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Mystères à l'île de Batz: Les enquêtes de Laure Saint-Donge - Tome 24
Mystères à l'île de Batz: Les enquêtes de Laure Saint-Donge - Tome 24
Mystères à l'île de Batz: Les enquêtes de Laure Saint-Donge - Tome 24
Livre électronique268 pages3 heuresLes enquêtes de Laure Saint-Donge

Mystères à l'île de Batz: Les enquêtes de Laure Saint-Donge - Tome 24

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À propos de ce livre électronique

Mission impossible pour Laure Saint-Donge : une amie à qui elle doit beaucoup lui a donné trois semaines pour retrouver des bijoux volés en mai 1944 à Brest… Un délai bien trop court pour une LSD aux prises avec de très sérieux problèmes personnels. Aura-t-elle les ressources mentales suffisantes pour tenter de retrouver le trésor à temps ? Et si elle se trouvait une alliée inattendue ? Et si le chemin de la vérité passait par l’île de Batz ? Et si l’impensable se produisait ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Michel Courat - Amoureux de la Bretagne depuis toujours, il y a exercé comme vétérinaire – dans le Trégor – durant une quinzaine d’années avant de partir s’occuper de la protection des animaux dans les Cornouailles anglaises pendant 9 ans. De 2008 à 2016 il a travaillé à Bruxelles comme expert en bien-être animal pour une ONG européenne. Ensuite, il a apporté son expérience au sein de l’OABA (Œuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoir) pendant 6 ans, avant de couler maintenant une paisible retraite à Locquirec."


LangueFrançais
ÉditeurÉditions Alain Bargain
Date de sortie17 juil. 2024
ISBN9782355507373
Mystères à l'île de Batz: Les enquêtes de Laure Saint-Donge - Tome 24

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    Aperçu du livre

    Mystères à l'île de Batz - Michel Courat

    PROLOGUE

    LOCQUIREC

    PLESTIN-LES-GRÈVES

    SAINT-POL-DE-LÉON

    Nous avons la douleur

    de vous faire part du décès brutal de

    Laure SAINT-DONGE

    (dite LSD)

    Journaliste et romancière

    De la part de

    Vincent Saint-Donge, son père,

    Isabelle Lebech et Tanguy Rosnoën, ses amis, Bruxelles, son fidèle compagnon

    Conformément à ses dernières volontés, son corps a été incinéré dans la plus stricte intimité.

    Ses cendres ont été dispersées dans la rivière Fal, devant l’église de Saint-Just-in-Roseland (Cornouailles anglaises).

    Ni messages, ni fleurs, ni messes, ni condoléances.

    Un don à une association de protection animale serait apprécié.

    Cet avis tient lieu de faire-part et de remerciement à toutes ses lectrices et tous ses lecteurs, à tous ses amis, et à tous ceux qui auront une pensée pour elle.

    I

    Bienvenue au paradis de la mer ! L’un des surnoms donnés à l’île de Batz dont vous allez découvrir le charme si particulier. Mais comme beaucoup de touristes ou d’occupants de résidences secondaires, séjournant temporairement sur cette parcelle de beauté sauvage, d’environ 304 hectares, vous n’en découvrirez pas l’âme en quelques heures ou même quelques semaines. Il faut longtemps pour devenir un Batzien ou une Batzienne quand on vient du continent. Il faut tellement de temps que généralement une vie n’y suffit pas, et plusieurs générations doivent se succéder avant que l’on vous considère enfin comme un îlien.

    À dire vrai, acquérir ce statut privilégié constitue le cadet des soucis de ces deux hommes qui éclusent leur deuxième muscadet à la terrasse du bar Le Kernoc, en cette belle matinée de septembre. Ils ont bien d’autres idées en tête.

    — Bon ! On lève le camp, la marée n’attend pas…

    — Et on a quelques milles à faire ! Il faut qu’on soit sur site avant 11 heures. Le temps de s’équiper et de plonger, on doit arriver quinze minutes avant l’étale de basse mer. D’après ce qu’on m’a dit, les courants peuvent être très forts même à 40 mètres de profondeur.

    — Faut pas oublier d’acheter la bouffe, on en aura besoin.

    — Et de quoi fêter notre possible découverte !

