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Jacques Prévert: Les mots à la bouche
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Jacques Prévert: Les mots à la bouche
Livre électronique154 pages2 heures

Jacques Prévert: Les mots à la bouche

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À propos de ce livre électronique

Les facettes méconnues de Jacques Prévert.

Le nom de Jacques Prévert évoque des poèmes récités devant le tableau noir, des chansons immortalisées par Yves Montand ou Juliette Gréco, un certain cinéma en noir et blanc… Pourtant ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses facettes de l’homme. Né avec le XXe siècle, il est de tous ses mouvements artistiques, sans jamais s’y laisser enfermer. Il est aussi de tous les mouvements sociaux : lui qui a pu observer dès l’enfance l’injustice et la brutalité des rapports entre les forts et les faibles ne manquera pas une occasion de les dénoncer en participant à l’effervescence artistique et politique des années folles. Artiste complet à l’imagination toujours en mouvement, ses créations touchent au cinéma, où il formera un duo légendaire avec Marcel Carné, au théâtre, avec des pièces militantes au plus près de l’actualité, mais aussi aux collages et au dessin animé. Écrivain et poète, son œuvre foisonnante s’étend des pamphlets aux livres pour enfants ; elle est toujours animée, en prose comme en vers, du souffle de la poésie et de la liberté.

Plongez dans la biographie de l'illustre Jacques Prévert et découvrez, au-delà du poète, l'homme, ses idéaux et son oeuvre foisonnante.

EXTRAIT

Comme à son habitude, Jacques Prévert offre une œuvre poétique, forte, où l’amour et la liberté sont les deux thèmes essentiels. Anne-Marie Déa s’oppose frontalement au diable pour protéger son amour.
Dès sa sortie, la fin du film où le couple est figé pour l’éternité par le diable a été perçue comme un appel à la résistance. En effet, le diable incarne Hitler, qui ne peut tuer la voix de l’amour, car les cœurs continuent de battre. C’est le tribut de Prévert contre l’Allemagne nazie.
Outre ses dialogues, l’autre force du film est la présence merveilleuse d’Arletty dans le rôle de Dominique, personnage androgyne, ingrat, voire antipathique. Il y a aussi celle de Jules Berry dans le rôle du diable qui intervient dans la seconde partie du film. Comme l’a dit Marcel Carné, tourner avec Jules Berry a été une épreuve de force. À la différence du Jour se lève où il connaît son texte par cœur, Jules Berry est épuisé, car il tourne deux autres films à la fois, l’un le matin, l’autre le soir et la nuit. Il ne connaît pas son texte et pour tenir le coup avale une bouteille de champagne. Ainsi la scène finale a-t-elle dû être retournée plus d’une vingtaine de fois.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Jacques Prévert, un nom qui nous ramène de suite sur les bancs de l’école. Aussitôt, j’entends les jeux de mots (" De deux choses lune l’autre c’est le soleil "), les calembours ou les énumérations. Mais le poète est un artiste complet jouant avec les mots et les images. Daniel Chocron nous parle de la jeunesse de Prévert, de sa vie, de ses écrits, de ses dialogues au cinéma, de ses textes chantés par les plus grands chansonniers d’après-guerre, de ses textes pour enfants et de ses contributions à la peinture et aux collages. - Sur la route de Jostein

À PROPOS DE L'AUTEUR

Historien du cinéma, Daniel Chocron participe à la fondation et à la rédaction de la revue Films. Depuis 2002, il participe à la programmation d'évènements artistiques et d'animations culturelles. Connu pour ses conférences sur l'histoire du cinéma à destination des chercheurs, il en anime également pour la jeunesse. Il invite alors le public à interagir avec des diapositives et des extraits de film. Daniel Chocron aime partager son savoir. C'est pourquoi il écrit des livres, en littérature générale et à destination du jeune public.
LangueFrançais
ÉditeurJasmin
Date de sortie6 juil. 2018
ISBN9782352844594
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    Aperçu du livre

    Jacques Prévert - Daniel Chocron

    2012

    1

    L’enfance – L’adolescence

    Enfant sous la Troisième,

    j’habitais au quatrième une maison du dix-neuvième

    Jacques Prévert

    À l’aube du XXe siècle, Neuilly-sur-Seine est surnommée la perle de la banlieue ouest. Elle tient autant de Paris que de la province. Des immeubles cossus haussmanniens, de beaux quartiers côtoient des logements populaires où vivent des cochers, des chauffeurs de maître et leurs familles, ainsi que des employés et ouvriers travaillant dans les petites usines de la cité.

