La prophétie des Elfes, Partie 1
Par Zélina .
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À propos de ce livre électronique
"Il est une prophétie qui dit que l'union de la cinquième fille du dixième roi des Elfes de Lumière et du cinquième fils du dixième roi des Elfes Sylvains donnera lieu à une guerre sans précédent." Lorsque Lalaith, princesse des Elfes de Lumière, entreprend de quitter le royaume d'Elenraz afin d'échapper à son mariage, elle n'a aucune connaissance de la prophétie qui la lie à Ohtar, prince des Elfes Sylvains. Durant son épopée, elle va traverser plusieurs épreuves et se confronter à maints dangers mettant sa vie en péril. Parviendra-t-elle à atteindre son but ? Rejoindra-t-elle le royaume de Sylvana ? Rencontrera-t-elle ces êtres dont on a caché l'existence à son peuple ?
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Avis sur La prophétie des Elfes, Partie 1
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La prophétie des Elfes, Partie 1 - Zélina .
La Prophétie des Elfes
Partie 1
de Zélina
Le temps d’un roman
Editeur
Collection «Fantasy»
CHAPITRE I
Il est une prophétie qui dit que l’union de la cinquième fille du dixième roi des Elfes de Lumière et du cinquième fils du dixième roi des Elfes Sylvains donnera lieu à une guerre sans précédent. Celle-ci fut lue par un sage appelé Meneldur alors qu’il regardait les étoiles le soir du couronnement d’Elenwë et Anarion, souverains du royaume des Elfes de Lumière.
Le palais qui surplombait la cité des Elfes de Lumière était d’une magnificence sans égal. L’on racontait qu’il avait été sculpté par les dieux eux-mêmes dans les falaises qui l’encerclaient, le protégeant ainsi de tout danger venu de l’Est, du Sud ou bien encore de l’Ouest.
Au Nord, l’océan d’un bleu si clair qu’il en était transparent venait lécher le rivage au rythme de ses marées, offrant une ouverture vers l’autre monde. Sur ces eaux, nul navire ne voguait exceptés ceux dont les passagers ne revenaient jamais. En effet seuls les elfes qui atteignaient la fin de leur longue vie embarquaient sur ces bateaux qui semblaient surgis tout droit des profondeurs sous-marines. Et tandis que ceux-ci parcourraient les flots en direction de leur destination ultime, d’autres prendraient leur place à Elenraz, peuplant la cité comme jadis ils le firent.
L’entrée de la cité se trouvait au Sud. Tenue secrète, très peu de citoyens d’Elenraz en connaissaient l’existence. Ce portail vers le monde extérieur était d’autant plus secret que le seul moyen de s’y rendre était d’emprunter un passage étroit entre les falaises à l’intérieur desquelles s’écoulaient avec vigueur les eaux d’une cascade, créant un épais rideau blanc à travers lequel la lumière du soleil ne paraissait pas. Enfin, pour traverser, il fallait réciter une formule en ancienne langue elfique - désormais très peu parlée à Elenraz.
Derrière cette barrière quasi infranchissable s’étendait une forêt. Une rivière la séparait en deux royaumes : d’un côté, le royaume des Elfes de Lumière ; de l’autre, celui des Elfes Sylvains. Sur les cartes cachées dans l’une des pièces de la grande bibliothèque du palais apparaissait son nom : Laurëduin, la rivière aux reflets dorés. Sans-doute l’avait-on nommée ainsi à cause des scintillements que l’on pouvait apercevoir à travers ses eaux cristallines.
Le palais d’Elenraz se divisait en des dizaines de salles creusées dans le roc auxquelles l’on accédait par des couloirs qui n’en finissaient pas de serpenter dans les entrailles de la terre. Les murs d’un blanc si pur qu’ils ne semblaient jamais avoir été effleurés par les dégradations causées par le temps étaient ornés de scènes peintes par les plus habiles artistes de la cité. Tantôt elles représentaient des jardins enchantés peuplés de créatures qui n’existaient que dans les contes ou les esprits les plus imaginatifs, tantôt elles retraçaient la vie des habitants de la cité en des fresques immenses dont les couleurs étaient si vives qu’elles paraissaient animées.
Dans la grande bibliothèque du palais où les érudits se retrouvaient afin de cultiver leur esprit, les murs étaient recouverts d’étagères poussiéreuses sur lesquelles reposaient des milliers d’ouvrages de toutes sortes : livres de contes, de magie blanche, parchemins encrés de formules en tous genres ...
Sous un dôme de verre qui laissait passer tantôt la lumière éblouissante du soleil tantôt les rais timides de la lune fleurissait un arbre millénaire qui à lui seul ornait ce sanctuaire de connaissances.
La façade du palais était longée par un balcon sur lequel s’invitaient de longues branches de lierre et de chèvrefeuille entremêlées dont les fragrances naturelles encensaient les âmes oisives qui l’arpentaient.
