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Merci à Jules Ferry
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Livre électronique267 pages3 heures

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À propos de ce livre électronique

Si vous avez aimé la tendresse de Pagnol et la cocasserie de Marcel Aymé vous ne pourrez pas ne pas aimer l’attachant livre de Guy Biraud. C’est le plaisir de s’enfoncer voluptueusement dans les joies de l’enfance et de partager quelques heures de bonheur avec le lecteur. Vous y retrouverez les sortilèges d’un village des années 30, les enchantements d’un petit garçon qui grandit à l’affût des mystères du bocage vendéen peuplé de légende et de bêtes sauvages, la vie d’une bourgade avec ses artisans, l’école de Jules Ferry, l’église toute puissante, l’arrivée du modernisme. Village alors plus près du moyen âge que d’Internet. Les filtres d’amour des sorcières avec les secrets du grand et petit Albert où se mêlent la bave du crapaud aux sèves de la salamandre. Les premiers baisers volés, la découverte du premier sein roulant sous ses doigts. Vous le retrouverez à Paris avec l’arrivée des congés payés et sous l’occupant allemand. Son enfance est morte avec la guerre mais un monde nouveau s’éveille : l’âge d’homme et la réalisation de son rêve, la création de son musée de la communication dans une folie 18e : « Ouvrez le sur votre oreiller vous verrez se lever l’aurore. », A. de Musset Et comme Georges de Caunes vous direz : « J’ai eu douze ans pendant 2 heures ».
LangueFrançais
Date de sortie27 juil. 2012
ISBN9782312004303
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    Aperçu du livre

    Merci à Jules Ferry - Guy Biraud

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    Merci à Jules Ferry

    Guy Biraud

    Merci à Jules Ferry

    LES ÉDITIONS DU NET

    70, quai de Dion Bouton 92800 Puteaux

    Du même auteur

    Les radios Philips de collection, Éditions C.V.R.

    La restauration et la conservation des appareils scientifiques de collection, G. Biraud – J. Le Breton – R. Foster

    Français/Anglais, Éditions Biraud, 1987.

    Le guide du collectionneur T.S.F. – Radio – TV

    Volume I, 1 000 documents. Français anglais, G. Biraud – R. Foster, Éditions S.H.R., 1989.

    Volume II, 1 000 documents. Français anglais, G. Biraud – R. Foster, Éditions S.H.R., 1991.

    Volume III, 1 000 documents. Français anglais, G. Biraud – R. Foster, Éditions C.V.R., 2007.

    Écoute s’il pleut, G. Biraud, Éditions In-Octavo, 2004.

    Cuisinez Séduction, G. Biraud, Éditions A.C.C., 2007.

    Cuisinez Séduction, 2e éd. Revue et augmentée, G. Biraud, Éditions du Net, 2012.

    Nouveauté

    Merci à Jules Ferry, G. Biraud, les Éditions du Net, 2012.

    © Les Éditions du Net, 2012

    ISBN : 978-2-312-00430-3

    Ce livre a été jusqu’ici pour moi éphéméride et album de famille. Nourri d’enfance et de jeunesse. Les plaisirs du dimanche et le bonheur de vacances. Il évoque des tendresses et des maisons, des dialogues et des sourires, des usages et des visages qui ne vivent plus que dans mon souvenir. Il est le carnet de bal de la mémoire du cœur. Il est peuplé de villages et de visages, de courants affectifs et de sourires éteints… Il est pour moi témoin et carnet de route.

    J’y ai consigné mes aventures d’écolier et mes tendresses d’adolescent, les jeux de mon école, les rites de mon église, le ciboire et l’encrier, mes tentations et mes ostentations.

    Les pages consacrées au Musée de la Communication peuvent apparaître comme une pièce rapportée. Mais en définitive, elles éclairent la finalité de ma démarche.

    Préface

    Le coffret de santal scellé depuis tant d’années laisse en s’ouvrant s’échapper les odeurs et les poussières du passé. On y écoute des rumeurs de marelles ou de « quatre coins » échappées de la cour de récréation du Grand Meaulnes.

