À propos de ce livre électronique
À PROPOS DE L'AUTEUR
Dans le premier tome de "La folie d’un Ange", Stéphane Breguy a exploré des secrets enfouis de l’après-guerre mais il n’a pas voulu laisser les lecteurs sans réponse. C’est ainsi que le deuxième tome transporte les lecteurs une décennie plus tard pour découvrir le destin des protagonistes.
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Avis sur La folie d’un ange - Tome 2
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Aperçu du livre
La folie d’un ange - Tome 2 - Stéphane Breguy
Stéphane Breguy
La folie d’un ange
Tome II
Roman
ycRfQ7XCWLAnHKAUKxt--ZgA2Tk9nR5ITn66GuqoFd_3JKqp5G702Iw2GnZDhayPX8VaxIzTUfw7T8N2cM0E-uuVpP-H6n77mQdOvpH8GM70YSMgax3FqA4SEYHI6UDg_tU85i1ASbalg068-g© Lys Bleu Éditions – Stéphane Breguy
ISBN : 979-10-422-3234-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Préface
Dans une vie, il y a des maux qui pèsent, qui hantent, qui disparaissent furtivement mais reviennent plus violemment. Ces maux sont ceux qui traumatisent, ceux qui s’installent au plus profond de votre esprit, bien décidés à ne pas vous lâcher. Ces maux sont ceux de victimes, infligés par des coupables qui, un jour, pourraient devenir, à leur tour, victimes de leur culpabilité. Ce jour-là, les victimes ressentent un apaisement, un allègement des maux, mais restent tout de même marquées par le passé. Ces maux ne s’oublient pas et pourtant la vie continue. On fait avec, en espérant un avenir meilleur et en souhaitant que cette justice morale ou immorale du « retour de bâton » permette d’éviter que les victimes de ces maux se multiplient encore et encore dans l’indifférence totale de ceux qui ont échappé à ces traumatismes de la vie.
Dans cette campagne vendéenne des années 60, on a oublié ce scandale qui avait fait couler tant d’encre il y a plus de dix ans. Un jeune pensionnaire, fou à lier, avait éventré un Frère, censeur d’un pensionnat réputé et élitiste, à la suite d’une mise à l’isolement pour violence déjà. Un traumatisme à l’époque… Et pourtant, la vie a repris son cours, comme si de rien n’était ; le crime avait été puni, l’apaisement avait été permis.
Juillet 1962, il règne une certaine excitation sur la place de la Vendée à la Roche-sur-Yon. En effet, deux autocars « Chausson » vont bientôt prendre la route pour mener 60 jeunes, âgés de 10 à 14 ans, dans les montagnes pyrénéennes pour quinze jours de vacances sans les parents. Deux prêtres et un chauffeur par bus accompagnent l’expédition. Une excitation qui s’exprime entre cris de joie et larmes d’appréhension. Cris de joie de ceux qui retrouvent les copains sur la place et s’impatientent de revivre, une nouvelle fois, ces moments inoubliables des colonies qu’ils ont déjà vécus les années passées, loin de l’autorité parentale. Larmes d’appréhension de ceux qui partent pour la première fois loin du cocon familial, qui ne reconnaissent aucun des visages des camarades qui monteront dans ces autocars vers l’inconnu.
Pour canaliser ou rassurer ces jeunes vacanciers, quatre prêtres se sont portés volontaires sur cette période de vacances scolaires. Ce sont des prêtres issus des paroisses des alentours ou des pensionnats privés qui ont fermé leurs portes pour ces deux mois de trêve estivale. Ces quatre prêtres ont l’expérience de ces colonies puisque chaque année, on les retrouve sur une ou deux missions d’accompagnement. Il y a Frère Jean, un solide morceau qui en impose par sa carrure mais qui est une crème de gentillesse. On ne s’y trompe d’ailleurs pas quand on voit la réaction des habitués qui se précipitent pour le saluer et le supplient de monter dans son bus.
— Ouh là, Ouh là ! Ah Ah Ah ! Vous n’avez pas changé, bande de petits gaillards ! Vous êtes bein mignons, mes petits, mais vous savez bein que les groupes sont faits à l’avance… Mais vous tracassez donc point, on aura quinze jours pour pousser la chansonnette lors des veillées…
Car oui, en plus d’être sympathique, Frère Jean adore les veillées en musique. C’est un peu l’ambianceur de la colonie.
