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Les Enquêtes de Maigret, de Georges Simenon: Lecture des textes
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Les Enquêtes de Maigret, de Georges Simenon: Lecture des textes
Livre électronique189 pages2 heures

Les Enquêtes de Maigret, de Georges Simenon: Lecture des textes

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À propos de ce livre électronique

Découvrez l'histoire du plus célèbre commissaire du cinéma et de la télévision

Le commissaire Maigret est aussi célèbre que Sherlock Holmes ou Hercule Poirot. Le héros créé par Georges Simenon en 1929 est entré dans la légende grâce au cinéma et à la télévision. Traduites dans le monde entier, ses enquêtes suscitent toujours la curiosité des lecteurs. Comment Maigret est-il né de l’imagination du romancier ? Quelle est sa méthode d’investigation ? Quelle place occupe-t-il dans un genre qui connaît une véritable évolution médiatique ? Autant de questions sur lesquelles s’arrête ce guide de lecture.

Un guide de lecture unique sur le célèbre héros de Simenon

EXTRAIT

Aujourd’hui, le commissaire Maigret est célèbre dans le monde entier. Depuis 1931, le policier à la pipe poursuit une honnête carrière dans la littérature mais surtout au cinéma et à la télévision. Même s’il est parfois boudé par les jeunes générations, Maigret reste une figure incontournable du roman policier et tous les Columbo, Derrick ou Navarro lui doivent quelque chose… Le commissaire est toujours d’actualité comme en témoigne la bonne santé de la série interprétée par Bruno Cremer : 54 épisodes tournés de 1991 à 2005 alors qu’initialement les producteurs en avaient prévu 12 ! Quant à la série des « Jean Richard », même si elle ne fait pas l’unanimité, elle continue à être rediffusée régulièrement sur les chaînes européennes. Du côté de l’édition, les lecteurs ont le choix entre l’intégrale chez Omnibus et Le Livre de Poche… Sans oublier la bande dessinée avec plusieurs titres au catalogue.

A PROPOS DE L'AUTEUR

Bernard Alavoine, maître de conférences à l’Université de Picardie Jules Verne, a déjà signé Georges Simenon, parcours d’une œuvre, ainsi que de nombreux articles sur cet auteur.
LangueFrançais
Date de sortie20 nov. 2015
ISBN9782360589418
Les Enquêtes de Maigret, de Georges Simenon: Lecture des textes

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    Aperçu du livre

    Les Enquêtes de Maigret, de Georges Simenon - Bernard Alavoine

    Références

    collection dirigée par Alfu

    Bernard Alavoine

    Les Enquêtes de Maigret

    de Georges Simenon

    Lecture des textes

    2015

    Encrage édition

    © 1999

    ISBN 978-2-36058-941-8

    L’auteur remercie les chercheurs dont certains travaux m’ont aidé dans la rédaction de cet ouvrage : Pierre Assouline, Jean-Baptiste Baronian, Jacques Baudou, Alain Bertrand, Marie-Paule Boutry, Pierre Deligny, Jacques Dubois, Claude Gauteur, Francis Lacassin, Michel Lemoine, Claude Menguy, Paul Mercier, Jean-Jacques Schleret et Christine Swings. Mes plus vifs remerciements à Pierre Deligny et Michel Lemoine pour leur relecture attentive et leurs précieuses suggestions. Merci enfin pour leurs conseils à Alfu et à toute l’équipe d’Encrage.

    Introduction

    Aujourd’hui, le commissaire Maigret est célèbre dans le monde entier. Depuis 1931, le policier à la pipe poursuit une honnête carrière dans la littérature mais surtout au cinéma et à la télévision. Même s’il est parfois boudé par les jeunes générations, Maigret reste une figure incontournable du roman policier et tous les Columbo, Derrick ou Navarro lui doivent quelque chose… Le commissaire est toujours d’actualité comme en témoigne la bonne santé de la série interprétée par Bruno Cremer : 54 épisodes tournés de 1991 à 2005 alors qu’initialement les producteurs en avaient prévu 12 ! Quant à la série des « Jean Richard », même si elle ne fait pas l’unanimité, elle continue à être rediffusée régulièrement sur les chaînes européennes. Du côté de l’édition, les lecteurs ont le choix entre l’intégrale chez Omnibus et Le Livre de Poche… Sans oublier la bande dessinée avec plusieurs titres au catalogue.

