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Sans limites: Saga fantasy
Sans limites: Saga fantasy
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Livre électronique276 pages3 heures

Sans limites: Saga fantasy

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À propos de ce livre électronique

Retrouvez Lauryn, Milly et Julien dans leurs nouvelles aventures !

2167. Milly, Lauryn, Julien ont quinze ans.
Perdus entre montagne et forêt tropicale, ils subissent leur Vitaltest, un lâchage initiatique, au milieu d’une bande d’adolescents qui apprennent à maîtriser leur pouvoir élémentaire.
Les amitiés émergentes n'empêchent pas les rivalités de se réveiller et une véritable lutte pour leur survie s'instaure.
Alors que les événements s’enchaînent, ils se rendent compte que leur épreuve n’a rien d’une colonie de vacances. Une question s’impose alors. Une question dont la réponse pourrait être bien pire que tout ce qu’ils peuvent imaginer : et si le Vitaltest n’était pas ce qu’il devrait être... ?

Sans limites nous entraîne dans un monde adolescent. Amitié, amour, cruauté et souffrance, une aventure explosive où réalité et imaginaire se confondent… parfois pour le pire.

EXTRAIT

Plus rien n’avait de sens. Plus rien n’avait de goût. Ni d’odeur. La nourriture était sable, les effluves fleuris qu’elle rencontra sur le chemin du retour lui donnèrent des haut-le-cœur. Chacune de ses pensées était engloutie dans un maelström de noirceur. La respiration saccadée, elle gardait les yeux rivés au sol. Un abîme se creusait en elle, lui labourait la poitrine comme un animal en colère… Le crâne compressé dans un étau de fer, elle sentait l’afflux sanguin battre à ses tempes. Les perceptions annihilées, seule subsistait une douleur sourde qui lui déchirait les entrailles. Comment aurait-elle pu savoir qu’une souffrance pareille existait?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Clara Suchère a commencé à écrire Vitaltest à quatorze ans. Elle en a seize aujourd’hui, et prépare un bac scientifique. Elle est passionnée de montagne, de lecture et, bien sûr, d’écriture.
Vitaltest est une saga fantasy où la magie ne résout pas tous les problèmes.
LangueFrançais
Date de sortie12 juin 2017
ISBN9791094140239
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    Aperçu du livre

    Sans limites - Clara Suchère

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    Clara Suchère

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    II - Sans limites

    © Yucca Éditions, Carmaux, 2016

    Tous droits réservés pour tous pays.

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    Depuis plus de cinquante ans, l’année de leurs quinze ans, les adolescents sont soumis au Vitaltest, un examen en deux parties. Un examen qui détermine le reste de leur existence et les marque à jamais…

    Résumé du tome précédent

    Vitaltest I Sans repères

    2167. Dans une société d’après-guerre, les hommes vivent maintenant en harmonie avec la nature.

    Milly, Lauryn et Julien passent leur Vitaltest, un rite initiatique en deux étapes. D’abord le Test, où ils choisissent l’élément qu’ils pourront maîtriser pour le reste de leur vie, puis le Lâchage, pendant lequel ils doivent survivre un mois en milieu hostile.

    Les trois amis se réveillent entre forêt et montagnes péruviennes. Ils trouvent refuge dans les vestiges d’une ville inca, où ils font la connaissance d’autres adolescents, parmi lesquels Amélie, Théo, Kim, Trystan et le mystérieux Skandar. Très vite, nos héros s’aperçoivent que survivre dans la nature n’a rien d’un jeu. Entre la nourriture qui manque, les blessures qui s’accumulent et l’apparition d’une bande adverse menée par la vicieuse Virginie, la situation devient vite incontrôlable. Sans parler de la découverte inexplicable d’une via ferrata au milieu de nulle part…

    La seule aide qu’ils peuvent espérer provient du container, un caisson, dans lequel sont stockés des éléments indispensables à leur survie, qui doit s’ouvrir lors du quinzième jour.

    Mais alors qu’ils sont sur le point de trouver un équilibre, un incendie provoqué par Virginie ravage leur abri, causant la mort de Quentin.

    La règle était pourtant claire : impossible de mourir pendant un Vitaltest. Chargé de son organisation, le Conseil est censé assurer leur parfaite sécurité.

    Mais à cette heure, rien n’est moins sûr…

    Chapitre 1 : 6e jour

    Milly

    Plus rien n’avait de sens. Plus rien n’avait de goût. Ni d’odeur. La nourriture était sable, les effluves fleuris qu’elle rencontra sur le chemin du retour lui donnèrent des haut-le-cœur. Chacune de ses pensées était engloutie dans un maelström de noirceur. La respiration saccadée, elle gardait les yeux rivés au sol. Un abîme se creusait en elle, lui labourait la poitrine comme un animal en colère… Le crâne compressé dans un étau de fer, elle sentait l’afflux sanguin battre à ses tempes. Les perceptions annihilées, seule subsistait une douleur sourde qui lui déchirait les entrailles. Comment aurait-elle pu savoir qu’une souffrance pareille existait?

