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Les oreilles en pointes
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Les oreilles en pointes
Livre électronique82 pages1 heure

Les oreilles en pointes

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À propos de ce livre électronique

Pour Raymond, à l'école, ça ne va pas très fort. Non seulement il n'arrive pas à résoudre les problèmes de maths, mais en plus, le temps qu'il efface le tableau noir pour recommencer, il a déjà oublié la question que lui posait Frousteil, l'instituteur. Frousteil n'est pas un homme patient, et souvent, à la fin de la journée, les oreilles de Raymond sont rouges et brûlantes. A la maison, ça ne va pas très fort non plus. C'est même pire. Le père de Raymond, qui est boucher, met parfois la même énergie à rosser son fils qu'à séparer des quartiers de bœuf. Le seul moment où Raymond se sent bien, c'est le jeudi matin, quand il fait la tournée avec le boulanger dans sa Deux-Chevaux fourgonnette. Le boulanger force un peu sur la bouteille, mais au moins, avec lui, on s'amuse. Un jour, Frousteil convoque les parents de Raymond. La vérité c'est qu'il a peur. Il est allé trop loin, quelques jours auparavant, et Raymond s'est évanoui en classe. Cet élève-là, il n'en veut plus. C'est là qu'on découvre qu'on peut soudoyer un instituteur avec un cochon, qu'il y a des parents qui aiment tellement leur fils qu'ils aimeraient le voir vivre ailleurs, et que le destin peut très bien vous faire miroiter une issue de secours pour mieux vous achever ensuite. La trilogie de Serge Perez: "Les Oreilles en pointe", "J'aime pas mourir" et "Comme des adieux".

LangueFrançais
ÉditeurPerez Serge
Date de sortie21 avr. 2018
ISBN9781370611096
Les oreilles en pointes
Auteur

Perez Serge

Serge Perez est un auteur de littérature française, ces livres sont traduits en plusieurs langues. Il a publié à l'École des loisirs et chez Actes-Sud.

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    Aperçu du livre

    Les oreilles en pointes - Perez Serge

    Chapitre 1

    – A lors ! Mon petit Raymond Lagousture, dans le parking de chez Mammouth nous avons trois emplacements quadrillés. Dans le premier nous comptons douze rangées de places et quatorze places par rangée, dans le second, six rangées de dix-huit places et dans le troisième, neuf rangées de treize places. Jusque-là, c’est bien clair, n’est-ce pas ?

    Avec la nuit que je venais de passer, c’était encore un peu embrouillé dans ma tête, et rien pouvait être clair. Alors, attaquer de bon matin le parking de chez Mammouth, c’était forcément un mauvais quart d’heure qui se pointait.

    – C’est bien clair, n’est-ce pas ?

    – Oui, Monsieur.

    – Alors si c’est bien clair, combien comptons-nous donc de places dans ce parking ? Je t’écoute, Raymond.

    Frousteil était tout près, là, penché sur moi, les mains croisées derrière le dos. Je sentais son souffle dans mon oreille. Ses grosses narines ressemblaient à des puits, aussi larges et aussi profondes. C’était peut-être pas le moment, mais je pensais vaguement que j’aurais pu y glisser au moins trois doigts dedans.

    – J’attends, on rêve ?

    Des petites bouffées de chaleur me montaient à la tête, parce que je savais pas combien on en comptait de places sur ce parking de chez Mammouth. Pourtant je cherchais et je me la creusais la cervelle, je l’imaginais ce parking, de toutes mes forces, mais des voitures, y en avait de partout, tout un paquet, et de toutes les couleurs, et tellement d’ailleurs que j’avais plus assez de doigts pour les compter. Et Frousteil il attendait, penché sur moi, les mains toujours croisées derrière le dos, il commençait même à taper du pied. Alors, à vue de nez, comme ça, je me risquai à dire qu’il devait y en avoir au moins mille, à une dizaine près, mais que bon, bon, j’en étais pas tout à fait sûr non plus, parce que ça faisait beaucoup quand même.

    Toute la classe éclata de rire. Au fond, ils gueulaient même comme des oies gavées pour bien qu’on les entende ; les règles tapaient contre les encriers, les pieds s’écrasaient sur le parquet, ça faisait de ces roulements, la foire, pareil, tout le carnaval, je savais plus comment me tenir, c’était bien le signe que j’avais dit une énorme connerie.