Des bancs de marbre blanc strié de mille minuscules vaisseaux rosâtres accueillaient peintres et poètes inspirés par la beauté de la vue qui leur était offerte. A leurs pieds s’étendaient les jardins du palais dans lesquels ondulaient des dizaines de petits cours d’eau. Puis, au loin, l’on pouvait apercevoir les campagnes, les forêts, les falaises, les montagnes…et enfin, l’océan se confondant avec l’horizon.
Dans les jardins s’élevaient de grands arbres majestueux reliés entre eux par des ponts de bois sur lesquels flânaient les habitants d’Elenraz : des rires, des chuchotements, des cris d’enfants emplissaient ces sentiers aériens. Du haut de ces passerelles, l’on pouvait observer les elfes étendus dans l’herbe moelleuse, les yeux rivés vers le ciel, remplis de rêves et de gratitude envers les dieux pour leur avoir fait don d’un monde d’une telle splendeur.
Des fleurs de toutes les couleurs formaient un bouquet gigantesque aux abords d’une fontaine trônant au milieu de ces milliers de teintes s’accordant parfaitement les unes avec les autres.
Le soir venu, lorsqu’Anor, dieu du soleil, disparaissait pour laisser place à Idril, déesse de la lune, toutes ces nuances chatoyantes se muaient en des couleurs plus sombres, la cité revêtant son manteau de nuit maculé d’une myriade de petites flammes orangées ondoyant doucement au gré du vent.
Ce paysage édénique était agrémenté d’une grande place où le peuple aimait à se réunir afin de festoyer.
Car, chez les Elfes de Lumière, tout événement était propice à la célébration. Ils avaient en effet pour coutume d’organiser des banquets lors des changements de saison, des couronnements des rois et reines, des annonces de naissances de princes et princesses ainsi que lors de leur passage à l’âge adulte le jour de leurs cent ans.
Les enfants étaient sacrés et considérés comme des cadeaux des dieux.
Et ce fut ainsi que les dieux firent don de cinq filles à Elenwë et Anarion, dixièmes souverains d’Elenraz, la Cité Étoilée.
L’aînée fut nommée Laurelin qui signifie « le chant d’or ».
Laurelin avait une voix dont les ondulations charmaient quiconque les écoutait. Sa nourrice, Serindë, fut l’une des premières victimes de cet enchantement. En effet, Laurelin avait pris l’habitude de lui conter les odes que Meneldur lui avait apprises, mais la voix de la jeune elfe était bien plus mélodieuse que celle du vieux mage avec qui les leçons semblaient durer une éternité. Serindë sombrait alors dans un profond sommeil pendant que Laurelin s’enfuyait à travers les champs des campagnes environnantes rejoindre Celebrindal, le fils d’un charpentier de la cité. Ensemble ils passaient des après-midis à s’amuser ou à courir dans les prairies.
Celebrindal connaissait la campagne mieux que quiconque. Il connaissait le nom de chaque arbre, de chaque fleur, de chaque insecte.
Lorsqu’ils étaient las de gambader dans les vallons verdoyants, Laurelin et Celebrindal s’étendaient parfois dans l’herbe grasse et se racontaient des histoires que seule l’imagination d’un enfant pouvait créer. La fille d’Anarion et d’Elenwë se mettait alors à chanter et la nature, envoûtée par une voix si pure, l’accompagnait dans ses litanies : le pépiement des oiseaux se mêlait au souffle du vent créant une mélodie naturellement enivrante.
Lorsque la douce saison laissait place à l’hiver, si rude, si froid, Laurelin, fredonnait sa tristesse dans une langue qu’elle avait elle-même inventée. Les accords voluptueux de sa voix, portés par la bise, parvenaient parfois jusqu’aux oreilles de Celebrindal, et bien que le jeune elfe ne comprît pas les mots de Laurelin, il ressentait la peine que ses chants véhiculaient.
Durant la saison de glace, lorsqu’elle ne chantait pas, elle passait son temps à étudier, contentant ainsi ses parents et Meneldur - qui ne tarissait pas d’éloges sur l’intelligence et l’esprit vif de la jeune princesse.
Lorsque la saison douce revenait, au contraire, Meneldur, agacé par l’oisiveté de Laurelin qui rêvait à ses escapades dans la nature, écourtait souvent les leçons.
Meneldur n’était pas un maître comme les autres. Il savait marier autorité et indulgence, comprenait la fougue de la jeunesse comme si lui-même la ressentait - bien qu’il paraissait si vieux que l’on n’eût pu deviner son âge.
Les enfants de la cité l’aimaient beaucoup et adoraient par-dessus tout jouer avec sa longue barbe blanche. Aussi pâle que la lumière d’Idril, sa peau semblait aussi fragile que du cristal. Lorsque l’on plongeait les yeux dans ceux de Meneldur, leur bleu azur nous transportait si loin qu’il nous était difficile de détacher notre regard du sien. L’on pouvait y lire toute la sagesse qu’il avait accumulée à travers les âges, une sagesse si grande que l’on disait qu’elle pouvait égaler celle des dieux.
