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Temps noirs
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Livre électronique491 pages6 heures

Temps noirs

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À propos de ce livre électronique

Les mâchoires de la guerre se referment brutalement sur Santerre, qui doit faire face à trois armées effrayantes. Au couchant, Mornac brandit Galiv, l'arme invincible. A la MI-Nuit, Raidak a transmis le feu de sa haine à ses troupes. Mais surtout, au Levant, Egohan traverse la frontière du pays en ralliant à sa cause de surprenants alliés : d'abord Shau, puis Francoeur lui-même, prêt à admettre que son éclatant jumeau est l'unique Marqué-du-Destin. Dans un tourbillon de drames et d'émotions à vif, le sort des Princes de Santerre se joue irrémédiablement.
LangueFrançais
ÉditeurDe Mortagne
Date de sortie23 août 2011
ISBN9782896620920
Temps noirs

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    Aperçu du livre

    Temps noirs - Luc Saint-Hilaire

    Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

    Saint-Hilaire, Luc

    Les Princes de Santerre

    Sommaire : t. 4. Temps noirs.

    ISBN 978-2-89662-092-0 (v. 4)

    I. Titre. II. Titre : Temps noirs.

    PS8613.O79P74 2008

    C843’.6

    C2007-941415-X

    PS9613.O79P74 2008

    Édition

    Les Éditions de Mortagne

    Case postale 116

    Boucherville (Québec)

    J4B 5E6

    Distribution

    Tél. : 450 641-2387

    Téléc. : 450 655-6092

    Courriel : info@editionsdemortagne.com

    Aspects visuels

    Conception de l’auteur

    Illustration de la couverture : Carl Pelletier

    Dessins des cartes : François St-Hilaire

    Signature de la série et graphisme des cartes : Roger Camirand

    Conversion numérique

    Mathieu Giguère, www.studioC1C4.com

    Tous droits réservés

    Les Éditions de Mortagne

    © Ottawa 2010

    Dépôt légal

    Bibliothèque nationale du Canada

    Bibliothèque nationale du Québec

    Bibliothèque Nationale de France

    4e trimestre 2010

    ISBN : 978-2-89662-092-0

    1 2 3 4 5 — 10 — 14 13 12 11 10

    Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) et celle du gouvernement du Québec par l’entremise de la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) pour nos activités d’édition. Gouvernement du Québec — Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres — Gestion SODEC.

    Membre de l’Association nationale des éditeurs de livres (ANEL)

    Luc Saint-Hilaire

    Les Princes de Santerre

    Tome 4

    Temps noirs

    Du même auteur

    Les Histoires du Pays de Santerre

    L’Eldnade

    Tome 1 : Ardahel le Santerrian

    Tome 2 : Loruel l’Héritier

    Tome 3 : Eldwen la Désignée

    Tome 4 : Vorgrar l’Esprit Mauvais

    Les Princes de Santerre

    Tome 1 : Premier Mal

    Tome 2 : Rouge frères

    Tome 3 : Feux furieux

    Aussi

    L’image à nu — Publications de l’AQESAP

    PUB 101 pour gens d’affaires

    Éditions Transcontinental

    Comment faire des images qui vendent

    Éditions Transcontinental

    À mon monde, ici,

    compagnons d’hier et d’aujourd’hui,

    que je n’oublie jamais malgré parfois la distance et le temps,

    en toute amitié.

    Remerciements

    Je veux remercier tellement de gens que j’ai peur d’en oublier. Voici donc, de façon bien incomplète assurément, quelques personnes dont l’apport est si apprécié.

    D’abord, je tiens à exprimer ma reconnaissance à chaque lecteur qui me fait l’honneur de m’accompagner en Pays de Santerre. Je souhaite vous entraîner dans un voyage fantastique.

    Aussi, Hélène, mon épouse, qui facilite à sa manière mes incessants voyages en Monde d’Ici. Monique, ma grande sœur, qui assume le rôle ingrat de première lectrice et de critique. François, mon fils aîné, qui fait les dessins finaux de mes cartes, traçant patiemment et habilement arbres, montagnes et rivages du Monde d’Ici. Roger, confrère de pub et néanmoins ami, brillant concepteur visuel à qui je dois de voir mes brouillons devenir dignes d’être présentés aux lecteurs.