    Elle ferma la porte de sa chambre, et resta immobile au milieu de la pièce, les jambes flageolantes. Son regard parcourut tous les détails du mobilier et de la décoration en une seconde. Avisant un petit miroir qu’Il lui avait offert, elle s’en approcha après avoir jeté son sac à terre et ôté ses chaussures. Le saisissant, elle contempla son reflet. La fille qui la dévisageait ne pouvait pas être elle. Ce visage rouge, ces yeux bouffis, ces cheveux en bataille, et, par-dessus tout, ce vide dans son regard, comme si on lui avait arraché son âme. Une colère puissante s’empara d’elle. Chris Helword n’avait pas le droit de la réduire ainsi.

    Dans un petit cri plein de rage, elle brisa le miroir contre le mur sans se soucier des éclats de verre qui ricochèrent et se plantèrent dans son avant-bras. Les boîtes en porcelaine qu’il lui avait offertes pour son anniversaire subirent le même sort. Elle saisit la lampe à deux mains et la jeta de toutes ses forces contre la commode. L’ampoule s’éteignit sous le choc, dans un grésillement suivi d’un minuscule éclair. La pièce fut plongée dans la pénombre.

    Le regard de Milly se tourna vers le cadre photo, dans lequel ils arboraient un sourire joyeux. Elle s’en empara et le mit à terre, puis le brisa de ses pieds nus. La douleur qui envahit son talon était enivrante. Elle continua de saccager sa chambre jusqu’à ce qu’il ne reste plus un seul souvenir de Chris. Seule au milieu de la pièce, luisante de sueur, elle baissa la tête et fixa ses bras.

    De longs filets pourpres coulaient sur sa peau blanche. Plusieurs entailles parsemaient ses poignets et ses chevilles. Le sol était jonché de débris et de morceaux de verre. Elle s’effondra sur son lit sans se soucier du sang qui macula les draps. Enfin, les larmes jaillirent, intarissables. Elle entendit à peine sa mère frapper à la porte et l’appeler d’un air inquiet.

    — Milly ? Est-ce que ça va ? J’ai entendu des fracas…

    — J’ai cassé un verre. C’est bon, tu peux partir.

    Malgré ses efforts, sa voix flancha sur les dernières syllabes. Elle renifla et ferma les paupières en s’enfonçant les ongles dans la paume de ses mains.

    — Tu es sûre que ça va, ma chérie ?

    — Oui, oui, mais j’ai beaucoup de devoirs.

    — Bon, je te laisse alors…

    Les pas s’éloignèrent après quelques secondes d’hésitation. Milly avait l’impression que chacun de ses membres était aussi lourd que du béton. Les larmes baignèrent ses joues, laissant des sillons de feu sur sa peau.

    De nouveau calme, elle se redressa sur son matelas. Le spectacle de sa chambre s’imposa alors. Elle ramassa la photo d’elle et de Chris et la regarda longuement. Ses doigts effleurèrent le visage figé de son ancien ami, laissant une trace rouge sur le papier glacé. De son autre main, elle sortit un briquet de l’un des tiroirs de son bureau.

    Un instant plus tard, elle contemplait la flamme crépiter en dévorant le papier. Lorsqu’il fut entièrement recroquevillé et noir, elle souffla. Ses restes carbonisés allèrent rejoindre les débris de l’enfance de Milly sur le parquet.

    Julien

    — Ce qui signifie que nous sommes seuls. La récréation est terminée.

    Ces mots sonnèrent comme le marteau s’abat sur l’enclume ou le bâton sur la surface lisse du gong. Inévitables, ineffaçables et engendrant plus de conséquences que n’importe quel discours.

    Chacun des membres de la CAVI se tut, laissant un silence oppressant planer au-dessus de leurs têtes. Pour la première fois, la Communauté des Adolescents de la Ville Inca, ainsi qu’ils l’avaient ironiquement nommée quelques jours auparavant, se trouvait dans une impasse de laquelle leur astuce seule ne pouvait les tirer.

    À mesure qu’il prenait conscience de toute l’ampleur de cette déclaration, Julien sentait son cœur s’emballer furieusement. Seuls. Le mot était brutal et infiniment terrifiant. Le simple fait de l’avoir prononcé avait déclenché en lui une vague d’angoisse qu’il peinait à refouler.

    Sans chercher à masquer son trouble, il planta ses yeux dans ceux d’Amélie. Théo lui coupa la route alors qu’il allait parler.

    — Mais si le Conseil est réellement absent, cela signifie que nous courons…

    — Un danger réel, acheva la jeune fille à sa place.

    — Il faut prévenir Virginie et sa bande.

    Les mots étaient sortis spontanément de la bouche de Julien. Ils eurent pour mérite de déclencher un tollé au sein de leur petite assemblée.