Meneldur portait souvent de longues aubes blanches et ne quittait pas son bâton de mage dont on disait qu’il possédait certains pouvoirs. L’on venait des quatre coins du royaume pour le consulter.
Premier conseiller du roi Anarion, le vieux sage était considéré comme une figure importante de la cité et sa voix comptait autant que celle du souverain lorsque des décisions devaient être prises.
Alors lorsque Meneldur affirmait que la culture s’acquérait aussi bien dans la grande bibliothèque d’Elenraz que dans ses forêts et ses champs, Anarion et Elenwë n’avaient d’autre choix que de laisser la jeune Laurelin en découvrir les mystères.
Ainsi, libre de vagabonder dans la nature, Laurelin s’empressait d’aller retrouver Celebrindal et bientôt, leurs rires d’enfants laissèrent place à des sourires complices. L’amitié qui les avait liés jusqu’alors se métamorphosa en un amour si fort qu’elle se refusa à aimer tout autre que lui.
Ils se rencontrèrent en secret pendant de longues années, leurs origines ne leur permettant pas une telle union : elle était une fille du palais - une princesse - et lui n’était que le fils d’un simple charpentier.
Un jour, vers la fin de l’automne, alors que les deux jeunes elfes sillonnaient gaiement les champs dont les hautes herbes n’avaient pas encore été coupées, une fine pluie froide commença à tomber. Laurelin et Celebrindal se réfugièrent quelques heures à l’orée d’un petit bois.
Blottis l’un contre l’autre et adossés à l’écorce rugueuse d’un vieux chêne dont le feuillage avait revêtu les couleurs chaleureuses propices à la saison, le jeune charpentier pria la princesse de lui réciter quelque ode en attendant que passât le mauvais temps. Laurelin chanta alors à son compagnon un poème qu’elle avait créé pour lui, lui avouant son amour. Sa voix d’or s’éleva dans les airs. Les feuilles se mirent à tourbillonner, l’ondée se muant en une pluie aux reflets ambrés. Lorsque les dernières notes eurent passé le seuil de ses lèvres, les gouttelettes d’or restèrent quelques secondes en suspension autour d’eux, créant ainsi un spectacle féerique.
Celebrindal effleura le visage de Laurelin, caressa sa chevelure soyeuse et l’embrassa timidement.
Ainsi commença l’histoire d’amour des deux amants qui s’unissaient en secret sans penser aux lendemains douloureux que le futur leur offrirait, car Laurelin, une fois son âge adulte atteint, devrait prendre pour époux un jeune guerrier de la cité.
Pendant quelques années cependant, Laurelin ne fut point importunée par les désaccords qu’aurait entraîné la découverte de son idylle avec Celebrindal.
En effet, durant le printemps de sa trentième année vint au monde sa sœur Elena, dont la vie fut tragiquement écourtée par une épidémie qui décima bon nombre de la population elfique.
Peu habitués à ce genre d’affliction, tous y virent là un châtiment divin, sans toutefois n’oser blâmer ces dieux qu’ils vénéraient autant qu’ils craignaient.
Ce drame scella le sort de la princesse Niniel, leur sœur cadette, qui naquit quelques années plus tard.
Le décès brutal d’Elena plongea Elenwë dans une tristesse inconsolable. Elle arpentait les couloirs du palais, inlassablement, ne faisant plus que de rares apparitions dans la cité, submergée par une douleur qui ne disparut qu’à la naissance de Niniel.
Sa venue au monde, Niniel, la fit en pleurs, exorcisant sa mère de la douleur qu’elle avait ressentie jusqu’alors. Dès lors, Niniel passa ses nuits à pleurer, sans même en connaître la raison. Quant à Elenwë, aucune larme ne s’écoula plus de ses yeux bleus dans lesquels l’on pouvait parfois apercevoir le scintillement des étoiles.
La jeune Niniel, toujours vêtue de robes sombres, souvent bleu foncé, ne souriait jamais. Élève studieuse, Meneldur désespérait de la voir s’épanouir et embrasser la vie tout comme le faisaient les autres jeunes elfes. Au lieu de profiter des beaux jours de la saison douce, de se délecter des senteurs des fleurs et des fruits qui faisaient ployer les branches des arbres tellement elles étaient chargées, ou bien d’aller gambader dans les campagnes, elle restait enfermée dans la bibliothèque.
Jamais le soleil ne caressait sa peau livide sinon à travers le dôme de verre de ce temple de savoirs.
Jamais elle ne tournait les yeux vers Anor, lui préférant la pâle lueur d’Idril.
Contrairement aux autres elfes qui se terraient durant la saison rude, Niniel, affublée de sa longue cape sombre, s’absentait durant des heures pour aller errer dans les forêts, se confondant avec les brumes humides qui les hantaient jusqu’au matin. Alors, elle rentrait et partait s’allonger sur sa couche où elle s’endormait, le visage baigné de larmes.