Ambianceur, Frère Luc l’est un peu moins. À l’opposé de Frère Jean, Frère Luc est un petit bout d’homme sec et plus autoritaire. Il aime rigoler aux boutades, au comportement parfois excentrique de Frère Jean mais ne sourira qu’aux comportements mesurés des jeunes. Tel un petit roquet, il a tendance à aboyer rapidement dès que l’excitation monte chez les jeunes vacanciers. Mais c’est un binôme qui plaît aux habitués qui les ont surnommés « Laurel et Hardy ». Et il faut dire qu’il pourrait y avoir une certaine ressemblance avec ce duo bien connu du cinéma de l’époque même si le petit Laurel vendéen n’a rien de la personnalité naïve du personnage original.
Dans le second autocar, on trouvera Frère Louis. Très apprécié aussi des jeunes garçons un peu turbulents car Frère Louis c’est la bonne pâte, toujours souriant, toujours bienveillant, il en est touchant. Jamais Frère Louis ne s’énerve, au pire il perd ponctuellement son sourire. Mais curieusement, cela suffit souvent à calmer les plus virulents qui comprennent instantanément qu’ils sont allés trop loin. Les jeunes se tournent souvent vers lui lorsqu’ils ont besoin de se confier sur un sujet qui leur pèse ou pour un conseil.
Enfin, il y a le bourru, Frère Jean-Pierre.
— Normalement, c’est Frère Jean, mais pour faire la différence avec « Hardy », le bourru, il a rajouté le prénom d’son paternel derrière, explique un des jeunes vacanciers à son petit frère qui part pour la première fois en colonie.
Frère Jean-Pierre est un grognon, toujours à ronchonner. Et il vaut mieux ne pas trop le titiller parce que le bourru a la voix qui porte. Il paraîtrait même que ses soufflantes ont le pouvoir de vous gominer les cheveux en arrière tellement elles sont puissantes. Enfin ça, c’est ce que disent les habitués mais ça n’a jamais été prouvé. L’avantage, c’est que Frère Jean Pierre est un gourmand et son apaisement s’achète facilement avec des sucreries. Il a un bon coup de fourchette aussi, et donc une digestion un peu plus longue qui l’embarque dans une sieste bien profonde après chaque repas. Ce sont des détails que les jeunes cernent très vite.
La compagnie de transport a assigné deux jeunes chauffeurs d’environ 25 ans à cette colonie : Mathieu et Benjamin. Une surprise pour les accompagnateurs qui ne s’étaient pas rendu compte que Lucien et Paul, qui étaient au volant depuis des années, avaient largement atteint l’âge de la retraite. Une surprise qui semble, toutefois, bien rassurer les parents des vacanciers qui n’étaient plus très sereins ces derniers temps de voir leurs enfants partir pour un si long trajet avec des chauffeurs à la « trop » longue expérience.
Il est donc 9 h du matin en ce dimanche de juillet lorsque, après une dernière embrassade aux parents, les petits vacanciers prennent place dans les autocars « Chausson » qui les mèneront près de Bagnères-de-Bigorre dans les Hautes-Pyrénées. Même si ces bus grand confort (pour l’époque) paraissent ravir les enfants et les parents, le voyage restera, tout de même, long et pénible, pour leurs occupants. Les chants des premières heures laisseront place, assez rapidement, aux filets de baves et ronflements malgré les quelques « arrêts pipi » et pauses pique-niques prévus pour ponctuer le chemin. C’est donc exténués que les petits Vendéens arriveront à bon port, aux alentours de 23 h, n’ayant même plus la force de défaire leur baluchon. Un exercice, que les accompagnateurs reporteront, bien volontiers, au lendemain matin.
Et il faut dire que le lendemain matin viendra vite, voir trop vite. C’est, en effet, à 7 h 30 précise qu’au son de la cloche à vache, le réveil retentit. Selon l’adage, l’avenir appartenant à ceux qui se lèvent tôt, les jeunes Vendéens devront se faire une raison, la grasse matinée ne fera pas partie du programme de la colonie. L’emploi du temps sera militaire sur les premières heures de la journée :
* Réveil à 7 h 30 ;
* Toilette rapide aux lavabos ;
* Petit-déjeuner à 8 h ;
* Courte messe de 8 h à 8 h 30 ou vaisselle et rangement du réfectoire (par petits groupes et à tour de rôle) ;
* 9 h 15, début des activités.
