Sabena, ma vérité: Tout ce que l'on n'a jamais osé dire depuis dix ans
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À propos de ce livre électronique
A Kinshasa ou à Atlanta, c’est un sentiment de bien-être qui pénétrait le Belge montant à bord d’un des appareils à la cocarde bleue et blanche. Comme s’il avait déjà posé un pied à la maison, en feuilletant les journaux nationaux et en retrouvant l’accent bien de chez nous du personnel de cabine. La Sabena, on la critiquait et on l’encensait en même temps … mais on la pensait éternelle...
Et pourtant, le 7 novembre 2001, le Tribunal de Commerce de Bruxelles écrit le mot « fin » au bas du livre d’histoire de la compagnie. Dans notre pays, peu de faillites ont eu un tel retentissement et engendré de telles conséquences pour autant de personnes et de familles.
Ce livre retrace deux histoires qui s’entrecroisent et s’entremêlent : celle d’un homme, fils d’immigrés siciliens qui a déjà connu plusieurs vies et celle, nébuleuse et surtout peu glorieuse, des dernières années de la Sabena. Homme de terrain, Salvatore « Toto » Bongiorno a pu mesurer de près l’évolution de la compagnie, entre son métier de chef de piste et sa responsabilité de délégué syndical. Son parcours étonnant et truffé de rencontres improbables le fera traverser en première ligne l’ouragan de la faillite la plus destructrice de l’histoire du pays et le mettra à l’avant-plan des médias.
10 ans après, cet ouvrage aborde sans langue de bois toutes les questions sensibles que les Belges sont en droit de se poser.
Salvatore Bongiorno nous y livre sa vérité, dévoile les dessous de la Sabena et les coulisses de la faillite, et n’hésite pas à égratigner ceux qui doivent l’être. Malversations ? Détournements ? Négligences ? Caisses noires ? Qui a laissé sombrer la Sabena ?
EXTRAIT
Je suis entré à la Sabena le 1er avril 1994. J’avais été engagé en tant que chauffeur-chargeur au département loading. Les premiers jours, mon instructeur, Freddy Vanhuysse - je dis souvent que si je devais être réincarné, ce serait volontiers en Freddy Vanhuysse car c’est un homme d’une très grande sagesse et qui inspire énormément de confiance - me trouvait morose et s’enquit de savoir ce qui me tracassait. Je lui raconte mon histoire et la raison de mon entrée à la Sabena. Mais aussi que mes copains me boudent car ils n’approuvent pas mon changement de carrière. Il m’explique alors tout simplement que dans la vie, si on s’expose et qu’on décide d’avancer, on est toujours critiqué d’une manière ou d’une autre, qu’il n’y a rien à y faire, sinon de rester comme un mouton et de brouter avec les autres.
CE QU’EN PENSE LA CRITIQUE
- « Salvatore [...] Bongiorno n’a jamais eu la langue dans sa poche et quand il écrit, c’est dans le vitriol qu’il trempe sa plume.» - La Dernière Heure
À PROPOS DES AUTEURS
Fier de ses origines familiales, Salvatore Bongiorno (Toto pour tous ses amis) est aussi un fervent défenseur de l’Humain. De son premier job dans l’hôtellerie à son restaurant en passant par sa carrière à la Sabena, le plus beau moment de sa vie, cet homme passionné et passionnant reste marqué par le gâchis que fut la faillite de la compagnie aérienne. Dix ans après, c’est en mémoire des milliers de collègues qui ont souffert de cette perte qu’il souhaitait transmettre sa version des faits.
Journaliste, reporter et photographe, Eric Vancleynenbreugel parcourt la planète depuis plus de quinze années pour la presse spécialisée et grand public et est aussi l’auteur de plusieurs guides de voyages. Le monde de l’aéronautique ne lui est donc pas inconnu. Touché comme la plupart des Belges par cette honteuse page de notre histoire et fasciné par le parcours de Salvatore Bongiorno, il n’a pas hésité une seconde à relever le défi de transcrire cette incroyable histoire croisée.
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Avis sur Sabena, ma vérité
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Aperçu du livre
Sabena, ma vérité - Salvatore Bongiorno
I
Toto, qui es-tu ?
Originaire du village de Villarosa en Sicile, mon père a débarqué en 1962 en Belgique, tout seul, sans sa famille, pour venir travailler dans une mine de charbon de la région montoise. Avec ses frères, il exploitait au pays une mine de soufre, une petite exploitation qui venait d’être endeuillée par un éboulement. Onze ouvriers étaient restés sur le carreau. N’ayant pas d’assurance pour couvrir ce risque, il a préféré quitter l’île pour se faire oublier un moment…
A l’époque, il fallait un permis de travail pour obtenir un contrat de cinq ans, le plus souvent dans un charbonnage. Pour chaque ouvrier envoyé en Belgique, l’Italie recevait une tonne de charbon ! Mais mon père a très rapidement souffert du mal du pays et s’est dit que, si c’était pour travailler dans les mines, autant le faire en Sicile, au soleil et en vivant auprès de sa famille. Il s’est donc mis en tête de rentrer au village pour affronter le procès. Arrivé avec son bagage à la gare du Midi, en route pour l’Italie, il rencontre un Sicilien issu lui aussi de Villarosa. La discussion s’engage, mon père lui explique les raisons de son retour et l’homme lui offre alors un travail de chauffeur de camion dans la petite société de transport qu’il a développée. Dans ces conditions, plus question de quitter la Belgique… mais bien de retrouver sa famille. Il nous a donc fait venir en deux vagues de quatre enfants. J’avais à peine deux ans.