    La vertu majeure de cette évocation, c’est la présence mouvante et vivante de ces voix d’enfants qui chantent dans une mémoire d’homme.

    Guy Biraud nous propose une plongée nostalgique dans la Vendée des années trente au temps où – selon l’auteur – les villages étaient plus proches du Moyen Âge que d’Internet.

    C’est une « balade » en sabots qui vagabonde de l’école publique à l’école buissonnière, du tableau noir de la communale aux tableaux de chasse des maraudeurs, des taillis mystérieux de la grande forêt aux flûtes d’eau du ruisseau à loches.

    La complicité entre le conteur et le décor facilite la renaissance de ce paradis perdu qui débouche sur un monde foisonnant de nids de merles, de bouteilles à vairons, de rainettes et d’écureuils, de pies familières et de sangliers apprivoisés.

    En un temps où la production littéraire est vouée au modernisme ou à la politique, au fantastique ou au polar, ce pèlerinage aux sources nous verse un bain de fraîcheur.

    L’univers de Guy Biraud est aux antipodes de la rhétorique et du Nouveau roman. Il nous ramène par les sentiers et les rivières, aux varennes enchantées de La Fontaine, aux battues de Maurice Genevoix ou aux affûts de Rouget-le-Braconnier.

    C’est une peinture onirique avec le côté ingénu et drolatique des dessins d’enfant.

    J’ajoute que c’est un art révolu. Il n’y a plus guère d’enfants comme ceux que les mémoires de Guy Biraud colorent et magnifient.

    Les enfants d’aujourd’hui ont répudié le cerceau et la pigouille, les arcs et les flèches, les piboles{1} et les sacs de billes. Ils ont des mini-tracteurs téléguidés, des trains robotisés, des chaînes stéréo, des « portables » et des transistors.

    Ce monde ancien revit sous une plume alerte et colorée.

    L’auteur a un tel talent de restitution, qu’à sa lecture un univers émietté s’anime, respire et reprend ses couleurs. Comme si on exhumait de l’armoire aux souvenirs un « documentaire » qui aurait tourné en direct ses champs et ses contrechamps et qu’on en ressorte les bobines poussiéreuses pour une projection de famille.

    À la lecture de ces confidences enfantines, un demi-siècle s’abolit de notre mémoire et nous rentrons par magie dans le Bocage des années trente. Au-delà de la marelle et des pièges à fouines sont tendus les pièges de l’existence. L’ennui des offices religieux, les discordes familiales, la pauvreté mitoyenne de l’indigence…

    Le livre est nourri d’anecdotes savoureuses qui donnent la tonalité folklorique du village. Ses hauts lieux – l’église, l’école et le bistrot – sont rendus avec une verve de chansonnier conteur et une fidélité d’entomologiste. Les figures de proue de la famille – oncles, tantes, cousins – apparaissent telles qu’en elles-mêmes, truculentes, hautes en couleur, ancrées dans des habitudes d’un autre âge.

    Le recueil est fleuri d’une moisson de vocables tombés en désuétude. Terminologie paysanne, locutions ancestrales, fantaisies dialectales d’un passé dépassé.

    Au bout du « conte », on est gagné par la nostalgie de cette longue incursion dans un monde si proche et si lointain : l’enfance de village.

    On se retrouve de plain-pied dans ce village du Bocage où subsistent les figures des traditions et des coutumes qui ne subsistent plus que dans la mémoire des survivants. On ne regarde pas : on y est.

    On retrouve le sarrau et le cartable de l’écolier, les sabots et le capuchon du petit villageois qui nous invite à partager ses passions et ses rêves. Ses escalades et ses escapades.

    On bâille à la messe, on maraude en forêt, on épie le flotteur qui danse sur l’étang.

    Les hommes et les bêtes, les oiseaux et les gibiers retrouvent sous sa plume cette vie pittoresque qui anime la verve de Pergaud. De Goupil à Margot ou les scènes animalières d’un autre Vendéen, Benjamin Rabier.

