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Mystère au Connemara: Polar irlandais
Mystère au Connemara: Polar irlandais
Mystère au Connemara: Polar irlandais
Livre électronique168 pages2 heures

Mystère au Connemara: Polar irlandais

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À propos de ce livre électronique

Dublin, dimanche 19 heures, dans le quartier de Clon-tarf. Un nouveau jour pluvieux décline doucement. L’atmosphère fraîche et liquide s’insinue dans tous les corps. Malgré tout, dans l’après-midi, Caitlin avait décidé de sortir prendre l’air. Elle avait erré, entre deux ondées, dans Saint Stephen Green avant de rencontrer, devant Newman House, Carleen, sa meilleure amie du temps où elle fréquentait Trinity College. On découvre le cadavre de Patrick, un pêcheur, sur les rochers de Gaillimh et la police conclut hâtivement à une mort naturelle par noyade, mais Caitlin, sa soeur n'en est pas convaincue et elle se lance dans une dangereuse enquête qui la mènera peut-être à la vérité. On y découvre une Irlande traumatisée par la "guerre" que mène l'IRA pour la réunification du pays.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Michel Germain, né en 1945, est professeur agrégé d'histoire-géographie dans les environs d'Annecy (en 1994). Profondément ancré dans le terroir qui l'a vu naître, il se lance dans l'étude de l'histoire locale en 1983, se spécialisant notamment dans les recherches historiques sur la Deuxième Guerre Mondiale.
Parallèlement, Michel Germain publie de nombreux livres de géographie et des guides ainsi que des ouvrages concernant le début du XXe siècle. Il participe également à de nombreux autres ouvrages. Membre depuis sa fondation de l'Association des Glières, animateur du Musée départemental de la Résistance de Morette, il fonde en 1991 la Société des Auteurs Savoyards, regroupant près de cent cinquante auteurs. En 2000 sort son premier roman, un roman historique. Depuis, il continue à donner des conférences et à rencontrer les jeunes élèves ainsi qu’à écrire sur la Haute-Savoie 39-45 tout en essayant d’évoluer vers le roman. Il a dirigé une collection nationale sur les Paysans, aux éditions Horvath et il écrit de nombreux articles dans divers bulletins municipaux, divers journaux (dont le Dauphiné Libéré plus de 200 articles), revues nationales (revue des Troupes de Montagne, le Patriote Résistant, Alpes Magazine, Relief...) et dans les bulletins des associations de résistants.
LangueFrançais
Date de sortie13 mai 2020
ISBN9782379880414
Mystère au Connemara: Polar irlandais

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    Aperçu du livre

    Mystère au Connemara - Michel Germain

    d’Azur

    Chapitre un

    Dublin, dimanche 19 heures, dans le quartier de Clontarf.

    Un nouveau jour pluvieux décline doucement. L’atmosphère fraîche et liquide s’insinue dans tous les corps. Malgré tout, dans l’après-midi, Caitlin avait décidé de sortir prendre l’air. Elle avait erré, entre deux ondées, dans Saint Stephen Green avant de rencontrer, devant Newman House, Carleen, sa meilleure amie du temps où elle fréquentait Trinity College. Comme elles ne s’étaient pas revues depuis plus d’un siècle et qu’elles avaient le monde à se raconter, elles avaient fini l’après-midi au Bewley’s Oriental Cafe, devant quelques pâtisseries et plusieurs tasses de thé. Caitlin adorait le thé de cet établissement. Elle y venait souvent, même si la maison était toujours bondée. Et puis, Graffton street était une rue si charmante et si pittoresque, un peu de chaleur et de soleil dans la grisaille de Dublin. Le pays d’où elle venait était si calme qu’elle appréciait cette foule bigarrée qui roulait dans cette rue piétonne. Nombreux étaient les gens qui arpentaient le pavé des rives de la Liffey vers le haut, à l’écoute de quelque groupe de musiciens en mal de notoriété et qui redescendait le nez au vent, à la recherche de quelque odeur exotique.

    Vers 18 heures, Caitlin et son amie s’étaient quittées, après s’être promis de s’appeler. Graffton street s’était quelque peu vidée ; la nuit n’allait pas tarder à venir et avec elle la froidure de ce printemps.