    – Donc, mon petit Raymond, il dit Frousteil en me tirant l’oreille, pour toi il y aurait plus de mille places sur ce parking, à une dizaine près bien sûr, ça dépend.

    L’oreille commençait à me faire mal, j’étais obligé de me mettre sur la pointe des pieds comme pour atteindre le ciel. Mais j’avais beau y aller, plus je m’élevais, plus il me tirait dessus. J’avais intérêt à trouver une solution, et la bonne par-dessus le marché.

    –  Neuf cents pile ? je dis.

    – Neuf cents pile maintenant ! Allons bon, voyez-vous ça. Et si je tire un peu plus fort, jusqu’à combien descendras-tu ? Hein, tiens, comme ceci par exemple.

    C’était pas neuf cents piles, pas plus que c’était mon jour de chance, parce que Frousteil faisait pas semblant, quand il vous tenait l’oreille il la lâchait plus.

    – Ça ne sert à rien de couiner, mon petit Raymond, les ânes ne couinent pas. Et que font d’ailleurs les ânes ? il demanda en se tournant vers la classe.

    Ça, j’étais tout content de le savoir, mon père me le disait assez souvent, et comme personne répondait et que j’en pouvais plus avec mon oreille, je dis que l’âne braillait.

    – Très bien, mon petit Raymond, tu vois, quand tu veux, l’âne brait.

    Il me lâcha enfin l’oreille et me demanda de prendre une craie. Mon oreille, elle devait être trois fois plus grosse que l’autre, je la sentais bien.

    – Bon ! il dit, mais revenons à nos moutons, voyons ça. Dessine-moi douze rangées bien propres dans le coin du tableau. Mais sais-tu au moins pourquoi, Raymond, dans le coin du tableau ?

    J’avais trouvé pour l’âne, c’était facile, mais alors là, ça sentait le piège et forcément, j’allais tomber en plein dedans. Avant de répondre n’importe quoi, je préférais regarder discrètement la classe pour voir si des fois quelqu’un me soufflerait pas la réponse ; il regardait tous ailleurs, mine de rien, ils attendaient que je raconte encore une connerie pour se fendre la gueule. Un fayot ne put s’empêcher de lever le bras.

    – Je t’écoute, il lui dit Frousteil.

    L’autre il se le fit pas répéter.

    – S’il commence le problème au milieu du tableau, il n’aura pas la place pour le finir.

    – Très bien, mais tu peux baisser ton bras maintenant, ça va aller.

    J’aurais pu chercher longtemps.

    – Tu comprends à présent pourquoi, Raymond?

    – Oui, Monsieur.

    – Alors puisque tu comprends pourquoi, dessine-moi au coin du tableau douze rangées, vas-y.

    Frousteil me demandait de dessiner, j’étais enfin sauvé. Je traçai avec la craie douze rangées bien nettes et bien propres dans le coin du tableau. C’était un jeu d’enfant, un vrai régal.

    – Bien, maintenant, tu divises chaque rangée en quatorze morceaux.

    Plutôt deux fois qu’une, et je dessinai quatorze morceaux dans chaque rangée. J’adorais ça, entendre la craie crisser contre le tableau, faire des figures, comme ça, des belles droites qui vous sortaient entre les doigts comme par enchantement et qui se répandaient dans un doux murmure sur le tableau noir. C’était pas dans la tête que ça se passait, ah ! ça non, le résultat était là, bien en face de moi, nickel, et Frousteil s’y trompait pas.

    – Très bien, Raymond, maintenant, dessine six autres rangées que tu diviseras en quatorze morceaux chacune.

    Et j’y allais gaiement, c’était bien comme ça que j’entendais les mathématiques.

    – Voilà, et pour finir, neuf autres rangées que tu diviseras en treize morceaux chacune.

    Je finissais les doigts dans le nez, et ma foi, j’étais assez fier du résultat, j’en oubliai mon oreille. J’avais en face de moi un superbe tableau, avec des rangées parfaites, bien blanches, des centaines de petits carreaux identiques au poil près. La classe était muette, elle en revenait pas. Je me tournai vers Frousteil en souriant.

    – Bon, maintenant, compte combien tu as de morceaux en tout. On t’attend, Raymond, prends ton temps.

    Je perdis mon sourire, le Frousteil s’était foutu de moi depuis le début. Les morceaux, ils avaient beau être

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