    Enfin, et très chaleureusement, l’équipe des Éditions de Mortagne que je salue en bloc (et « Y », dictionnaire en main), chacune et chacun m’étant si précieux pour leur enthousiasme et leur complicité.

    Amicalement,

    Luc

    … Dans ce monde que ses habitants nomment tout simplement le Monde d’Ici, je crus d’abord qu’il n’y régnait qu’une seule conscience. Celle qui dirigeait les pensées, les paroles et les actes des Races Anciennes, des Races Premières et du Moyen Peuple.

    Puis je constatai qu’un peuple était guidé autrement. Celui qui présidait à son épanouissement engendra une Pensée différente. Il indiqua une autre voie à ceux qu’il aimait. Il voulut qu’elle s’inscrive dans les esprits et les cœurs de tous les autres peuples qui vivent en ce Monde.

    Les Pensées s’affrontèrent.

    Les Races se tournèrent le dos.

    Les Peuples levèrent les armes.

    Les Familles se disloquèrent.

    Les Frères s’opposèrent.

    Heureusement, le Dieu de tous les Mondes de l’Univers ne demeura pas insensible. Dans leur liberté, il leur offrit des Guides pour retrouver sa Pensée Bienveillante…

    Gouand

    Présentation des cartes de Gouand

    Les cartes qui suivent ont été réalisées par Gouand afin d’aider le lecteur à se situer. Certains points doivent être mentionnés.

    Le Monde d’Ici : Le Monde d’Ici est traditionnellement représenté de la Terre Cahan à la Terre Abal, et des Terres Blanches aux Terres de Glace. Le continent du Lentremers occupe une place centrale puisque c’est de là que sont originaires toutes les Races. L’orientation se fait en référence au mouvement du soleil, soit le Levant, la Mi-Jour, le Couchant et la Mi-Nuit.

    Les Terres du Lentremers : Gouand a tracé des cartes illustrant différents moments de l’histoire du Lentremers. Cette carte correspond à l’époque suivant le blanc brasier déclenché par Mithris Sauragon.

    Le Pays de Santerre : Le plus puissant et le plus important des États du Couchant, le Pays de Santerre est en fait une confédération de quatre régions à la fois distinctes et interdépendantes. Cette carte date de l’époque du Roi Alahid.

    La Région des Baïhars et la Longue Rivière : Les combats qui impliquent les Princes de Santerre se déroulent particulièrement dans la Région des Baïhars, puis dans les environs du Temple Cult.

    Le Pont du Sault : L’affrontement décisif contre le Roi Mornac a lieu près du Pont du Sault en Région des Baïhars.

    Le Temple Cult : C’est dans les environs du Temple Cult, en Région des Culters, que se livrent les combats ultimes.

    Avant-propos

    Vouloir situer le Monde d’Ici s’avère à la fois facile et impossible. Gouand, le troubadour, le diseur et le chantre du Moyen Peuple, a rédigé moult récits qu’il assembla en des livres fort instructifs. Il eut accès à des cartes très précises qu’il recopia minutieusement, illustrant les régions connues des marins, depuis la Terre Abal jusqu’à la Terre Cahan. Ses documents permettent aussi de constater l’évolution du Lentremers, le plus important continent, ainsi que du Pays de Santerre où il élut domicile durant son séjour en Monde d’Ici. Donc, rien n’est plus simple que de situer les lieux qu’il connaissait alors qu’il entreprit de transcrire la tradition orale des Gens du Moyen Peuple. Toutefois, il s’avère utopique de situer Santerre par rapport à nous puisque Gouand ne donna aucun point de repère sur les Mondes d’Ailleurs, cela autant en ce qui concerne les endroits que les époques.

    Et Gouand lui-même, qui est-il vraiment ? Bien malin celui qui pourrait affirmer quoi que ce soit à son sujet. Il va et vient de par les Mondes de l’Univers, sage ou naïf, peut-être les deux à la fois, posant sur les gens et les événements un regard qui sait toujours s’émerveiller. C’est probablement, et même certainement, ce qui compte le plus. Qu’importe de savoir d’où il vient ou vers où il se dirige ? Diseur et jongleur, autant avec les objets qu’avec les mots ou les idées, il ne demande qu’à raconter ses histoires à ceux qui savent encore s’ouvrir au merveilleux et se laisser emporter dans ses mondes magiques conçus pour charmer. Nous savons toutefois, grâce à un petit récit autobiographique, que Gouand possède le don des langues et qu’il peut ainsi converser aussi bien avec les Races Premières qu’avec des membres de la Race Ancestrale ou des Basses Races. Gouand rencontra maintes gens au cours de voyages qui lui permirent d’apprendre en détail les événements survenus dans le Monde d’Ici. Son désir de mettre tous les faits par écrit, d’en séparer le véridique de la légende et d’en faire un document à transmettre par tous les Mondes lui ouvrit même le fameux Vérécit, méticuleusement tenu à jour en Augenterie. La profonde sincérité de Gouand apparaît si manifestement dans ses écrits qu’il n’y a aucune raison de douter que le troubadour ne se soit acquité de sa tâche avec le plus grand sérieux.

