À propos de ce livre électronique
Ulcide, jeune garçon Mythéthymien, survit dans un orphelinat maudit d’un coin reculé des Contrées du Sel. Accompagné de sa seule amie Jalia, tous deux y sont maltraités depuis toujours. Un vent de révolte les anime toutefois, les poussant finalement à se libérer de leur sinistre destinée… et à sacrifier beaucoup d’eux-mêmes... Car si les pouvoirs que le garçon se découvre s’avèrent précieux et les aident à se sortir de leur statut de proie, ils les conduisent inéluctablement à celui de bourreau. Aussi, meurtre et vengeance ne tardent-ils pas à noircir leur existence. Or, ce n’est pourtant pas tout ce que le destin leur réserve… Et si l’adolescent n’a d’autre désir que de se sortir de la misère, sa compagne le sent appelé à un autre dessein. Du reste, le continent tout entier bouillonne de changements. Des Bestiars errent désormais au hasard des terres, Men-Ecrys le Guide s’échine dans une volonté de pacification des Clos et le Brisenef Durbrisant, vil pirate écumant les Eaux Périlleuses, s’emploie, à force de raids et d’abordages, à déstabiliser tout ce que compte de royaumes le monde d’Inaré. Ainsi, des conflits majeurs sont-ils tout près d’embraser les terres et de consumer les cœurs tandis que, sans vraiment s’en rendre compte, beaucoup, déjà, ont inconsciemment choisi leur camp.
Plongez dans le premier tome d'une saga fantastique captivante, et découvrez les aventures périlleuses d'Ulcide et Jalia dans un univers surprenant.
EXTRAIT
À son étonnement, rien d’autre qu’un silence persistant ne suivit ses paroles. Son nouvel allié semblait décidément bien difficile à tranquilliser. Le Haut Gardien et le Comptefer échangèrent un regard fugitif, visiblement mal à l’aise, mais ne pipèrent mot, sachant parfaitement où se trouvait leur place.
— Nous ne cesserons de grandir sous votre conduite, ajouta-t-il alors. Hostilarpents et Finelandes sont réputés fuir les concessions tant ils les considèrent comme une preuve de faiblesse mais ils envisagent, j'en suis certain, l’intérêt crucial de se joindre aux Saintes Nations. Ils savent pertinemment qu’il y va de leur survie. Et chaque faraud, chaque frileux, finira par comprendre qu'il peut s'unir aux autres, sans rien renier de sa nature, de ses terres ou de ses traditions.
— J'ai pourtant été très clair dans mes intentions, éclata soudainement le Guide, dévoré de frustration. Je leur ai assuré que rien de ce qu'ils possèdent déjà ne leur serait retiré. Or, aucun de mes mots n’a eu grâce à leurs yeux et nous connaissons leur intraitable réponse… C’est à croire que leur orgueil est leur plus redoutable ennemi, bien plus que nous-mêmes ou que les Bestiars.
— Je ne sais que trop bien les ravages qu’occasionne une fierté à la taille disproportionnée ! s’exclama à son tour le Discret.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Luc Sérao vit actuellement en Bretagne où il exerce le métier d’imprimeur depuis peu. Sudiste d’origine, il passe son enfance et son adolescence non loin de Marseille, dans les campagnes et les banlieues alentour. Passionné de mythes, d’histoire et d’archéologie depuis son jeune âge, c’est tout naturellement que les récits Heroic Fantasy trouvent depuis toujours chez lui un écho particulièrement important. Plus qu’une surprise, la rédaction de son premier roman est un besoin, une révélation, bien qu’elle survienne tardivement. Elle ne le lâche plus depuis…
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Avis sur Les aurores sombres
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Aperçu du livre
Les aurores sombres - Luc Sérao
LES TUEURS DE DIEUX
LES AURORES
SOMBRES
LUC SERAO
MYTHETHYME
img1.jpgMYTHETHYME NORD
img2.jpgMYTHETHYME CENTRE
img3.jpgMYTHETHYME SUD
img4.jpgPROLOGUE
Le ciel semblait d'encre, la nuit était profonde. Rien dans ces campagnes ne semblait esquisser un mouvement. De ces terres engoncées dans une neige collante ne bruissait qu'un inquiétant silence ponctué çà et là de craquements… De grognements aussi, tels d’inquiétantes mises en garde sur la dangerosité des lieux. Pourtant, le monde semblait suspendu et seules quelques mottes encore fraîches tombées de branches trop lourdes, rompaient l’immobilité glaciale de la nuée d’arbres figés par un givre compact. Aussi, ce paysage blanc, si inhabituel dans ces contrées, n'avait de cesse de surprendre le petit groupe dispersé dans la clairière.
