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Lettre ouverte aux investisseurs irresponsables
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Livre électronique275 pages3 heures

Lettre ouverte aux investisseurs irresponsables

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À propos de ce livre électronique

Nouvelle édition revue et enrichie

 
GAGNANT

Grand prix du livre d'affaires

*********************************

De plus en plus de Québécois gèrent leurs placements eux-mêmes. On leur a dit : «C’est facile et ça réduit les frais de gestion.» En réalité, mal équipés pour s'aventurer seuls dans la jungle des marchés boursiers, la grande majorité d’entre eux obtiennent des rendements pitoyables, mettant ainsi à risque leur prospérité financière. Et le pire, c'est qu’ils ne le savent pas!

Dans cette nouvelle édition de ce livre-phare, André Gosselin s'attaque aux pièges qui font mordre la poussière à ceux qui ne les voient pas. Les fonds communs de placement sont des avenues idéales pour l’investisseur amateur ? Les compagnies les plus admirées font les meilleurs placements ? Les planificateurs financiers coûtent trop cher ? Attention: vous pourriez faire fausse route.

Convaincu qu’investir en bourse est une excellente façon pour chacun d'assurer son autonomie financière tout en contribuant au progrès social, l’auteur répond avec aplomb aux détracteurs du libéralisme économique et de la mondialisation. Au fil de ce guide brillant qui a déjà changé la vie de milliers d’investisseurs, le lecteur trouvera des conseils concrets pour éviter les écueils et investir avec succès.
LangueFrançais
Date de sortie22 sept. 2021
ISBN9782898271632
Lettre ouverte aux investisseurs irresponsables
Auteur

André Gosselin

Sociologue (doctorat de l’Université de Paris 2) et politologue (doctorat de l’Université du Québec à Montréal), ANDRÉ GOSSELIN a fait carrière dans le monde des affaires et de la finance, notamment comme gestionnaire de portefeuilles. Il a été chroniqueur financier pour diverses publications québécoises (Affaires plus, Finance et investissement) et est l’auteur d’une série de sept ouvrages sur les stratégies d’investissement et la finance des marchés boursiers, une somme unique en langue française.

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    Aperçu du livre

    Lettre ouverte aux investisseurs irresponsables - André Gosselin

    Prologue

    J’ai toujours considéré l’investissement et la bourse comme l’une des activités humaines les plus stimulantes qui soient. Voilà une activité qui nous relie au reste du monde et nous pousse à mieux connaître la nature et l’évolution des innovations technologiques, des entreprises, de la société de consommation, du commerce international et du monde du travail. Une activité qui nous incite à réfléchir à la politique, à la liberté, à la justice, à la démocratie, aux relations internationales et aux interventions de l’État dans l’économie. Une activité qui nous force à nous faire une opinion sur les enjeux de société (environnement, égalité sociale, etc.), les rapports entre pays riches et pays pauvres, la mondialisation et le choc des civilisations. En somme, une activité qui nous place devant nos responsabilités.

    Comme occupation intellectuelle, on trouve difficilement plus complet. Rien, aujourd’hui, ne doit échapper à l’attention de l’investisseur aguerri : la science, les nouvelles technologies, les médias, la mode, la biologie, la sexualité, le jeu, l’éducation, l’alimentation, et plus encore. Pour chacun de ces domaines, je pourrais citer (et vous aussi sans doute) des dizaines d’entreprises cotées en bourse qui sont, par leur taille et leurs ressources, au cœur des innovations et de la production des biens et services concomitants.

    Que serait l’informatique sans les IBM, Microsoft et Apple ? Que serait l’automobile sans les Ford, GM et Toyota ? L’imaginaire de nos enfants, pour le meilleur comme pour le pire, serait bien différent sans les Disney, Pixar, Sony, Activision Blizzard et Electronic Arts (les deux plus grands fabricants de jeux vidéo au monde). Même notre santé mentale, physique ou sexuelle est façonnée par les découvertes des Pfizer, Johnson & Johnson, Merck et autres. Quand nos intérêts d’investisseur couvrent un aussi large spectre, il est difficile d’échapper à un certain questionnement moral, social ou politique. À y regarder de plus près, on constate qu’il existe très peu de réformes gouvernementales et de débats éthiques qui n’impliquent aucune grande entreprise cotée sur les parquets de New York, Londres, Paris, Tokyo ou Shanghai.