    « La seule chose qu’on ne puisse pardonner à un livre c’est l’ennui », dit Musset. Et qui enchaîne :

    Ouvrez-le sous votre oreiller

    Vous verrez se lever l’aurore.

    La maison, les « souillardes », les celliers et les larmiers, les ustensiles hors d’usage, les rites saisonniers, métives ou battages, évoquent par instants les couleurs des missels des siècles disparus.

    Prenez votre mémoire par la main, remontez avec elle la grand-rue de Saint-Pierre, ses échoppes et ses vitrines, ses boulangeries au pain coché, ses modistes et ses bourreliers, vous plongerez dans un univers enchanté qui vous habite peut-être à votre insu, et vous découvrirez comment Guy Biraud cultive et fleurit les calices et les langages du monde ancien.

    Entrez avec lui à la grand-messe avant de retourner à l’auberge, suivez-le dans les sentiers, les halliers, dans la lumière zébrée des sous-bois ou sur les berges chantantes du ruisseau et vous retrouverez le charme du mot magique de Georges de Caunes :

    « J’ai eu douze ans pendant deux heures ».

    Jean Delannoy

    Avant-propos

    Nous ne gardons jamais que l’écume des choses.

    Paul Valéry.

    Une vie… vingt mille jours, vingt mille nuits. Une poussière dans le temps – et quelques millions de battements de cœur – me séparent de mon enfance.

    Ce n’est pas sans une autre chamade que j’ouvre ce reliquaire nostalgique qui marie le Temps perdu au Temps retrouvé. Mais la longueur et l’étendue de ces jours m’interdisent des perspectives de bilan ou d’éphéméride.

    Il s’est passé tant de choses, et tant de choses ont changé… Tant de regards, tant de sourires, tant de voix que je n’entendrai plus…

    En ouvrant cet album du proche et du lointain passé, je ne peux guère envisager une rigueur d’inventaire. Je ne peux l’éclairer qu’à la façon d’un kaléidoscope, ce jeu de miroirs alternés qui m’émerveillait dans mon enfance et dont les rayons présentent, dit Larousse, des « images symétriques et variées ».

    Ce choix me contraint d’escamoter les pages dissoutes dans les oubliettes de la mémoire.

    Je me soustrais aux astreintes du calendrier, et je braque mon projecteur sur les évènements qui ont marqué ma vie. Ce qui explique et justifie les privautés – et les primautés – de mon récit, ses sautes de temps et ses sautes de courant.

    « On ne peut pas tout dire », soupirait Simenon. On ne garde que les traits – et les extraits – qui permettent de reconstituer l’essentiel. Ce n’est pas moi qui ai biffé et gommé telle ou telle image de ma vie, c’est l’oubli qui est le régisseur de la mémoire.

    Tout bien pesé, j’ai serti dans ce récit l’essentiel d’une vie peuplée, comme tant d’autres, de travaux et de combats, de peines et de plaisirs, nourrie de sourires et de soupirs, de défis et de revanches.

    Ce carnet de route n’est pas régi par un souci de continuité rigoureuse mais par les lignes mélodiques et les lignes de force dont le raccordement montre que la vie vaut bien d’être vécue, comme chante le couplet de l’ancienne ritournelle.

    Ce livre est une confidence à bâtons rompus. Comment le définir ? Il participe du Mémorial, du carnet de bal, de l’album du souvenir, de l’éphéméride et du journal de bord. Il n’a pas d’autre vocation que d’apporter à mes enfants et petits-enfants et à mes contemporains l’histoire d’un homme du vingtième siècle marqué au départ par une hérédité villageoise et un atavisme artisanal.

    Une vie traversée d’élans, nourrie de rêves, confrontée à de dures réalités, mûrie au soleil de la diversité.

