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À l'eau
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Livre électronique160 pages1 heure

À l'eau

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À propos de ce livre électronique

Blessée lors d’un entrainement de patinage de vitesse, Charlie est convaincue que sa vie est finie. Pour ajouter au malheur de la jeune fille qui préfère l’eau gelée de l'aréna à l’eau mouillée d'un grand lac, la physiothérapeute lui recommande la natation comme exercice de réadaptation ! Quand sa demi-sœur l’invite à venir la rejoindre à Magog, où des triathloniens de partout dans le monde affluent pour le TriMemphré, Charlie se dit que nager dans un lac sera moins déprimant que dans la piscine de son quartier montréalais. Elle ne se doute pas que la convalescence qu’elle entrevoit ennuyeuse comme la pluie se transformera en enquête exaltante lorsque le séduisant athlète mexicain qui loge dans le chalet voisin sera menacé de mort.
LangueFrançais
ÉditeurÉditions Chauve-Souris
Date de sortie12 mai 2025
ISBN9782982105911
À l'eau
Auteur

Anne Brigitte Renaud

Auteure de nouvelles et de récits publiés dans les Carnets de navigation, Jet d’encre, XYZ, Moebius et Virages et autres collectifs, Anne Brigitte participe à la fondation de la revue Jet d’encre, à la direction du no 49 de la revue Virages, de La montagne à portée de voix, publié chez XYZ et Memphrémagog, publié chez GID. Ses articles paraissent dans les revues Lettres québécoises et Continuité. Animatrice d’atelier d’écriture, elle coordonne Se parler tout bas : récits et nouvelles – collectif de l’atelier d’écriture de l’UTA de Memphrémagog. Deux dents de cachalot est un mini-roman écrit pour la Maison Merry, lieu de mémoire citoyen de Magog. Pour la Ville de Magog, elle est tour à tour responsable de projets spéciaux culturels, directrice de bibliothèque par intérim, agente de développement Patrimoine et Culture par intérim et chef de division Culture, Bibliothèque et Patrimoine par intérim. Elle rédige de nombreux textes en lien avec l’histoire et le patrimoine de Magog qui sont publiés et diffusés par audioguide et baladodiffusion.

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    Aperçu du livre

    À l'eau - Anne Brigitte Renaud

    Un poignard dans le mollet

    Olivier immobilise la longue lame de son patin droit à quinze centimètres de moi. Couchée sur la glace où je me suis effondrée, je me retiens pour ne pas hurler.

    — Ça va, Charlie ? me demande-t-il d’une voix hésitante.

    De la main, je désigne ma jambe gauche, étonnée de ne pas y voir un poignard planté. Olivier se tourne vers les autres membres du club de patinage de vitesse de courte piste et lance :

    — Le Grec !

    — Je t’assure que Nikos n’y est pour rien, dis-je à notre entraineur entre deux sanglots.

    Le visage tordu par la souffrance, je pointe du doigt Nikos Petraki qui exerce des sauts en vrille à l’autre bout de la patinoire. Mon ami n’a rien à voir avec ma chute.

    — Glace, Repos, Élévation et Compression, claironne Emma, la championne du club, en glissant à mes côtés. C’est ça, le Grec !

    Et c’est exactement ce qui suit. Olivier dépose un sac de glace sur mon mollet et Emma, à qui je n’ai rien demandé, téléphone à mon père pour qu’il vienne récupérer sa fille avant qu’elle ne se noie de douleur et de déception dans ses larmes.

    La claque du claquage

    — Cette jeune fille a de la chance, déclare le médecin à mon père sans me regarder. Rien de cassé. Rien de déchiré. Mais un sérieux claquage.

    — Un claquoi ?

    Je pose la question au médecin avant mon père pour rappeler à l’homme en blouse blanche que je suis la patiente et qu’il peut m’informer directement.

    — Touchez son mollet, poursuit-il sans se soucier de moi.

    — Mon mollet est dur comme une lame de patin, dis-je en mettant l’emphase sur le mon.

    — Quelques fibres musculaires se sont bloquées. Le muscle de son mollet ne parvient donc plus à se décontracter.

