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Courageuse, est-ce juste un mot?
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Courageuse, est-ce juste un mot?
Livre électronique151 pages1 heure

Courageuse, est-ce juste un mot?

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À propos de ce livre électronique

L'inde, mon pays, mes racines, ma force. Depuis toute petite déjà, j'étais passionnée par la nature et toutes ses merveilles. Jouer avec la terre, sentir le vent et les gouttes de pluie sur mon visage, courir sans but étaient ma joie de vivre. Mais voilà, les souffrances et les plus sombres côtés de l'être humain se sont mis sur mon chemin. La misère, la violence, la mort, l'effondrement familiale, mon adoption.

Mon récit veut raconter ce parcours de combattante. Ce lien que j'entretiens avec la nature m'a permise d'affronter les périls, de naviguer en moi, dans mes émotions et de voir les beautés de ce monde.

Peut-être que des gens se reconnaitront au travers de ces lignes, la résilience dont j'ai du faire preuve leur fera écho.

A toutes épreuves de la vie le cœur ne demande qu'à être en paix. 

À PROPOS DE L'AUTRICE

Nanou a déjà vécu trois vies : avec sa famille en Inde, puis sa famille d’adoption en Suisse, enfin lors de son indépendance et la création de sa propre famille. Elle a éprouvé tôt le besoin de les raconter: ne rien perdre de la mémoire si fragile d’années qui l’ont construite est vital. Pour elle d’abord, ses enfants, sa sœur et toutes les personnes que son témoignage poignant impressionnera.





LangueFrançais
ÉditeurIsca
Date de sortie7 nov. 2024
ISBN9782889820481
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    Aperçu du livre

    Courageuse, est-ce juste un mot? - Nanou

    L’Inde

    Kerala

    Le début de mon histoire se déroule en Inde, au Kerala. Nous étions quatre enfants, je suis la dernière. J’avais une grande sœur, un grand frère, ma sœur Pimpri Chinchwad et moi. Avec mes parents, nous habitions dans une maison mitoyenne. Mon père s’appelait Devraj et ma mère Sangeetha.

    Mon père était alcoolique. Il y avait beaucoup de disputes à la maison, j’entendais souvent des cris. Les hommes ont un pouvoir extraordinaire en Inde, donc il tapait, il battait. J’entendais aussi les coups. Mais, parfois, il y avait de bons moments de fête. Celle de Holi, par exemple. La fête des couleurs, qui marque l’arrivée du printemps. Nous jetions des couleurs partout sur les gens. Chacune avait une signification. Mon père, lui, gonflait les bombes à eau, c’était la fête, tout le monde s’éclaboussait ! Mon père taquinait ma mère en faisant rebondir les bombes sur elle.

    J’ai de petits souvenirs, quelques séquences d’enfance. Des images de mousson. C’est à cette saison que mon père m’a demandé d’aller chercher du lait. Il a ajouté : « Ce qu’il te restera d’argent, tu le partageras avec ta sœur. » J’en suis revenue avec un billet que j’ai naturellement déchiré, moitié pour ma sœur, ce qui m’a valu cette réprimande paternelle : « Toi, tu n’as aucune notion de l’argent ! »

    J’avais beaucoup les yeux sur mon père et lui, les siens sur moi. Ma sœur était davantage liée à ma mère.

    À l’école, qui n’était pas mixte, je titillais la professeure en posant beaucoup de questions. Plus je cherchais des réponses, plus ça l’énervait. Je recevais des coups de règle sur les doigts et j’étais tout le temps punie. Il fallait rester assise, écouter sans rien dire.

    Un jour, ma mère est venue nous chercher à l’école, ma sœur et moi. Elle attendait, scrutant les fenêtres pour savoir si nous avions terminé. Elle nous a crié de nous dépêcher, mon père avait préparé une petite fête. Mais une fois de plus, j’étais punie, de sorte que toutes les filles sauf moi sont sorties. Je me suis mise debout sur la table, exigeant des réponses à mes questions d’enfant. Nous sommes finalement sorties et, devant la maison, une grosse marmite nous attendait. Mon père avait préparé du riz coloré au safran avec des raisins. Ce jour-là, il était en bonne forme. Il était net. Il n’avait pas bu comme à l’accoutumée.

    Un peu plus loin, il y avait de grands buildings. C’est là, dans l’appartement de ma grand-mère maternelle, que ma mère nous amenait après une sempiternelle dispute violente avec mon père. Je me rappelle d’énormes pneus stockés là. Quand nous avons quitté la région après la mort de notre mère, je me suis dit : il faut que je retienne un élément qui me restera pour me rappeler où c’était. C’est ce building-là, ces pneus-là, dans ces lieux-là.

    Je me souviens aussi de l’intérieur de l’appartement. Un bel appartement propre, comme on trouve en Suisse. Bref, nous avions une vie normale et ordinaire, avant le drame.

