclusivity agreements
1.2. Prohibition of data portability
2. Should the risks of an accumulation of personal data be taken into account in competition law assessments?
3. Could personal data be considered an « essential facility » within the meaning of article 102?
IV. Conclusion
Protection de la vie privée et des données personnelles : l’Europe à l’avant garde
Françoise Le Bail
I. Valeur des données personnelles et analyse concurrentielle
II. Les innovations de la réforme
III. Conclusion
Part III
Private enforcement: will the wave be coming from Brussels, London, Paris or... elsewhere?
Private enforcement 2013 : Entre actions de contournement et forum shopping…
Laurence Idot
I. La multiplication des actions de contournement
1. L’accès au juge
1.1. La réalité de l’indemnisation des dommages de masse
1.2. La reconnaissance de l’intérêt à agir de certaines catégories de victimes
2. L’établissement de la responsabilité
2.1. Les conditions de la responsabilité
2.2. L’évaluation du préjudice
II. Le développement du forum shopping
1. La concurrence interne entre les systèmes judiciaires des États membres
1.1. La réalité de la concurrence interne
1.2. Le traitement de la concurrence interne
2. La concurrence externe des systèmes judiciaires des États membres
2.1. L’attrait des ADR
2.2. L’attrait du système américain
The European Commission’s role: main achievements and next steps
Carles Esteva Mosso
I. The story so far
1. The wave from Luxembourg (ECJ): Courage and beyond
2. The first wave from Brussels: the Green and the White Paper
3. The wave from Member States: increasing awareness and damages claims
3.1. Slight increases in damages actions in some jurisdictions
3.2. Developments in national legal frameworks
II. The future of private enforcement in the EU
1. Is a EU legislative initiative still necessary?
1.1. The enforcement of the EU right to damages is far from effective
1.2. The progressive improvement of private enforcement does not cover the whole EU
1.3. The need to ensure a balanced interaction between private and public enforcement
2. Issues to be addressed at EU level
2.1. Principles
2.2. Collective redress
2.3. Enhancing private enforcement
2.4. The relationship between public and private enforcement
Discovery under 28 United States Code section 1782
Maurice E. Stucke
Introduction
I. Litigants who seek discovery in the U.S.
1. When does Section 1782 authorize the U.S. Court to order discovery?
1.1. Who can seek discovery under § 1782?
1.2. What foreign proceedings qualify under § 1782?
1.3. When can interested persons seek discovery under § 1782?
1.4. What kind of discovery is available under § 1782?
2. When will the U.S. Courts exercise their discretion and permit discovery under § 1782?
2.1. Is the person from whom discovery is sought a participant in the foreign proceeding?
2.2. Comity considerations
2.3. Is the applicant’s discovery request under § 1782 an attempt to circumvent foreign proof-gathering restrictions or other policies of a foreign country or the United States?
2.4. Is the discovery request unduly intrusive or burdensome?
II. Friction from U.S. discovery
Conclusion
Striking the right balance : The importance of leniency to the global rise of private antitrust enforcement
John Terzaken
Molly Kelley
I. Private actions in the United States
II. The role of leniency
III. Striking a balance
IV. Lessons for aspiring private enforcement regimes
Part IV
Industrial policy: can a pro-competition industrial policy exist?
Politique industrielle et politique de concurrence
Frédéric Jenny
Conclusion
The interplay between competition policy and industrial policy: restructuring declining industries with structural overcapacity
Jorge Padilla
I. Introduction
II. Restructuring an industry with structural overcapacity
1. The role of industrial policy
2. The interplay with competition policy
III. Concluding remarks
Le point de vue de l’avocat
Patrick Hubert
Introduction
I. Le droit de la concurrence, limite intangible aux politiques industrielles
1. Le droit de la concurrence : un droit de niveau constitutionnel
2. Une contrainte protéiforme exercée sur les États membres
II. Politique industrielle : une marge de manœuvre restreinte mais pourtant bien réelle
1. Une politique industrielle dans les interstices du droit de la concurrence
2. Une crise financière porteuse d’enseignements
III. Politiques industrielles de demain : le champ des possibles
1. Des possibilités encore inexplorées
2. Vers une (r)évolution du rôle joué par les autorités nationales de concurrence ?
Conclusion
Innovation et politique de concurrence
Discours de clôture
Fleur Pellerin
I. Les brevets, d’abord
II. Deuxième point, le fonctionnement du monde du numérique, justement
Pour conclure
Présentation
Frédéric Jenny
frederic.jenny@gmail.com
Président Comité concurrence, OCDE
Président, Comité international Concurrences
Professeur d’économie, Co-Directeur CEDE, ESSEC
Abstract
In this short presentation, Frederic Jenny, Chairman of the OECD Competition Committee, presents the fourth edition of the « New Frontiers of Antitrust » conference. After having recalled the opening speech of Joaquin Almunia on the recent activity of the European Commission and his vision for the future, he introduces the themes of the 4 panels; the foundations of competition law and the distinction between competition and competitors; the interface between competition law and respect of the protection of personal data; the reforms to expect in private enforcement at national and EU levels, and; the relationship between competition law and industrial policy.
