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Un chien enragé
Un chien enragé
Un chien enragé
Livre électronique175 pages2 heures

Un chien enragé

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À propos de ce livre électronique

Une fiancée perd sa bague, un homme le contrôle de son bateau, une baby-sitter à l'air rangé a une autre vie, des enfants viennent hanter une mère et sa nouvelle famille, un type se fait détrousser par un couple en Amérique latine, un chien enragé pourrit le dimanche d'un vétérinaire et un campus dégénère...
Recueil de nouvelles où le drame n'est jamais loin du rire.
L'auteur, grande voyageuse par ses fonctions internationales dans des maisons de luxe, a vécu à New-York et Paris.

LangueFrançais
Date de sortie26 mai 2013
ISBN9781301821037
Un chien enragé
Auteur

Madeleine Ruh

Shorts stories writer. Born in Paris. Live in San Francisco.Auteur de nouvelles.Grande voyageuse. A vécu à New York et Paris, vit actuellement à San Francisco

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    Aperçu du livre

    Un chien enragé - Madeleine Ruh

    L’homme, surpris, regarda à deux fois à travers le pare-brise de sa vieille Renault Cinq marron. Il était garé dans la contre-allée de l’avenue Charles de Gaulle à Neuilly-sur-Seine. L’horloge indiquait neuf heures trente. On était le 8 septembre 1990. Au dessus de l’essuie glace, comme posée à dessein, une bague scintillait. Il sortit, la prit délicatement entre ses doigts. Il n’y connaissait rien en joaillerie, mais l’objet finement ouvragé le séduisait. Il regarda autour de lui, se sentant vaguement coupable. Puis il mit la bague dans sa poche intérieure de veston et fit démarrer la voiture. Il décida qu’il donnerait la bague à sa mère, qui avait subi un cambriolage ; elle avait perdu ainsi tous ses bijoux de famille ce qui la faisait souvent se lamenter. Elle n’avait plus beaucoup de joie depuis la mort de son mari. Il lui offrirait. Il faudrait qu’il fasse élargir l’anneau. Sa mère avait les doigts gonflés, elle ne pourrait pas l’enfiler sinon. Il sifflota gaiement et alluma la radio, la journée commençait bien.

    Sophie sortit des toilettes, puis rentra à nouveau avec précipitation dans l’espace, pinçant le nez malgré, l’odeur du parfum chimique l’indisposait. Elle venait de réaliser l’absence de la bague à son doigt après s’être lavée les mains. D’habitude, elle posait l’objet sur le rebord du lavabo pour éviter de l’abimer avec le savon. Son coeur accéléra. Elle essaya de se remémorer le début de cette journée. Sortie du métro à neuf heures, café à la cafétéria avec les autres stagiaires, elles formaient un petit groupe de cinq au marketing, dans la célèbre maison de cosmétiques. Elle n’avait pas sa bague, elle avait joint les mains et ne se souvenait pas de la sensation de l’avoir au doigt. Elle crut se souvenir soudain. Elle avait du la perdre entre la sortie du Métro Sablon et le bureau. Elle avait la sensation du bijou glissant le long de son doigt, elle l’avait bougée à cause de la poignée de sa mallette en cuir noir qui appuyait sur son doigt. Au même moment, elle avait entendu des klaxons, leur brutalité l’avait fait sursauter. Elle aurait du entendre le bruit de la bague tomber sur le trottoir. Paniquée, elle se mit à pleurer silencieusement et se réfugia quelques minutes dans les toilettes pour cacher son trouble.

    « Sophie avait trop maigri, sa belle mère lui en parlait souvent, lui demandant ce qui n’allait pas depuis sa sortie de l’école. « Vous êtes brillante, mais il ne faut pas trop travailler, sinon vous aurez du mal à avoir des enfants ma chère. » Elle ne répondait pas, et se mordait les lèvres. Elle se sentait perdue. Son mariage était voué au désastre, elle le sentait. Perdre sa bague de fiançailles quelques mois seulement après, c’était un signe du ciel ou du destin. Elle rentra dans le bureau de sa Chef de Produit, qui lui demanda ce qui n’allait pas. Elle hoqueta son histoire entre deux sanglots. Brune et ronde, et de caractère toujours enjoué, sa chef lui dit de ne pas s’inquiéter. « On va la retrouver cette satanée bague! »  Mais elle avait les sourcils froncés, elle ne savait pas si c’était en regardant sa taille trop fine dans la robe noire, le mascara qui coulait, ou bien l’heure affichée par la montre qu’elle venait de regarder machinalement. En tout cas, déterminée et claquant dans ses mains, qu’elle mit ensuite en haut parleur en marchant dans le couloir, elle fit un branle-bas de combat en mobilisant les quelques personnes volontaires à l’étage pour aller chercher la bague. Il y aurait deux équipes qui se répartiraient le large trottoir, le long du trajet et près du caniveau ; deux personnes partiraient du bureau, les deux autres feraient le chemin inverse. Il était dix heures.

