G&H: Comment devenezvous aviateur?
Jean Gualini: Mon père, d’origine italienne, est arrivé en France, d’abord dans la région parisienne, après la guerre de 1914. Il cherchait du travail, et il a rencontré ma mère, qui était Vosgienne. Ils se sont installés à Saint-Dizier et nous habitions près de l’aéroclub. De là, je voyais les avions et cette fascination m’a habité d’aussi loin que je me souvienne. Il y avait des Blériot, d’autres encore, mais je n’étais pas féru des marques.
Pour vous, la grande année, c’est 1947…
Oui, j’ai 15 ans et je vais faire mon premier vol sur planeur. C’est une récompense: cela fait déjà plusieurs mois que je me rends indispensable à l’aéroclub. Je tiens les planeurs, j’apprends même à piloter une voiture pour tendre les câbles qui leur permettent de décoller. Le président de l’aéroclub, Marcel Hache, voit mon impatience, alors il m’offre un vol… mon premier! Dès lors, je veux que cette passion devienne un métier et je passe les épreuves pour devenir pilote. Je vole sur C.800, puis sur SG, un genre d’ULM de conception allemande, truffé de câbles en acier et aussi performant qu’un pavé. Et puis, après avoir réussi mes brevets, je suis lâché sur Stampe SV-4 [un biplan léger très maniable, NDLR].
Pourquoi démarrer une carrière militaire?
Je n’ai pas vraiment la fibre scolaire: je vais avoir mon CAP de dessinateur, mais ce n’est pas ma priorité. Je tente le concours de recrutement comme élève-pilote, et curieusement, ce n’est pas réellement difficile. Les écrits incluent un peu de mathématiques, du français, et une lettre de motivation pour décrire les raisons pour lesquelles on veut s’engager. J’ai 18 ans, je veux voler, et manifestement, je me défends plutôt bien car on me propose un contrat d’engagement. Le 14 février 1951, je signe ce contrat pour cinq ans comme sous-officier élève pilote. Je suis incorporé et envoyé sur l’aérodrome d’Aulnat []. On va y attendre cinq mois dans des conditions vraiment pas terribles. Nous sommes parqués dans une baraque en planches, il fait froid