— Soyez-prête à pousser, Maîtresse. Mobilisez toutes vos forces ! Car les prochaines contractions seront plus douloureuses encore, je le crains.
La domestique dévouée humidifia une bande de tissu déchiré... Lan-Alphé ou peut-être Pal-Géane, Dryane n'avait jamais réellement accordé d'importance au personnel de sa maison, ignorant même jusqu'à leur nom et leur nombre. Elle en accordait bien plus à chacune de ses tenues qu'elle prenait grand soin d'imaginer et de faire confectionner sur mesure. D'ailleurs, la jeune Domina éprouvait une vive colère de voir le lambeau que tenait sa servante : un volant de dentelle finement ouvragé, autrefois délicat ornement de sa légère chemise de lin, celle-là même qu'elle revêtait pour dormir chaque soir. Le pliant grossièrement en quatre, la vieille femme l'avait enseveli sous la neige et s'apprêtait à l'appliquer sur le front de la future mère dont les yeux roulaient de colère. Le regard noir, la jeune Méritante était toute prête à exploser, n'ayant pas vraiment idée de son état. Mais ce linge frais posé soigneusement sur sa peau, avant même qu'elle puisse émettre une objection, lui fit soudainement prendre conscience de la fièvre qui la consumait. Instantanément, un froid intense lui saisit le crâne, séchant en partie ses cheveux noirs défaits, emmêlés, et poisseux d'une sueur collante qu'elle s'ignorait pouvoir produire. Le gel la terrassait alors, la ramenant subitement à la réalité de sa condition et à une faiblesse extrême qui lui soulevait le cœur. Or, pour l'heure, les déferlantes de contractions n’attendaient pas et, alors qu'elle sentait une profonde vague de douleur se préparer à la submerger, la jeune femme renonça à ses pathétiques considérations esthétiques, pensées d'un autre temps lui semblait-il, d'une autre vie... celles peuplées des seules préoccupations d'une naïve écervelée de grande famille...bien trop gâtée et bien trop protégée... Mais cette nuit, prisonnière de ses souffrances et du froid, personne n'était capable de lui venir en aide. Il lui fallait combattre pour la première fois de sa vie. Il lui fallait lutter pour obtenir ce qu’elle souhaitait, elle qui n’avait d’autre habitude que de désirer pour obtenir. Et, défi suprême, elle devait faire face seule. Aussi, fût-ce sans espérer avoir le choix qu’elle s’y était résolue dès le début du travail et qu’encore maintenant elle raffermissait son cœur et se préparait à résister du mieux qu'elle pouvait à cette lourde fatalité qui s'abattait sur elle. San Dryane, Prima de la gens Sevriar, ferait honneur à son rang, s’était-elle martelée. Néanmoins, au bord de ce gouffre de douleurs croissant inexorablement, un sentiment de panique domina d'abord, sentiment mêlé à une souffrance encore jamais éprouvée lors de sa jeune existence. Puis, un cri aigu, ou plutôt, une profonde plainte échappée de sa gorge, stridente et d'une longueur à lui briser la voix. Le déchirement était extrême, si violent et ravageur qu’elle crut plusieurs fois s'éteindre là, sur sa litière. Et tandis que son regard ne reflétait plus que désolation, le tiraillement se prolongeait encore, ravageant son bas-ventre, contractant son torse tout entier et bloquant même sa respiration jusqu'à l'étouffer. Elle suffoqua, d’ailleurs, pendant une éternité lui sembla-t-elle, avant, qu’à force de souffles désordonnés, elle ne manque de perdre connaissance sous l’implacable étreinte. Cependant, comme une largesse que lui accordait sa mauvaise fortune, la terrible oppression se relâcha enfin, épargnant finalement son corps brisé et la laissant haletante à demi consciente. Tous l’observaient alors avec inquiétude tandis qu’elle peinait à revenir de la lisière séparant les morts des vivants et qu’elle percevait, crescendo, comme une sourde rumeur, un piaillement soutenu de gens paniqués. Provenant d'un lointain inhabituel, des voix lui intimaient de pousser encore, de tenir son effort, de bander chaque muscle de son corps meurtri et de ne rien céder à son brasier intérieur. Il lui sembla reconnaître les exhortations de sa domestique, celles de son père aussi, orageuses et volontaires. Puis, voilées par une trop forte émotion, elle devina plus qu’elle ne perçut celles de sa mère, étouffées et vacillantes. Dryane se sentait néanmoins perdue, comme réfugiée profondément en elle-même, ne sachant plus vraiment qui était présent, où elle se trouvait ni ce qu'elle y faisait. Errant dans une demi-conscience, elle se savait lentement s'éloigner de son monde, cet univers désormais empli d'une seule et unique sensation de douleur infinie et, s’avouant vaincue, l’acceptait pleinement. Un claquement cinglant la surprit pourtant, lui brûlant les joues et la tirant brutalement de sa torpeur naissante.
