Histoire de Beder et de Giauhare
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Aperçu du livre
Histoire de Beder et de Giauhare - One Thousand and One Nights
One Thousand and One Nights
Histoire de Beder et de Giauhare
SAGA Egmont
Histoire de Beder et de Giauhare
Traduit par Antoine Galland
Titre Originalأَلْفُ لَيْلَةٍ وَلَيْلَةٌ
Langue Originale : Arabe
Les personnages et le langage utilisés dans cette œuvre ne représentent pas les opinions de la maison d’édition qui les publie. L’œuvre est publiée en qualité de document historique décrivant les opinions contemporaines de son ou ses auteur(s).
Image de couverture : Shutterstock
Copyright © 900, 2021 SAGA Egmont
Tous droits réservés
ISBN : 9788726790320
1ère edition ebook
Format : EPUB 3.0
Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée/archivée dans un système de récupération, ou transmise, sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, sans l'accord écrit préalable de l'éditeur, ni être autrement diffusée sous une forme de reliure ou de couverture autre que dans laquelle il est publié et sans qu'une condition similaire ne soit imposée à l'acheteur ultérieur.
Cet ouvrage est republié en tant que document historique. Il contient une utilisation contemporaine de la langue.
www.sagaegmont.com
Saga Egmont - une partie d'Egmont, www.egmont.com
La Perse est une paille de la terre de si grande étendue, que ce n’est pas sans raison que ses anciens rois ont porté le titre superbe de rois des rois. Autant qu’il y a de provinces, sans parler de tous les autres royaumes qu’ils avoient conquis, autant il y avoit de rois. Ces rois ne leur payoient pas seulement de gros tributs, ils leur étoient même aussi soumis que les gouverneurs le sont aux rois de tous les autres royaumes.
Un de ces rois qui avoit commencé son règne par d’heureuses et de grandes conquêtes, régnoit il y avoit de longues années, avec un bonheur et une tranquillité qui le rendoient le plus satisfait de tous les monarques. Il n’y avoit qu’un seul endroit par où il s’estimoit malheureux, c’est qu’il étoit fort âgé, et que de toutes ses femmes il n’y en avoit pas une qui lui eût donné un prince pour lui succéder après sa mort. Il en avoit cependant plus de cent, toutes logées magnifiquement et séparément, avec des femmes esclaves pour les servir, et des eunuques pour les garder. Malgré tous ces soins à les rendre contentes et à prévenir leurs désirs, aucune ne remplissoit son attente. On lui en amenoit souvent des pays les plus éloignés ; et il ne se contentoit pas de les payer, sans faire de prix, dès qu’elles lui agréoient, il combloit encore les marchands d’honneurs, de bienfaits et de bénédictions pour en attirer d’autres, dans l’espérance qu’enfin il auroit un fils de quelqu’une. Il n’y avoit pas aussi de bonnes œuvres qu’il ne fit pour fléchir le ciel. Il faisoit des aumônes immenses aux pauvres, de grandes largesses aux plus dévots de sa religion, et de nouvelles fondations toutes royales en leur faveur, afin d’obtenir par leurs prières ce qu’il souhaitoit si ardemment.
Un jour que selon la coutume pratiquée tous les jours par les rois ses prédécesseurs, lorsqu’ils étoient de résidence dans leur capitale, il tenoit l’assemblée de ses courtisans, où se trouvoient tous les ambassadeurs et tous les étrangers de distinction qui étoient à sa cour, où l’on s’entretenoit non pas de nouvelles qui regardoient l’état, mais de sciences, d’histoire, de littérature, de poésie et de toute autre chose capable de recréer l’esprit agréablement ; ce jourlà, dis-je, un eunuque vint lui annoncer qu’un marchand, qui venoit d’un pays très-éloigné avec une esclave qu’il lui amenoit, demandoit la permission de la lui faire voir. « Qu’on le fasse entrer et qu’on le place, dit le roi ; je lui parlerai après l’assemblée. « On introduisit le marchand, et on le plaça dans un endroit d’où il pouvoit voir le roi à son aise, et l’entendre parler familièrement avec ceux qui étoient le plus près de sa personne.