Une nuit, alors que l’inquiétude d’Elenwë et d’Anarion avait atteint son paroxysme, Meneldur rendit visite aux souverains.
Les étoiles avaient parlé.
Ébranlée par la souffrance de Niniel, Eilinel, l’étoile-reine, avait pris une décision : dès le lendemain, Niniel quitterait Elenraz sur l’un des navires qui voguaient vers les rives de l’au-delà.
Accablés de chagrin, le roi et la reine ne purent s’endormir cette nuit-là.
A peine le soleil fut-il levé qu’elle descendit les escaliers du palais lentement, accompagnée par ses parents qui pleuraient en silence. Ensemble ils traversèrent les jardins et, lorsqu’ils arrivèrent sur la plage, Niniel baisa leur front à tous deux et poursuivit seule sa marche silencieuse vers le rivage où l’attendait son embarcation. Elle entendit la voix de sa sœur aînée qui lui formulait ses adieux en une chanson emplie de tristesse dont la mélodie sembla émouvoir la nature même qui se mit à déverser un léger crachin, comme si les cieux pleuraient le départ de Niniel.
Puis ce fut autour de sa mère :
« Namarië.1 Adieu, ma tendre fille. » chuchota-t-elle.
« Namarië Ammë. Namarië Atar.2», murmura-t-elle.
Et, pour la première fois depuis sa naissance, Niniel sourit.
Le bateau s’éloigna des rives d’Elenraz, laissant des parents certes meurtris de voir une autre de leurs filles les quitter, mais aussi soulagés que son fardeau ne fût plus.
CHAPITRE II
Les années passèrent.
La célébration des cent ans de Laurelin approchait à grands pas, laissant paraître un triste destin, car en effet son père comptait la marier à un jeune guerrier du nom de Thalion.
Mais Laurelin à la voix d’or était toujours éprise de Celebrindal.
Un matin d’automne, alors qu’elle étudiait à la bibliothèque, réfléchissant à un moyen d’éviter cette union, elle eut une idée qui susciterait sans doute des controverses.
Scrutant chaque étagère à la recherche d’un livre dans lequel elle pourrait trouver quelque sort ou quelque potion qui eût pu l’aider, elle découvrit bien vite l’objet de ses convoitises : un grimoire dans lequel étaient répertoriées toutes sortes de formules.
Ce jour-là, à sa plus grande satisfaction, Meneldur était absent – il avait en effet été appelé au chevet d’un jeune elfe que seuls ses talents de guérisseur pouvaient sauver.
Parcourant les pages poussiéreuses du manuscrit, ne sachant quelle méthode elle allait employer pour se débarrasser de ce Thalion qui ne l’aimait sans doute pas non plus, elle tomba sur un sort de fertilité.
Son idée portait ses fruits : un enfant de Celebrindal lui éviterait ce futur dont elle ne voulait pas. En ce jour, la fortune semblait lui sourire.
Elle lut rapidement l’incantation qu’elle s’empressa de recopier et regarda la liste des ingrédients dont elle aurait besoin : dix pétales d’iris bleu, quelques feuilles de lierre et une rose tricolore.
Laurelin remit le grimoire à sa place et s’enfuit dans la campagne rejoindre Celebrindal. Sur son chemin elle n’eut aucune difficulté à regrouper les plantes nécessaires. Elle retrouva son amant et le mit au courant de ses intentions par lesquelles il fut enthousiasmé - bien que réprimant une certaine appréhension quant à la réaction de ses souverains.
Ils se réfugièrent dans les bois où ils s’étaient embrassés pour la première fois et, pendant que Celebrindal allumait un feu, Laurelin commença à broyer les divers composants de la potion.
Pendant qu’elle continuait de préparer sa mixture, s’enivrant des senteurs des fleurs fraîchement cueillies, le jeune charpentier se rendit au petit ruisseau à quelques pas de là auprès duquel il s’agenouilla pour remplir un récipient qu’il se hâta de rapporter à sa bien-aimée qui y ajouta la préparation.
Bientôt, tout fut prêt.
Laurelin se mit à murmurer quelques mots en ancienne langue elfique3 que le jeune elfe répéta : « […] i melmë, i onwë, i valdë...[…] A alyalwë Yavanna !4 », puis tous deux chantèrent à tue-tête cet hymne à la fécondité. La voix de Laurelin s’éleva jusqu’à la cime des arbres, si puissante et si fluide à la fois, si envoûtante, que même la nature n’aurait su ignorer leur requête.
Le vent souffla, créant un murmure étrange dont ils ne saisirent le sens. Transcendés, ils portèrent la concoction à leurs lèvres et l’ingurgitèrent. Le philtre brûlant s’écoula dans leurs veines pour fusionner avec leur sang. Animés d’une passion ardente, ils s’aimèrent au creux du chêne qui avait été témoin de leur amour durant toutes ces années qu’ils avaient passées à se cacher.