    — Te fais pas trop d’illusions, Thibault ! Aujourd’hui on se contente de faire du repérage. On passera aux choses sérieuses la prochaine fois. Si tout va bien.

    — On peut toujours rêver…

    — Tu peux !

    — Après tout, ce ne serait que du bonus !

    — Cela ne me déplairait pas non plus, mais cela relèverait du miracle…

    Et les deux silhouettes s’éloignent sur leur vélo électrique, direction les magasins d’alimentation de l’île, où ils trouveront tout ce qui leur faut : épicerie, charcuterie, eau minérale, petits gâteaux, et une bouteille de rhum pour fêter leur retour. Juste quelques centaines de mètres à parcourir.

    *

    Dans un des bars du Tintagel, l’un des deux bateaux de la Cornish Ferries qui assure les liaisons Roscoff-Plymouth, Laure pousse un cri de surprise à la vue de cet homme longiligne, élégamment vêtu d’un jean slim et d’un polo Ralph Lauren couleur mandarine, qui moule parfaitement sa carrure d’athlète.

    — Peter ! Peter Clowance !

    Trente ans et des poussières, un visage bronzé et un sourire à la James Bond. Ajoutez des yeux gris, aux reflets métalliques sortis directement d’un magazine de mode sans photoshoppage, la démarche assurée d’un séducteur sûr de lui, et vous entendrez les ovaires de Laure frissonner. Une sensation plus qu’inattendue dans sa situation actuelle, après un retour de Paimpol émaillé de sacrées surprises. Le beau mâle qui s’avance vers le zinc du Macareux, le bar du pont n° 7, la regarde pour s’assurer que c’est bien à lui que cette jeune femme parle. Quelques secondes encore et son cerveau percute. Il met un nom sur ce visage si spécial. Et à dire vrai inoubliable.

    — My godness ! Laure ! Qu’est-ce que tu fais sur ce ferry ?

    — Je pourrais te retourner la question ! Mais si on s’embrassait d’abord ? En tout bien tout honneur, évidemment ! Dis donc, la roue a tourné depuis notre… aventure à Pleumeur-Bodou*, mais toi tu n’as pas changé. Tu es toujours aussi beau mec ! ajoute Laure avec un petit sourire.

    — « La roue a tourné » ? Excuse-moi, mais je ne possède pas le français encore parfaitement.

    — Arrête ! Tu parles vraiment bien maintenant. Tu as juste gardé cette pointe d’accent british que nous aimons tant ! Mais tu as raison, c’est une expression impossible à traduire, et sans doute difficile à comprendre ; cela veut juste dire que de l’eau a coulé sous les ponts depuis notre dernière rencontre…

    — Excuse me, but « la roue a tourné » et maintenant « de l’eau a coulé sous les ponts », je souis, pardon, je suis perdu, réagit Peter Clowance en lui lançant un regard effaré.

    — C’est à moi de m’excuser ! Je suis tellement surprise et émue en te revoyant que je m’emmêle les pinceaux…

    Manifestement cette dernière expression is the last straw that breaks the camel’s back. In French, mais je ne garantis pas l’exactitude de la traduction, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Peter éclate de rire, embrasse LSD très amicalement et lui lance :

    — Je suis vraiment désolé, Laure, mais je ne comprends strictement rien à ce que tu me dis. Je crois qu’on devrait s’asseoir et discuter autour d’un verre. Je te laisse choisir la table et moi je vais chercher les boissons au bar. Qu’est-ce que tu veux ?

    Une question simple, à laquelle Laure a déjà répondu des milliers de fois au cours de sa vie, et pourtant elle hésite. Son cœur balance entre pinte de bière et double calvados, mais sa raison s’arrête sur… un diabolo menthe. Un choix qui peut surprendre quand on connaît bien le personnage et son goût prononcé pour certains breuvages alcoolisés, mais qui n’étonnera pas les lecteurs de ses précédentes aventures dans la cité corsaire. Laure s’est installée tout près d’un des sabords. Pourtant ses yeux oublient bien vite cette étendue baignée de soleil qui lui offre son immensité parsemée de reflets moirés, dansant au gré des vagues. Son esprit vogue ailleurs sur un océan plus vert et étonnamment terrestre, en l’occurrence le practice du golf de Saint-Samson à Pleumeur-Bodou, du temps où le séduisant Peter Clowance avait bien failli faire basculer son cœur, et son corps, avec son charme et cette attirance magnétique qu’il dégageait. Quelle ahurissante coïncidence que de le retrouver dans ces circonstances, à ce moment précis de sa vie personnelle et sentimentale ! Le temps de poser sa pinte de Proper Job et le verre de Laure, Peter revient à cette conversation qui l’a laissé si perplexe.