    Le feu

    Ma mère était dans la maison avec ma sœur aînée. Moi dehors. Je jouais avec la terre, devant la maison. Tout à coup, j’ai vu ma mère sortir en flammes. En fait, je voyais toutes ces flammes autour d’elle et je n’ai pas tout de suite vu que c’était elle. Elle s’approchait de moi, semble-t-il pour me prendre dans ses bras. J’ai arrêté de jouer, me suis approchée d’elle, mais mon père a crié et ma sœur Pimpri Chinchwad m’a sauté dessus pour me dégager. Je crois que j’ai une brûlure quelque part.

    Les gens sortaient des maisons. Ils ont recouvert maman d’un grand tissu pour étouffer le feu. La suite s’est passée très vite. Ils voulaient sauver ma mère. Quelqu’un a appelé une ambulance. Tout le monde est parti et nous avons été confiés à la voisine d’en face pour la journée.

    La nuit commençait à tomber quand cette voisine nous a annoncé : « Voilà, votre père va être de retour avec votre mère. Attendez un peu ici. » Nous étions tous collés contre le mur à attendre. Mon frère tremblait. Ma sœur Pimpri Chinchwad à ses côtés. Moi, je ne me posais pas tellement de questions. Sauf quand mon père est enfin arrivé. Il nous a dit : « C’est assez grave. Vous pouvez aller la voir mais ne la regardez pas. » J’ai demandé pourquoi. « Elle est toute brûlée, elle n’a plus de cheveux. »

    Ma mère était assise sur le lit. Mon frère se tenait à l’écart. Ma mère m’a prise sur ses genoux. Je n’ai pas regardé son visage. J’ai juste entrevu ses seins. Je me souviens d’une trace très foncée, un peu bleutée, sur le côté gauche du haut de son corps. La peau était très abîmée. Son sari était par terre, brûlé. Le tas de ses cheveux aussi sur le sol. Mon père insistait pour que mon frère lui dise au revoir. Il n’osait pas regarder, il tremblait de tout son corps.

    Le lendemain matin, notre père nous a annoncé que notre mère était décédée. Apparemment, quand elle s’est vue à l’hôpital dans un miroir, elle a eu un choc et son cœur s’est arrêté.

    J’ai entendu beaucoup d’histoires sur les femmes indiennes et leurs droits bafoués. Si son mari décède, la femme n’a plus de raison de vivre. Elle se donne la mort. C’est quelque chose de courant, qui se pratique aujourd’hui encore au fond des villages. En couple, ma mère vivait certainement une grande souffrance. S’immoler a peut-être été sa manière de dire : « Maintenant, ça suffit ! »

    Suite à ce drame, ma grande sœur est partie. Ce n’était pas la première fois qu’elle fuguait. D’après ce que mon père nous a dit plus tard, elle s’appelait Tshelly. Elle avait une peau tellement foncée qu’il blaguait en disant que c’était comme du poulet grillé. Et mon père nous a annoncé que nous allions partir dans sa famille au sud du Kerala. Ce départ sera parmi les derniers souvenirs que j’ai de mon frère. Il était plus grand que nous, 13 ou 14 ans. Il nous a donné deux bonbons à la mangue en nous disant : « Souvenez-vous de moi, c’est tout ce que je peux vous offrir. » Et il a ajouté : « Je vous attendrai. » Il m’a pointée du doigt : « Toi, je t’attendrai. Le temps qu’il faudra. Et je serai là. »

    Raksha Bandha : pendant cette fête qui célèbre les liens entre frères et sœurs, j’avais pu attacher, selon la coutume, un bracelet au poignet de mon frère bien aimé. Je l’observe ensuite avec tendresse et m’aperçois que le bleu du bracelet étincelle à l’image de notre relation si profonde.

    Et il est parti. Nous nous sommes retrouvées là avec ces deux bonbons. Et nous sommes parties avec mon père au sud du Kerala. À ce moment-là, je devais avoir 5 ans. J’étais toute petite.

    La maison de pierres rouges

    Nous nous sommes retrouvés dans une maison tout en longueur, faite de pierres rouges. À l’intérieur, le sol était jonché de bouses de vache composant un tapis séché. La cuisine comportait des feux de bois. Je me souviens de cette grande longueur à l’intérieur de la maison. À l’extérieur, nous avions du terrain. À côté, il y avait tout de suite la forêt, une forêt un peu comme la jungle.

    Dans cette maison vivaient ma grand-mère et mon grand-père paternels, ma tante, Tanghonie, enceinte, et son mari. Nous vivions ! Nous vivions avec tout ce qu’il y avait autour. Nous allions chercher à manger dans la forêt. C’étaient de beaux moments, proches de la nature, des animaux, des serpents, des hiboux, des sangliers, des cochons, des poissons. Le Kerala, c’est la nature, les palmiers, les fruits, les chakkas (jack fruit), d’immenses fruits qui ressemblent aux litchis. La papaye aussi, nous la récoltions et nous allions chercher de l’eau à une

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