    Les Histoires du Pays de Santerre

    Parmi les écrits de Gouand figurent les Histoires du Pays de Santerre qui sont, et cela de son propre avis, ses plus belles chroniques. Bien qu’elles couvrent des événements ayant eu lieu par tout le Monde d’Ici, Gouand les intitula ainsi, car ce fut le Pays de Santerre qui devint sa patrie d’adoption durant son séjour en ce monde.

    En abordant ce récit, le lecteur doit se souvenir que le texte qu’il lit est une traduction de la langue du Moyen Peuple, fort différente de la nôtre. Les noms des gens ou les toponymes prennent donc une saveur nouvelle. Parfois, le lecteur trouvera des désignations qui traduisent le sens littéral, parfois ce sera le terme d’origine qui sera utilisé. Il faut se rappeler que tous les titres tels que Prince, Sage, Noble, Prétendant, Capitaine ou Gens s’utilisent indifféremment pour les hommes ou pour les femmes. La langue du Moyen Peuple ne fait aucune distinction entre le féminin et le masculin. Le lecteur devra prendre note, en lisant des mots comme Roi ou Reine, que cette différenciation est apparue seulement à la traduction.

    D’autre part, les désignations comportent des nuances parfois très subtiles selon les circonstances et les interlocuteurs. Par exemple, « mi-jour » au masculin et écrit en minuscules signifie un moment de la journée, le midi, tandis que « Mi-Jour » au féminin et écrit avec des majuscules désigne un point cardinal, le Sud. En outre, comme si la tâche de traduire les récits de Gouand n’était pas assez ardue, certains mots de la langue du Moyen Peuple n’ont aucun équivalent dans notre langage. Notons ainsi l’emploi du mot frœur qui s’applique seulement pour désigner les liens familiaux des membres de la Race Ancestrale, ceux-ci étant des hermaphrodites. Ce texte-ci diffère légèrement de celui de Gouand, mais malgré tout, que le lecteur soit assuré que l’essence des récits de ce troubadour enchanteur n’a été aucunement altérée.

    Enfin, précisons que l’œuvre de Gouand s’articule autour de deux récits majeurs dans l’histoire du Pays de Santerre. En premier lieu, le récit Les Princes de Santerre, dont l’action se situe à l’époque de la scission entre Vorgrar et ses frœurs de la Race Ancestrale. Gouand nous plonge alors à l’origine même du Mal en Monde d’Ici. Ensuite, cinquante générations plus tard, L’Eldnade apporte la conclusion du combat contre l’Esprit Mauvais.

    Il reste un dernier fait à souligner. Pour commencer ses histoires, Gouand utilise une formule bien connue de nous : Il était une fois… Si cette expression n’est pas reprise dans la traduction, c’est qu’il fallait amalgamer différents textes et inclure dans le récit certaines descriptions de pays ou de peuples que Gouand avait consignées ailleurs et que le lecteur devait connaître pour mieux suivre la présente chronique. Mais il aurait été dommage de passer ce détail sous silence, car il prouve que dans tous les Mondes de l’Univers, les récits merveilleux demeurent les mêmes, c’est-à-dire des moments privilégiés où l’esprit oublie la raison pour rêver à des histoires peut-être plus vraies que la réalité perçue par nos sens. Sait-on jamais…