Alain Delon et Roger Moore
Avec mes parents, mes deux frères et mes cinq sœurs, nous habitions près de la place Dailly à Bruxelles et en face de chez nous, il y avait une librairie. Un jour, la libraire, qui me connaissait bien, me proposa de faire la tournée de distribution du journal « Le Soir » dans le quartier. Et c’est ainsi que du haut de mes huit ans, j’ai accepté mon premier job et ai gagné mon premier argent de poche. Sac en bandoulière rempli de journaux pliés en deux, je passais de boîte en boîte et gagnais royalement 70 francs belges (± 1,80 €) par semaine ! Bien entendu, mon travail scolaire s’en est ressenti.
Selon le souhait de mon père qui avait suivi une formation de plombier, j’ai tout de même obtenu un certificat d’électricien. Après une année dans le bâtiment, j’ai renoncé. Je n’avais que 16 ans mais je savais déjà ce que je voulais ou plutôt ce que je ne voulais pas. Un de mes copains, qui était commis au Royal Windsor Hotel, l’un des six grands hôtels de la capitale à l’époque, m’a suggéré d’y postuler car la direction cherchait constamment du nouveau personnel. Me voilà donc salarié dans un cinq étoiles ! Il fallait servir en costume et ma mère, pour mon premier jour, ne m’a rien trouvé d’autre qu’une abominable chemise en dentelle qui a fait rire tous mes collègues. J’entretenais de bons contacts avec la clientèle et durant mes cinq années de service au Windsor, j’ai travaillé dans tous les départements. J’y ai servi les plus grandes stars de l’époque, comme Charles Aznavour qui, à chaque rencontre, s’est montré sous un jour très désagréable, paraissant toujours de mauvaise humeur ; Julien Clerc, dont les enfants étaient, je me souviens, assez difficiles ; Hugues Aufray, qui séjournait à Bruxelles le lendemain de la mort de Claude François ; Marie Myriam, qui venait de gagner l’Eurovision - je suis entré dans sa chambre au moment où elle était au téléphone avec sa mère, pleurant de joie en lui racontant sa victoire ; Alain Delon, qui parlait d’ailleurs pas mal l’italien. J’ai travaillé une longue période dans la boîte de nuit de l’hôtel, le « Crocodile Club ». Pour multiplier les extras, je faisais également le room service après la fermeture de la discothèque. C’est ainsi qu’un matin, de très bonne heure, Alain Delon me commande dix bouteilles de champagne. Je frappe à sa porte et vois l’acteur entouré de femmes plus séduisantes les unes que les autres. Il signe le bon, sort un billet de 5000 francs belges (125 €) et me demande combien nous sommes de service. Je réponds : « Cinq, Monsieur Delon ! » Il me demande si je suis Italien et me suggère - toujours en italien - de partager le pourboire avec mes collègues. Un peu plus tard, il me retéléphone pour venir chercher les verres sales. Je découvre Delon nu dans sa salle de bains et qui me lance en italien : il reste deux bouteilles, tu peux les avoir. Puis il me demande si j’ai bien partagé mon billet et je lui réponds oui, évidemment… Et là, il m’assène tout de go : « T’es un Italien, t’as pas partagé ! » Il avait raison…
Autre anecdote : je me retrouve dans l’ascenseur avec Roger Moore, vêtu comme dans un James Bond d’un sublime smoking blanc et fumant le cigare. Le temps de rapidement déposer une note à la réception et je remonte pour une nouvelle course. Là, je suis à nouveau avec Roger Moore mais cette fois habillé en jeans. Etrange… Un peu plus tard, je repasse dans le hall et croise deux Roger Moore, en réalité le vrai et son sosie, la doublure qui tourne les cascades et donne le change aux paparazzis et aux fans… Il y avait aussi Richard Kiel, le Requin à la fameuse mâchoire d’acier de L’Espion qui m’aimait… Tous étaient à Bruxelles pour la sortie du dernier épisode des aventures du plus célèbre espion de Sa Gracieuse Majesté.
L’hôtel avait organisé une petite exposition sur la taille du diamant dans le lobby et je détaillais, fasciné, les machines qui avaient été installées pour l’occasion. Jean Piat, célèbre à l’époque pour son rôle du chevalier Lagardère, passe derrière moi juste à l’instant où je me retourne et je m’écrie sans réfléchir : « Tiens, Lagardère ! » L’acteur a réagi de façon sympathique et on a discuté un long moment ensemble, sans doute une bonne heure, jusqu’à ce que mon manager vienne me rappeler à l’ordre. Très gentiment, Jean Piat lui a demandé de pouvoir poursuivre la discussion engagée avec moi.