    Au coin de Nassau street, la vendeuse des quatre saisons, drapée de bronze, ruisselait encore de la bruine du jour. Caitlin avait dû attendre si longuement son bus qu’elle était revenue trempée, comme au temps où, gamine, elle jouait sur les rives du Lough Mahon.

    Sa mère, campée depuis des heures devant la cheminée, où brûlait une interminable bûche de plastique dans le rougeoiement d’une ampoule électrique, n’avait même pas ouvert un œil, lorsqu’elle avait franchi le seuil de la maison. À pas feutrés dans la pénombre, pour ne pas déranger, Caitlin s’en était allée prendre un bain, histoire de se réchauffer.

    Sa mère s’était installée pour quelque temps chez elle. D’ordinaire, elle habitait Cork, d’où la famille était originaire, mais elle acceptait de moins en moins les ragots de cette ville et trouvait le quartier où vivait sa fille beaucoup plus calme. Caitlin, qui avait dépassé la trentaine depuis quelques années déjà, se disait que sa mère pourrait bien venir vivre avec elle, puisqu’elle était seule à Cork.

    Mais sa chère mère ne pouvait se passer de la mer et des mouettes qui hantaient Little Island. Caitlin avait beau lui expliquer qu’à Dublin c’était aussi la mer d’Irlande et les mêmes oiseaux, rien n’y faisait et elle s’était lassée. Là-bas, dans la maison de son enfance, elle avait souvent surpris sa mère à rêver tout éveillée de son père ou de son frère. Mais la maison de Cork était désespérément sans homme depuis longtemps déjà.

    À peine était-elle sortie de sa salle de bains que le téléphone sonna avec violence. L’agressivité de cette sonnerie dérangea les deux femmes tant l’atmosphère de la maison était feutrée. Caitlin décrocha le combiné comme pour faire cesser cette agression. Au bout du fil, une voix qu’elle ne connaissait pas.

    L’homme, un peu malhabile, questionna :

    — Vous êtes bien madame O’Neill ?

    — Oui, enfin... Je suis mademoiselle O’Neill. Caitlin O’Neill.

    — Avez-vous un frère qui se prénomme Andrew ?

    — Oui, mais il n’est pas ici. Puis, réalisant la drôle de question, que venait de lui poser l’inconnu, elle ajouta aussitôt : Qui êtes-vous ? Que lui est-il arrivé ?

    — J’ai cherché à joindre sa mère toute la journée. Elle doit être morte, poursuit l’homme plus malhabile encore. Le numéro que l’on m’a donné ne répond pas ! En désespoir de cause j’ai appelé le centre de Dublin qui m’a donné votre numéro...

    Coupant son interlocuteur, Caitlin lança :

    — Ma mère n’est pas morte, monsieur ! Elle se porte, Dieu merci, très bien. Elle est là près de moi et vous entend parfaitement bien. Mais, qu’est-il arrivé à Andrew ?

    — Un promeneur, ce matin, a trouvé son corps sur les rochers tout près d’ici. Oui... J’ai oublié de vous dire, je vous téléphone de Galway... Votre frère s’est visiblement noyé. Il est passé par-dessus bord de son bateau et son corps a été rejeté par la mer et projeté à plusieurs reprises contre les rochers. On n’a pas encore retrouvé ni son bateau ni ses filets. On ne sait pas non plus s’il était parti seul en mer, tôt ce matin. Mais nous continuons l’enquête.

    Un lourd silence emplit la maison de Clontarf. Les deux femmes apprenaient tout à la fois qu’Andrew vivait à Galway et qu’il s’était noyé cette nuit. Pour elles, le monde s’arrêta net de tourner. Que faisait Andrew à Gaillimh ?