    Au crépuscule de cette vie et avant le terme du Voyage, je me suis efforcé de consigner les travaux et les jours, les rencontres et les visages, les évènements et les avènements, les accords et les dissonances, tout ce qui compose et anime la vie d’un français du vingtième siècle.

    J’ai travaillé, j’ai rêvé, j’ai lutté, j’ai buté, j’ai aussi combattu et j’ai exécré… En un mot j’ai vécu.

    Les saisons de ma première enfance se déroulent dans une vieille province encore engluée dans son histoire et ses légendes. Et mon âge d’homme se levait sur un avenir chargé de promesses et de menaces.

    Mon témoignage se situe entre ces deux pôles, les vestiges du proche passé, les prémices du proche futur.

    Faut-il revenir aux chimères de l’enfance, reprendre les chemins que nous avons connus fleuris et aujourd’hui promis aux rouilles de l’automne ?

    Où sont les jeunes filles que nous avons aimées ?

    Je gardais une image bucolique et idyllique d’une liane brune et flexible, un charme de princesse gitane et le feu du ciel dans ses yeux de nuit.

    Au banquet de la cinquantaine, les copains de l’école m’avaient installé au cœur de la fête. Et mes yeux d’enfant recherchaient machinalement Marinette, son teint de maure et ses tresses andalouses. J’ai fini par apercevoir une épaisse matrone assise au bout de la table. Énorme, mafflue, mamelue, le poitrail étalé sur l’assiette…

    Quelques poils blancs et frisés émergeaient de ce corsage de grand-mère négligée. Je n’osais plus la regarder. Elle était comme un miroir déformant des années heureuses.

    La vie est empirique. Elle est le fruit d’un long apprentissage. À l’opposé de la technocratie qui repose sur des principes livresques, pour moi la vie s’apprend « sur le tas ».

    Si nous regardons la carrière des hommes qui ont fait évoluer l’histoire du monde, de Galilée à Einstein en passant par Newton, on constate qu’elle est le fruit d’un travail expérimental et non d’une science scolastique.

    Ce qui se traduit par le dicton populaire : « C’est en forgeant qu’on devient forgeron. »

    Le peu que je sais des hommes, du travail, de la vie, je l’ai appris dans cette culture au quotidien.

    « L’histoire d’un homme, c’est celle de ses affrontements », disait le boxeur Georges Carpentier. On peut étendre ce précepte aux métiers d’homme, c’est par la confrontation avec les grands problèmes de l’existence, ses joutes, ses pièges, ses tentations, qu’un homme se forge une éthique et se fraye une voie.

    Quand je me tourne vers cette longue chaîne d’années, de saisons, d’étés révolus, et de printemps abolis, où se mêlent et se confondent tant de visages et de voyages, tant d’échanges et de rencontres, ma pensée va vers mes amis morts, ceux dont le sourire rayonne quelquefois à travers la neige noire des insomnies.

    Tant de sourires effacés, tant de voix à jamais éteintes et qui ne revivent plus que dans mes songeries mélancoliques.

    Le seul moyen d’exorciser les fantômes c’est de susciter leurs silhouettes, leurs rires, leurs confidences : « Tant que tu continues à vivre dans la mémoire d’un ami, tu ne seras pas complètement mort », dit le proverbe oriental.

    Non ce n’est pas un souci de justification qui me fait dresser mon bilan, mais la volonté d’inscrire les lignes mélodiques et les lignes de force de ma vie dans un testament mémorial que je dédie à ma femme.

    Au-delà de cette volonté patrimoniale, l’hommage du cœur à tous ceux qui m’ont escorté, aidé, aimé.

    Au terme de ma longue marche je ne sais pas si selon l’expression populaire mon verre est à moitié plein ou à moitié vide. Mais si je devais tirer en une phrase l’enseignement de ma longue expérience, je choisirais le précepte de Saint-Exupéry : « Le seul véritable luxe c’est celui des relations humaines. »

    Si j’avais été romancier – et critique d’art –, j’aurais aimé consacrer un livre à Georges Mathieu.