    Alors donc : Il était une fois en Monde d’Ici…

    Épisodes précédents

    Tome 1 — Premier Mal

    Lors d’une rencontre des membres de la Race Ancestrale, le conflit qui se dessinait entre les six frœurs se transforme en affrontement direct. Désormais isolé, désigné par les siens du nom de Vorgrar, Celui-dont-la-Pensée-est-différente, Orvak Shen Komi se prétend malgré tout le seul vrai et le plus grand serviteur du dieu créateur Elhuï pour conduire le Monde d’Ici à sa plénitude. Afin de réaliser son projet, il jette son dévolu sur les jumeaux Mithris Egohan et Mithris Santhair. En effet, fils du Grand Seigneur Alisan et de son épouse originaire du Pays de Santerre, ces nouveaux-nés réunissent en eux le passé d’une Race Première et l’avenir du Moyen Peuple. Il grave sa marque personnelle dans leur chair en attendant qu’ils deviennent adultes pour, alors, former leur esprit afin qu’ils deviennent les maîtres d’un monde guidé par la perfection de sa Pensée.

    Si le dessein de Vorgrar réjouit leur père Mithris Sauragon, il répugne à leur mère qui a reçu autrefois l’enseignement du Roi Alahid et du Sage Delbon. Au fil des ans, ce sujet oppose les deux époux au point de transformer leur amour en haine et d’obliger Delbiam à fuir Saur-Almeth, la fabuleuse cité alisane. Elle entraîne avec elle Mithris Santhair, surnommé Francœur, dans une fuite qui semble désespérée. Heureusement, elle obtient l’aide de deux compagnons originaires du Pays de Santerre, le puissant Herkas et le ménestrel Jhibé, puis de Gouïk, un surprenant membre de la Race des Gouhachs.

    Convaincu par Mithris Sauragon de diriger les recherches pour capturer les fuyards, le Sorvak Raidak se lance à leurs trousses. Toutefois, celui-ci cache à ses compagnons un engagement pris en secret avec le Grand Seigneur Alisan. Lorsque Delbiam et ses compagnons parviennent au Haylabec, un pays de pêcheurs, ils sont faits prisonniers par une famille désireuse de toucher la récompense promise par Raidak. Shau, une jeune femme révoltée par la Tradition oppressante de son peuple, les aide à s’échapper et se joint à eux afin de se réfugier elle aussi en Pays de Santerre.

    Pendant ce temps, à Saur-Almeth, Egohan se rebelle contre son père et cherche un sens à sa destinée dans les fanges de la Cité. C’est à ce moment que l’esprit de Vorgrar s’insinue dans le sien et que débute une période de déchirements douloureux pour le jeune homme, qui épouse à son insu les ambitions de domination d’Orvak Shen Komi sur le Monde d’Ici. Pire encore, le membre de la Race Ancestrale se retrouve séquestré par ses frœurs en Terres Mortes, ce qui laisse Egohan sans repères, hanté par les ambitions dévorantes d’un Guide absent et la froideur d’un père obsédé par ses échecs.

    Plus Mithris Sauragon se plonge tout entier dans ses recherches, plus il laisse l’administration de la cité alisane entre les mains d’Egohan. Celui-ci se rend sur le Haut-Plateau afin de tirer au clair une situation qui inquiète les Nobles Alisans locaux. En effet, les Saymails du Roi Otrek œuvrent à creuser un col dans les montagnes avec l’aide des Géants. À cette occasion, le jeune Seigneur Alisan fait la rencontre de Guelnou avec qui il se lie rapidement d’une rare et surprenante amitié. Après avoir tenté de conclure une entente à son avantage avec les Géants, Egohan échappe de justesse à la colère d’Urgagon le Roux. Il s’apprête alors à revenir à Saur-Almeth, où son père s’isole de plus en plus dans sa colère contre Delbiam et dans son désespoir de parvenir enfin à compléter l’œuvre grandiose de sa famille.

    Ainsi, en cette fin d’été en Lentremers, les jumeaux Marqués-du-Destin vont officiellement quitter l’adolescence pour entrer dans l’âge adulte selon la tradition des Alisans. Or, tous deux cherchent leur voie dans des directions résolument opposées. Sur le Plateau des Alisans, l’esprit soumis à la Pensée de Vorgrar, Egohan se retrouve seul, mais déterminé à exercer le pouvoir promis par le membre déchu de la Race Ancestrale. De son côté, indécis mais lié par sa promesse d’écouter les enseignements d’Alahid et de Delbon, Francœur s’apprête à aborder en Pays de Santerre avec des compagnons formant un groupe disparate et bien étrange.