    C’est un euphémisme de dire que les marchés financiers n’ont pas très bonne presse. Pourtant, l’histoire nous apprend que la prospérité d’une nation est reliée directement à sa capacité de créer un système financier ouvert et concurrentiel, avec au premier rang un marché boursier dynamique et accessible. Plus encore, la liberté d’un peuple et le respect de ses droits dépendent en bonne partie de la dispersion du pouvoir et de la richesse que permet, entre autres, un marché boursier où participent des millions de petits épargnants. Comme le dit l’économiste canadien Reuven Brenner, le progrès économique et social repose d’abord et avant tout sur notre capacité à marier le talent et le capital.

    Quand les cités-États de la Renaissance italienne ont ouvert leurs marchés financiers, elles ont tout de suite attiré les artisans et commerçants les plus talentueux du pays. La ville d’Amsterdam est devenue le miracle économique de l’Europe au XVIIe siècle parce qu’elle a mis en place la première bourse des valeurs mobilières de l’histoire, drainant vers elle tous les Européens qui avaient de bonnes idées à commercialiser. L’Angleterre a réussi à étendre son empire lorsque Londres a pris le relais en développant des marchés financiers encore plus ouverts et sophistiqués.

    Les millions d’immigrants entrepreneurs qui ont choisi les États-Unis comme terre d’accueil depuis 100 ans ne l’ont pas fait en raison de son filet de sécurité sociale, de son régime politique ou du raffinement de sa culture, mais bien parce qu’ils avaient accès à un marché de capitaux fortement déconcentré et décentralisé, indépendant de l’État et des dynasties industrielles, qui ne trouvait son équivalent nulle part ailleurs. Si les trois quarts des grandes entreprises de haute technologie ou de biotechnologie dans le monde sont américaines, c’est parce que les États-Unis sont encore l’endroit où l’on réussit le mieux le mariage entre les talents des entrepreneurs et les capitaux des investisseurs.

    La bourse fascine et inquiète à la fois. Elle fascine tous ceux qui veulent augmenter leur patrimoine financier, et elle inquiète tous ceux qui croient que la culture matérialiste et la soif de profit nous mènent directement à notre perte. Certains souhaiteraient qu’on puisse la contrôler davantage et même, si possible, en tirer des revenus pour l’État, sous la forme d’une taxe sur les transactions des investisseurs par exemple. D’autres voudraient qu’elle protège davantage les droits des petits actionnaires, qui ont souvent l’impression d’être les derniers à être récompensés, une fois que tout le monde (travailleurs, patrons, fournisseurs, État, etc.) a obtenu sa part du gâteau.

    Mais au-delà de tout, la bourse est un moyen parmi tant d’autres de s’enrichir. Du moins, telle devrait être sa fonction première du point de vue des investisseurs. Hélas ! ce n’est pas du tout le cas, notamment pour cette catégorie d’investisseurs qui ont choisi de prendre en main, en partie ou en totalité, la gestion de leur portefeuille (je les appelle indistinctement les investisseurs individuels, particuliers, autonomes ou tout simplement, sans aucun préjugé, les petits investisseurs).

    Les statistiques recueillies au cours des 20 dernières années sont incontestables : les rendements réalisés par ces investisseurs, autant sur le marché des actions que sur celui des obligations, sont pitoyables, pour ne pas dire catastrophiques. Pendant que tout le monde joue à l’autruche, il y a péril en la demeure. Pourquoi ? À qui la faute : les gestionnaires de fonds ? les patrons d’entreprise ? les spéculateurs ? les médias ? l’État ? les investisseurs eux-mêmes ? Avec les rendements qu’il obtient, le détenteur d’actions ou de fonds d’actions n’arrive même pas à protéger son capital contre l’inflation, et pendant ce temps on nous parle d’investissement socialement responsable, de capitalisme actionnarial ou de tendances de marché. La maison brûle, et on discute de la couleur des rideaux du salon.

    On dit que la psychologie et l’histoire sont les deux sciences les plus tristes parce que l’une étudie les faiblesses de l’homme et l’autre les faiblesses de l’humanité. Ce livre aborde notamment des questions d’histoire et de psychologie. Histoire de la spéculation financière, des marchés financiers et des innovations technologiques d’une part, et psychologie de l’investisseur d’autre part, sous l’angle, entre autres, de cette nouvelle discipline universitaire appelée finance béhavioriste ou finance comportementale.