    Papa me connait suffisamment pour savoir que l’attitude du médecin m’agace. Il me jette un regard qui veut dire du calme. Sans se douter de mon exaspération, le docteur poursuit :

    — C’est le même phénomène que pour un cadavre…

    Jusqu’ici, j’ai réussi à retenir mes pleurs et ma déception malgré la douleur. Mais là, c’en est trop ! Le mot cadavre déclenche une alarme dans ma tête : ma jambe est morte et ce médecin n’a pas le courage de me dire qu’il va devoir l’amputer ! La fille courageuse (et indignée) se transforme en misérable loque. Si au moins il m’avait annoncé la nouvelle avec compassion. Des larmes embuent mes yeux et mes épaules se mettent à tressauter. Je ne retiens plus mes pleurs.

    — La douleur s’est intensifiée ? me demande le médecin découvrant tout à coup qu’il peut me parler directement.

    Je lui fais signe que non en essuyant mon nez avec le revers de ma main.

    — Ma jambe est morte, et vous allez devoir la couper ?

    Les coins de la bouche du sadique se relèvent. Je n’en crois pas mes yeux. Le médecin sourit à pleines dents. Et papa aussi !

    — Y a-t-il quelque chose que je n’ai pas compris ?

    — Charlotte, as-tu déjà lu des histoires de vampire ?

    — Quel est le rapport ? dis-je en hochant la tête de haut en bas.

    — Tu sais donc que le corps de la victime du vampire se rigidifie par manque d’énergie quelques heures après la mort. Eh bien, c’est ce qui est arrivé. Des fibres musculaires se sont déchirées et ton muscle s’est rigidifié. Mais ne t’inquiète pas, ton muscle n’est pas mort et le sang coule encore dans tes veines.

    Il regarde papa et m’ignore encore une fois :

    — Elle s’en remettra, conclut-il.

    Le ton désinvolte sur lequel il émet son pronostic finit de me le rendre complètement antipathique.

    Je pensais avoir vécu le pire moment de ma vie avec ce médecin aux métaphores douteuses. Mais ce n’était rien ! La véritable claque, c’est la physiothérapeute qui me la donne en m’annonçant sans gants blancs que je ne dois pas chausser mes patins pendant les six prochaines semaines. Pour couronner le tout, elle me recommande la natation !

    — Tu dois pratiquer un sport sans impact au sol, m’explique-t-elle. Les mouvements de nage sont conseillés pour masser un muscle blessé. Il peut ainsi se contracter sans risque d’étirement traumatisant.

    — Êtes-vous certaine ?

    — Pour la natation ou pour les six semaines sans enfiler tes patins ?

    Mon père pince ses lèvres. Je jurerais qu’il se mord la langue pour s’empêcher de me demander d’être raisonnable. Dans le fond, je connais la réponse. J’ai posé la question pour la forme. Je m’efforce de sourire pour lui dire que j’ai compris. Que je vais être raisonnable ! N’empêche que, nager, c’est l’horreur ! Pendant que les membres de mon club glisseront sur l’eau gelée de la patinoire, moi, je tournerai en rond dans la piscine municipale comme un poisson rouge prisonnier dans son aquarium.

    Même la perspective d’être exemptée de la corvée de balayeuse ne m’aide pas à avaler la pilule. Mais je n’ai pas le choix de ranger mon équipement jusqu’à la reprise de l’entrainement à l’automne : patins, casque, lunettes, gants, bas, protège-cou, protège-tibias, protège-genoux et mon nouveau skin se retrouvent abandonnés dans le fond de ma garde-robe. Cet été, j’avais comme objectif avoué d’améliorer mon endurance. Je comptais surtout battre Emma dans la compétition à la fin de la saison… Bien sûr que je patine pour m’amuser, n’empêche que le sentiment de remporter une course contre cette fille qui se pavane avec des airs de championne serait exaltant !

    Tout est à l’eau, c’est le cas de le dire !