Chaque jour sera orchestré de la même façon et ce n’est donc qu’à partir de 9 h 15 que les véritables vacances commenceront.
Cette première journée sera, toutefois, une journée plus souple sur les horaires afin de ne pas effrayer d’emblée les petits touristes et de créer la cohésion entre eux. La messe sera d’ailleurs remplacée par le mot d’accueil du directeur de la colonie : Frère Benoit. C’est lui qui a initié une petite dizaine d’années plutôt cette colonie pyrénéenne. Ce Frère Benoit est un prêtre bedonnant, voire un peu plus, qui se déplace difficilement avec une canne. Il a longtemps enseigné en Vendée, d’ailleurs, et s’est exilé dans les montagnes, dans cette auberge mise à disposition par la paroisse, pour se rapprocher de la nature, raconte-t-il. Il a très vite repris contact avec ses proches du bocage vendéen pour mettre en place cet échange pendant les vacances scolaires, en été comme en hiver. Il faut bien dire, cependant, que les séjours hivernaux n’ont pas su séduire beaucoup de monde jusqu’à présent, au contraire des colonies estivales.
Frère Benoit officialise donc le début des vacances auprès des jeunes aventuriers présents sur cette première quinzaine :
— Mes chers petits ! Amis vendéens ! C’est un grand plaisir pour moi, pardon, pour toute notre équipe, de vous accueillir ici aux portes du parc national des Pyrénées. Nous allons vous faire découvrir la montagne et ses richesses naturelles. Un décor que Dieu a voulu pur et sain mais aussi envoûtant. Vous allez aussi redécouvrir ces métiers que l’on trouve en Vendée mais que l’on pratique différemment ici comme celui de fromager, celui de gardien de bestiaux, celui de garde forestier et bien d’autres encore. Vous allez faire de belles balades sportives où vous aurez le plaisir de la marche mais aussi de la baignade ou bien de la tyrolienne. Et puis au début de la deuxième semaine, vous partirez en randonnée de trois jours pour goûter aux joies du camping en montagne et atteindre le fameux pic du Midi. Comme vous le voyez, vous n’allez pas vous ennuyer.
Bien entendu, en contrepartie de tout ce bon temps, vous devrez aussi répondre par ces valeurs de respect que nous a enseigné le Seigneur et que, j’en suis sûr, vous ont transmis vos parents. Mais le Seigneur nous a aussi enseigné la solidarité et vous devrez donc participer aux tâches ménagères, à la cuisine et à la lessive. C’est effectivement de l’entraide que je vous parle. Et puis, pour débuter chaque journée sous un rayon de lumière sacrée, vous assisterez chaque jour à une courte messe après le petit-déjeuner, afin de démarrer du bon pied.
Avez-vous des questions ? conclut-il avec un large sourire.
— Oui mon Père ! intervient naïvement un jeune homme téméraire qui vient pour la première fois en vacances. Mon Père, vu qu’on est en vacances… Bah, on y est vraiment obligé de s’faire la messe tous les jours ?
Une intervention osée qui eut le don de méduser les autres camarades et de figer un instant, puis faire disparaître spontanément le sourire du directeur du centre.
— Mon garçon ! N’oubliez pas une chose… C’est grâce à l’église que vous êtes ici, que vous pouvez profiter de ces vacances. N’oubliez pas que sans l’église et ses représentants, vous seriez resté en Vendée dans les jupons de Maman, répond de manière très sarcastique le Frère Benoit.
— Pour sûr que non, rétorque l’effronté avec un aplomb certain.
— Ah bon ? Parce que vos parents auraient pu vous offrir ces vacances ? s’impatiente le Frère.
— Bah non, bien sûr. Mais pour rester dans les jupons d’maman, faut-y en avoir une, pi la mienne, bein elle est morte y a belle lurette… répond le jeune homme avec un détachement plus que déstabilisant.