    Ce que ces deux disciplines nous apprennent à propos de l’investisseur individuel et de sa performance sur les marchés est certes désolant, mais loin d’être sans intérêt. Ça devient même passionnant quand on arrive à comprendre les causes et les conséquences de ses déboires. On constate alors que la bourse n’est qu’une extension de la psychologie humaine et que les meilleures stratégies d’investissement sont celles qui évitent les pièges de la « nature humaine » ou, mieux encore, celles qui consistent à exploiter, tout en les corrigeant, les réflexes moutonniers de certains joueurs boursiers.

    Un mauvais plaisantin écrivit un jour que la psychologie est la science qui vous apprend des choses que vous savez déjà en des termes que vous ne comprenez pas. Je me propose de faire exactement le contraire : vous inciter à prendre conscience de choses que vous ne savez pas en des termes que vous comprenez d’instinct.

    Ce livre s’adresse aux investisseurs irresponsables, mais aussi aux investisseurs responsables. Les premiers ont tout à apprendre, tandis que les seconds ne seront jamais trop vigilants pour comprendre et assumer les conséquences de leurs actes. Sur des questions comme la spéculation, le capitalisme actionnarial, les droits des actionnaires, la responsabilité sociale des entreprises, la mondialisation, la bulle des technos, le profit, les fonds communs de placement, la vente à découvert, les dividendes, les multinationales et la gouvernance des entreprises, je crois avoir un point de vue qui contraste avec l’opinion dominante et la « pensée unique ». Un point de vue qui en ébranlera sans doute plusieurs, un discours qu’on entend trop peu souvent mais qui n’en demeure pas moins bien documenté et essentiel.

    Après avoir écrit sept livres sur les stratégies d’investissement et des centaines de chroniques sur l’art et la psychologie du placement à la bourse, je me crois autorisé à prendre un ton plus personnel, direct et provocateur. Non pas par plaisir ou par exercice de style, mais parce que l’heure est grave, que les idées fausses sont trop nombreuses et les mauvais réflexes, trop dangereux.

    En pastichant le jargon sportif, on peut dire que pour le petit investisseur « il n’y en aura pas de facile ». Rien n’est gagné d’avance. Sur sa droite, il a pour mission de défendre le capitalisme contre les capitalistes (leur propension à quémander l’aide de l’État ou à abuser de leurs privilèges personnels, corporatifs et industriels) ; sur sa gauche (souvent ses propres enfants), il doit convaincre les altermondialistes et les antilibéraux que, sur l’essentiel, ils ont tout faux ; et au centre (c’est-à-dire par rapport à lui-même), il doit se doter de meilleurs outils (attitude mentale, stratégies de placement, etc.) pour atteindre ses objectifs de placement.

    L’investisseur d’aujourd’hui a deux grandes responsabilités. À l’égard de lui-même d’abord, afin qu’il ait les moyens financiers de vivre le type de vie qu’il a raison de souhaiter, sans dépendre de l’État, des institutions de crédit ou de sa famille. À l’égard des autres ensuite, en leur donnant les moyens d’une certaine égalité des conditions, par le biais des programmes sociaux et services de l’État bien sûr (est-il nécessaire de préciser que l’investisseur prospère paie plus d’impôts que l’investisseur fauché ?), mais aussi plus directement par le don, la contribution à des œuvres humanitaires qui peuvent suppléer aux limites de la solidarité familiale, de l’État et du marché.

    Plusieurs thèmes abordés dans ces pages ont fait l’objet de chroniques que j’ai signées dans des publications comme le magazine Affaires Plus, le mensuel Finance et Investissement ou le site Internet lesaffaires.com. Mes éditeurs m’ont souvent reproché d’être trop « universitaire » et pas assez « engagé » face à l’un ou l’autre des sujets que j’ai eu l’occasion de traiter dans ces tribunes. Avec ce livre, je me mouille. Je laisse tomber les gants blancs et je mets les gants de boxe. Mais n’ayez crainte, je ne crois pas avoir trop fait de compromis sur l’objectivité scientifique ou l’honnêteté intellectuelle en portant, pour écrire ces pages, un chapeau de polémiste.

    J’ose formuler le souhait que cet ouvrage tombera dans les mains des non-investisseurs, des jeunes surtout, mais aussi de tous ceux qui, même s’ils en ont les moyens, ont choisi de ne pas investir leurs épargnes dans le marché des actions en raison de préjugés tenaces.

    Tout le monde devrait savoir qu’il n’y a pas de meilleure façon de contribuer à la croissance économique, d’assurer son autonomie face à l’État, d’exercer sa liberté de citoyen et de combattre le sous-développement dans le monde que de participer au marché boursier. Votre responsabilité d’investisseur est beaucoup plus grande que vous ne le croyez.