    En fait, Maigret est devenu pour beaucoup un héros médiatique. Pour preuve ce numéro spécial du magazine Télérama consacré à Maigret en 1993 : cent pages pour décrire et raconter un héros… de télévision ! Il est impossible aujourd’hui de faire abstraction de cette évolution : il y a le héros créé par Simenon et pas moins de dix-sept acteurs qui ont choisi d’être le personnage de Maigret à l’écran… Avec cette nouvelle donne, il paraissait donc nécessaire de faire le point sur la situation de Maigret et d’éclairer un peu le lecteur. Qui est véritablement Jules Maigret ? Dans quelles conditions le personnage fut-il créé par Simenon ? Quel est le secret de la méthode du commissaire ?

    Après ces questions assez traditionnelles mais essentielles, nous avons ensuite tenté d’aborder les enquêtes de Maigret sous des angles plus originaux. Le personnage de Simenon continue en effet à intriguer bon nombre de lecteurs que l’on peut qualifier de professionnels : critiques, journalistes, universitaires, psychanalystes ou médecins apportent ainsi leur éclairage. Nous nous sommes donc efforcés de rendre compte de ces approches souvent novatrices. Et puis, à chaque fois que cela était possible, nous avons rapproché la série des Maigret et le reste de l’œuvre : on y retrouve en effet la même thématique et une écriture assez semblable. Enfin, il était tentant de faire un bilan soixante-dix ans après la naissance officielle du personnage et de poser quelques nouvelles questions. La série des Maigret appartient-elle vraiment au roman policier ? Peut-on mesurer une évolution dans l’écriture de ces romans ? Quels problèmes soulèvent la multiplication des adaptations cinématographiques ? Quel est l’avenir de ce héros populaire ?

    A la suite de cet essai, on trouvera une bibliographie commentée des œuvres de Georges Simenon. Les enquêtes du commissaire ont fait l’objet d’un résumé et d’un bref commentaire selon le même principe que dans le volume précédent 1. Le lecteur désireux d’approfondir ses connaissances pourra également retrouver les principaux livres ou articles dans la bibliographie critique. Enfin, nous proposons un choix important d’adaptations sur le petit et le grand écran.

    1 Georges Simenon, parcours d’une œuvre, Références n°6

    Histoire d’une série

    Des influences incertaines

    La véritable origine du genre policier remonte probablement à la fin du XVIIIe siècle avec des œuvres populaires qui utilisent plus ou moins une énigme. Le roman policier est apparu d’une façon plus officielle au milieu du XIXe siècle à trois endroits différents : on hésite entre Edgar Poe aux Etats-Unis, Emile Gaboriau en France et Wilkie Collins en Angleterre pour attribuer la paternité du genre… Quant à ceux qui restent tout de même des pionniers — Conan Doyle, Gaston Leroux et Maurice Leblanc — on ne sait pas toujours quelle a pu être leur influence réelle sur la littérature policière qui a fleuri tout au long du XXe siècle. En tout cas, Georges Simenon a sans nul doute profité de l’expérience de ses aînés, même si son Maigret s’est démarqué des Sherlock Holmes ou des Rouletabille… C’est en effet en maîtrisant la technique du roman à énigme que Simenon a pu acquérir l’écriture des Maigret. Cependant, il est évident que le romancier n’explore pas la voie classique de ce type de roman policier : la logique en effet est rarement la méthode utilisée par le commissaire.

    De la même façon, les techniques d’observation scientifiques, fort à la mode dans le monde du roman policier à la fin du siècle dernier, n’ont pas influencé beaucoup le personnage de Maigret. Le commissaire, en effet, n’est pas un homme supérieurement intelligent, capable de résoudre scientifiquement et logiquement les énigmes les plus obscures. Apparemment donc, on ne voit pas bien les rapports entre un Maigret et un Sherlock Holmes. Surtout dans les premières enquêtes — Le Chien jaune par exemple —, le commissaire méprise ouvertement les méthodes scientifiques de son jeune inspecteur : « Excusez-moi, commissaire… Mais… les empreintes… […] Maigret laissa tomber : Si vous voulez… » (ch. II). Maigret affiche le même scepticisme lorsque le pharmacien lui propose d’analyser le contenu des bouteilles après la tentative d’empoisonnement à la strychnine… Et d’une façon plus générale, le commissaire démontrera à ses inspecteurs ou au juge d’instruction qu’une démarche rationnelle est souvent inopérante parce que, selon lui, on ne peut prévoir le comportement humain. En apparence, Maigret conduit donc ses enquêtes très différemment de ses illustres prédécesseurs…