Le Frère Benoit pâlit instantanément devant ce coup de massue que vient de lui asséner le garçon et pris au dépourvu, se contente de :
— Et bien à tour de rôle, vous serez exemptés de messe pour faire la vaisselle du petit-déjeuner. Puis se tournant vers les accompagnateurs :
— Messieurs, vous pouvez commencer les activités, le repas sera servi à midi précise.
Sans attendre, il reprend sa canne et quitte son estrade pour retourner à son bureau, l’air légèrement chafouin.
Les regards à la fois impressionnés et amusés, par exception, compatissants, se tournent alors instinctivement vers le perturbateur devenu centre d’intérêt du groupe. Le brouhaha gagne alors la classe qui fera office de chapelle durant le séjour. Un brouhaha que les accompagnateurs auront bien du mal à faire cesser.
La matinée sera occupée par des activités sportives comme le football et le tire à la corde, afin de ramener le calme mais surtout d’évincer le sujet d’excitation.
À l’heure du repas, les amitiés commencent à se dessiner, les petits clans se forment et l’ambiance est au beau fixe. Le réfectoire est pensé comme celui que l’on retrouve dans beaucoup de pensionnats de l’époque. Trois grandes tables d’une vingtaine de places accueillent les jeunes colons. Faisant face à ces trois lignées de petits affamés, une table de six places est réservée au Frère Benoit, à son bras droit, le Frère Rolland, et aux quatre accompagnateurs, les Frères Jean, Luc, Louis et Jean-Pierre. Puis, à part, une petite table de quatre qui isole les deux chauffeurs, Mathieu et Benjamin, ainsi que deux hommes à tout faire originaires du village voisin. Il s’agit d’un père, Charles dit Charlo, et son fils Paul dit Paulo. Charlo est un bonhomme qui a bonne mine, comme on dit par ici. Un de ces bonhommes qui fait honneur au travail du cuisinier en ne laissant rien dans son assiette ou dans celle de ses voisins de tables. Quand on lui fait remarquer qu’il a bon appétit, il aime à répliquer :
— On voit bein, qu’c’est po te, qu’fait la vaissellle. J’ commence le boulot pour l’y aider.
Paulo est un jeune homme d’une vingtaine d’années, à peine plus jeune que Mathieu et Benjamin, mais qui a un léger retard mental. Très vite la risée de ses camarades d’école, son père a préféré le prendre sous son aile, dès l’âge de douze-treize ans pour éviter la dérive. Mais Paulo est un bosseur et il a plutôt intérêt car Charlo ne lui laisse rien passer.
Cette mise à l’écart du reste de l’encadrement, sur une petite table excentrée, aurait pu frustrer le quatuor. Mais cela ne semble pas être le cas. En effet, c’est même plutôt la bonne ambiance qui semble régner à cette table. À tel point que la frustration de la mise à l’écart semblerait même plus gagner les Frères accompagnateurs.
Il faut dire que Charlo a une manière de raconter les choses qui ne laisse pas indifférent et sait inclure l’humour dans un récit au demeurant anodin. De plus, le retard mental de Paulo fait qu’il a tendance à rigoler par mimétisme avec un certain décalage temporel, ce qui accentue l’euphorie du moment.
— Ça fait longtemps qu’vous travaillez ici ? demande Benjamin à Charlo.
— Alors, de une, dis-me tu, pa’ce que j’va point t’entend’ sinon, j’entends po le vous, ça m’siffle dans les oreilles. P’is de deux, oh que oui qu’ça fait que’ques’ années à c’t’heure, répond Charlo, récoltant un rire timide d’approbation des deux chauffeurs.
— C’est bein simp’, commence à expliquer le bonhomme.
— Hi, hi, hi ! se met à rire Paulo.
— Bon ça, les gars, va-t-y falloir l’y habituer pa’ce que ça va arriver souvent. L’gamin vous a vu rire, donc veint d’comprend’ qu’y avait sans doute une drôlerie… Alors bein, i’s’dit : j’fais pareil qu’eux aut’, explique le Père.
— Ah oui ? C’est marrant ça… Benjamin est surpris.
— Marrant, non lassant surtout, corrige Charlot faisant à nouveau rigoler ses deux interlocuteurs avant de reprendre son récit.