On était en 1976, j’avais seize ans et, à l’occasion des vacances, j’ai rejoint mon père en Sicile. Il venait d’acheter un appartement pour s’installer définitivement dans son île natale. Un ami nous avait invités pour un barbecue dans son vignoble. Au cours du repas, mon père apprend que le vignoble est à vendre. C’était son rêve depuis toujours, je le savais : passer ses vieux jours à cultiver tranquillement son petit carré de vignes et élever son propre vin. Il venait de dépenser le plus gros de ses économies avec l’achat de l’appartement. Nous nous sommes alors concertés entre frères et sœurs et lui avons proposé de contribuer à son projet pour un montant de 50 000 FB chacun (1250 €). Mais ce n’était pas encore suffisant. J’ai alors proposé à mon père de lui envoyer chaque mois une partie de ma paie pour l’aider à rembourser le prêt qui couvrirait le solde à payer. Je devinais qu’il était heureux de voir son rêve se concrétiser mais il était tout autant gêné que je doive lui envoyer de l’argent. Pour lui, il importait d’abord que j’épargne en vue de mon mariage.
Je travaillais depuis peu au Windsor mais je gagnais chaque mois un peu mieux ma vie, ce qui me permettait d’envoyer des sommes de plus en plus importantes en Sicile. Un jour, je suis convoqué au bureau du directeur, Monsieur Van Molle (qui, pour la petite histoire, avait été dans une autre vie directeur du Memling, le célèbre hôtel de la Sabena situé en plein centre de Kinshasa). Dans ma tête à ce moment-là, je n’imagine que deux raisons à cette convocation : être félicité pour mon travail ou viré. Stupéfaction : lorsque j’ouvre la porte du bureau de la direction, là, dans le fauteuil face au directeur, mon père est tranquillement assis. Et je le croyais en Sicile… Monsieur Van Molle me dit : « Ton père est ici car il veut savoir combien tu gagnes. » Et il fait appeler la comptabilité pour vérifier le montant de mon salaire. Entre ma paie régulière et les extras, on calcule un revenu mensuel de plus de 60 000 FB (1487 €) auxquels se rajoutent mes pourboires. Ce qui doit faire un total de 120 à 130 000 FB (3223 €) estime le directeur. A cet instant, j’ai lu de la fierté dans le regard de mon père. Il s’est levé, m’a embrassé, a remercié le directeur et est reparti aussi sec en Sicile, rassuré. J’ai appris plus tard qu’il était très inquiet pour moi et qu’il craignait que cet argent envoyé tous les mois ne provienne d’activités moins avouables…
Je me suis marié durant cette période de ma vie avec celle que j’avais rencontrée pour la première fois à l’âge de… six ans, lors d’une fancy-fair à l’école. La direction du Windsor nous a gracieusement offert notre voyage de noces à Londres. Ma jeune épouse Marie-Christine n’appréciait pas trop que je travaille de nuit et j’ai donc cherché un autre emploi. Cette fois, je revenais dans le secteur du bâtiment en tant que technicien d’entretien de chaudières chez Thermomatic, à Ganshoren en région bruxelloise. Un job qui payait moins bien mais qui assurait de beaux horaires. Il n’était pas rare que je termine mes rendez-vous vers 13 ou 14 heures et il ne me restait ensuite qu’à assurer un service de garde basé à la maison. Idéal pour ménager la vie de couple et… attendre notre premier enfant.
L’un de mes frères travaillait avec les brasseries Haelterman, société spécialisée dans l’importation de bières étrangères. L’envie le rongeait d’ouvrir un restaurant avec moi et, justement, un emplacement situé près de mon domicile à Laeken semblait parfait. Il faut savoir qu’à l’époque, il était de coutume que les brasseries financent en partie le lancement de nouveaux établissements. Grâce à l’aide d’Haelterman et à mes économies, nous avons donc ouvert une pizzeria en 1981. Nous étions jeunes, j’avais 21 ans à peine, et nous avons foncé tête baissée dans pas mal de pièges : loyers et taux d’emprunt excessifs, coût élevé des travaux, mauvaise utilisation des fonds… A cause de tous ces tracas qui nous coulaient peu à peu, je me suis disputé avec mon frère et un ami a accepté de reprendre ses parts. Mal lui en a pris car un an plus tard, il devait jeter l’éponge à son tour. J’ai mis des années avant de le rembourser définitivement. En avril 1984, j’ai arrêté proprement mon affaire, en payant mes créanciers au fur et à mesure de mes possibilités. Cet épisode de ma vie fut une bonne leçon mais une leçon qui a coûté très cher. Disputes, tensions, huissiers, dettes ont fait partie de mon lot quotidien.
Parenthèse italienne
Pour nous aider à tourner la page, nous avons alors décidé, ma femme et moi, de partir en Italie rejoindre ma belle-sœur qui gérait un hôtel
