Qu'est-ce qui pleure en vous
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À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTRICE
Originaire de Saint-Brieuc, après des études littéraires à Rennes, l’autrice réside quelques années en Angleterre. À son retour, elle choisit de s’établir dans les Côtes d’Armor, entre Terre et Mer. Après une activité auprès d’enfants en difficultés scolaires, elle consacre du temps à la peinture et à l’écriture. Captivée par la beauté de la nature, intéressée par la complexité de la nature humaine, elle publie plusieurs recueils de Poésie qu’elle illustre par quelques-unes de ses peintures. "Qu’est-ce qui pleure en vous ?" Succède à un roman paru en 2023, "La Glaneuse de la Baie". Si les sujets abordés sont très différents, le premier roman mettant davantage l’accent sur la nature dans tous ses états, reste une trame commune, celle de l’émotion suscitée par les relations qui s’établissent entre les personnes.
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Aperçu du livre
Qu'est-ce qui pleure en vous - Sylvie Le Drogoff
Sylvie Le Drogoff
Qu’est-ce qui pleure en vous ?
« Les mondes mettent longtemps à mourir, plus encore à disparaître tout à fait. Ils cohabitent plutôt, se superposent et traînent dans le temps. Ils se prolongent et s’éternisent par la voix des témoins qui, de récits en conversations, de souvenirs en affabulations, passent le relais, dans un chant en canon qui se perd en échos interminables. »
Laure Murat (Proust, Roman familial)
Il y eut un début
Osciller entre renoncement et action, avec l’obsession d’un sentiment d’inutilité est-ce normal ? À l’époque, Laure n’osait pas poser la question, comme s’il y avait quelque chose d’inavouable ou d’un peu honteux à ressentir un pareil état. Les projets qu’elle mettait en place dégringolaient les uns après les autres avant même de se réaliser. Pareille à Sisyphe, personnage de la mythologie grecque, condamné à remonter son rocher en haut d’une montagne d’où il retombait sans cesse, elle passait beaucoup de temps à faire du surplace, parfois elle reculait. Même si des imprévus joyeux faisaient office de trêves passagères au goût de petits miracles, une telle insistance à la stagnation n’était pas pour rien. Laure a une histoire comme tout le monde, brouillonne comme certains, un peu plus brouillonne que d’autres avec l’estampille d’un secret ou plutôt d’un rébus sur lequel elle bute sans en connaître les raisons. Si le propre d’un secret est de ne pas être dévoilé, elle mettra toute son énergie et une partie de sa vie à tenter d’en comprendre la nature et les nuisances qu’il a engendrées.
L’histoire commence à un âge où les souvenirs ont parfois du mal à être convoqués. Ce souvenir-là peut paraître anodin, en réalité, pas tant que ça !
Au collège, il était courant de demander avant un voyage scolaire à l’étranger quels étaient les hobbies des élèves. Les listes obtenues permettaient aux enseignants de constituer des couples aux goûts similaires, si possible. Sur la fiche à remplir, Laure écrivait toujours la même litanie sous le regard attentif de sa mère : Élève sportive aimant rire, lire, écrire et tricoter. Faux. Elle n’aime pas tricoter et se force souvent à rire. Les bouts d’écharpe commencés n’ont jamais abouti, pas plus que l’essai de pull, à chaque décennie, jusqu’à la quatrième où elle renonce. Elle finit par admettre que tricoter n’est pas son truc. Pourquoi s’évertue-t-elle à noter ce mensonge sur sa liste ? Qui lui a mis en tête que le tricot fait partie de ses activités préférées ? Une fidélité indéfectible à Irène, sa mère. Pour faire comme elle. Pour ne pas la déranger dans ses certitudes. Pour la valider. Pour lui ressembler. Pour lui donner de l’importance, la rendre heureuse, la voir sourire et aller bien, la faire exister. C’est de cette façon que Laure s’efface peu à peu derrière Irène. C’est la période du grand calme avant la tempête prévisible.
*
La tricoteuse, c’est Irène qui n’en finit pas de mettre ses points à l’envers et à l’endroit, de croiser et de décroiser les fils, de diminuer ou d’augmenter les mailles à sa guise comme s’il fallait retrouver la trame de l’ouvrage pour le tisser à nouveau, sans aucun accroc. Tenir l’ouvrage bien serré pour qu’il ne s’effiloche pas. Tricoter sans relâche pour voir l’œuvre, rang après rang, se créer sous son nez, à portée d’aiguilles, entre ses mains expertes.
Laure n’est pas sa mère, pourtant, elle en porte les stigmates chaque fois qu’elle essaie de manier les aiguilles avec la même dextérité, sans réaliser l’évidence de l’emprise dévorante d’une mère garante de l’histoire familiale. Elle la tient si fort serrée entre ses points joliment tricotés qu’il est hors de question de lâcher quoi que ce soit. Lâcher un seul instant et tout l’ouvrage part à la dérive ; situation impossible. Irène ne supporte ni désordre ni laisser-aller. Rien ne doit jamais dépasser de sa silhouette impeccable. Tout est en place autour d’elle et sur elle. Elle offre la vision d’une pièce unique dans le musée intime de sa demeure où elle conserve son histoire sous clé, dans un coffre-fort que personne ne doit toucher ni même approcher, surtout pas Laure.
Les années ont passé
Dans quelques mois, Irène fêtera ses quatre-vingt-dix-huit ans. L’idée trotte dans la tête de Laure, comme un vilain pou, qu’elle n’aura peut-être pas l’énergie, ou la chance, de survivre à la statue monolithe vivante que représente sa mère. Si cette dernière vieillit, Laure aussi, c’est arithmétique !