    La mère de Caitlin, recroquevillée au fond de son fauteuil d’osier, se mit à pleurer en silence. La mort lui avait déjà volé son mari, il y a 21 ans et un bébé à la naissance. Depuis, elle tentait de se consoler en pensant que tous deux étaient auprès de Dieu et que si le Créateur l’avait voulu ainsi, c’est qu’elle l’avait mérité. Mais qu’avait-elle donc fait au Bon Dieu pour qu’Il lui enlève son fils unique ? Elle cAngusait avoir assez donné à son Maître et en avoir fini avec les malheurs. Elle aspirait à vivre sa proche vieillesse en toute humilité et pour cela, tous les matins, elle allait à l’église prier le Seigneur. Dieu le voulait autrement et il lui envoyait une nouvelle épreuve. Le temps s’écoulait lentement au pays des Gaëls, mais là, il s’était immobilisé. L’air, lui-même semblait figé. Les bruits de la rue si peu passante et ceux du port toujours lointains, cette fois, ne pénétraient plus les rideaux épais. Le ferry, en partance pour Hollyhead, s’était même arrêté, statufié dans la blancheur du temps.

    Caitlin n’était plus là. Ou plutôt si, elle était là physiquement, tenant difficilement sur ses jambes flageolantes. Tout autour d’elle changea très vite. Elle était comme cernée par les vapeurs scintillantes du brouillard. Ses yeux dans le vague ne voyaient plus les meubles ou les bibelots qui l’entouraient et leur réalité s’était évanouie. Elle était anéantie dans cette irréalité qui, la grandissant, lui permettait d’échapper à toutes les contingences qui l’a reliaient au monde. Elle aurait voulu être ailleurs, très loin, tant la nouvelle de la mort d’Andrew lui était insupportable.

    Au bout d’un instant, qui lui parut une éternité, la sonnerie du téléphone la sortit à nouveau de la torpeur, où l'inexcusable nouvelle l’avait précipitée. Son rêve disparu dans le brouillard de ses yeux et machinalement, comme un automate, sans reprendre vraiment conscience, elle décrocha.

    La même voix était toujours au bout du fil. Une voix rauque sans chaleur. Retrouvant ses esprits, Caitlin voulut tout savoir et les questions fusèrent de sa bouche à la vitesse de l’éclair, à en devenir incompréhensibles. Elle finit par apprendre que le corps d’Andrew était à la morgue de Galway, que l’homme qui lui parlait n’était autre que le commisor Angus Omagh, responsable de la police du comté de Galway, que la barque n’avait pas été retrouvée et qu’on ne savait pas s’il y avait un autre marin avec lui, que sa maison de la plage était déserte et que rien ne semblait anormal, etc.

    — Vous m’entendez ?

    — Euh... oui.

    — Je vous attends demain matin, ici au poste de police. Vous trouverez aisément. Vous ne pouvez pas vous tromper, nous sommes près de Main Street.

    Le policier poursuivit sur des banalités qu’il est d’usage de dire aux parents des défunts en pareil cas. Entre deux condoléances, Caitlin promit d’être sur place dans la matinée, avant de raccrocher à contrecœur, car il lui semblait qu’elle avait oublié mille et une questions.

    Sa mère n’avait toujours pas bougé. Les yeux clos, elle gardait son chagrin au fond d’elle-même. Elle se souvenait de ce terrible jour de mars 1973, où le téléphone lui avait annoncé la mort de Darcy, son tendre époux qu’elle chérissait tant. Il était allé à Londres, envoyé par sa société et, ayant fini son travail, il avait déambulé dans Oxford Street, puis emprunté Regent Street à la recherche de quelques cadeaux pour sa femme et ses enfants. C’est non loin de là, en pleine rue, alors qu’il marchait tranquillement sur le trottoir, qu’une saleté de bombe avait explosé et l’avait assassiné avec plusieurs autres passants. Big Ben achevait d’égrener quinze heures.

    Elle avait dû, alors, faire le voyage à Londres pour reconnaître le corps de son Darcy, mais elle ne s’en était jamais remise. Depuis, la vue de son pauvre mari, sanguinolent et déchiqueté, la hantait à chaque instant. Dès qu’elle fermait ses grands yeux gris, les larmes coulaient et elle voyait Darcy. Depuis cette après-midi mortelle, ses nuits s’étaient écourtées et elle parlait souvent avec lui. Elle voulait chasser les horribles images de sang et ne garder que les meilleurs moments passés avec lui, mais cela ne diminuait en rien son immense chagrin. Parfois, lorsque le cafard l’étreignait trop, elle téléphonait à Caitlin et sa fille venait la chercher.