    — Bon ! Maintenant, tu m’expliques ce que tu voulais dire, avec des mots normaux ?

    — Je voulais juste te faire comprendre que depuis la dernière fois qu’on s’est vus, il m’est arrivé beaucoup de choses, et que je ne suis plus tout à fait la même femme que celle à qui tu donnais des cours…

    — En tout cas tu es toujours aussi jolie. Tu es mariée ? Tu as des enfants ?

    Une double question qu’elle ressent comme un double coup de poing dans son ventre si fragile. Elle réussit pourtant à rester impassible, et trouve la force mentale pour sourire, de cette manière si spéciale due à la cicatrice qui creuse sa joue droite.

    — Eh non ! Je suis restée une femme libre, sans attaches – elle lui montre ses deux mains exemptes de toute bague – et je suis très bien comme ça.

    Oh la menteuse ! Si l’intérieur de son corps n’est plus qu’une larme, il y nage un minuscule embryon d’espoir. Pourtant ses yeux pétillent quand elle reprend :

    — Je ne vais pas te raconter ma vie pendant ces quelques années. Je te dirai seulement que j’ai bien vécu, mené beaucoup d’enquêtes, rencontré les situations les plus invraisemblables et écrit beaucoup de livres et de nombreux articles. Mais comme ce serait trop long à t’expliquer, parle-moi de toi plutôt.

    Les yeux du professeur de golf s’illuminent comme si un feu d’artifice jaillissait du fond de ses rétines.

    — Moi, je vais devenir un daddy ! Un papa ! Tu te rends compte ! Si tu savais comme je suis heureux ! Et Claire aussi ! On veut partager ce bonheur avec nos parents, et c’est pour ça que nous avons pris ce ferry une semaine avant la date prévue. Là, comme elle se repose dans la cabine, j’en ai profité pour faire un tour dans les diverses boutiques du bateau… et je tombe sur toi ! Je trouve cela extraordinaire, isn’t it ?

    Laure doit user de tout son courage pour affronter la nouvelle annoncée par son compagnon de rencontre, et garder un visage aussi impassible que faire se peut. Elle prend encore un peu plus sur elle pour ajouter d’une voix empreinte de fausse sincérité :

    — Oh ! Quelle bonne nouvelle ! Je suis si heureuse pour toi, ou plutôt pour vous. Vas-y ! Raconte-moi comment vous vous êtes rencontrés et ce qui s’est passé dans ta vie depuis qu’on s’est perdus de vue.

    *

    Alex et son compère Thibault naviguent sur une mer plate comme une assiette de spaghettis sans sel. Ils naviguent – qu’écris-je ! – ils volent sur l’eau à bord de leur semi-rigide, propulsé par deux moteurs Yamaha de 80 chevaux, direction l’archipel des Sept-Îles, au large de la Côte de Granit rose. Un coup d’œil à son GPS et le barreur réduit un peu les gaz. Ils arrivent à proximité d’une zone protégée, et il ne ferait pas bon se faire repérer par la gendarmerie maritime ou les veilleurs du sémaphore de Ploumanac’h. Leur objectif n’est plus qu’à moins de deux milles. Pour être précis et si vous voulez les imiter, leur cible se situe à 5 milles nautiques (9,260 kilomètres) à l’est de l’île Rouzic, célèbre pour ses fous de Bassan et à 3 milles au nord de Port-Blanc. La position exacte : latitude 48° 53’ 228’’ nord et longitude 3° 18’ 697’’ ouest. Le Zodiac approche de la zone fatidique quand Alex diminue encore la vitesse. Thibault à ses côtés ne réagit pas. Ils ont tellement de fois répété ensemble cette manœuvre… Les moteurs tournant au ralenti sont presque inaudibles quand Alex murmure :

    — La prudence s’impose : sur l’eau et surtout par mer plate, les sons se propagent très facilement. On est bons, tu peux larguer l’ancre, mais donne du bout*, il faut au moins 70 mètres. Dès que tu penses avoir croché, tu me dis.