— Tu ne partiras pas avant moi, je te l'interdis ! Bats-toi ma fille car abandonner n'est ni une option, ni dans l'ordre des choses !
Tandis que les mots de Men-Aution, son père, Secundus de la gens Sevriar, cheminait dans son esprit, Dryane rouvrit douloureusement les yeux. Ses orbites se consumaient sous ses paupières, la sueur suintait de chacun de ses pores. Épuisée et en partie engourdie par le froid, elle restait là, le regard perdu dans le vague, errant en proie à d'amers remords. Si l'espace d'un instant, elle s'était doutée que recevoir son premier homme lui occasionnerait quelques mois plus tard de si cruels tourments...si seulement... La jeune noble se concentra un instant sur ses souvenirs, recherchant partout le réconfort dont elle avait crucialement besoin. Et une première image s'imposa subitement à elle. Elle revoyait ce guerrier...son guerrier ! Cet homme si singulier, Chu-Thyomé, qui était originaire de la cité côtière de Proséspéra et qui la charma dès leur première rencontre. Se délectant, malgré elle, de tout ce que sa mémoire avait préservé, elle revécut la naissance de son idylle, l'emballement de ses sentiments et la conclusion inévitable de leur attirance mutuelle. Puis, se réfugiant un peu plus encore dans cet inestimable bien-être, elle redétailla précisément le physique de son irrésistible amant. Un homme d'âge mûr que l'expérience de la vie avait magnifié en tout point. Elle resongeait avec délice à chacun de ses muscles harmonieusement dessinés, témoignant d'une force et d'une vitalité hors du commun, l'une et l'autre forgée au feu des exercices militaires répétés. D'un teint hâlé, sa peau dorée par le soleil généreux de ses terres natales était tout à la fois tiède, douce et épicée de subtils parfums. Et que dire de sa taille ? Si ce n'est la qualifier d'imposante. Tout comme sa corpulence, d'ailleurs, digne d'Helios lui-même tel qu'on le représentait dans tous les temples de la cité. Un crâne rasé, à la mode de la capitale de son Clos, et un nez droit, légèrement épaté, au-dessous duquel s'inscrivait une délicieuse bouche étroite garnie de dents d'une blancheur étonnante, entretenaient la superbe esthétique du personnage. Aussi, l'impression donnée par son visage ovale et d'une séduisante symétrie ne pouvait laisser indifférent tant le regard magnétique qu'il abritait attestait de la détermination qui y régnait en maître au travers du vert émeraude de ses yeux. Et elle ne s’y trompait pas : elle savait que cet homme lui avait tourné la tête, lui paraissant tout simplement exceptionnel. Or, passée cette pâmoison devant la montagne d'attraits de son amant, l’esprit de Dryane continua son errance et s'avisa bientôt de souvenirs moins réjouissants. Notamment celui lié à la lettre que l’irrésistible combattant lui avait confié avant de prétexter une absence de quelques jours pour une obscure raison de relève de garnison au nord de Katasti, relève dont il ne revint jamais. La Méritante avait pourtant gardé sa missive, se souvenant encore de leur discussion tendue à ce sujet, la dernière qu'elle n'ait jamais eu avec le Prosespérien.
— Conserve-la précieusement, lui avait-il intimé sur un ton de commandement. Et si, par malheur, il m'arrivait un sort funeste, remets-la à notre enfant une fois celui-ci capable de la lire !