— Donc comme j’disais, c’est bein simp’.
— hihihi, réagit le fiston.
— Bon… c’est pô simp’, mais c’est bein simp quand même, enchaîne le conteur. J’suis arrivé là dès la fin d’la guerre. L’curé d’l’époque, Père Firmin, c’était un bon gars qui voulait qu’les jeunes oublient les horreurs d’la guerre. Même si faut bein dire, qu’y en a qu’ont bein p’us souffert que nous aut’ ailleurs. Il a bein vite organisé l’endroit pour qu’y a des jeunes qui avaient un comportement difficile, cause, choqués par des choses qu’i’s avaient vu ou bein, simplement la disparition d’un parent, qui viennent se r’faire la c’rise quoi. Pi quand, j’su réapparu dans l’ coin, bein m’a dit. Mon Charlo t’a montré qu’t’es un bon gars, qu’t’es débrouillard, j’t’embauche pour bosser avec moi.
— Vous, pardon, tu, faisais quoi pendant la Grande Guerre ? demande Mathieu.
— J’existais pas.
— Hein, comment ça ? réagit Benjamin.
— Bein, j’étais invisible, j’existais pas, insiste Charlo.
— Ah, j’ai compris, t’as déserté ? comprend Mathieu.
— Dam Non, bon dieu Non, un déserteur, jamais d’la vie ! s’énerve Charlo.
— Non, Non, Non, pas, Non, Non ! s’affole Paulo, alertant tout le réfectoire et faisant réagir le Frère Benoit.
— Que se passe-t-il là-bas !? Si les adultes ne montrent pas l’exemple, où va-t-on ? Charles, tenez votre fils, si ce n’est pas trop vous demander.
— Pardon, Frère Benoit ! Dis pardon, toi.
— Pa Pa’don, Frère Benoit, s’exécute le jeune homme.
— Ça par exemp’, jamais l’curé d’l’époque, nous aurait mis à la tab’ des gueux comme c’ui-ci. Mais faut croire que l’bon dieu, à c’t’ heure, préfère qu’on soit pô tous égaux. Marmonne le paternel vexé.
— Bon mais si t’étais pas déserteur, t’étais quoi pour pas exister ? insiste Mathieu.
— J’étais résistant… j’faisais passer les gars en Espagne, au nez et à la barbe d’le putains d’Chleuhs. Mais bouche cousue, pas un mot, hein !
— Chhhhhhhut, enchérit le fiston pour appuyer son père.
— T’inquiète pas pour ça, on n’est pas des balances et au contraire, c’est fort c’que t’as fait, les rassure Benjamin.
— En tous cas, pour sûr, j’étais là bein avant l’aut’ Seigneur des lieux, pi j’connais bein p’u tous les coins et recoins d’la région que lui i’n’ connaît la parcelle du centre. Pa’c’que j’ai p’t êt’ d’la bedaine mais moi j’sais encore la bouger ma bedaine. C’est po comme l’seigneur qu’à besin d’une canne pour la t’nir pi qu’a pu d’souffl’, une fois qu’il a passé d’la tab’ au cabinet. Alors peut bein s’croire au-dessus nous, mais pour vrai, jamais l’arriv’ra à la soulever aussi haut sa bedaine, même avec l’aide du Bon Dieu. Peste l’homme à tout faire.
— Ah Ah Ah ! Si j’comprends bien, c’est ton copain le Frère Benoit ? rigole Mathieu.
— Eh, eh ! Non j’m’emballe mais.
— Ah Ah Ah ! coupe Paulo.
— Mais jamais m’a fait d’mal ou posé problème… tempère Charlo. I’court pas assez vite.
Le premier contact aura donc été railleur mais plutôt fédérateur à la table des exclus.
Aux tables des jeunes colons, l’ambiance est également plutôt conviviale. Mais l’attention de ce premier repas est, surtout, tournée vers Pierre, le petit impertinent qui a su déstabiliser Frère Benoit. Une notoriété soudaine qui a le don de surprendre l’intéressé qui n’a fait que poser une question sans arrière-pensée.
— Bah quoi ? J’ai rien dit… T’as envie toi d’aller à la messe tous les matins pendant les vacances ? Moi, non, j’ai pas envie d’aller à la messe tous les matins. J’préfère faire la vaisselle, moi.