Dans cet article, Frédéric Jenny, Président du Comité concurrence de l’OCDE, présente la quatrième édition de la conférence « Demain la concurrence ». Il évoque tout d’abord le discours d’ouverture de Joaquin Almunia qui dresse le bilan de son activité récente de la Commission et sa vision de l’activité à venir. Il reprend ensuite les thèmes à aborder dans les tables-rondes de la journée : les fondements du droit de la concurrence et la distinction entre protection de la concurrence et protection des concurrents ; l’interface entre droit de la concurrence et respect de la protection des données personnelles de la vie privée ; les évolutions à attendre en matière d’action civile en matière de droit de la concurrence ; l’articulation entre droit de la concurrence et politique industrielle.
1. Pour cette quatrième édition de la conférence « Demain la concurrence : New Frontiers of Antitrust » organisée par la Revue Concurrences, nous n’avons pas dérogé à la règle que nous nous étions imposée dès la première édition de cette manifestation devenue incontournable : identifier et traiter des sujets qui seront au cœur du débat en matière de droit et de politique de concurrence dans les mois à venir.
2. À cet égard, l’intervention du Commissaire Européen à la Concurrence, Joaquin Almunia, qui, cette année encore a accepté d’inaugurer nos travaux en dressant le bilan de son activité récente et en partageant avec nous sa vision de l’activité de la Commission pour les mois à venir, a été particulièrement riche et le débat avec la salle auquel s’est prêté le Commissaire après son allocution a été particulièrement vivant.
3. Quatre questions ont été au cœur des débats pendant notre journée.
4. La première question a concerné les fondements même du droit de la concurrence. Chacun sait l’importance qu’attachent les autorités de la concurrence à faire la distinction entre protection de la concurrence et protection des concurrents. À bien des égards, particulièrement aux États-Unis, la protection des concurrents est perçue comme une perversion au regard de ce que devrait être une saine politique concurrence. Mais en Europe, dans un nombre de secteurs importants tels que l’électricité, le transport ferroviaire, ou la poste etc., l’ouverture à la concurrence peine à avoir les effets positifs attendus tant il est vrai que les nouveaux entrants ont du mal à concurrencer effectivement les anciens monopoles légaux. La question de savoir si, dans ces conditions, il ne faut pas recourir dans ces secteurs à une régulation de la concurrence asymétrique qui soit pour partie protectrice de ces nouveaux entrants, à tout le moins jusqu’à ce qu’ils aient la force, la taille et l’expérience nécessaires pour être des concurrents effectifs des anciens monopoles, est posée. Une telle position est diamétralement à l’opposé de celle de la Cour Suprême des États-Unis qui, notamment dans l’affaire Trinko, a fait valoir qu’une entreprise fût-elle dominante n’avait pas le devoir d’aider ses concurrents à se développer. Faut-il alors revoir les règles du droit de la concurrence pour les rendre plus asymétriques et protéger les entrants même lorsqu’ils sont relativement inefficaces ou au contraire adhérer strictement à l’orthodoxie de la neutralité entre concurrents ?
5. La deuxième question a concerné l’interface entre le droit de la concurrence et le respect de la protection des données personnelles de la vie privée. On sait en effet, que le traitement des informations recueillies par internet sur les habitudes de consommation des internautes ou sur le type de site qu’ils consultent est devenu un enjeu majeur de la lutte concurrentielle des géants de l’internet. L’accès aux données permettant de mieux cibler le comportement commercial des internautes, s’il est facteur d’amélioration de la concurrence, peut par ailleurs porter une grave atteinte à leur vie privée et, par la crainte qu’inspire cette atteinte, constituer un frein au développement de l’économie numérique. La question de savoir quel cadre assure la nécessaire protection des droits de la personne tout en facilitant le développement économique et le jeu de la concurrence est cruciale à l’heure où la vente en ligne se développe plus rapidement que les autres formes de commerce et où les autorités de concurrence portent une attention soutenue au secteur de l’internet.