    Chapitre 1

    Grandeurs et misères de l’investisseur

    Le 20 avril 1720, le grand savant anglais Isaac Newton, investisseur à ses heures, décida de vendre ses actions de la South Sea Company, réalisant un profit de 7 000 livres sterling, soit un rendement de 100 % en un an à peine. Le titre de la South Sea n’en continua pas moins de monter de façon spectaculaire, et Newton ne put s’empêcher de céder à l’euphorie générale en achetant, à prix fort, une plus grande quantité d’actions que la première fois. Comme c’est le cas de toute bulle spéculative alimentée par des fantasmes plus que par des faits, l’action de la South Sea était destinée à s’écrouler, et Newton perdit plus de 20 000 livres. « Je peux calculer le mouvement des corps célestes, dit-il après sa déconfiture boursière, mais pas la folie des hommes. »

    Les mésaventures financières du père de la physique moderne sont typiques de ce que connaissent les petits investisseurs depuis que les marchés boursiers existent : acheter à prix élevé et au mauvais moment, et vendre à bas prix et au mauvais moment. Ce constat s’applique autant à celui qui achète directement ses actions sur le marché de la bourse qu’à celui qui préfère investir dans un fonds commun d’actions.

    Hélas ! la performance boursière de l’investisseur individuel, au cours du dernier demi-siècle, a été aussi pitoyable que celle de Newton avec ses actions de la South Sea. De 1984 à 2002, le rendement annuel moyen du détenteur de fonds d’actions, aux États-Unis, n’a été que de 2,57 %. Oui, vous avez bien lu : 2,57 %. Et la situation n’était guère plus brillante pour les investisseurs individuels du Canada, d’Europe ou d’Asie.

    Pourtant, le rendement annuel de l’indice S&P 500 durant cette période a été de 12,2 %, et le rendement moyen des fonds d’actions s’est élevé à au moins 10 %. Le détenteur américain de fonds d’actions n’arrivait même pas à protéger son capital contre l’inflation, dont le taux depuis le début des années 1980 oscillait autour de 3 % par année¹. C’est tout simplement catastrophique.

    Selon la firme d’information financière Dalbar, le détenteur de fonds d’actions aux États-Unis a réalisé un rendement annuel moyen de 6,24 % entre 1990 et 2020, alors que le rendement de l’indice S&P 500 a été de 10,7 %. Un manque à gagner de 4,46 % par année en termes de rendement annualisé. C’est énorme.

    Pour la détention de fonds communs à revenus fixes, la situation est pire. Toujours entre 1990 et 2020, l’investisseur qui a baladé son argent dans les fonds à revenus fixes s’est contenté d’un rendement annuel moyen de 0,45 %, alors que l’indice de référence Bloomberg-Barclays Aggregate Bond Index a procuré un rendement annuel moyen de 5,86 %.

    Aux plus belles heures de la Bourse américaine, à la fin des années 1990, plusieurs détenteurs de fonds d’actions ont réussi le tour de force de perdre de l’argent, alors que les fonds qu’ils avaient achetés, selon les chiffres officiels et vérifiés, enregistraient d’excellents rendements. Comment, direz-vous, peut-on encaisser des pertes avec des fonds qui réalisent des gains ? La réponse est simple : en agissant comme un mouton et non comme un investisseur. Attiré par des rendements mirobolants, vous achetez les fonds juste après qu’ils ont connu une forte hausse et vous les vendez seulement après qu’ils ont subi une glissade.

    Pour citer un exemple, voyons ce qui s’est passé en 1996 avec le fonds américain Dreyfus Aggressive Growth, qui réalisa, cette année-là, un rendement moyen de 20,7 %. La majeure partie de ce rendement fut obtenue durant les trois premiers mois de l’année, alors que le fonds avait moins de 25 millions de dollars d’actif sous gestion. Devant les performances extraordinaires du fonds en début d’année, des milliers de petits investisseurs confièrent leurs épargnes à Dreyfus, faisant ainsi grimper l’actif sous gestion à plus de 154 millions. Malheureusement, le fonds connut un été pitoyable, avec une perte de 22,2 % durant ce seul trimestre.