    Unis par le Rouge de leur Sang, Egohan et Francœur s’apprêtent à affronter le Noir et le Blanc de leur Pensée.

    Tome 2 — Rouge frères

    Dans leur repaire des Terres Mortes, les membres de la Race Ancestrale voient le conflit dégénérer et Vorgrar terrasser ses frœurs. Il les abandonne dans un état de profonde léthargie pour aller se réfugier à Saur-Almeth, désormais isolé des siens, leurs liens coupés, leur parfaite complémentarité devenue une opposition définitive. En se présentant à la cité alisane, Vorgrar découvre un Mithris Sauragon solitaire dans son palais, occupé à ruminer sa colère envers Delbiam. Toutefois, même si le Grand Seigneur Alisan semble incohérent, il comprend que le Guide n’est plus en position de force. C’est l’occasion pour ces deux redoutables personnalités de redéfinir leurs relations.

    Après leur rencontre avec les Nobles du Haut-Plateau alisan, Mithris Egohan et Guelnou prennent le chemin de Saur-Almeth. De passage dans un hameau isolé, des habitants blessent le jeune Saymail. Furieux, Egohan jure de revenir exercer sa vengeance. Ses propos sont si durs qu’ils inquiètent son ami. En Santerre, Francœur et ses compagnons abordent finalement le port de Belbaie. Ils s’installent à l’auberge des Mille coques où une mystérieuse femme en bleu attire Herkas dans les ruelles avoisinantes pour lui réclamer le paiement d’une dette dont le Frett ignore tout. Dès le lendemain, ils se rendent au Temple pour rencontrer le Roi Alahid et le Sage Delbon. Or, ceux-ci sont absents. De plus, la visite au Temple tourne mal, car Herkas est mis aux arrêts par les gardes royaux sous des accusations de meurtre et de désertion. À cette occasion, les compagnons rencontrent l’inconnue en bleu, Safyr, une femme qui affirme avoir été défigurée par Herkas.

    Inquiets par l’arrestation du Frett ainsi que par l’absence d’Alahid et de Delbon, les compagnons ne peuvent qu’attendre en espérant un rapide dénouement. C’est alors que les événements se précipitent. Le Sorvak Raidak aborde à Belbaie avec trois compagnons ainsi qu’avec Pakas, le frère de Shau. Lorsqu’ils approchent de l’auberge, le fanatique Haylabois veut éviter à tout prix que sa sœur échappe à sa sentence. Il se rue dans l’établissement, les Sorvaks à ses trousses. Dans la mêlée qui éclate, Pakas est frappé mortellement par Shau. La Sorvak Vardal, compagne de Raidak, est gravement blessée par Delbiam. Les intrus sont maîtrisés et reconduits à leur navire pour être expulsés de Belbaie. Rendu au large, Vardal succombe à sa blessure, provoquant la colère de Raidak, qui jure de revenir raser la ville. Il met alors le cap sur les Terres Mortes, où il sait trouver l’armée, pour préparer sa vengeance.

    Lorsque Guelnou et Egohan arrivent à proximité de Saur-Almeth, le Saymail décide de retourner vers les siens. Egohan se présente donc seul au Palais Mithris, où il réalise à quel point la situation s’est transformée. Rapidement, le jeune homme prend la mesure de son autorité face à Vorgrar, qui accepte ses écarts sans réagir, et face à Sauragon, qui donne l’impression de céder la place à son fils. Certain de gagner son frère Santhair à sa cause et impatient de récupérer les Fioles dérobées par sa mère, Egohan convainc son père de l’aider à se rendre rapidement en Santerre.

    Grâce à la science des Alisans et à la puissance de Vorgrar combinées, une matérialisation d’Egohan est projetée en Santerre. Les deux frères reprennent enfin contact. Or, la rencontre ne se déroule pas comme ils l’auraient souhaité. Rapidement, leurs divergences de vue les opposent au point de se transformer en affrontement. L’arrivée de Shau complique la situation, Egohan en profitant pour jouer avec les sentiments de la jeune Haylaboise.