    Dans cette commune de 35 000 habitants, l’on trouve également en ce temps-là, rue Grenier, une grande ferme très active. C’est la campagne près de Paris, qui ne disparaît qu’après la Première Guerre mondiale.

    Dans cette charmante commune, vivent André Louis Marie Prévert, né en 1870, et Marie Clémence Catusse , née en 1878, connue sous le prénom de Suzanne qu’elle s’est choisi. La jeune femme a suivi des études fort pénibles chez les religieuses – la punition en cas de désobéissance était de garder dans la bouche une queue d’artichaut, afin de ressentir la dureté et l’amertume de la vie. Ils se sont mariés le 16 avril 1896 à Paris et demeurent dans un quartier bourgeois de Neuilly.

    Les parents d’André, et surtout son père, Auguste, s’étaient opposés à ce mariage avec une Auvergnate de Paris, sous prétexte qu’elle aidait sa mère à confectionner des sacs pour les marchands des Halles. Auguste Prévert est un bourgeois breton venu s’installer à Paris comme libraire. Il est bonapartiste, catholique pratiquant et a des principes rigides.

    Enfant, André a été mis en pension au petit séminaire d’Ancenis. Auguste n’est pas hostile à une éducation ferme, voire, si besoin est, à l’usage de la force. Pendant tout son séjour au petit séminaire, André subit les mauvais traitements infligés par les éducateurs religieux.

    Mais ce temps est lointain. Aujourd’hui, André Prévert est un bel homme, avec une barbe noire du plus bel effet, il se promène avec des costumes élégants, au choix avec un melon, un canotier de paille ou une casquette de cycliste. Il affectionne tout particulièrement les courses cyclistes, et a même participé à certaines d’entre elles. Passionné de spectacle et de théâtre, il a renoncé au métier de comédien pour écrire des critiques théâtrales dans de modestes revues. Fin 1895, il a obtenu un certain succès en publiant dans Le Plébiscite, journal bonapartiste, un roman-feuilleton historique, Diane de Malestreck.

    Il connaît par ailleurs le grand peintre Henri de Toulouse-Lautrec et l’échotier à la mode Jean Lorrain, avec lesquels il apprécie de boire de l’absinthe dans les cafés.

    Pour nourrir sa famille et payer le loyer, il travaille comme employé dans une compagnie d’assurances, La Providence, sur les grands boulevards.

    En 1898, André et Suzanne ont un premier enfant, un garçon prénommé Jean. Le 4 février 1900 à 19 h 00 naît un deuxième garçon, Jacques André Marie, à leur domicile du 19, rue de Chartres.

    Cette première année du nouveau siècle voit également la naissance de personnalités qui seront proches de Jacques : le poète Robert Desnos, le peintre Yves Tanguy, le directeur de la Série noire Marcel Duhamel. Un mois après la naissance de Jacques, un certain Henri Jeanson vient au monde. Avec Jacques Prévert, il sera l’un des grands scénaristes dialoguistes du cinéma français.

    1900, c’est aussi la première venue à Paris du peintre espagnol Pablo Picasso, alors âgé de dix-neuf ans.

    Voici comment Jacques Prévert évoque sa naissance : « Dans les grandes eaux de ma mère, je suis né en hiver, un soir de février. Au printemps, entre mes parents, il y eut un feu d’artifice et ils m’ont versé le sang dans le corps. »

    En déclarant son fils à la mairie André Prévert s’est désigné lui-même comme un « homme de lettres ».