    Celle-ci avait dû quitter Cork et s’installer pour son travail à Dublin, où elle occupait un poste à responsabilité dans une société d’informatique. La ville se développait très vite et les entreprises embauchaient de nombreux jeunes. L’écart avec les campagnes verdoyantes et agricoles s’agrandissait chaque jour un peu plus. Caitlin était devenue une femme moderne, se déplaçant dans la grande ville avec aisance, mais au fond d’elle-même elle n’avait jamais oublié Cork et toute son enfance.

    Caitlin s’était assise dans le fauteuil face à sa mère. Elle n’osait parler et resta muette de peur de troubler encore plus sa chère mère. Celle-ci ouvrit ses yeux pleins de larmes et son regard se perdit dans le feu artificiel. La pièce lui sembla, tout à coup, étriquée et glaciale. Elle frissonna et Caitlin se leva pour aller lui quérir une couverture.

    Tandis que la jeune femme regardait dans le vide à travers la fenêtre, la mère reprit le cours de ses pensées, qu’elle connaissait par cœur.

    Quelques jours après l’attentat, Andrew, qui venait d’avoir 16 ans, déclara qu’il partait. Il ne pouvait laisser le meurtre de son père impuni. Au début, elle avait reçu trois lettres de Londres, puis plus rien. Andrew n’avait pas reparu. Pas de lettre, pas de coup de fil, rien qu’un silence pesant, qu’elle ne comprenait pas. Caitlin, pas plus que sa mère, ne savait ce qu’il était advenu de son grand frère.

    Au début, Caitlin avait attendu, se disant qu’il reviendrait bien vite. Il était parti en disant qu’il voulait venger papa. Qu’est-ce que cela voulait bien dire dans sa caboche ? Elle savait qu’il était têtu et capable de tout. Il n’était pas Irlandais pour rien. Sa jeunesse lui interdisant de partir à sa recherche, elle avait attendu vainement auprès de sa mère. Quelques années plus tard lorsqu’elle eut 19 ans, elle s’était mise à le chercher, roulant à travers le pays, les week-ends et lors de ses vacances universitaires, espérant follement le trouver. « L’Irlande n’est pas si grande, je finirais bien par le trouver », disait-elle à sa mère désespérée. Puis, elle aussi s’était lassée, sans cesser pour autant d’être tourmentée et de croire à son retour.

    Elle était restée inquiète, tous les jours que Dieu avait faits, car Andrew avait parlé de vengeance, donc de violence. L’I.R.A. avait revendiqué l’attentat de Regent street, qui avait tué son père et elle ne voyait pas très bien comment son frère pourrait s’en prendre à cette organisation, qui luttait pour l’Irlande libre, comme le faisait le Sinn Fein depuis sa création et à laquelle ses aïeux avaient activement participé. Le grand-père Daniel avait été longuement emprisonné, quant à l’arrière-grand-père, les Anglais l’avaient exécuté. Alors que pouvait faire son frère ?

    — Admettons, disait-elle parfois à sa mère, qu’il ait décidé d’entrer dans l’IRA, l’armée clandestine n’engageait pas des gamins et elle a dû lui faire comprendre.

    — Tu sais aussi bien que moi que, d’abord, ton frère n’est plus un gamin et puis tu sais aussi que l’I.R.A. a besoin de soldats. Alors...

    Au début, il leur arrivait souvent de parler d’Andrew, de la lutte clandestine des Irlandais catholiques. Puis le temps passant, le sujet devint tabou ou presque. L’angoisse s’était perpétuée du fait surtout qu’elles restaient sans nouvelle d’Andrew. Il avait disparu de la circulation. À chaque nouvel attentat ou affaire, elles achetaient tous les journaux et épluchaient, l’une à Dublin l’autre à Cork, la presse et regardaient la télévision, l’inquiétude rivée au ventre. Jamais elles n’avaient trouvé de traces de leur Andrew. Parfois, à bout d’arguments, Caitlin lançait qu’il avait dû partir aux États-Unis, comme tant d’autres Irlandais émigrés. Mais rien n’y faisait et les deux femmes ne cessaient de regarder leur porte espérant qu’il en franchirait un jour le seuil, son large sourire aux lèvres et ses cheveux roux en bataille. Elles n’en parlaient jamais et gardaient un silence complice.

    Et finalement, la catastrophe tant redoutée était arrivée.

    Rompant

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