Ils ne s’éveillèrent qu’au petit matin, extirpés de leur sommeil par des cris :
« Laurelin ! Laurelin ! ».
C’était la voix de Serindë ! réalisèrent-ils.
Ses parents, inquiets, avaient cherché Laurelin durant toute la nuit et avaient envoyé la nourrice la trouver. Celebrindal s’empressa d’enfiler sa chemise de lin assortie à son pantalon et recouvrit les épaules de son amante avec la cape verte qu’il avait l’habitude de porter en ces mois d’automne. Laurelin frotta vigoureusement sa robe tâchée par la terre humide puis ils rejoignirent rapidement Serindë, mettant fin à ses vociférations.
Pauvre Serindë ! Laurelin ne lui épargnait décidément aucune folie !
Toutefois, sachant qu’elle n’obtiendrait aucun aveu, la nourrice ne lui posa aucune question et ne lui fit aucune remontrance.
Protectrice, Serindë n’hésitait parfois pas à mentir pour éviter des punitions trop sévères à celle qu’elle considérait comme sa propre fille. De plus le tempérament de la reine était une fois de plus adouci par les joies de la maternité.
En effet, Elenwë attendait de nouveau un enfant - une fille, d’après les présages rapportés par Meneldur.
Nerwendë, la quatrième princesse qui naquit durant le règne d’Elenwë et d’Anarion, ouvrit ses yeux vert-bleus par un beau matin d’hiver. Les derniers flocons de neige avant un printemps très attendu tourbillonnaient dans les airs, recouvrant Elenraz d’un léger manteau blanc.
Laurelin, dont le ventre commençait à bien s’arrondir, ne pouvait désormais plus garder sa condition secrète. Le matin même où la reine mit au monde sa troisième petite sœur, elle prit la décision d’annoncer à ses parents qu’elle ne prendrait pour époux que le père de son enfant. Bien que surpris à l’annonce d’une telle nouvelle, les souverains ne purent néanmoins s’opposer à la requête de Laurelin.
Ainsi Laurelin annonça son union avec Celebrindal qui fut célébré le jour du solstice d’été. Elle quitta le palais le soir-même pour aller s’installer dans la maison forestière que son charpentier leur avait bâtie dans les hautes branches du chêne sous lequel ils avaient scellé leur avenir.
Le mois suivant naquit leur enfant qu’ils prénommèrent Ingwë.
Ingwë et Nerwendë, bien qu’issus de la même famille, grandirent loin l’un de l’autre, sans que jamais leurs chemins ne se croisassent. Pourtant, tous deux partageaient un amour inconditionnel pour la nature.
En effet, Nerwendë n’aimait guère s’enfermer durant des matinées entières pour assister aux leçons de Meneldur qui désespérait de lui trouver quelque sujet qui eût pu la captiver : ni la lecture, ni la poésie, ni même la magie - que tous les jeunes elfes rêvaient pourtant d’apprendre ! – ne semblaient trouver d’intérêt à ses yeux. Il avait tout essayé.
Las de ces vains efforts, il se contenta de l’emmener visiter le royaume, l’instruisant tout en la distrayant – c’était là le seul moyen de préserver et d’améliorer la culture de la princesse.
Mais les jeunes jambes de Nerwendë la portaient bien plus vite que celles du vieux sage ne le faisaient. Meneldur peinait à suivre ses courses effrénées à travers les champs et les forêts, et bientôt, elle sut tout ce qu’il y avait à savoir sur la nature.
Pourtant, jamais elle n’était rassasiée.
Durant sa vingtième année, Nerwendë découvrit la chasse - ce qui la passionna bien plus que tout ce qu’elle avait pu apprendre jusque-là. Bien entendu, elle s’y rendait en secret car seuls les elfes mâles y participaient alors.
Ainsi, tous les matins, elle quittait ses quartiers, traversait le long corridor qui desservait les chambres vides de ses sœurs sur la pointe des pieds, se faufilait dans la cuisine encore silencieuse à cette heure-là et sortait par la petite porte devant laquelle s’étirait un minuscule sentier de terre battue qui la mènerait tout droit à la lisière de la forêt. Elle enfilait un heaume sous lequel elle attachait ses cheveux châtains - ayant auparavant pris soin de choisir quelques vêtements qui ne seyaient guère à une jeune princesse. Puis, avant d’entamer son aventure matinale, elle se recouvrait le visage de la terre imprégnée de rosée afin que personne ne la reconnût.
Mais son stratagème ne berna pas bien longtemps les chasseurs qui, devant tant d’obstination, promirent de ne rien révéler au roi et à la reine.
Ce fut Maehdros - un guerrier qui maniait aussi bien la lame que l’arc - qui apprit à Nerwendë l’art de la chasse. Il avait atteint son âge adulte depuis de longues années : environ cent cinquante ans les séparaient mais tous deux s’entendaient si bien que bientôt, ils ne se quittèrent plus.