Dryane avait d'abord marqué un temps d'arrêt, prise de court par une telle impudence. Puis, loin de supporter un tel manque de respect à son noble lignage, sa froide réponse n’avait pas tardé à geler l'atmosphère.
— Ne me prendrais-tu pas pour un de tes sous-fifres, un de ceux qui n'ont de cesse que d'acquiescer à chacun de tes ordres ? avait-elle alors éclaté. Comprends bien quelle est ta misérable condition ! Prends bien conscience, qu'à mes côtés, tu jouis d'une existence meilleure que celle à laquelle tu es en droit de prétendre. Tu n'es digne ni de ma naissance ni de mon rang. Que crois-tu pouvoir espérer sous prétexte d'avoir été le premier homme à partager ma couche ? avait-elle enfin durement asséné, plus cassante que du verre.
Un étouffant silence s'était alors fait, chacun toisant froidement l'autre. Puis, face à l’obstination dédaigneuse de l'imposant soldat, la jeune femme s'était décidée à reprendre plus crânement encore :
— Et bien, je répondrai à cette question pour toi : tu n'as le droit d'espérer que ce que je choisirai de te laisser miroiter. Rien de plus. Et si je reconnais que tu m'as agréablement diverti lors de ces vingt derniers jours, je ne compte pas pour autant t'attribuer une importance à laquelle il t'est interdit d'aspirer. C’est que je ne désire rien t'offrir que ta naissance ne soit capable d'assumer, avait-elle terminé avec ironie.
Mais l’impassibilité de son amant avait perduré, ce dernier se contentant de la fixer froidement. Aussi s’était-elle finalement décidée à lui demander sans détour, sceptique et ricanante, un regard amusé sur son propre ventre :
— Peux-tu maintenant m’expliquer d'où te vient la certitude d'avoir un enfant de moi ? Qu'en sais-tu réellement ? Quels sont les indices que toi seul as la présomption d'avoir décelé ?
D’une attitude plus hautaine que jamais, l’homme avait encore tardé un moment avant de rompre son pesant silence :
— Ton incrédulité m'indiffère, avait-il d’abord asséné. Quant aux indices... sache que je vois des signes que tu ne saurais appréhender ni même comprendre.
Un nouveau mur s’érigea entre les deux amants… Toutefois, la volonté de Thyomé était restée moins encline à la dispute qu’au désir de convaincre sa compagne et c’est luttant contre lui-même qu’il avait poursuivi son propos, se reprenant subitement avec plus de douceur :
— Il est vrai que je ne suis pas de ta nature mais tu te leurres grandement quant à nos véritables différences...
Surprenant une seconde fois sa noble amante, l'homme s'adressait maintenant à son cœur et non plus à sa raison. Son attitude en était totalement changée :
— Je te demande de garder cette missive à l'abri de tout regard indiscret. Je t'en conjure même ! Laisse-la hors de toute atteinte et réserve-la uniquement à l'enfant qui grandit déjà en ton sein... Je t'en prie très solennellement.
Fortement déstabilisée par le brusque revirement d'attitude de Thyomé, plein d'une sérénité et d'une force de persuasion qu'elle ne lui connaissait pas, Dryane, inexplicablement, avait finalement cédé un pouce de terrain, touchée comme il l'espérait. Néanmoins, tentant de se donner une contenance, elle se revoyait lui répondre sans se départir d'un ton de plaisanterie dans la voix :
— J'imagine que c'est une prière à laquelle je peux accéder sans me compromettre.
Et la tension, à ce moment précis, était retombée comme un soufflet. Dryane s'était sentie se radoucir, à la merci d'une nouvelle bouffée d'amour envers ce Prosespérien qui la fascinait plus que quiconque. Lui-même avait relâché ses muscles sans s'en apercevoir. Soulagé, sans nul doute. Pourtant, la possibilité de devenir mère semblait à la jeune femme toujours insensée à cet instant. Quel manque de discernement, se reprochait-elle aujourd'hui ! Si seulement elle y avait cru... Mais voilà, pleine d'assurance et de fausses certitudes, la jeune noble n'avait eu foi qu'en elle et c'est dans le seul but d'apaiser son insensé amant qu'elle lui avait finalement déclaré :
— Je t'en fais la promesse, Thyomé. Je respecterai ta volonté. Toutefois, tu as sérieusement piqué ma curiosité et je serai prête à beaucoup d'efforts pour connaître le contenu de ton écrit, avait-elle insinué, un sourire désormais coquin aux lèvres. Me diras-tu de quoi il retourne, même succinctement, si jamais je t'offre ce que tu aimes tant me prendre ?