6. La troisième question a porté sur les évolutions à attendre en matière d’action civile en matière de droit de la concurrence. Si la Commission Européenne a été à l’origine de la réflexion sur cette question, force est de constater que le débat s’est quelque peu enlisé au plan communautaire. Il est possible que l’année 2013 voie un projet de la Commission aboutir ; il est en revanche certain que diverses modifications des lois nationales dans des États membres, par exemple en France ou au Royaume Uni, vont cette année viser à permettre l’action de groupe en matière de droit de la concurrence ou faciliter le développement de l’action civile individuelle. Ces développements nationaux semblent prendre ainsi le pas sur l’initiative communautaire ce qui ne saurait surprendre dans un domaine qui relève à l’évidence des États membres. Pour autant ces développements qui méritent d’être étudiés, conduisent à se demander si une certaine harmonisation des initiatives nationales ou la définition d’un cadre communautaire, d’une part, ne seraient pas utiles pour éviter le risque de forum shopping, et, d’autre part, ne seraient pas nécessaires pour assurer de façon plus cohérente l’interface entre action civile et protection des programmes de clémence.
7. La quatrième question a, enfin, porté sur l’articulation entre droit de la concurrence et politique industrielle. Force est de reconnaître qu’à la suite de la crise financière puis économique de 2008, la préoccupation des responsables de la politique économique dans nombre de pays est moins celle de l’allocation optimale des ressources que celle de la croissance et de l’innovation. Si les bienfaits de la concurrence sont bien établis en statique, ils sont plus incertains lorsque l’on considère l’évolution dynamique de nos économies. Aussi la question des champs respectifs et des utilités comparées de la politique industrielle et de la politique de concurrence est-elle redevenue une question centrale alors qu’elle a été largement ignorée dans le courant des années 1990 et 2000. On observe d’ailleurs une convergence qui mérite d’être notée entre les spécialistes de la politique de concurrence et ceux de la politique industrielle. Les cas d’échec du marché concurrentiel qui justifient une intervention publique proportionnée sont définis avec plus de précision et de rigueur que par le passé ce qui permet d’envisager une plus grande complémentarité entre ces deux types de politique.
La concurrence au service de l’achèvement du marché unique
Joaquín Almunia¹
joaquin.almunia@ec.europa.eu
Vice-Président de la Commission Européenne
chargé de la concurrence
Abstract
In his keynote speech delivered at the « New Frontiers of Antitrust 2013 » Paris conference on February 22, Joaquín Almunia, Commissioner responsible for Competition Policy, reminds the importance of the Internal Market in the context of the economic recovery and job creation. He discusses the European Commission’s action in key-sectors such as financial markets, telecommunications and energy.
Dans son discours d’ouverture de la conférence « Demain la concurrence 2013 » (Paris, 22 février 2013), Joaquín Almunia, le Commissaire en charge de la politique de concurrence, se penche sur l’importance du marché intérieur dans la relance économique et la création d’emplois. Il évoque également l’intervention accrue de la Commission dans trois secteurs-clés tels que les marchés financiers, les télécoms et l’énergie.
1. Mesdames et Messieurs, c’est un grand plaisir d’être à nouveau à Paris, et pour la quatrième fois parmi vous. Je vous en remercie.
2. J’aimerais me pencher aujourd’hui sur la construction et l’approfondissement du marché intérieur, en vue de sa contribution à la relance économique et à la création d’emplois. La situation économique en Europe n’est pas facile. Et il ne faudrait en aucun cas que les difficultés auxquelles nous sommes confrontés affaiblissent notre Union et son meilleur atout, le marché unique. Il nous incombe à tous – États membres, comme institutions européennes – de trouver des solutions pour aider l’Europe à retrouver une croissance durable, créatrice d’emplois et source d’innovation. C’est précisément le marché unique, et son approfondissement, qui doivent nous aider à réussir.
3. Vous l’aurez compris, je suis ici pour plaider en faveur de plus d’Europe, d’une Europe plus forte et plus compétitive. Cela passe par un marché intérieur plus performant et intégré.
4. Le marché intérieur recèle encore, à bien des égards, un potentiel de croissance inexploité pour l’économie européenne. Nous avons aujourd’hui grand besoin d’en tirer tous les bénéfices. Bien sûr, la politique de la concurrence a un rôle clé à jouer dans ce contexte. Elle aide à consolider un marché intérieur où les mêmes règles s’appliquent à tous les opérateurs économiques ; un marché intérieur ouvert aux entreprises les plus performantes et innovantes ; et un marché intérieur au sein duquel aucune entreprise ou État membre ne peut revenir sur les acquis de la construction européenne en érigeant de nouvelles barrières. Je voudrais donc évoquer aujourd’hui le rôle de la politique de la concurrence pour le bon fonctionnement du marché unique.
Le Marché Intérieur, clé de la compétitivité européenne
5. Ceux qui prévoyaient une implosion de la zone euro ont eu tort. Mais il ne faut pas se leurrer, la crise n’est pas encore finie. Nous avons pris les décisions politiques nécessaires pour assurer la stabilité de notre monnaie unique. Nous avons aussi enclenché un assainissement graduel des finances publiques à travers l’Europe et la pression des marchés financiers s’est affaiblie. Beaucoup de réformes structurelles ont été mises en marche, et commencent à donner des résultats. Cependant il reste beaucoup de travail à faire. Il est tout à fait inacceptable que plus d’un jeune sur deux soit à la recherche d’un emploi dans certains États membres. Nous avons atteint au sein de l’Union un pic de chômage de 11,8%, avec des écarts extrêmement importants entre les pays, allant de 4,5% en Autriche à 26% en Grèce et en Espagne.