Et tandis que Maehdros enseignait à Nerwendë l’utilisation de l’arc et de l’arbalète, mais aussi de la lance, et parfois même, lorsqu’elle le suppliait, de l’épée, la princesse lui révélait les particularités de telle ou telle plante ou les effets de telle ou telle fleur, jusqu’à ce qu’ils eussent complété leur éducation mutuelle.
Elle s’entraînait durant longues heures, sans que jamais personne ne se doutât qu’elle était devenue l’une des meilleures chasseuses d’Elenraz et que dans les auges des souverains étaient parfois servis le gibier qu’elle avait elle-même tué.
Parfois, lorsqu’elle rentrait tard dans la matinée, elle prétendait qu’elle s’était adonnée à la cueillette de champignons et de baies sauvages dont les enfants des villages voisins étaient particulièrement friands - ce qui n’était pas tout le temps un prétexte, car en effet elle aimait à partager les fruits de ses récoltes avec les autres.
Si Nerwendë était de nature frivole, elle était par-dessus tout généreuse.
Un jour, Nerwendë prit conscience qu’il existait quelque chose en ce monde qui pouvait changer la vie d’un elfe : l’amour.
Après une partie de chasse infructueuse, Nerwendë et Maehdros se promenèrent quelques heures dans la forêt, ramassant çà et là quelques fruits qu’ils grignotèrent en se racontant de courtes histoires.
Maehdros avait une imagination inépuisable et la jeune princesse débordait d’idées originales.
Errant tels deux poètes vagabonds, ils atteignirent bientôt un site dont aucun d’eux ne connaissait l’existence. Perdu dans un labyrinthe de hêtres et de chênes, ceinturé de fougères et de ronces, s’étendait un petit étang nourri par une source aux eaux si transparentes que l’on en distinguait le lit parsemé de galets multicolores. Le soleil en embrassait la surface qui scintillait sous ses caresses ardentes. Une brise chaude balayait le visage des deux amis qui, pour profiter pleinement de ce paysage enchanteur, se frayèrent un passage à travers les buissons épineux qui protégeaient ce petit paradis.
L’étendue d’eau était de forme circulaire, ceinte par une roche nacrée aux reflets rosâtres. Lorsqu’on levait les yeux, ceux-ci se retrouvaient pris dans une spirale qui les menait directement au centre de ce cercle de ciel bleu, délimité par la cime des hauts arbres qui s’étiraient à n’en plus finir.
Maehdros et Nerwendë s’assirent sur les rochers brûlants, ôtèrent leurs bottes et, les jambes ballantes, effleurèrent du bout des pieds les eaux limpides de la source. La sensation que leur offrit l’onde était délicieuse.
Maehdros s’allongea, se laissant bercer par la chaleur d’Anor qui embrassait son corps tout entier.
Profitant que son compagnon eût les yeux clos, Nerwendë se dévêtit et se laissa glisser lentement dans l’étang, jouissant chaque seconde des sensations que lui procuraient les eaux dans lesquelles elle s’immergea bientôt complètement.
Elle se mit à nager : sous la surface, au-dessus, puis à nouveau en dessous, laissant son corps voguer au gré de ses désirs. Tantôt celui-ci rencontrait les bras enflammés de l’astre de feu, tantôt il s’imprégnait de la fraîcheur du bassin.
Après quelques instants, le chasseur ouvrit l’œil, et, n’apercevant plus sa compagne, se releva pour poser son regard sur la princesse dénudée dont le corps épousait l’onde en une exhibition sensuelle.
Désormais, Nerwendë ne ressemblait plus du tout à la « fille masculine5» que Maehdros avait connue jusqu’alors. Au contraire, elle incarnait en ce lieu, en cet instant, la féminité et l’innocence, la fusion desquelles dégageait un charme envoûtant.
Maehdros, ne pouvait détacher les yeux de cette sirène si bien que lorsqu’elle émergea, elle le surprit en train de l’observer et ne put réprimer un rougissement honteux. Arraché à ses songes, le guerrier rougit à son tour et détourna le regard, non sans que cela ne lui coûtât un effort considérable.
Jamais il n’avait vu pareille beauté, et bien que tous les elfes de lumières fussent d’une grande élégance, Nerwendë possédait quelque chose d’autre qui avait réussi à faire chavirer son cœur.
Elle profita des yeux fuyants de Maehdros pour sortir de l’eau, ramasser ses vêtements et les enfiler promptement.
Elle s’agenouilla sur la roche trempée par les ruissellements de sa peau et coiffa ses longs cheveux de ses doigts fins puis elle se mit à fredonner un air que les oiseaux reprirent à l’unisson, ajoutant leur pépiement au doux murmure de la jeune princesse.
S’immisça une nouvelle voix, plus masculine, mais dont le timbre s’accordait parfaitement aux chœurs qui l’accompagnaient. Maehdros improvisait une ode qui vantait les plaisirs de l’amour, tout en retenue.