C’est à ce moment précis que la Méritante, bien trop sûre de ses charmes, avait franchi une limite que le Prosespérien ne toléra pas. Et son ton grivois n’avait rien changé à l'affaire. Elle le réalisait maintenant… bien tard… sans en avoir eu conscience à l'époque. Voilà pourquoi la réponse de Thyomé la cueillit durement sans même qu'elle puisse y répondre.
— Ni la blancheur de tes dents, ni tes indécentes propositions ne pourront changer quoi que ce soit, lui avait-il rétorqué, inflexible. Je ne peux croire que tu aies l'esprit si prompt à occulter les obligations qui te paraissent désagréables à tenir. Ne viens-tu pas d'engager ta parole à l'instant ? Du reste, rien n'est à révéler à qui ne peut comprendre. Cet écrit ne signifierait rien à tes yeux si jamais tu avais l'occasion de le lire. Pas plus qu'il ne parlerait au reste du monde. Il ne fera sens qu’auprès de son destinataire...notre enfant ! N'oublie en aucun cas le serment que tu viens de prêter et honore-le ! Car il nous engage, tous deux, et déterminera nos destinées ainsi que cette vie à naître, avait alors terminé le solide guerrier en pointant de son index le bas-ventre de Dryane.
Discours bien trop péremptoire ! Bien trop autoritaire ! Avait pensé la jeune noble qui, battue froid, avait du mal à décider comment elle se devait de réagir à de telles provocations.
— Mais il me faut désormais partir là où d'autres desseins m'appellent, avait déjà repris Thyomé, un brin grandiloquent.
La jeune Domina se souvenait parfaitement de la bruyante quinte de toux qui avait martelé ses derniers propos, une toux que la jeune femme s'étonnait, encore aujourd'hui, qu'il ne puisse contenir. Un filet de sang avait suivi, discret, s'échappant à peine des lèvres de l’homme qu’elle découvrait dans un état de faiblesse. Il était touché, profondément touché…Atteint par un mal dont elle ignorait tout et qui la questionnait depuis. Et c'est toujours avec cette même émotion, singulière et complexe tant elle mêlait l'amour et la détestation, que la voluptueuse Méritante se remémorait son inquiétude, dévisageant l'homme de guerre dans une muette frustration. Encore aujourd'hui sentait-elle tout le paradoxe de son sentiment, enflammée de colère et pourtant compatissante. Or, le soldat avait semblé en avoir cure et, sans ne rien montrer qui l'affecte, avait affiché une désinvolture marquée. Ainsi avait-il simplement fait volte-face, puis, tranquillement, avait ramassé son impeccable paquetage posé sur la console d'ébène du luxueux hall d'entrée avant de disparaître rapidement dans un silence surnaturel... Dryane voyait encore devant elle la porte s'ouvrir et se refermer sans même que ses gonds aient le loisir de grincer. Elle sentait, de nouveau, toute l’étendue de sa détresse d’alors, étrange écho de celle qui l’accablait cette nuit. Car le caractère implacable de la situation actuelle lui revenait douloureusement en tête…Il ne lâchait pas son corps non plus, torturant sans répit son ventre meurtri. Plus largement, son être tout entier était sous emprise. Comment aurait-elle pu imaginer une telle désolation ? Sa haute éducation n'avait jamais fait mention de ce que le désir et le plaisir éphémères peuvent engendrer. Voilà le résultat de ses actes inconsidérés enrageait-elle ! Aucune prise possible sur les choix passés. Ce qui dépendait d'elle en cet instant était tristement réduit...éminemment simple. Vivre, se délivrer, donner la vie, donner la mort, mourir elle-même... Sans nul doute une partie de tout cela. Mais au-delà de ces tristes perspectives, avant même qu’elle n’en arrive à l’épilogue de cette épreuve, ce qui lui importait plus encore à ce moment précis, c'était un répit, une trêve. Ne plus endurer ces tourments, cette guerre que son propre corps lui imposait. Elle désirait juste voir la fin de cette nuit de cauchemar...et en sortir vivante. Aussi, pleinement focalisée sur ce but, elle présageait la prochaine vague toute proche. Elle la devinait là, tapie en elle et prête à l'acculer bientôt. L'attendant alors, comme le condamné à mort attend la hache du bourreau, elle n'en demeurait pas moins habitée par la révolte, résolue à affronter cette nouvelle montée de douleurs sans se laisser abattre. Et aussi sûr que la marée remonte au galop après être longtemps restée à l'étal, la jeune noble ressentit une nouvelle lame de fond tandis que déjà, dans son entre-jambes, un corps étranger semblait tout proche de se libérer. Ce énième déchirement semblait plus dévastateur encore, plus insoutenable que les précédents. Elle résista cependant. Préparée à subir un tel choc, elle fit rageusement face, tout emplie d'une volonté forgée à l'épreuve de dures souffrances.