    Le cordage glisse en silence sur le davier de proue. Les secondes s’écoulent tout aussi calmement et les deux occupants du Lady Bird ne parlent pas. Trop excités par les minutes à venir, et les surprises qu’ils espèrent trouver au fond.

    Le bateau sécurisé, les deux hommes s’équipent, n’échangeant que quelques mots. Combinaison, palmes, détendeur, bouteilles, masque, ceinture de plomb, poignard, montre connectée, profondimètre, GPS sous-marin, lampe, rien ne manque à leur équipement. Avant de se préparer à la plongée proprement dite, Thibault résume en quelques phrases leur objectif du jour, parlant toujours à voix basse :

    — On est mouillés à environ 300 mètres de l’épave. Sur une base de 10 mètres par minute on doit donc l’atteindre en une demi-heure. Compte tenu des paliers de décompression à la remontée, cela nous laisse maximum vingt-cinq à trente minutes sur site. Cela ne fait pas beaucoup…

    — Je sais, mais on n’a pas le choix ; à une telle profondeur, on est déjà limite avec de l’air comprimé seul. De toute façon, aujourd’hui, on se contente d’une exploration rapide. On ne fouille rien, on ne ramasse rien, on fait juste du repérage. Il va falloir faire attention, très attention. L’épave est cassée en plusieurs morceaux, et il faut essayer de retrouver les cabines des officiers. Je commencerai par les divers compartiments à partir de la proue, et toi de la poupe. Tu essaies de jeter un œil sur le maximum de pièces, et surtout de bien te repérer. Pour ne pas explorer les mêmes zones la prochaine fois…

    — J’y ai pensé, j’ai apporté des dizaines de bouts de garcette rouge, et je pensais les accrocher à chaque fois que j’ai fini d’explorer une zone.

    — Très bonne idée ! Et tu en as en rab pour moi ?

    — J’en ai préparé une centaine, cinquante pour toi, idem pour moi. Tiens ! Je te file les tiennes.

    Qui finissent aussitôt dans le sac que chaque plongeur se doit d’emmener, au cas où…

    Un coup d’œil à sa montre et Alex enchaîne :

    — Il va falloir y aller. À cause des courants, il faut vraiment qu’on soit en bas juste avant l’étale et qu’on remonte juste après. Et n’oublie pas de faire gaffe aux tacauds et aux congres, l’épave en est pleine et tu parles de saloperies ces bestioles !

    — T’en fais pas, les tacauds c’est sympa et les congres à cette heure-là ils dorment.

    — Mais si tu les réveilles, à mon avis ils seront de mauvaise humeur !

    Le temps de capeler les masques, de bien fixer l’embout de leur détendeur, et les deux plongeurs s’enfoncent dans la mer.

    *

    — Donc, si je comprends bien, tu as séduit Claire en lui donnant des leçons de golf ? Je me rappelle que tu avais employé la même méthode avec moi… Et à part Claire et moi, j’imagine que tu as dû faire pas mal de conquêtes féminines…

    Peter Clowance rigole un bon coup avant de répondre, sourire aux lèvres.

    — Ne me dis pas que tu es jalouse ! Mon travail n’est pas si facile…

    — Mais tu as des compensations… Pour expliquer les mouvements corrects pour bien frapper la balle, tu dois souvent te mettre tout près de ton élève, tout tout près. Et comme l’été la plupart de tes clientes sont plutôt bien foutues, et ne portent qu’une mini-jupette, un polo bien décolleté, et un parfum envoûtant, cela facilite les contacts, au propre et au figuré, non ?

    — Je ne te dirais pas le contraire, mais ça c’était avant… Avant #balancetonporc, #metoo et le reste… Et, excuse-moi de te le rappeler, mais il me semble que quand je te donnais des leçons, je ne sais pas lequel de nous deux était le plus entreprenant…

    Laure se réfugie derrière son grand verre de diabolo menthe pour cacher son sourire.