    Un espoir dans le noir

    Une odeur de tarte aux pommes qui dore au four flotte dans la maison. Depuis mon accident, papa s’escrime à me remonter le moral. Mais ses efforts coulent comme un bloc de ciment dans le fleuve, sans faire de vagues. Mon moral s’est enfoncé sous l’eau et aucun flotteur n’est assez puissant pour le remonter. La bonne humeur et moi sommes désormais ennemies jurées… en tout cas, jusqu’à ce que ma condition physique me permette d’enfiler de nouveau mes patins.

    — Comment va ma petite grognonne ce matin ? demande papa en poussant la porte de ma chambre.

    La grognonne ne lève pas les yeux. Profitant de l’ouverture de la porte, mon chat Albert saute sur la table et déplace sept des mille-et-une pièces du casse-tête que j’ai péniblement réussi à assembler. Rien pour améliorer mon humeur !

    — Tu ne réponds pas à ton cellulaire, Charlie ? J’ai un appel pour toi, dit-il sur un ton enjoué qui ignore ma moue boudeuse.

    À contrecœur, je pousse la table et tente de me lever. Mon mollet gauche fait encore tellement mal que je retombe sur ma chaise comme un sac de patates. Même si je le veux de tout mon cœur, je dois l’admettre : je suis incapable de chausser des patins. Papa fonce vers la fenêtre et tire sur les rideaux que j’avais laissé fermés. Comme s’il n’attendait que ce moment pour me narguer, le soleil inonde ma chambre de lumière.

    — C’est Julia, chuchote-t-il, en me tendant son cellulaire.

    Julia, c’est ma demi-sœur. Enfin, quand je dis demi, c’est juste une façon de parler. Je suis plus petite qu’elle, mais ma demi-sœur n’est quand même pas deux fois plus grande que moi. Nous avons le même père, mais pas la même mère.

    — Bonjour, Jul’, dis-je sur le ton de quelqu’un enterré vivant dans le caveau d’un cimetière.

    — Oh ! la ! la ! Papa m’avait avertie que tu n’étais pas en forme. Mais à ce point ! Entre toi et moi, il est même un peu découragé.

    Entendre la voix de ma demi-sœur produit un effet magique sur mon humeur. Elle lève le voile qui m’étouffe depuis ma chute à l’aréna. Pendant un moment, je revois les images de mes vacances à la montagne avec elle et papa l’hiver dernier. Julia, je l’adoooore !

    — Bof ! Tu sais ce que c’est, dis-je en laissant trainer ma voix pour ne pas trahir ma joie de l’entendre. Papa t’a raconté le coup de poignard dans mon mollet ? Et que ma récupération passe par la natation ? Après le supplice du poignard, la torture de l’eau. Ma vie est finie !

    Julia coupe court à mes lamentations :

    — Devine où je suis.

    Quand Jul’ pose cette question, la réponse pourrait être n’importe où sur la planète : Chine, Sénégal, Australie… La dernière fois qu’elle m’a envoyé des photos, elle randonnait au Pérou. Quand elle n’étudie pas à l’université, elle voyage. Voilà pourquoi on ne se voit pas souvent, et qu’elle me manque tant.

    — Comment veux-tu que je le sache ?

    Oups ! Ma mauvaise humeur vient de refaire surface.

    — Excuse-moi, Jul’. Je suis désespérée. Où es-tu ?

    — Au bord d’un lac ma-gni-fi-que.

    J’ai envie de lui répondre que c’est tant mieux pour elle, parce que mon mollet me condamne à passer l’été au bord d’une piscine mu-ni-ci-pa-le. Décidément, mon humeur ne s’arrange pas.

    — Que dirais-tu de venir me rejoindre ? Je travaille dans un restaurant quelques heures par jour. Le reste du temps, je suis libre. Imagine-toi qu’une amie m’a prêté son chalet à la condition de garder son chien Pilou. C’est le paradis ici, Charlie ! Le lac, le grand air, les sorties en canot, les sentiers dans la montagne, les petits cafés écolos, une magnifique bibliothèque. C’est tout simplement a-do-ra-ble ! Et Pilou est si attachant. Une belle petite boule de poils.

    — …

    — Si tu en as envie, bien sûr.

    — …

    — Écoute, je ne

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