    Dans leur repaire des Terres Mortes, Alios parvient à ramener ses frœurs à la vie. Enfin, Alahid et Delbon reviennent en Santerre et, immédiatement, le Roi tient le procès d’Herkas tandis que le Sage prend en main la formation de Francœur. Le Frett est libéré, mais il ignore que le témoignage déterminant de Safyr lui a été dicté par sa volonté de se venger elle-même. Maintenant qu’ils sont réunis, les compagnons cherchent à définir leur rôle face aux événements que les membres de la Race Ancestrale redoutent tant. Francœur crée alors les Princes de Santerre dont la raison d’être sera de protéger le Pays de la Pensée Mauvaise de Vorgrar, ainsi que des agissements d’Egohan.

    Entre-temps, le jeune Seigneur Alisan a décidé de revenir lui-même en Pays de Santerre pour récupérer les Fioles des Mithris. Il veut aussi régler définitivement la situation avec les membres de sa famille. Sur son chemin, il repasse par le hameau où Guelnou avait été attaqué. Il ordonne à ses hommes de le raser. Rendu au défilé, il constate avec effroi que les Géants sont en colère contre les Saymails. Inquiet quant au sort de son ami, il s’empresse d’atteindre la Grande Forêt. Il fait alors la rencontre de la Magomienne SpédomSildon qui le séduit par sa beauté et son caractère.

    Toujours dans la Grande Forêt, la troupe d’Egohan fait la surprenante rencontre des Princes de Santerre venus enquêter sur la situation des Saymails. Encore une fois, Egohan et Francœur s’affrontent, cette fois l’épée à la main. L’intervention de Guelnou permet d’éviter le pire et il oblige les deux groupes à quitter les lieux. Egohan reprend la route, satisfait d’avoir récupéré les Fioles alisanes et de savoir que les relations avec sa famille sont désormais très claires.

    À BaiNorde, capitale des Sormens, Raidak a pris contact avec le Roi Mornac qu’il a convaincu de s’attaquer au Pays de Santerre. Il dispose de l’hiver pour former une armée. Dès le printemps, il pourra mettre sa vengeance à exécution.

    Ainsi, en cet automne où les jumeaux Marqués-du-Destin deviennent officiellement des adultes, deux visions opposées de la perfection prennent forme autour d’eux. L’une est initiée par Vorgrar, l’autre par ses frœurs fidèles à leur mission originelle. Deux Pensées qui plongent le Monde d’Ici dans la brutale réalité d’un conflit impitoyable.

    La colère des géants

    1.

    — La Terre a souffert.

    Maître Sorvak tourna vers son frœur un visage ravagé, tout autant par une angoisse douloureuse que par une tristesse incommensurable. Il réalisa alors que Vorgrar reculait lentement, s’éloignant de la rambarde du navire sans quitter l’horizon des yeux. Manifestement, une sourde terreur l’oppressait. Orvak Shen Komi semblait redouter une indéfinissable menace qui allait surgir du lointain, se jeter sur lui et le broyer sur place. Ses pas courts et traînants finirent par le conduire à la cabine où il s’adossa contre la porte. À l’aveuglette, ses doigts cherchèrent en vain le loquet. Le noir jais de sa longue chevelure rendait encore plus inquiétante la pâleur de sa figure.

    — Viens m’ouvrir, supplia Vorgrar dans un murmure pathétique.

    Comme toutes les nuits depuis qu’il avait frappé Alahid, Vorgrar ne pouvait pas trouver le sommeil. Il était venu en Terres du Couchant en compagnie de Maître Sorvak dans l’espoir de convaincre leur frœur, le Roi de Santerre, de reformer l’unité de la Race Ancestrale. Pendant que Shar Mohos Varkur restait à bord de leur navire, la rencontre entre Orvak Shen Komi et Shan Tair Cahal avait été un désastre sanglant. Dépassés par la tournure des événements, plus indécis que jamais, les deux membres rebelles de la Race Ancestrale retournaient par la mer vers les Pays du Levant. Ou plutôt, ils fuyaient le lieu de ce crime dont ils étaient désormais complices.

    Bien avant l’aurore, Maître Sorvak était monté sur le pont, son endroit préféré, en espérant que les sons, les odeurs, le goût et la sensation de la mer lui apporteraient un peu de calme. Il contemplait le spectacle majestueusement serein de l’océan caressant les rives endormies du Lentremers lorsqu’il avait senti la présence de son frœur. Orvak Shen Komi était venu le rejoindre, lui aussi incapable de dormir. Perdus dans leurs pensées, ils fouillaient l’immensité de la nuit à la recherche d’un quelconque réconfort, d’un argument en mesure de chasser tout doute sur la justesse de leur confrontation avec leurs frœurs. La Pensée qui les animait désormais n’était-elle pas plus grande, plus parfaite, plus proche du Bien désiré par Elhuï que celle défendue par Alios, l’Ancêtre, Delbon et Alahid ?