— J’ai aimé comment tu l’as couémé (cassé) avec l’histoire des jupons ! relève Raphaël, un jeune dont le physique annonce déjà la « bête à connerie ».
— Bah quoi, c’est vrai, mon père i’ porte pas d’jupon, mon père… Ou alors c’est qu’il a vraiment trop bu, mais c’est rare, répond Pierre avec son air quelque peu naïf qu’il sait mettre en avant pour amuser les copains.
— Hein !? Quoi ton père, il met des jupons quand il a trop bu ? s’esclaffe Romain.
— Mais non, enfin j’en sais rien, quand il a trop bu, ça fait belle lurette que j’ai mis la viande dans l’torchon, moi. I’ boit que l’soir et moi j’suis po du soir, alors j’sais po, moi, rectifie Pierre. Non il en met que pour aller à la messe, alors c’est pour ça qu’on va p’us à l’église.
En moins d’une demi-journée, Pierre aura su, par son humour, se hisser sur un piédestal auprès des copains de la colonie.
C’est bien à la table des Frères que la monotonie semble être la plus présente. Le nez dans l’assiette, il n’y a pas beaucoup de paroles. Il faut dire que pour qu’une communication soit active dans un groupe, on sait tous qu’il faut un meneur. Mais lorsque le meneur en question s’apparente à un gargantuesque Frère Benoit, l’assiette prend plus d’importance que n’importe quel sujet de discussion. Aussi pesante soit la situation pour les invités à la table, c’est une chance offerte aux jeunes pour que le repas se passe dans une réelle décontraction. En effet, le gourmand obnubilé par les victuailles semble ne conserver que deux de ses sens, l’odeur et le goût. Plus rien ne vit autour de sa bulle. Alors les autres frères font preuve de clémence envers les jeunes et leurs rigolades, car ce sera pour eux leur seule distraction ou échappatoire pendant le repas. Mais ce n’est pas une surprise pour ces expérimentés accompagnateurs qui connaissent bien l’énergumène depuis ces quelques années qu’ils le côtoient.
Après chaque repas, cinq ou six enfants sont désignés pour laver la vaisselle avec les cuisinières. En effet, chaque jour, trois femmes âgées de la paroisse donnent de leur temps, bénévolement, pour préparer les repas avec les produits donnés ou achetés auprès des producteurs locaux. Ce sont les permanentes qui sont présentes depuis quelques années maintenant. Elles sont aidées dans leurs tâches par quelques jeunes femmes du village, leurs petites filles, en général. Elles viennent également le jour du départ pour un grand ménage des lieux. Comme Charlo et Paulo, ces femmes ont commencé leurs actions solidaires auprès du Père Firmin, après la guerre. C’est en vérité tout le hameau qui vit autour de cette colonie. En effet, ces anciens qui ont terminé leur carrière professionnelle, comme les agriculteurs qui ne termineront leur carrière que le jour du grand départ, ont tous vécu le grand conflit, puis se sont retrouvés après coup, isolés dans leur campagne montagnarde, à ressasser autour d’une partie de cartes et d’un verre, ou plusieurs, d’alcool de plantes inspiré de l’izzara basque, ou d’une piquette locale inspirée plus du vinaigre Amora que du château Petrus. Alors, à chaque vacance scolaire, la venue de ces jeunes vendéens amène un certain rayon de soleil à ces gens dévoués. Et puis, dans chaque bus qui amène les vacanciers, il y a toujours deux ou trois caisses de produits vendéens destinés à ces bonnes âmes. Un présent en guise de rémunération qui suffit au plaisir de ces bénévoles.
Cet après-midi, les activités proposées aux jeunes resteront très basiques, le véritable programme lié à la montagne ne commençant réellement que le second jour. Ce sera donc, balle aux prisonniers, courses en sac, partie de football, loup-chaîne et goûter bien sûr, une tartine de pain de deux livres avec beurre et copeaux de chocolat, et un verre de lait frais du matin, pour entrecouper les activités.
Le premier soir ne sera pas animé mais même si plusieurs réclameront en vain les talents d’ambianceur de Frère Jean, la fatigue liée au trajet de la veille et à l’excitation de ce premier jour aura vite raison des jeunes. À 21 h, tout ce petit monde est plongé dans les bras de Morphée.