    Je me bornerai simplement à rendre un hommage éclatant à l’Homme et à l’Œuvre.

    L’Homme, parce qu’il est un seigneur du dix-huitième siècle et qu’il émane de lui – je n’aime pas le mot charisme, ça fait singe savant – un rayonnement généreux.

    L’Œuvre, parce qu’elle m’apparaît comme un sommet des arts plastiques au XXe siècle.

    J’étais allé voir son exposition au Palais de Chaillot et je connaissais ses critiques et son défi lancé aux grands industriels.

    Je lui ai écrit une requête modeste et mesurée, sans grand espoir…

    Sa réponse allait au-delà de mes espérances.

    Il a composé, illustré, enluminé le catalogue conçu pour le vingtième anniversaire de la création de notre entreprise.

    Pour le dessin de notre nouvelle usine, il est venu à Fontenay s’imprégner des besoins des ouvriers, des employés et dès lors a conçu une œuvre architecturale, bâtiments et jardins, connue du monde entier.

    J’avais le sentiment qu’il nous y apportait une autre dimension, une nouvelle philosophie, l’inverse de l’usine habituelle concentrationnaire, une usine en devenir vers l’extérieur.

    Je crois que la semaine la plus enrichissante de ma vie a été celle que j’ai passé à Mervent avec Frédéric Rossif et Georges Mathieu.

    Je le considère comme la figure de proue de l’art contemporain terminant ainsi la grande aventure de la peinture de chevalet.

    Après les surréalistes et l’abstraction

    Tout était dit.

    img1.jpg

    Paulette, l’amie des chats.

    Je n’oublierai jamais ce jour-là…

    Mardi 12 février.

    Je suis dans mon bureau, plongé dans un dossier. Ma plume court sur le papier. La sonnette rompt le silence feutré du bureau, tinte, résonne, s’obstine… Une voix dans l’interphone :

    – Monsieur, il y a une dame en face qui a un malaise, elle dit qu’elle habite ici.

    Je descends quatre à quatre le cœur en chamade. Et je vois Paulette accolée au mur, soutenue par deux passants. Je lis détresse et panique dans son regard chaviré. Ses doigts sont crispés sur deux baguettes de pain. Je lui parle, elle répond à peine, l’élocution est confuse et le verbe hésitant.

    Elle chancelle et s’écroule dès qu’on lui retire un appui, sa jambe droite ne la soutient plus. On la transporte avec des précautions d’infirmier sur le divan du salon. Un vocable tragique sonne dans ma tête comme un grelot : l’Attaque. Sa voix devient inaudible. Je recueille dans son souffle comme une dernière confidence :

    – Tu sais je ne t’ai jamais trompé…

    J’ai la glotte bloquée, les tempes battantes. J’aurais voulu pouvoir lui répondre : « Moi non plus… » Impossible de mentir en ces moments-là.

    Comment répondre à ce grand cri d’amour monté vers moi des profondeurs de son être. Ai-je mérité cette confidence haletante qui me bouleverse si fort que je ne peux retenir mes sanglots.

    La suite : un enchaînement d’images de cauchemar. Les pompiers, les stridences, la lumière mouvante du gyrophare dans la nuit d’hiver.

    Une nuit froide et stellaire où je sens affluer les prémices du printemps.

    Aux urgences, le temps se métamorphose en durée.

    Une durée qui n’en finit pas.

    Une heure, deux heures, je ne sais plus…

    Je suis venu m’asseoir à son chevet, mon cœur sautait dans ma poitrine comme une bête affolée. Paulette ne parle pas, mais je lis dans ses grands yeux qu’elle m’entend et me comprend.

    – Donne-moi la main.

    Et j’ai pris cette main dans la mienne – Ses mains que tant de fois mes paumes réchauffèrent –, et cette main est moite, molle, inerte. Mais ce simple geste abolit l’espace et le temps et je sens, en pressant ses doigts, courir dans mon sang la manne de tendresse et de désir des premiers âges de notre couple. Et que remontent en moi les saisons et

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