Lorsque les chants disparurent, laissant place à un silence dans lequel de troubles pensées s’entrechoquaient, créant un écho presque audible, les deux amis, gênés, entreprirent de retourner vers la cité, sans dire mot.
Il se passa bien des mois sans qu’ils n’osassent se rencontrer à nouveau, chacun craignant la réaction de l’autre - bien que tous deux eussent partagé les mêmes sentiments.
Maehdros continua de chasser pour le roi, ne ramenant toutefois que de menus gibiers, tiraillé entre l’affection qu’il éprouvait pour Nerwendë et sa loyauté envers son souverain.
Nerwendë quant à elle ne s’éclipsait plus du palais aux aurores pour prendre part aux battues organisées par ses amis qui se languissaient de sa présence frétillante. Elle restait allongée sur sa couche, fantasmant pendant des heures, repensant à cette journée qui avait éveillée en sa conscience cette nouvelle sensation, ce nouveau désir qui désormais la hantait.
Qu’ils fussent clos ou bien ouverts si grand qu’ils semblaient vouloir englober le monde d’un seul regard, ses yeux ne percevaient plus rien excepté le visage empourpré de honte de Maehdros.
Vers la fin de l’automne avait lieu la dernière partie de chasse avant la saison froide à laquelle pouvait prendre part quiconque le souhaitait.
Des citoyens accouraient des quatre coins du royaume : des paysans, des jeunes elfes, des guerriers qui se chargeraient de tuer le gibier qu’ils conserveraient une partie de l’hiver, tandis que les femmes elfes récolteraient fruits et légumes sauvages ainsi que toutes sortes de racines et de champignons comestibles qui seraient ensuite séchés pour une meilleure conservation.
Nerwendë décida elle aussi d’assister à cette grande traque, mais pas en tant que cueilleuse : elle chasserait aux côtés du roi !
Maehdros, qui avait auguré la présence de son amie, l’accueillit à l’orée du bois où se déroulerait la battue. La jeune princesse fut surprise de trouver son instructeur, ami et amant de ses songes, perché sur une branche, sifflotant un air qui ne lui était pas inconnu – en effet il s’agissait de celui qu’ils avaient eux-mêmes composé la dernière fois qu’ils s’étaient rencontrés. Il descendit de l’arbre avec grâce, et lui tendit un arc qu’il avait lui-même fabriqué : une pièce faite d’if – un des meilleurs bois utilisés dans la conception de ce type d’arme – sur laquelle étaient sculptées des branches entremêlées. Son prénom était gravé parmi les entrelacs.
Ne sachant que dire, émue devant tant d’attention de la part de celui qu’elle aimait, elle le remercia en déposant un baiser furtif sur ses lèvres à la fois si masculines et si délicates. Maehdros, troublé, mit quelques instants avant de reprendre ses esprits.
Il avait tellement espéré qu’elle partageât les sentiments qui étreignaient son cœur jour et nuit ! Il avait tant attendu ce jour qu’il n’avait cessé de rêver !
« Tye melen6. » murmura-t-il.
« Tye melen. », répéta-t-elle, déposant sa tête sur l’épaule de son compagnon.
Ils n’osèrent bouger, de peur de rompre le charme qui les unissait alors, mais bientôt, une multitude de voix envahit la forêt, véritable intrusion dans leur écrin de tendresse. Leur étreinte fut brisée.
Nerwendë remit son casque, se barbouilla le visage de terre, ce qui amusa Maehdros – cela lui rappela le bon vieux temps ! – et, d’un geste sûr, elle s’empara de l’arc qu’il lui tendait.
Ensemble, ils rejoignirent Anarion et les autres archers et guerriers qui l’accompagnaient qui reconnurent aussitôt leur ancienne partenaire.
Chevauchant une monture majestueuse, le roi, vêtu du blason des elfes de lumière qui lui seyait aussi bien que ses robes de cérémonie brodées de fil d’or, portait à son cou une corde tressée de couleur rouge à laquelle était attaché un cor de chasse aux reflets ambrés. Noblement, il le porta à sa bouche et retentit alors un son à la fois doux et puissant qui annonça le début de la battue.
Les cavaliers s’élancèrent dans une course effrénée, le claquement des sabots sur la terre battue s’estompant au fur et à mesure qu’ils s’éloignaient, se métamorphosant en un grondement sourd qui bientôt disparut. Menés par Anarion, ils avaient pour mission de rabattre le gibier vers l’Est où les attendraient Maehdros et tous ses compagnons impatients de montrer leurs talents.
De l’autre côté du royaume, leurs épouses s’adonnaient à des activités plus paisibles, mais tout aussi plaisantes. Les denrées récoltées seraient ensuite partagés et distribués à tous les habitants d’Elenraz.