6. Face à ce problème dramatique, beaucoup dépendra de la situation macroéconomique et des politiques de l’emploi menées au niveau national. Mais l’Union européenne ne doit pas rester inactive. Il n’est pas acceptable que nos entreprises ne puissent toujours pas bénéficier d’un véritable marché intérieur sans entrave dans des secteurs comme l’énergie, les télécommunications, l’économie numérique ou les services.
7. Cette fragmentation du marché intérieur entraîne une perte de compétitivité par rapport à nos concurrents mondiaux et notamment par rapport à ceux issus des pays émergents. C’est pourquoi je suis stupéfait d’entendre, dans certains milieux, le retour de slogans protectionnistes prônant le repli national et le chacun pour soi. Je ne me lasserai jamais de le dire : le protectionnisme n’est pas un remède pour notre économie, c’est un poison.
8. La solution pour renforcer notre compétitivité passe par un marché européen ouvert, où l’entrée de nouvelles entreprises est aisée, et où la discipline imposée par les règles de concurrence rend nos entreprises plus performantes. Ces principes sont le fondement d’une politique industrielle moderne et la Commission vient de présenter une Communication qui va dans ce sens il y a quelques mois. Les solutions que nous envisageons tirent les leçons du passé : le protectionnisme et la politique consistant à « choisir les gagnants » à la place du marché appartiennent à une époque révolue.
9. L’argent des contribuables est bien mieux utilisé lorsqu’il est orienté vers la création d’opportunités commerciales pour des entreprises innovantes et en bonne santé. Il est temps de réfléchir à des investissements communs au niveau européen, comme le fait par exemple le mécanisme pour l’interconnexion en Europe – la Connecting Europe Facility. Nous devons nous munir des outils adéquats pour permettre la réussite de nos entreprises : assurer une meilleure compétitivité, l’accroissement de la productivité et encourager l’innovation. Nous devons créer des opportunités pour que de nouvelles entreprises entrent sur le marché et pour que celles qui sont en difficulté se transforment et se renouvellent. C’est à ce niveau que la politique de la concurrence joue un rôle essentiel – un rôle d’ailleurs tout à fait complémentaire d’une politique industrielle moderne.
10. Nos règles permettent de s’assurer que l’action des acteurs privés comme celle des autorités publiques ne privent pas notre économie des bénéfices du libre jeu de la concurrence. Ces bénéfices vont aux consommateurs bien sûr, mais aussi à l’ensemble de l’économie, en favorisant la croissance. Ceux qui appellent à privilégier les producteurs au détriment de leurs clients ou des consommateurs risquent ainsi de favoriser les seuls actionnaires ! Et cela, seulement sur le court terme.
Sauvegarder une concurrence saine pour un marché intérieur plus performant
11. J’entends parfois que nos règles de concurrence sont trop rigoureuses, trop sévères et que nous empêchons la création de champions européens. Je ne le pense pas. Je veux vous le démontrer en prenant comme exemple notre politique de contrôle des concentrations. Certains nous reprochent parfois de définir un marché comme européen ou national, alors qu’en réalité il serait mondial. Cette définition trop étroite empêcherait les entreprises européennes de se consolider pour prendre plus d’envergure face à la concurrence internationale.
12. Ces critiques sont tout simplement infondées. Notre analyse des marchés pertinents se fonde sur des critères objectifs. Dans chaque cas, nous examinons de façon précise à quels fournisseurs alternatifs les clients européens peuvent recourir. Pour ce faire, nous nous informons auprès de toutes les entreprises du marché et notamment auprès des entreprises clientes. Nous procédons également à des analyses économiques poussées qui prennent en compte les évolutions futures du marché, comme par exemple l’entrée potentielle de nouveaux fournisseurs. Lorsque, sur la base de ces critères, le marché s’avère mondial, nous le définissons comme tel. Et nous l’avons fait – entre autres – dans des affaires connues comme Deutsche Börse/NYSE Euronext dans le domaine financier ou Western Digital/Hitachi dans le domaine informatique.
13. De même, lorsque le marché est défini comme étant géographiquement plus étroit, nous ne faisons que refléter la réalité économique. Il est flagrant que certains marchés en Europe, comme celui de la téléphonie mobile, demeurent nationaux. J’y reviendrai dans quelques instants.
14. J’entends aussi dire que nous ignorons les gains d’efficacité que certaines fusions pourraient apporter. Là encore je tiens à dire que cette critique est erronée. Lorsqu’ils sont invoqués, nous comparons les éventuels