    A dix heures trente, les deux équipes rentrèrent bredouilles, et Sophie alla vomir dans les toilettes.

    Le 3 mai 2000. Marianne avait raconté pour la quinzième fois l’histoire de la rupture à ses deux copines au café, une troisième écoutait pour la première fois. Son homme l’avait quitté sept mois et trois jours après leur rencontre. Elle n’avait pas vu la grande claque arriver.

    - « Il était tellement aimant. Des fleurs chaque semaine, des roses magnifiques. Des diners en amoureux aux chandelles tout le temps. Et il m’avait même demandé ce que j’aimais comme type de bague, on avait fait la devanture de plusieurs joaillers Place Vendôme, sans rentrer, mais je lui avais montré, elle était magnifique, toute gracile en forme de fleur, je ne sais pas la décrire... En fait, sa mère refusait de donner les bijoux de la famille...

    - Ah les belles mères! Mais comment ça, tu n’as pas rien vu venir quand il t’a quitté... Pas d’indice? C’était pour une autre?

    - Même pas! Il m’a dit que c’était trop tôt. Il avait perdu sa femme récemment.

    - Perdue comment? »  demanda le nouveau visage amical.

    - « Partie. Elle l’a quitté un jour, et il ne s’y attendait vraiment pas.

    - Faut dire, tout lui à plutôt réussi, fils à papa un peu non? Le milieu politique, ça doit pas être très bon pour l’égo.

    - Tu veux dire, je théâtralise ma vie... dit la deuxième jeune femme, muette jusqu’à là. Dis nous, j’ai oublié, le premier mariage, ils avaient des enfants?

    - Non, elle avait du mal à accepter la maternité si je comprends bien. »  Elle éclata de rire. « Si ça se trouve, elle était frigide! Je ne sais pas mais il est tellement caressant, pardon, il était...si caressant que je me suis demandée...

    Les trois jeunes femmes étaient en noir, et le serveur les charria. « Alors Mesdemoiselles, un petit noir pour aller avec votre tenue? » 

    Elles sourirent poliment et lui demandèrent de mettre un verre d’eau en plus pour l’une, et une tartine de pain grillée pour l’autre, mais Marianne ne prit que le café, sans faire fondre son sucre dans la cuillère, leur rituel d’école quand elles n’avaient pas un rond et que tout ce qui leur apportait de l’énergie comptait.

    -« Et vous, excuse moi d’être direct, la baise, au lit c’était...

    - Ben oui, évite moi ces questions, mais oui! »  Marianne touilla le café et ajouta. « C’est dingue, il parait qu’au mariage, la mère de Sophie, elle s’appelait Sophie, a refusé que les invités rentrent dans le château. Ils avaient dû installer des toilettes dehors.

    - Sympa la mère! Généreux. Comment se fait-il qu’il t’ait raconté ça? »  dit la brune tonique.

    - « Je sais pas. Bon, les filles je suis ouverte à n’importe quel plan. Même cul. Vous me donnez les numéros, et je fonce. J’ai essayé tous les réseaux je crois. C’est très intéressant d’un point de vue sociologique et ethnologique, vraiment on rencontre des gens étranges qu’on ne verrait nul part ailleurs je pense! Le dernier réseau, c’est « adopte un homme » : tu le mets dans ton cadis, et tu peux troquer à la fin pour un autre homme si ça ne convient pas...

    - Le gros délire... dit la femme qui parlait peu, rêveuse.

    - Ok, j’ai peut-être un homme pour toi, il est assez enveloppé, mais il a du charisme...

    - Il est grand?

    - Heu... normal, pourquoi, c’est important?