    Ces tourments gardaient les deux frœurs éveillés. Soudain, un embrasement éclatant avait illuminé le ciel. En même temps, leur nature particulière de membres de la Race Ancestrale leur avait fait ressentir dans tout leur être la douleur et la colère de la Terre.

    — Ouvre cette porte, implora de nouveau Vorgrar.

    — Fais-le toi-même, répliqua nerveusement Maître Sorvak en s’éloignant à son tour du bastingage.

    Ils demeurèrent figés, muets et apeurés, à regarder en direction du Lentremers d’où était venue cette brève et intense lumière. Puis, après une attente interminable, un souffle passa. Plutôt une sorte d’onde chargée d’une clameur silencieuse, d’une détresse horrible, d’une souffrance à la fois fugace et éternelle. Le hurlement à l’unisson d’innombrables voix, celles de toutes ces vies anéanties brusquement sur le Plateau des Alisans. Vies de gens, d’animaux, d’insectes, de plantes… Toute la richesse et la diversité de l’existence réduites à un râle par la folie de l’unique peuple enfanté par Orvak Shen Komi.

    Le silence qui suivit pesa lourdement sur Vorgrar, l’écrasant sous le poids d’une accusation impitoyable. Il perdit pied et glissa le long de la porte en hoquetant. Il demeura prostré, incapable de réagir, jusqu’à ce que le soleil finisse enfin par se lever, presque brutalement, et que sa lumière inonde les lieux. Un trait doré aveugla Orvak Shen Komi qui dut tourner la tête.

    — Ce n’est pas ma faute, sanglota-t-il. C’est Mithris Sauragon le responsable ! Moi, je n’ai jamais agi autrement que pour mener le Monde d’Ici à sa perfection. Ce n’est pas moi. Pas moi… Non, pas moi…

    On aurait dit que les rayons du soleil avaient gagné en intensité, affirmant à Vorgrar qu’il ne pouvait se soustraire à la réalité. Alors, il voulut fuir la lumière du jour. Avec des gestes frénétiques, il parvint à ouvrir la porte de la cabine pour s’y engouffrer et se précipiter vers une trappe donnant accès à la cale. Il dévala l’échelle pour se réfugier finalement dans le coin le plus sombre, comme si l’obscurité le protégeait de la vérité. C’est à partir de ce moment qu’Orvak Shen Komi se mit à fuir le grand jour et les endroits exposés au regard du Monde d’Ici. Confiné dans ses propres ténèbres, hanté par son œuvre funeste, il se mit à chercher une lumière en lui-même. Comment sa Pensée pouvait-elle éclairer le Monde d’Ici, mieux encore que celle de ses frœurs ? Seule une réponse à cette insoluble question pouvait désormais justifier son existence.

    * * *

    Loin en Terres Mortes, dans le refuge secret des membres de la Race Ancestrale, la souffrance de la Terre réveilla brusquement Maître Alios. Lovée contre lui sous de chaudes fourrures, SpédomSildon fut aussi tirée de son sommeil. Depuis leur fuite de Saur-Almeth, ils avaient vécu trente-six jours d’excitation, d’émerveillement et de bonheur indescriptible. Hunil Ahos Nuhel s’était révélé sous sa véritable identité, grand, jeune d’allure, aux longs cheveux blonds tombant très bas dans le dos, le visage aux lignes délicates et des yeux d’un bleu très clair, brillants de sagesse et d’un formidable savoir. La jeune Magomienne, élancée, à la chevelure noire interminable, partageait cette même finesse des traits, la pâleur de peau ainsi que l’allure racée et volontaire. Surtout, le noir de son regard étincelait aux mêmes beautés, aux mêmes mystères, aux mêmes merveilles de la vie. Le couple s’enivrait de discussions philosophiques, d’échange de connaissances et de recherche des secrets de l’Univers.