C’est donc au petit matin du deuxième jour, après la messe pour certains, dont font partie Pierre et Raphaël, et la vaisselle pour d’autres, que l’aventure montagnarde commence. Et ce sera une journée découverte et sportive. Une petite randonnée de quatre ou cinq kilomètres pour atteindre la ferme du père Gustave qui n’a rien d’un religieux. Il faudra de la concentration aux jeunes colons pour comprendre les explications du fermier car le père Gustave a cet accent bien particulier qui consiste à manger la moitié des syllabes des mots qui constituent une phrase. La présentation de l’activité du jour imagera bien ces propos.
— bein l’bjour li jeunes, dam che bein k’tent d’li vèr à matin à casau. Vais p’voi’ li montrer ma b’lot al estibe avec Li baca, pi r’veindrons pou la Fabric d’li p’tit lait ou d’il fromach. À fin d’j’née en s’rez bein pu qu’n’import’ que’ badaud d’le baroegue su’l baca.
Les regards interloqués des jeunes se croisent. Pas un ne semble saisir les paroles de leur hôte, ce qui amuse beaucoup les Frères, habitués à cette réaction lors des premières rencontres avec le père Gustave. Le message était pourtant simple :
« Bien le bonjour, les jeunes, je suis bien content de vous voir ce matin à la maison. Je vais pouvoir vous montrer mon boulot (travail) au pâturage d’été avec les vaches, puis nous reviendrons pour la production du petit lait et des fromages. En fin de journée, vous en saurez bien plus sur les vaches que n’importe quel badaud de la vallée ».
Les jeunes seront toutefois vite séduits par ce parler si particulier qui inspirera quelques imitateurs en herbe. Ils seront également séduits par cette journée riche en découvertes, telles que « Li Biehl » (le vieux), le chien berger de Gustave qui, à lui tout seul, maîtrise un cheptel d’une bonne vingtaine de vaches, les rassemble, les guide. Ils se souviendront assurément de la traite des vaches, tant pour l’expérience nouvelle (pour certains) que pour le côté coquin que certains ont relevé avec malice ou avec gêne.
— Lor gamin, t’i bein arrouy, c’est-y la première foué qu’ti tat’ d’le toussal ? Ti p’l’air benaise… Aaah ! se plaît à chambrer le fermier.
« Alors, gamin, t’es bien rouge, c’est la première fois que tu tâtes le mamelon ? Tu n’as pas l’air à l’aise »…
Et puis après avoir assisté à chacune des étapes de la fabrication du fromage, tout ce petit monde retrouvera ses esprits avec la dégustation accompagnée d’un bon verre de lait. Une journée à l’image de l’estomac, bien pleine, qui aura rassasié nos vacanciers. Le soir même, un bouillon et une pomme suffiront amplement à contenter les jeunes colons éreintés par la journée mais satisfaits de cette première expérience montagnarde.
Il y en a deux qui auraient pourtant bien apprécié une petite soirée musicale. En effet, Mathieu et Benjamin, les deux chauffeurs n’avaient pas grand-chose à faire aujourd’hui, ils n’étaient pas conviés aux festivités du jour. Certes, ils se sont fait une petite randonnée de deux-trois heures sur les pentes au départ du centre. Ils ont respiré l’air pur, déambulé à travers des chemins plus ou moins escarpés, observé la nature en mangeant un très bon casse-croûte au jambon et fromage des montagnes. Ils ont longuement échangé sur le rôle qu’occupait Charlo lors de la Grande Guerre, bien décidés à lui demander de raconter en détail ses manœuvres. Mais cette ballade leur a surtout offert un véritable regain d’énergie, plus que de la fatigue, et ils auraient bien assisté aux premières exhibitions musicales du Frère Jean, tant plébiscitées par les jeunes qui le connaissent. Ce sera pour une prochaine fois, et peut-être même dès le lendemain puisque le programme des jeunes se cantonnera aux environs.
Pour nos deux chauffeurs, la prochaine activité, et la seule du séjour d’ailleurs est de conduire les petits Vendéens et leurs accompagnateurs au point de départ de leur aventure de trois jours vers le pic du Midi en début de deuxième semaine, et bien évidemment d’aller les chercher à leur retour. Ils ont toutefois obligation de rester au centre ou à proximité immédiate, en attendant, pour pouvoir réagir immédiatement en cas d’alerte accident de l’un des randonneurs.