Le roi en usoit ainsi avec tous les étrangers qui dévoient lui parler, et il le faisoit exprès, afin qu’ils s’accoutumassent à le voir, et qu’en le voyant parler aux uns et aux autres avec familiarité et avec bonté, ils prissent la confiance de lui parler de même, sans se laisser surprendre par l’éclat et la grandeur dont il étoit environné, capable d’ôter la parole à ceux qui n’y auroient pas été accoutumés. Il le pratiquoit même à l’égard des ambassadeurs ; d’abord il mangeoit avec eux, et pendant le repas, il s’informoit de leur santé, de leur voyage et des particularités de leur pays. Cela leur donnoit de l’assurance auprès de sa personne, et ensuite il leur donnoit audience.
Quand l’assemblée fut finie, que tout le monde se fut retiré, et qu’il ne resta plus que le marchand, le marchand se prosterna devant le trône du roi, la face contre terre, et lui souhaita l’accomplissement de tous ses désirs. Dès qu’il se fut relevé, le roi lui demanda s’il étoit vrai qu’il lui eût amené une esclave, comme on le lui avoit dit, et si elle étoit belle ?
« Sire, répondit le marchand, je ne doute pas que votre Majesté n’en ait de trèsbelles, depuis qu’on lui en cherche dans tous les endroits du monde avec tant de soin ; mais je puis assurer sans craindre de trop priser ma marchandise, qu’elle n’en a pas encore vu une qui puisse entrer en concurrence avec elle, si l’on considère sa beauté, sa belle taille, ses agrémens et toutes les perfections dont elle est partagée. » « Où est-elle, reprit le roi ? Amène-la-moi. » « Sire, repartit le marchand, je l’ai laissée entre les mains d’un officier de vos eunuques ; votre Majesté peut commander qu’on la fasse venir. »
On amena l’esclave ; et dès que le roi la vit, il en fut charmé à la considérer seulement par sa taille belle et dégagée. Il entra aussitôt dans un cabinet où le marchand le suivit avec quelques eunuques. L’esclave avoit un voile de satin rouge rayé d’or, qui lui cachoit le visage. Le marchand le lui ôta, et le roi de Perse vit une dame qui surpassoit en beauté toutes celles qu’il avoit alors et qu’il avoit jamais eues. Il en devint passionnément amoureux dès ce moment, et il demanda au marchand combien il la vouloit vendre.
« Sire, répondit le marchand, j’en ai donné mille pièces d’or à celui qui me l’a vendue, et je compte que j’en ai déboursé autant depuis trois ans que je suis en voyage pour arriver à votre cour. Je me garderai bien de la mettre à prix à un si grand monarque : je supplie votre Majesté de la recevoir en présent, si elle lui agrée. » « Je te suis obligé, reprit le roi ; ce n’est pas ma coutume d’en user ainsi avec les marchands qui viennent de si loin dans la vue de me faire plaisir : je vais te faire compter dix mille pièces d’or. Seras-tu content ? »
« Sire, repartit le marchand, je me fusse estimé très-heureux si votre Majesté eût bien voulu l’accepter pour rien ; mais je n’ose refuser une si grande libéralité. Je ne manquerai pas de la publier dans mon pays et dans tous les lieux par où je passerai. » La somme lui fut comptée ; et avant qu’il se retirât, le roi le fit revêtir en sa présence d’une robe de brocard d’or.
Le roi fit loger la belle esclave dans l’appartement le plus magnifique après le sien, et lui assigna plusieurs matrones et autres femmes esclaves pour la servir, avec ordre de lui faire prendre le bain, de l’habiller d’un habit le plus magnifique qu’elles pussent trouver, et de se faire apporter les plus beaux colliers de perles et les diamans les plus fins, et autres pierreries les plus riches, afin qu’elle choisît elle-même ce qui lui conviendroit le mieux.
Les matrones officieuses, qui n’avoient autre attention que de plaire au roi, furent elles-mêmes ravies en admiration de la beauté de l’esclave. Comme elles s’y connoissoient parfaitement bien : « Sire, lui dirent-elles, si votre Majesté a la patience de nous donner seulement trois jours, nous nous engageons à la lui faire voir alors si fort au-dessus de ce qu’elle est présentement, qu’elle ne la reconnoîtra plus. » Le roi eut bien de la peine à se priver si long-temps du plaisir de la posséder entièrement. « Je le veux bien, reprit-il, mais à la charge que vous me tiendrez votre promesse. »
La capitale du roi de Perse étoit située dans une isle, et son palais qui étoit trèssuperbe étoit bâti sur le bord de la mer. Comme son appartement avoit vue sur cet élément, celui de la belle esclave, qui n’étoit pas éloigné du sien, avoit aussi la même vue ; et elle étoit d’autant plus