Ce jour sera fêté, auréolé par la fierté d’Irène d’avoir atteint, sans trop de décrépitude, ce record de longévité. La fierté, qualité ou défaut, l’a toujours maintenue à flot, loin des tempêtes et des orages. Peu de hasard à cette longévité pour celle qui n’a connu ni difficulté d’incarnation ni soucis de santé. À la différence, le corps de Laure a pris l’habitude de s’exprimer en maux, là où les mots se sont tus. Elle ressent souvent la désagréable impression de léviter avec un sentiment d’étrangeté à elle-même. Dans ces moments de vertige, elle a la sensation d’avoir été jetée sur cette planète par accident, jeu ou hasard. Un coup de dé de trop ou pas prévu !
Cet arrivage précipité est vite devenu une menace. Même si le lot des humains est de débarquer avec un grand point d’interrogation sur ce qui les attend, Laure est venue au monde en ayant l’impression d’avoir laissé quelqu’un derrière elle. Dit de cette façon, cela peut paraître étrange. Après de nombreuses discussions avec Irène à propos de sa naissance, cette dernière a fini par desserrer quelques mailles de l’histoire. Ça va faire un trou dans l’ouvrage, juste un petit trou, ce morceau-là étant plus digeste et avouable que d’autres. Il a fallu insister. À chaque évocation de sa naissance, Irène manifestait une attitude d’agacement, de colère, voire d’incompréhension : mais que cherches-tu toujours à savoir ? Laure a eu raison de persévérer puisqu’un jour Irène raconte.
Elle ne voulait pas d’un nouvel enfant. Un, c’était assez, d’autant qu’elle avait failli perdre la vie en le mettant au monde. Un deuxième, pas question ! Surtout si ce deuxième s’avère être deux. À l’époque, pas d’échographie, mais son médecin est formel au regard de tous les symptômes qu’elle développe au fur et à mesure des mois. Ils sont deux à l’intérieur. Irène déprime sérieusement. L’idée de deux lui est insupportable. Le récit qu’elle fait à Laure (la chute dans les escaliers, l’aiguille à tricoter, l’absorption d’une substance pour faire passer, comme on disait à l’époque, ce ou ces fœtus encombrants) relève presque de l’anecdote.
« Depuis le temps, tu penses, j’ai oublié tout ça ! »
Laure croit s’évanouir ce jour-là. Le fait divers relaté par Irène, le « ça », c’est elle.
« Tu vois, continue Irène, presque guillerette, faut croire que tu étais bien accrochée et que tu avais envie d’être là. Tu es arrivée à terme, un bébé fille pour le bonheur de tous, et surtout pour celui de ton frère et de ton père. »
Le disparu fut un énorme soulagement pour sauvegarder le bonheur de la famille, enfin pas tout à fait ! Dès sa venue au monde, Laure porte dans son inconscient le fantôme d’un jumeau. Va-t-elle aussi disparaître ou devra-t-elle vivre pour deux ? Le choix posé, dans tous les cas, elle a intérêt à faire attention. Elle s’incarne avec un étrange sentiment de peur logé à la place du disparu. À partir de ce moment, elle va devoir se battre pour repousser la survenue d’un danger imminent, synonyme de fin. Ce manque à être dévore son quotidien. Manque de confiance et peur de disparaître comme l’autre rendent son enfance étriquée. Les temps de répit sont des oasis au milieu d’une grande solitude.
Elle se souvient de cette phrase d’Irène chaque fois qu’elle ne se comportait pas bien ; bien signifiant comme un agneau docile et obéissant. « Si je n’avais pas été la seule femme à accoucher dans cette clinique, et toi, le seul bébé à y naître, j’aurais pensé que l’on t’avait changée, qu’une puéricultrice s’était trompée. Tu me ressembles si peu. Tu es si différente de nous. »
Laure reçoit la claque. Le « nous », ce sont ses frères, sa mère, son père. Pourquoi ne fait-elle pas partie de cette famille ? Elle n’a même pas l’espoir d’avoir été échangée avec un autre enfant puisqu’elle était le seul bébé dans cette clinique privée. En prenant la place initialement prévue pour deux, elle se vit désormais comme une imposture. Elle est née avec cette différence qui sépare. Depuis, elle n’a de cesse de reconstruire un puzzle dont les morceaux lui échappent. Quand des années plus tard, elle demande à sa mère de lui établir un arbre généalogique sur deux générations, elle doit beaucoup insister une fois encore pour obtenir une réponse. Irène n’a jamais le temps ou bien elle a oublié, ou bien elle dit que ça ne presse pas. Le jour où elle remet le papier en question à Laure, elle lui remet un torchon taché où ne se voient que des vides et des points d’interrogation. L’encre a coulé sur le papier. Certains noms sont indéchiffrables. Sa mère si soignée d’ordinaire a-t-elle pleuré en rédigeant cet arbre encombrant ? Quand Laure demande quelques éclaircissements, Irène ne veut pas en parler. Son ascendance se passe de commentaires comme si elle n’existait pas.
Le déménagement
Irène s’est imposée dans sa famille comme l’aînée attendue et désirée. Si elle a rencontré des difficultés au cours de sa longue vie, pas celle de savoir prendre des décisions sans osciller entre oui, non, peut-être, à quoi bon. Le jour où elle décide de quitter son appartement pour un foyer logement dans une bourgade plus proche de ses enfants, tout va très vite. La vente de l’appartement, le déménagement, l’installation dans le nouveau lieu, rien ne traîne. Ce déménagement au cours duquel il faut ouvrir