Alors, comment s’occuper sans frustration lorsqu’on est dans un si beau cadre naturel que l’on ne peut explorer… C’est décidé, ils ne copieront pas leurs prédécesseurs qui passaient leur temps à squatter les caves de chaque maison du hameau pour s’imprégner du sang du Christ, Amen… Non, Mathieu et Benjamin épauleront Charlo et Paulo dans leurs tâches quotidiennes afin de voyager avec le père à travers les souvenirs de la résistance et de connaître les petites histoires secrètes du hameau, les cancans surtout, avec le fils.
En ce troisième jour, les émotions des jeunes Vendéens vont dessiner des montagnes. En effet, si de prim abord, l’intitulé interpelle, questionne seulement, il provoque surtout l’émoi chez de jeunes garçons de 10 à 14 ans d’après-guerre. Frère Rolland, qui gère le centre en l’absence de Frère Benoit, absence de nécessité mais bien plus souvent de paresse, annonce donc le thème de la journée, avec une certaine fierté.
— Messieurs, Messieurs ! Aujourd’hui, je vous ai préparé une rencontre bien particulière, une fierté de la région que vos parents nous envient certainement… Le Frère, tout émoustillé, fait régner le suspense…
Nous allons vous faire découvrir, dans la ferme de notre ami Rolland, et oui il porte le même prénom que moi, hi hi hi, c’est fou, non ? Les regards moqueurs s’échangent dans une assistance aux abois, ou presque…
Bref, nous allons vous faire rencontrer le « Noir de Bigorre » !
Cette annonce crée la surprise. Une surprise plutôt négative à l’oreille de nos jeunes Vendéens, qui s’offusquent même de l’annonce. Et la réaction candide du petit Pierre ne se fait pas attendre :
— Frère Rolland ! Je n’irai point… Papa m’a toujours appris à respecter les autres, alors, je n’irai point, moi, à ce genre de cirque moqueur, papa i’ voudrait pas !
— Moi non, plus. Vous êtes religieux et vous osez nous montrer un noir comme un animal de foire, enchérit Romain, le regard sombre.
— Ah, ah, ah ! s’esclaffe Frère Jean avec sa voix portante.
— Vous en riez, Frère Jean !? s’offusque Romain.
— Mais oui, j’en ris, mon bon Romain, répond Frère Jean. Car lorsque vous rencontrerez le « Noir de Bigorre », vous vous rendrez bein compte qu’on est bein loin de la triste époque de l’esclavage ou du clown chocolat. Mon pauvre ami, vous serez surpris de votre erreur et vous vous en voudrez même d’avoir eu ces pensées.
— Oui bah, pendant la guerre y avaient bien des africains qui nous ont aidé, mon père, i m’la dit, continue Pierre. Alors on n’a po l’droit de s’moquer ! Non, on n’a po l’droit.
— C’est bein c’que j’viens de dire à Romain, préparez déjà vos prières pour vous faire pardonner de ces mauvaises pensées mes petits… insiste encore Frère Jean.
— En tous les cas, c’est une réaction un peu naïve mais ma foi valeureuse, conclut le Frère Rolland avec un sourire amusé tourné vers ses confrères.
C’est donc à contrecœur que certains suivront le groupe jusqu’à la ferme de Rolland, à la rencontre du « Noir de Bigorre ». Et effectivement, la surprise sera grande et déroutante, notamment pour les deux petits impulsifs.
— Oh mais ce sont des sangliers, c’est pas des hommes ! Regarde Pierre, ce sont des sangliers, c’est pas des Noirs ! s’exclame Julien, un petit blondinet de la bande.
— On dit pas c’est mais ce sont, reprend Frère Luc ou Laurel, avec son air aimable.
— On dit surtout du cochon noir, et po du sanglier, corrige Frère Jean-Pierre pour qui tout ce qui peut terminer dans l’assiette est familier.
— Oui bah, Sanglier ou Cochon, i’s ont bien mangé mais i’s ont oublié de faire la toilette ce matin,