    Il ne faudrait pas cependant être aussi catégorique et nier toute filiation entre les enquêteurs comme Holmes ou Rouletabille et le commissaire Maigret. Francis Lacassin rappelle, dans La Vraie naissance de Maigret, que le rêve de Simenon était de mener lui-même des enquêtes à la Rouletabille lorsqu’il était jeune reporter :

    « J’avais lu Le Mystère de la chambre jaune et deux autres romans de Gaston Leroux. Et Rouletabille m’avait fortement impressionné comme, à cette époque-là, il en a impressionné beaucoup d’autres… C’était mon modèle. Je le trouvais merveilleux. Je portais d’ailleurs un imperméable comme Rouletabille, un chapeau avec le devant bien baissé, et je fumais une courte pipe pour ressembler à Rouletabille. »

    Pas étonnant alors que le personnage de Leroux ait pu par la suite influencer Maigret puisque le romancier avoue avoir été lui-même sous le charme… Ce qui séduit Simenon c’est probablement le Rouletabille des premières œuvres, c’est-à-dire les romans de Leroux influencés par Conan Doyle. Le créateur du titi parisien qui a la prétention de rivaliser avec le plus célèbre détective du monde a sans doute une lointaine parenté avec Maigret ! A ce sujet, Alfu rappelle que « Rouletabille affirme très tôt sa supériorité sur son aîné anglais » en citant un extrait révélateur du Mystère de la chambre jaune : « Sherlock Holmes te fera faire des bêtises, des bêtises de raisonnement plus énormes que celles qu’on lit dans les livres… Elles te feront arrêter un innocent… » 2 Supériorité de Rouletabille, mais également méfiance à l’égard de certains excès de logique. C’est probablement cet enquêteur anticonformiste — et non le futur agent secret du cycle suivant — qui a exercé une influence sur Maigret.

    Mais il y a un autre événement qui a pu décider Simenon à se démarquer de la littérature populaire dont on sent déjà le déclin à la fin de ces années 20 : c’est la naissance d’une nouvelle collection créée par un inconnu, Albert Pigasse. Il s’agit bien sûr de la collection Le Masque qui ne va proposer, jusqu’en 1930, que des auteurs anglo-saxons, et notamment Agatha Christie avec son génial Hercule Poirot. Le premier titre, Le Meurtre de Roger Ackroyd, paraît en 1927. Georges Simenon a-t-il lu ces premiers romans édités au Masque ? On ne peut l’affirmer, d’autant qu’il avait la réputation de lire peu ses confrères… Cependant, alors qu’il fournissait copieusement Ferenczi, Tallandier et surtout Fayard, Simenon n’a pu ignorer ce qui se faisait du côté de La Librairie des Champs-Elysées, ne serait-ce que d’un point de vue commercial… Le romancier gagne certes beaucoup d’argent chez ses trois éditeurs, mais ressent la lente agonie d’un genre populaire qui a du mal à s’adapter aux changements de société et donc au lectorat. L’avènement du Masque est une petite révolution, comme l’écrit encore Francis Lacassin dans son livre sur Maigret :

    « Suprême outrage envers la tradition, Le Masque se présente sous couverture non plus en papier mais cartonnée — comme un livre de prix. L’atmosphère et les personnages sont beaucoup plus réalistes […] L’intrigue — débarrassée de digressions, rebondissements et quiproquos du roman populaire — est construite de façon rigoureuse autour d’une énigme (qui a tué ?) brillamment résolue par le détective. » (p. 44)

    Si on fait abstraction de la résolution « rigoureuse » de l’intrigue, on remarquera que Georges Simenon a pu s’inspirer de quelques-uns des principes énoncés par Francis Lacassin à propos du cahier des charges du Masque. Les héros révélés par les nouvelles collections qui voient le jour entre 1927 et 1930 vont probablement aider Simenon à définir son propre personnage. Le futur enquêteur sera français comme Rouletabille et évoluera dans le décor quotidien de son pays — ce qui était en partie le cas pour le héros de Gaston Leroux. Mais au contraire de Sherlock Holmes ou d’Hercule Poirot, il sera un fonctionnaire issu d’un milieu assez modeste. Et surtout, c’est dans la méthode d’investigation qu’il se démarquera : le futur commissaire ne procédera pas par déductions brillantes.