    Les investisseurs qui ont été assez disciplinés pour conserver ce fonds durant les 12 mois de l’année 1996 ont profité de son rendement positif de 20,7 %. Toutefois, ceux qui l’ont acheté au mauvais moment et qui l’ont vendu à un tout aussi mauvais moment furent si nombreux qu’on a calculé que l’investisseur qui a détenu, à un moment ou à un autre en 1996, des parts du fonds Dreyfus a encaissé une perte de 34,9 %. Une différence de -55,6 % par rapport au rendement réel du fonds. Une boutade vieille comme le monde dit que, lors d’un marché haussier, tous les investisseurs sont des génies. De toute évidence, Wall Street devra jeter ce proverbe aux oubliettes.

    Il serait injuste de blâmer le gestionnaire du fonds Dreyfus pour les déboires de la plupart des détenteurs d’actions en 1996. Il a fait correctement son boulot. Les infortunes du détenteur moyen de fonds communs s’expliquent d’abord par sa propension à céder à l’appât du gain facile et rapide. Le petit investisseur joue d’ailleurs un rôle beaucoup plus important qu’il ne le croit dans le succès ou l’échec d’un fonds de placement. En restant discipliné et en refusant de céder à la panique à la moindre occasion, il s’assure que le gestionnaire n’aura pas à liquider des blocs importants d’actions à des prix dérisoires afin de le rembourser. De plus, en évitant de se jeter à corps perdu sur le meilleur fonds de l’heure, il fait en sorte que le gestionnaire n’aura pas à acheter, pour répondre à sa demande, des actions qui sont déjà surévaluées.

    Ne croyez pas que l’investisseur américain est un cas unique. Qu’il soit français, anglais, australien ou chinois, le petit investisseur qui gère son portefeuille, seul ou avec l’aide de son conseiller, a connu le même fiasco². Cette calamité ne s’abat pas seulement sur les investisseurs qui détiennent des fonds d’actions. Les petits actionnaires qui détiennent directement des actions par le biais de leurs courtiers se sont enlisés dans les mêmes sables mouvants. Même les détenteurs de fonds d’obligations, habituellement prudents et circonspects, tombent dans le panneau³.

    Aussi « doué » que l’investisseur en fonds d’actions, le détenteur de fonds d’obligations achète ses fonds au mauvais moment et les vend au mauvais moment. À l’instar des détenteurs directs d’actions, les détenteurs de fonds d’obligations sont de moins en moins patients. La belle époque où ils pouvaient détenir leurs fonds pendant au moins 10 ans semble bel et bien révolue. Dans ces conditions, comment voulez-vous que l’investisseur moyen sorte indemne d’une aventure aussi décevante, autant pour l’estime de soi que pour l’opinion qu’il aura des marchés financiers ?

    Même en ne conservant dans votre portefeuille qu’un seul fonds d’actions ou d’obligations, et à la limite le moins performant des 20 dernières années, vous auriez fait plus d’argent que de passer sans cesse d’un fonds à l’autre.

    Au risque de m’attirer les foudres des millionnaires qui lisent ce livre, je dirai que les riches s’en tirent mieux que tous les autres non pas parce qu’ils sont plus intelligents, raisonnables ou clairvoyants, mais tout simplement parce que leurs conseillers n’ont pas lésiné sur les moyens (gros poissons, gros moyens !) pour les convaincre que la gestion de leur fortune ne doit pas être de la responsabilité d’un amateur, surtout quand cet amateur est le client lui-même.

    C’est ainsi que les riches réalisent de très bons rendements et que les investisseurs des classes moyennes ou inférieures obtiennent des rendements pitoyables. On s’étonne ensuite de constater que les riches sont de plus en plus riches, que les pauvres sont de plus en plus pauvres et que les classes moyennes sont de plus en plus… moyennes.

    Vous avez un portefeuille de plus de 10 millions de dollars : soyez assuré qu’on organisera une belle rencontre privée avec le président d’une grande banque pour vous vendre l’idée d’une gestion « professionnelle » et privée de vos actifs. Mais si vous avez un portefeuille d’à peine 100 000 $, contentez-vous des conseillers en fonds de placement (la plupart sont honnêtes) ou gérez vous-même vos affaires au risque de voir s’envoler en fumée tous vos espoirs d’enrichissement et d’amélioration de vos conditions de vie.

    Après avoir mordu la poussière, bien des gens pensent que la bourse n’est faite que pour les riches. J’en entends déjà qui se disent que ce sombre tableau est à vous dégoûter à tout jamais du monde du placement. Pourtant, il n’y a aucune raison objective pour qu’il en soit ainsi. Les marchés financiers offrent tous les outils pour permettre aux investisseurs les plus modestes de s’enrichir. Les fonds indiciels négociés en

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