La dernière cueillette de l’année se déroulait dans la joie et la bonne humeur, des chants et des éclats de rire résonnant dans les forêts de la Cité de Lumière.
Pendant que celles-ci psalmodiaient des poèmes et des contes, accompagnées d’enfants dont les cris attestaient d’un grand entrain, les chasseurs se dirigeaient vers l’Est, certains chantonnant, d’autres racontant des anecdotes qui en firent rire plus d’un.
Maehdros et Nerwendë se contentaient de marcher en silence, souriant naïvement, heureux.
Lorsqu’ils eurent atteint leur destination, ils se dispersèrent dans les sous-bois, attendant patiemment leurs cibles qui n’allaient plus tarder à se montrer.
En effet, les grondements réapparurent. Les chevaux approchaient, précédés par le gibier. Les archers tendirent leurs arcs, les yeux fixés droit devant eux, guettant tout mouvement, tout bruissement qui eût pu trahir la présence d’un sanglier, d’un cerf ou bien encore d’une biche.
« L’elfe à l’œil vif 7» repéra bientôt une paire de bois imposants et fit signe à sa comparse qu’il allait prendre pour cible l’animal. Mais la bête releva la tête et son œil noir vint rencontrer le regard de Maehdros qui fut déstabilisé par tant d’audace. Nerwendë, quant à elle, tentait de réfréner l’excitation qui faisait bouillir son sang, mais elle ne put se retenir plus longtemps : elle s’élança à la poursuite du cerf qui détala aussi vite qu’il le put.
Elle se déplaçait rapidement, bondissant si promptement que ses jambes ne semblaient non plus seulement la porter mais la soulever dans les airs.
Bientôt, l’animal fut prisonnier : derrière lui, la jeune princesse qui l’avait dans sa ligne de mire, et devant, une horde de cavaliers qui s’approchaient.
Il s’arrêta net ; Nerwendë l’imita.
De nouveau, elle s’empara d’une des flèches de son carquois, murmura quelque mots inaudibles, tendit la corde de son arc et la relâcha brusquement. Un sifflement aigu se fit entendre, accompagné d’une sorte de chuchotement mélodieux, et enfin, lorsque la flèche atteignit le cerf, celui-ci s’écroula sans un bruit, comme s’il n’avait ressenti aucune douleur lorsque la pointe avait pénétré sa chair pour venir transpercer son cœur.
Anarion, qui avait assisté à la scène, resta coi devant un tel spectacle. Par quelle magie ce jeune elfe dont il ignorait l’identité - ne reconnaissant pas sous ses traits brunis par la terre sa propre fille - avait-il réussi à tuer un animal sans que ce-dernier n’hurlât sa souffrance ? alors que tout autour, des brames et des grommellements se faisaient entendre ?
Les armes de ses compagnons n’étaient-elles pas faites des mêmes essences que les siennes ?
Il fut alors tiré de son introspection par la vision d’un sourire complice entre le jeune chasseur et un des autres archers.
« Jeune ami, montrez-moi le visage d’un futur maître des armes dont je tiens à saluer les prouesses devant la communauté entière. » déclama le roi.
Nerwendë ne sut comment réagir. En son esprit troublé se heurtaient tellement de pensées qu’elle se sentit défaillir, accablée par le poids des remords, de la honte, de la peur et de l’amour.
Pourquoi avait-elle écouté son instinct ? Pourquoi n’avait-elle pas laissé le soin à Maehdros, tout aussi méritant qu’elle, de poursuivre le cerf et d’obtenir la gratitude du souverain ?
Sentant qu’elle commençait à flancher, Maehdros se précipita vers la jeune princesse pour la soutenir. Sous le regard attentif du roi, Nerwendë, après s’être relevée, ôta timidement son casque, secoua la tête et sa chevelure se déploya, onduleuse, révélant la véritable identité de la chasseuse.
Anarion resta muet quelques secondes, à la fois surpris et fier de son enfant.
Suite à ce moment intense et inattendu, tous repartirent vers la cité où fut organisé un gigantesque repas pendant lequel fut servi le gibier goûteux que Nerwendë leur avait offert.
Lors de ce dîner, Nerwendë prit la parole et exprima fermement son désir de prendre pour époux Maehdros le jour du prochain solstice d’été afin que leur union fût célébrée sous les meilleurs auspices. Les souverains ne s’y opposèrent pas, bien que la tradition voulut que le mariage d’un membre de la famille royale eût lieu au cours de sa centième année.
De plus, Maehdros était un prétendant tout à fait convenable : maître des épées, excellent archer et par-dessus tout, honnête, serviable et généreux. Le roi avait beaucoup d’estime pour ce guerrier et tous ses compagnons d’armes. Nerwendë eût-elle choisi n’importe lequel d’entre eux, Anarion eût accepté leur union sans hésiter.
Durant ce festin éclairé par Idril fut également annoncée la nouvelle d’une naissance prévue pour le printemps : celle de la cinquième fille des dixièmes souverains du