— Lan-Alphé ! Assiste-la ! Contrains-la à tenir ! N'oublie pas que ton existence dépend de la sienne !
De telles menaces ne ressemblaient vraiment pas aux habituels propos que Dryane était coutumière d'entendre dans la bouche de Bon-Amienda, sa mère. Celle-ci avait explosé et s'était tue aussi subitement, visiblement en proie à une angoisse au moins aussi grande que celle que ressentait sa fille. Surprise quelques instants, la servante n’eut pourtant pas le loisir d’en prendre ombrage ni de craindre réellement pour sa vie. Toute à l’urgence du moment, elle s'employait pleinement à soutenir sa jeune maîtresse qui, rongée par la douleur qui menaçait de les terrasser, elle et son enfant, combattait en livrant toutes ses forces. La domestique resta donc de marbre, serrant la main de la parturiente dans un geste de bienveillance. Et un simple coup d’œil à la Domina Mère avait suffi pour comprendre qu'une terreur profonde la tenaillait, elle, une haute fonctionnaire de la cité de Katasti. Lan-Alphé en souriait intérieurement, songeant que c’est au pied des plus imposants obstacles que l’on jugeait de la réelle valeur d’une personne. Aussi, Bon-Amienda lui paraissait surévaluée…de toute évidence. De son époux, a contrario, elle nota une attitude toute inverse. Men-Aution s'acharnait à cacher son épouvante alors que sa fille, malgré son admirable courage, semblait à bout de forces, exténuée d'endurer tant de tourments. Mais son angoisse restait palpable, une discrète sueur faisant luire son front plissé d’inquiétude. En cet instant, une réalité frappa alors la conscience de la modeste servante. Seule elle, insignifiante créature au service d'une famille de Méritants, semblait n’afficher aucune crainte quand des personnes, prétendument de nature supérieure, tremblaient de peur telles des feuilles mortes en pleine bourrasque. Et ce constat l’étonnait au moins autant qu’il ne l’enorgueillissait. Un sourire irrépressible dérida un moment son visage. Néanmoins, l’heure n’était pas à l’autosatisfaction et, bien que fière de sa force d'âme, la vieille domestique devait s’efforcer de rester calme et sereine. Aussi revint-elle précipitamment à Dryane en détaillant et évaluant avec précision le critique de sa situation. Le mal empirait et elle devait bien l’admettre, les possibilités de sortir sa maîtresse de ce péril étaient réduites. Forcée de réagir, pourtant, elle élimina méthodiquement une à une les possibilités et il ne lui apparut bientôt plus qu’une solution, une solution viable mais douloureuse...une de celle dont le prix à payer pouvait être ultime. Car attendre équivalait à mourir et elle ne pouvait risquer cela. Ainsi, sa prise de décision ne tarda pas et, s'étonnant elle-même, elle annonça sans tergiverser :
— L'enfant est tout proche mais ne peut emprunter jusqu'au bout cette voie. Il vous déchirera mortellement si on ne lui prépare pas la sortie.