    — Tu oublies aussi que la plupart de mes leçons, je ne les donne pas à de jolies demoiselles, comme vous dites en France, mais aussi à des messieurs. Ou à des femmes… plus mûres. Je peux te certifier que certaines de ces dames peuvent être très mignonnes, et… très insistantes, si tu vois ce que je veux dire. Que ce soit en Angleterre ou en Bretagne. Et de toute façon, tu ne m’as pas laissé finir : j’ai effectivement donné des cours à Claire en juin de l’année dernière ; mais je ne lui ai donné qu’une leçon.

    — Une seule ?

    — Eh oui ! En sortant du practice, elle a glissé sur une balle qu’un joueur avait dû faire tomber. Elle s’est fait une sale entorse, et n’a pas pu jouer pendant trois semaines. Mais elle logeait à l’hôtel du golf, et comme je prenais souvent de ses nouvelles quand je la voyais au bar…

    — "Le 19" ?

    — C’est ça ! Donc on a fini par boire un verre ensemble, dîner ensemble…

    — Et à la fin des vacances vous êtes repartis tous les deux en Angleterre.

    — Absolutely ! Elle préparait un PhD* de physiologie végétale à l’université d’Exeter. Moi j’étais pro dans un golf hôtel à Ashbury, dans le Devon aussi. J’étais à moins de quarante minutes de sa faculté, donc on se voyait souvent… Comme mes parents habitent en Cornwall et sa grand-mère aussi, tu vois, on était faits pour se rencontrer.

    — Et le bébé, il était prévu si tôt ?

    Le séduisant sourire du beau gentleman golfeur s’est terni brutalement. L’air redevenu plus sérieux, il lance :

    — Assez parlé de moi ! Tu rencontreras sans doute Claire avant l’arrivée. Et toi, toujours avec ton pharmacien ? Comme tu m’as dit que tu étais une femme libre je me pose des questions.

    *

    Hugues, son pharmacien comme dit Peter, profite de son jour de congé pour traînailler son spleen derrière la fenêtre de sa maison de Trémel, les yeux rivés sur le barbecue de pierre qui borde la terrasse et le salon de jardin. Tandis que Sandra, sa nouvelle préparatrice et… compagne, s’affaire dans la cuisine en chantant, son cerveau dérive. Dans une mer de mirages où flotte un fantôme qu’il sait bien vivant : Laure. Sa silhouette danse et virevolte devant ses yeux vides de toute image réelle. Des jours et des jours qu’il n’a plus de nouvelles de sa Laurinette.

    Isabelle et Tanguy, leurs amis communs, ne cessent de lui répéter qu’ils ne savent rien de plus, que Laure ne leur a fait aucune confidence. Comment pourrait-il gober un mensonge pareil ? À force de harceler Tanguy, celui-ci a fini par lui lâcher quelques éléments de réflexion.

    — Que veux-tu que je te dise ? Elle nous a largués à Paimpol, après la fin de l’enquête de Saint-Malo, et elle ne nous a rien dit de spécial. Ah si ! Qu’elle était crevée et qu’elle dormirait peut-être chez elle, à Locquirec, au lieu de passer la nuit chez toi. Elle avait l’air un peu bizarre, c’est sûr ; je pense que l’enquête l’a beaucoup secouée. Comme en plus elle venait de revoir Annef*, elle a pu avoir envie de passer un peu de temps avec elle ? Elle savait que tu ne l’attendais pas ce jour-là et que de toute façon, tu étais en pleine saison. Peut-être qu’elle n’avait pas envie de te déranger ?

    Et c’est tout ce qu’Hugues avait pu tirer du professeur d’informatique. Des explications en forme d’énigmes. Il avait appelé Laure des dizaines de fois sur son portable, pour tomber, inévitablement, sur sa messagerie. Il était allé à sa maison de Locquirec, sans jamais y trouver le moindre signe d’activité. Annef n’avait plus vu LSD depuis leur dernière soirée malouine, et Isabelle restait aussi muette que son conjoint. Mais la disparition soudaine de la femme de sa vie, comme il l’appelait si souvent avant sa rencontre avec Sandra, n’était pas le seul élément troublant. Hugues avait la garde du chien de Laure, Bruxelles, le curieux croisement d’un jack russell et d’un king-charles (à petites oreilles) et le chien s’était évaporé justement la nuit où Laure roulait sur la route du retour. Une coïncidence plus que troublante. Aurait-elle pu passer le reprendre ce soir-là sans qu’il n’entende rien ? Impossible ! Il

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