    Depuis quelques jours, ils séjournaient dans cet endroit où jamais personne d’autre que les membres de la Race Ancestrale n’avait accès. La tour noire de trois étages était perdue au milieu de nulle part, trapue et sans grâce, percée d’aucune fenêtre, et son unique porte était fermée par une énergie qu’aucun membre des races mortelles ne pouvait défier. Par contre, à l’intérieur, l’aménagement des différentes pièces surprenait par son confort. L’ameublement en bois précieux finement travaillé ainsi que les riches tapisseries et les épais tapis créaient une atmosphère douillette. Le centre du toit était fait d’une matière translucide qui laissait pénétrer la lumière extérieure, de plus en plus abondante en cette période de l’année, dans la grande bibliothèque aux étagères débordant de parchemins soigneusement roulés et de livres aux fines couvertures de cuir. Pour la Magomienne assoiffée de savoir, ce lieu se révélait tout simplement paradisiaque.

    La plainte déchirante de la Terre les bouleversa. Sans même se parler, ils comprenaient de semblable manière à quel point l’harmonie du Monde d’Ici venait de souffrir.

    — Oh non, cela s’est finalement produit, se lamenta Alios.

    — Mithris Sauragon a perdu le contrôle des forces qu’il manipulait ? demanda SpédomSildon tout en connaissant la réponse.

    — Oui, et la Terre nous en tiendra rigueur éternellement, soupira le membre de la Race Ancestrale.

    Il n’y avait rien à ajouter. Maître Alios avait maintes fois exprimé ses craintes à la Magomienne. Un jour, prédisait-il, Sauragon ou un autre de la lignée Mithris meurtrirait profondément la Terre et celle-ci les jugerait responsables. Elle aurait alors raison parce que les Alisans auraient obéi à une logique inculquée par le plus puissant d’entre eux, Vorgrar, et parce que les membres de la Race Ancestrale seraient toujours solidaires dans leurs mérites comme dans leurs fautes.

    SpédomSildon chercha à consoler son amant. Avec douceur, elle le caressa du bout des doigts et de toute la voluptueuse chaleur de son corps allongé contre le sien. Alios se sentit à la fois tellement soulagé et si tourmenté. Comment pouvait-il s’abandonner à un tel bonheur alors que le malheur s’abattait sur le Monde d’Ici ? Chacun de ses instants d’euphorie avec la jeune Magomienne n’était-il pas une trahison envers sa tâche ancestrale ? Commettait-il une faute chaque fois que ses lèvres prenaient les siennes, que ses mains enveloppaient ses seins chauds et fermes, que son ventre glissait sur le sien, que ses jambes emprisonnaient les siennes, que son sexe pénétrait au cœur de son intimité ? Comment une félicité aussi lumineuse pouvait-elle contenir la moindre obscurité ? Est-ce que son bonheur personnel lui faisait oublier égoïstement celui du monde dont la Race Ancestrale devait assurer l’épanouissement ?

    Bouleversé par la souffrance de la Terre, accablé par ses interrogations, Hunil Ahos Nuhel tenta de faire face à la Magomienne, de la regarder dans les yeux. Elle était si belle, si intelligente, si radieuse, si désirable… Toute autre réalité devint secondaire et il l’enlaça avec passion, prisonnier volontaire de sa chair capiteuse et de son esprit assoiffé de connaissances.

    * * *

    Lorsque l’onde lugubre traversa le Pays de Santerre, Delbon se trouvait au chevet d’Alahid. Elle arracha une plainte à Shan Tair Cahal, le laissant haletant et encore plus blême. Son frœur Jein Dhar Thaar eut peur que la vie le quitte définitivement. Il s’empressa de saisir ses mains et de lui transmettre toute l’énergie dont il était capable. Pendant un long moment, rien d’autre ne compta que de survivre.

    Finalement, Alahid retrouva un souffle à peu près normal.

    — C’est notre échec, fit-il faiblement. Nous avons démérité de notre tâche…

    Un feu brûlant enflamma le regard de Delbon.

    — N’abdique pas devant Vorgrar, s’écria le Sage. C’est lui l’unique responsable et nous devons le contrer. Il faut le faire pour toutes les races et tous les peuples du Monde d’Ici. Ils sont notre raison de vivre, notre devoir, notre responsabilité. Nous existons pour eux.

    Alahid ferma doucement les yeux. Il ne se sentait pas la force de débattre avec son frœur ni de départager les torts de chacun. Toutefois, ce qu’il constatait chez Delbon l’effrayait. En plus de faire du combat contre Vorgrar une cause personnelle, il risquait de se laisser aveugler par

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