    Jacques est un petit garçon heureux, il tient cette gaieté de sa mère, Suzanne : « Comme toutes les plus belles filles du monde ma mère avait aussi les plus beaux yeux et d’un bleu tellement bleu et tellement souriant. Des fois elle rougissait ou plutôt devenait toute rose, et elle était comme les reines qu’on peint sur les tableaux et aujourd’hui, je la vois nettement, comme dans un film, avec son bouquet de violettes au corsage, un oiseau sur le chapeau, une voilette modelant son visage et son sourire toujours nouveau. » Il sent que ses parents s’aiment, malgré les difficultés financières, la faiblesse d’André pour l’alcool, ses fréquentations politiques « nationalistes » et son penchant anti-dreyfusard.

    Suzanne assure l’équilibre du foyer. Elle est et reste pour Jacques une héroïne, elle est belle, douce, toujours prise de fous rires, toujours prête à pardonner les incartades et les retards à répétition de son époux.

    Face à ce père cyclothymique, instable et dénué de sérieux, une grande complicité se crée entre la mère et le fils cadet. « Elle me savait », écrit-il. Le petit Jacques passe beaucoup de temps avec le chat du foyer surnommé Loubet, du nom du président de la République de l’époque. Toute sa vie, Jacques Prévert sera proche des animaux et les aimera.

    En ce temps de la Belle Époque, il y a toujours une fête ou une manifestation populaire quelque part. Le petit Jacques aime la fête à Neu-Neu, aller au cirque, à Luna Park, cet immense parc d’attractions de la porte Maillot où la femme à barbe côtoie les chevaux de bois des manèges.

    Jacques aime aussi la musique des rues, avec ces musiciens qui chantent tout en tournant la manivelle de leur « boîte magique ». Son père André l’amène dans les coulisses des théâtres avant le début du spectacle. Il découvre avec émerveillement des pièces comme Le Bossu, de Paul Féval, vu au grand théâtre forain. Sans doute est-ce lors de ces spectacles que Jacques Prévert a découvert sa vocation.

    Il est également marqué par les affiches du musée d’anatomie Dupuytren, qui l’impressionnent. Il se promène dans les parcs et les jardins, comme celui du jardin d’acclimatation, proche de chez lui. S’il aime surtout les serres et leurs odeurs de forêt vierge, il est triste de voir les fauves et autres animaux parqués derrière les grilles, où ils sont forcément malheureux.

    Suzanne promène chaque jour son petit Jacques au bois de Boulogne et le matin, comme un rituel, elle lui apprend à lire à l’aide de contes et histoires pour enfants.

    Ses premières lectures sont les Contes de Grimm, La Belle et la Bête, L’Oiseau bleu, La Belle au bois dormant, Le Spectre de la mort rouge ; il apprécie aussi les bandes dessinées, les récits pour enfants du Petit Journal illustré comme Texas Jack ou Sitting Bull, sans oublier Les Trois Mousquetaires et les aventures de Sherlock Holmes.

    En ces premières années, Jacques Prévert est distant vis-à-vis de son frère aîné, Jean : « Je l’aimais parce que c’était mon frère, on mangeait des gaufres, on buvait du coco, mais on ne riait jamais des mêmes choses, ou jamais en même temps. Mais il était très beau, et il était sérieux et allait déjà à l’école… »

    Le dimanche, André, Suzanne et leurs deux fils rendent visite aux grands-parents paternels, rue Monge. Chez son grand-père à la morale inflexible, il n’est pas question de s’amuser. Auguste, surnommé « le sévère » emmène le petit Jacques à la messe où il s’ennuie beaucoup mais prend son mal en patience, car à la sortie, son grand-père lui achète un bon gâteau. Cela vaut bien une messe !

    Jacques Prévert n’aimera jamais l’Église ni les prêtres qui représentent tout ce qu’il déteste : le pouvoir autoritaire, le passéisme, le conformisme ; il dira plus tard : « On me taxe parfois d’anticléricalisme, ce qui ne veut rien dire. Les gens qui s’appellent des cléricaux sont des anti tout, ils sont contre tout ce qui est agréable dans le monde. » Il dénonce « les fruits des superstitions ».