    Il serait excessif de penser que la collection Le Masque est à l’origine du personnage de Maigret, mais elle a pu conforter Simenon dans le sens d’une évolution de sa production à la fin des années 20. On observera cependant que les personnages d’enquêteurs étaient présents dans l’œuvre populaire de Simenon. Si l’on place à part Le Bouton de col qui constitue plutôt une parodie de roman d’énigme (1922), il y a plusieurs personnages qui annoncent Maigret dans la production simenonienne à partir du milieu des années 20. Dès 1926 en effet, un premier enquêteur se manifeste dans Nox l’insaisissable — signé Christian Brulls — et l’ex-policier qui s’oppose au bandit fait penser au duel Arsène Lupin-Ganimard. Anselme Torrès n’est donc qu’un faire-valoir bien éloigné de Maigret… Parmi les nombreux détectives lancés par Georges Simenon à l’époque, on retiendra cependant deux figures intéressantes : Yves Jarry et Sancette. Dans un article, Claude Menguy et Pierre Deligny écrivaient ceci à propos du premier personnage :

    « C’est en 1927 que Simenon (ou plutôt Georges Sim) introduit dans ses romans populaires un personnage très proche d’Arsène Lupin et des détectives-aventuriers d’avant 1914. Imitant en cela ses illustres devanciers Gaston Leroux et Maurice Leblanc qu’il a lus dans sa jeunesse, il crée à son tour un aventurier de grande classe, à mi-chemin entre Arsène Lupin et Irving Le Roy, qu’il baptise Yves Jarry. […] Dans L’Amant sans nom, on assiste sans doute à l’une des meilleures aventures de Jarry, celle où apparaît le mieux aussi le caractère lupinesque de l’aventurier. » (cf. biblio.)

    Plus tard, dans divers entretiens, Georges Simenon admettra qu’à travers le personnage de Jarry, le profil psychologique de Maigret s’est lentement dessiné à ses yeux : notamment dans cette capacité à entrer dans la vie des autres et à recomposer ainsi une existence à l’aide de quelques indices. C’est aussi dans L’Amant sans nom qu’apparaît la première préfiguration policière de Maigret avec le personnage de l’agent N.49 : « un homme énorme et pesant. Des traits immobiles, épais. Un air de naïveté balourde. Un air buté aussi, têtu, obstiné […] Il bourra une pipe avec le soin qu’il apportait à toutes choses, l’alluma et se mit à fumer en arpentant la pièce. » Si, dans ce roman populaire, la silhouette de Maigret semble s’ébaucher — à travers deux personnages —, on y verra avant tout l’influence de Maurice Leblanc : on peut penser qu’à un certain moment Georges Simenon a envisagé d’écrire, lui aussi, une série de romans avec son propre gentleman-cambrioleur.

    On retiendra donc que Simenon a subi plusieurs influences des années 20 qui ont contribué à forger le projet de la série Maigret. Il est indéniable que le roman à énigme a imprégné la jeunesse du romancier et que ce dernier a appris à maîtriser une technique d’écriture grâce à ce canevas. Pour ce qui est de la spécificité de Maigret — fonctionnaire aux méthodes peu orthodoxes — il est probable que c’est à la fois le souhait de se démarquer du roman populaire en déclin et l’arrivée en force des Anglo-Saxons avec Le Masque qui ont permis la lente maturation de la série policière de Simenon. Mais il ne faudrait pas non plus limiter ces influences aux seuls maîtres du roman policier, français ou anglais : en créant Maigret, Georges Simenon a le projet d’accéder à la littérature légitimée. Avec le commissaire, le romancier a un « meneur de jeu » et une « armature » comme il le dit à maintes reprises : c’est une aide appréciable pour un apprenti romancier. Très vite, il va avoir l’ambition de se passer de ces « garde-fous » et va écrire des romans sans Maigret. Dans cette perspective, il convient d’évoquer le style et plusieurs noms d’écrivains peuvent être avancés, russes pour la plupart : il y a Dostoïevski, mais surtout Gogol parce que ce dernier « créait des personnages qui sont comme des gens de tous les jours » 3. Et à André Parinaud, il cite Tchekhov comme « second parrain » parce que, dit-il, le romancier russe « souffre de voir souffrir les hommes et voudrait réparer les destinées. Je disais un jour que je considérais Maigret comme un raccommodeur de destinées ». C’est un peu ma passion. Je vois des gens qui ne sont pas tout à fait à leur place. Je voudrais donner un coup de pouce qui les rende plus heureux. Cette sensation-là, vous l’avez en lisant Tchekhov » 4.

    Il est bien difficile, par conséquent, de trouver les œuvres ou les auteurs qui ont pu influencer le père de Maigret. En plaçant, comme nous l’avons fait, Gaston Leroux, Maurice Leblanc, Arthur Conan Doyle aux côtés de Gogol et de Tchekhov, on perçoit

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