    - Non, je dis ça comme ça.... »  Elle rit nerveusement de nouveau, et posa les mains sur les épaules de ses copines en disant. « Merci les filles d’être là quand il faut, ça c’est l’amitié! Vous êtes trop cool. » 

    7 Avril 2011

    Une jeune femme sortit de sa mini en coup de vent, les écouteurs aux oreilles pour finir une conversation téléphonique, puis elle resta deux minutes devant la terrasse du petit café près de la Sorbonne, pour finir un mail. Sous la lumière des bulles de gaz pour chauffer l’atmosphère, elle vit un couple l’observer, l’air atterré, et elle sourit se disant qu’effectivement ce soir, elle était la caricature d’elle même. Elle repartit, rapide sur ses talons hauts, vers le coffre de la voiture, pour sortir un livre dépassant d’un petit sac.

    Le restaurant était bondé. Elle mit du temps à identifier les têtes de son couple d’hôtes, qui rituellement invitaient leurs amis pour l’anniversaire du mari. « Surprise »: le concept avait dû fonctionner à cinquante, puis cent , puis deux cents, et la dernière fois quatre cents invités avec un autre couple. Puis l’un ou l’autre avait du vouloir prendre le contrepied de cette surenchère, ils étaient donc une douzaine de couples. « Les amis d’une vie qui nous sont chers ».

    A la quarantaine, la fidélité en amitié fait une vraie différence pensa-t-elle, et joyeuse, elle claqua une bise sur chaque joue de ses hôtes, caressa la tête de leurs trois jeunes enfants - trop contents de sortir si tard en semaine et sans nounou, et fit un petit signe à son homme, coincé à l’autre bout de la table et visiblement enchanté de la discussion animée. De son côté, la table était plus calme. Un couple visiblement très amoureux sur la banquette, le corps collé l’un à l’autre, et les mains entrecroisées. Un avocat chauve, la peau blanche, le double menton naissant, qu’elle évalua en quelques secondes comme convenu et sans intérêt. Et la fille ainée de ses amis, Charlène, vive et rayonnante, qui imitait sa prof de maths, « stricte«  pour reprendre son terme.

    Les présentations furent faites. La femme amoureuse, et plus âgée que son compagnon, s’avérait écrire des livres de psychologie et de culture managériale. Elle était belle, elle l’apprécia comme un rien narcissique, mais profonde dans sa façon d’aborder les relations avec les gens et le sens de sa vie. Elle était belle, long cheveux, rides du lion, à priori une femme approchant les quarante cinq ans, épanouie et assumant son âge. L’homme ne cessait de chercher son regard, et lui caressait la cuisse comme s’il avait besoin de lui dire et de crier à tous « Je suis avec elle ». Cela fit sourire la retardataire, et elle écouta d’une oreille plus distraite ce qu’il lui dit sur son job de Président d’une entreprise, où bien sûr il accomplissait beaucoup, et redressait une situation désespérée laissée par ses prédécesseurs.

    La jeune femme pensa à son coach, à son topo sur l’analyse transactionnelle, et se dit que ces deux là devait bien aimer une relation parent enfant. Le serveur lui demanda au même moment de bouger sa chaise car elle était dans le passage et Charlène releva ses boucles claires et se mit à chanter. Elle prit son verre, se leva pour lui porter un toast et se déplacer vers l’autre table où elle avait vu des visages connus.

    Le vin était fruitée, peut être pas servi assez frais, néanmoins le brouhaha des conversations amicales, la lumière douce, et les parfums chaleureux de la cuisine du Sud Ouest rendaient la soirée légère et mémorable.

    Elle embrassa comme du bon pain son ancien voisin rue de Lisbonne, et entama une conversation décousue, entrecoupée de fou rires avec toute une petite bande, en posant une demi-fesse sur l’une des chaises déjà occupée, heureuse d’être là.

    25 juillet 2011

    Epilogue

    La même femme pressée à la mini arriva en retard au restaurant italien réservé par des amis. Elle gara sa voiture juste devant, comme si la place lui avait été réservée. Elle était souvent en retard. L’autre couple et son époux étaient déjà attablés, attaquant les graissins qu’ils grignotaient avec avidité et plaisir. Dans la glace en s’asseyant, elle vit le bel Anthony Delon, et à droite Omar Sharif qui portait avec panache ses soixante dix ans passés, et dont la conversation, sans surprise, portait sur le monde des chevaux.

    Leur ami Jean-Baptiste été très fier d’avoir obtenu une réservation aussi vite. Son amie le charria en

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