    Bientôt les Prévert quittent la rue de Chartres pour la rue Louis-Philippe, dans la même ville. La famille sympathise avec ses voisins, les Toucas-Massillon, qui élèvent un petit neveu inscrit à l’état civil sous le nom de Louis Aragon. Les deux enfants jouent ensemble sans se douter qu’un jour ils seront tous deux d’ardents défenseurs de la littérature et de la langue françaises.

    Le 26 mai 1906, une grande joie entre dans la maison des Prévert où a lieu la naissance du troisième garçon de la famille, Pierre. Voici comment Jacques en parlait : « C’est en 1906 que je vis mon petit frère Pierre pour la première fois. Bien que je doive souvent le voir par la suite, cette première entrevue me frappa beaucoup. Il me fit, pour ainsi dire, une forte impression. » Mais ce bonheur est atténué par la perte de l’emploi d’André Prévert à La Providence. Il faut penser à faire des restrictions sur le train de vie et déménager pour un appartement moins cher. La famille trouve un petit rez-de-chaussée, toujours à Neuilly, rue Jacques Dulud. Même si le logement est plus petit et assez sombre, il a l’avantage d’être situé près du bois de Boulogne. La situation devient de plus en plus délicate et Suzanne Prévert est obligée de faire les courses à crédit. Jacques ne se plaint pas des repas frugaux, il est heureux, entouré d’amour et n’est pas très sensible à la précarité de la situation, même si les huissiers sont à la porte. Un jour, André Prévert annonce à sa petite famille qu’il a trouvé un emploi à Toulon ; ils partent donc pour cette ville et arrivent dans un hôtel situé en face de la gare, après une escale à Marseille. Ils espèrent en une vie meilleure.

    Malgré la bonne humeur de Jacques qui embellit toujours les choses, la situation se détériore. André Prévert n’a pas trouvé l’emploi promis. Un soir, il se promène avec son petit Jacques le long du port de Toulon. Très déprimé, il est sur le point de se suicider. Jacques reste calme et parvient à raisonner son père.

    Après l’échec de l’expérience toulonnaise, la famille Prévert revient s’installer à Paris. Un bref passage dans un hôtel près de la gare de Lyon, puis elle s’installe au 7, rue de Vaugirard, dans un petit appartement. Face aux difficultés de son fils, Auguste Prévert décide enfin de l’aider et lui propose un travail à l’Office central des œuvres de bienfaisance de Paris, dont il est le président. André devra aller voir les pauvres de la capitale pour savoir s’ils méritent qu’on leur vienne en aide.

    Le 1er février 1907, Jacques Prévert entre enfin à l’école, avec beaucoup de retard. À cette époque, les enfants n’avaient pas classe le jeudi. Il en profite pour accompagner son père dans ses tournées.

    De ces visites avec son père va naître une profonde empathie envers les pauvres, les marginaux, les laissés pour compte. Il découvre, malgré la misère et les privations, les qualités humaines basées sur la solidarité et la générosité des êtres les plus démunis. Il se rend compte également que les quartiers les plus pauvres ont les plus jolis noms de rues : rue aux Ours, rue du Chat qui pêche ou rue des Fillettes. Comme il le dit, « C’étaient sûrement les pauvres qui les avaient trouvés, ces noms, pour embellir les choses. »

    Le petit Jacques découvre la dureté, la violence de l’existence. Heureusement il peut se réfugier dans l’imaginaire, la lecture, les promenades et bientôt le cinématographe.

    Jacques Prévert découvre le cinéma au début des années 1907-1908. C’est encore dans le cinéma premier ou primitif. Alice Guy, première réalisatrice de l’histoire du cinéma, laisse sa place à Louis Feuillade, réalisateur de la série Fantômas, pour diriger la production de la compagnie Gaumont ;

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