Puis, sans autre préambule, elle saisit une trousse de cuir craquelé dont la couleur avait passé depuis de nombreuses années. Dryane n'avait jusque-là pas remarqué cet objet posé à même la neige, au côté de sa servante. Lan-Alphé ouvrit ces trois pans, observa quelques secondes ses divers instruments pour choisir, en fin de compte, une lame courbe longue d'une dizaine de centimètres. Un outil traditionnel de Passeur pensa Bon-Amienda, intriguée que sa domestique ait pu en obtenir un exemplaire. N'était-ce pas un objet réservé aux accoucheurs Sempercontes, objet sacré, comme leur propriétaire, et dévolu à cet usage exclusif ? Lan-Alphé sentit peser sur elle le regard accusateur de sa Domina. Elle savait avec certitude qu'il lui faudrait fournir plus tard des explications détaillées sur les circonstances de l'acquisition de ce dakre. Dans l'instant néanmoins, elle avait à répondre à une urgence plus pressante. La vie de sa maîtresse ne pouvait souffrir de délai. Mais son embarras n'échappa pas à la jeune Méritante qui remarqua tristement son assurance vaciller. Une expression d'inquiétude envahissait désormais le regard de la vieille femme, y creusant un peu plus profondément les sillons de son visage buriné. La crainte et le doute avaient soudainement fait surface. Cependant, elle ne s'interrompait pas, saisissant avec hésitation l'instrument de sa main droite et le rapprochant de ses yeux pour en vérifier le tranchant. Spectatrice impuissante, Dryane, elle, se tourmenta plus encore, son moral chutant violemment tandis qu’elle comprenait ce que sa tremblante domestique comptait lui faire subir. Comment pouvait-elle espérer survivre en laissant cette femme incertaine et non qualifiée lui élargir une partie de son intimité ? Comment continuer à croire qu’elle survivrait à cette maudite nuit ? D'incontrôlables sursauts la prirent alors et ses yeux s’emplirent de larmes avant de se fermer de terreur. Comme si ne rien voir de ce qu'elle allait subir lui épargnerait quelques souffrances...
— Quelle jeune naïve ! se fustigeait-elle.
Cependant, Lan-Alphé s'était immobilisée un instant...étonnamment...le dakre en main. Car si décider de l'action à entreprendre avait été limpide aux yeux de la courageuse servante, celle-ci tremblait désormais au moment d'agir, rongée par la crainte de manquer de maîtrise. Elle semblait avoir vieilli de vingt ans en l'espace de quelques battements de cœur. Pourtant, le temps manquait. Elle le savait. Tous attendaient qu'elle agisse promptement...qu'elle accomplisse un miracle en réalité... et le poids de leurs espérances conjuguées l’accablait…Néanmoins, tous attendraient encore car il lui fallait prendre une dernière disposition. Reposant alors, à la stupeur générale, calmement sa lame courbe à terre, elle prit un instant pour sortir de sa trousse un petit objet de métal qu'elle frotta contre le tranchant d'une pierre trouvée là en grattant la neige. Les étincelles ne tardèrent pas à fuser tant le briquet était efficace. Approchant alors un fragment sec d'amadou, des flammèches apparurent bien vite. La domestique, forte de sa longue expérience et d'une dextérité sans pareille, savait exactement ce qu'elle faisait. Plaçant avec précaution ses braises au centre d'un foyer improvisé, celui qu'elle avait préparé plus tôt à l'aide de brindilles, feuilles et petits branchages, de plus grandes flammes surgirent et un petit feu se propagea.
— Voilà qui n'était pas de trop ! songeait-elle furtivement.
Néanmoins, malgré son succès et sa rapidité d'exécution, Lan-Alphé était une nouvelle fois rattrapée par les doutes. Aider à délivrer une femme sur le point d'accoucher était interdit au commun des mortels. L'Héliarkhie, religion en place dans le Clos de l'Ancestral Domaine, y veillait scrupuleusement. Quant à utiliser un dakre, cela relevait du sacré, un véritable rituel initiatique dépendant du seul ressort des Passeurs. Tous ici en étaient pleinement conscients. Tous, ici, savaient que quiconque bafouait leurs prérogatives le payait chèrement... Pas un, cependant, ne s'élevait pour stopper l'accoucheuse improvisée. Cette dernière sentait clairement le paradoxe et dévisageait maintenant les parents de la jeune Domina, guettant une dernière fois un signe qui pourrait la faire renoncer. Mais aucun ne vint. Dans leur regard où se mêlaient peur et colère, chacun l'exhortait silencieusement à agir. Aussi, interprétant leur mutisme comme un accord tacite, la vielle servante raffermit son âme et chassa ses dernières craintes, désormais résolue à ne plus rien laisser paraître. Elle ressaisit alors le dakre avec détermination. La survie de sa maîtresse ne dépendait plus que d'elle, plus que de sa faculté à garder la tête froide et à inciser précisément. Elle présenta donc l'instrument au feu...précautionneusement. Renforcé par la lueur des flammes, son regard étincelait d'une