    — Quentin est mort à cause d’eux. Je te rappelle qu’ils ont été jusqu’à déclencher un incendie dans notre abri, signala Trystan avec morgue et colère.

    Virginie Veyne était l’archétype de la peste manipulatrice et impulsive. Chacun de ses gestes était imprégné de malveillance pure, chacune de ses paroles avait une visée perfide. À la tête d’un petit groupe dont elle contrôlait soigneusement l’organisation, son ultime forfait avait coûté la vie à l’un des participants au Vitaltest.

    — Justement ! argumenta Julien. Ils sont persuadés qu’aucun de leurs gestes ne peut mener à des conséquences graves, il nous faut les détromper. Ils prennent ça comme un jeu et ça risque de nous coûter une vie de plus si on ne fait rien.

    — Je suis d’accord avec Julien.

    La voix familière de Milly fit monter en lui une bouffée d’affection. Il esquissa un petit sourire dans sa direction, mais ses yeux verts regardaient ailleurs.

    — Quoi ?

    Amélie, Trystan et Kim la dévisagèrent, incrédules.

    — Il serait plus prudent de prévenir Virginie et ceux de sa bande. Pour notre sécurité à tous.

    Son timbre était mécanique, dénué de toute émotion. Julien fronça les sourcils, étonné par le tour que prenait la situation et la manière bizarre avec laquelle son amie réagissait.

    — Virginie est instable et toxique, mais ce n’est pas une meurtrière. Elle changera d’attitude en voyant ce qu’elle a fait.

    — Désolée de te contredire, mais ça reste à voir. Depuis que je la connais, Virginie a toujours été mégalomane, répliqua Amélie. J’ai peur que la prévenir ne fasse qu’empirer les choses.

    — Je ne connaissais pas Virginie.

    Toutes les têtes se tournèrent vers Trystan. Ses boucles blondes retombaient sur son front en lui conférant un air angélique et mélancolique.

    — En revanche, Gaëtan était mon ami… souffla-t-il, les yeux dans le vague.

    Frissonnant, Julien se remémora ce dernier aux côtés de Virginie alors que l’incendie faisait rage autour d’eux. Trystan avait cherché à le retrouver en début de Vitaltest, mais il n’aurait jamais imaginé que ce serait dans ces conditions. Il devait cogiter sur cette trahison depuis qu’il avait revu son visage.

    — Je ne comprends pas ce qui lui est passé par la tête.

    Kim posa une main réconfortante sur son épaule, incapable de trouver les mots. Fort heureusement pour elle, Skandar se chargea de rompre le silence en se raclant bruyamment la gorge.

    — Je suis sincèrement désolé pour toi. Malheureusement, j’ai peur qu’on ait d’autres sujets de préoccupation dont il faut discuter. Et concernant Virginie, je ne vois pas l’intérêt de la prévenir qu’elle dispose de toute liberté pour nous tuer.

    Milly et Julien baissèrent la tête, vaincus devant les murmures d’approbation des autres. La conversation s’orienta sur les restes de Quentin, un sujet trop macabre pour Théo apparemment, qui s’empressa de prétexter une nausée pour s’éclipser. Il fut décrété que Trystan, à l’aide de ses capacités d’Air, rassemblerait ce qui restait du corps calciné dans le sweat du défunt, ce qu’il alla faire de mauvaise grâce.

    Il revint deux minutes plus tard, tenant à bout de bras une sorte de baluchon roussi par les flammes, fermé par la chaîne du cristal de Quentin. Lauryn s’empressa de le faire léviter pour que Trystan, qui pâlissait à vue d’œil, aille soulager son estomac à quelques pas de là.

    Le silence s’installa tandis que tous prenaient conscience de la gravité de la situation. Ils étaient perdus au milieu de nulle part, sans protection aucune et avec une pyromane en liberté. L’anxiété s’était taillé sa place dans tous les esprits. Sans un mot, Ève prit la situation en main et étendit les bras devant elle.

    Un grondement remonta des entrailles de la montagne. La terre se mit à bouger, trembler, se retourner, manipulée par une force invisible. L’adolescente ne quittait pas le sol des yeux. Lorsqu’elle abaissa les mains, une fosse assez profonde s’étalait devant elle. Lauryn déposa le sinistre baluchon dans la terre et Ève s’empressa de reboucher la tombe avant de faire pousser de l’herbe et des fleurs à boutons d’or dessus. Ainsi, une fois le Vitaltest achevé, sa famille pourrait exhumer ses restes afin de lui offrir un adieu décent.

    Cette tâche macabre accomplie, un silence gênant s’instaura. Aucun d’entre eux n’avait été proche du disparu. Les mots censés lui rendre hommage ne venaient pas spontanément. Kim finit par s’éclaircir la gorge, puis avança d’un pas.

    — Qu’il repose en paix, déclara-t-elle, achevant par ces mots la seule cérémonie qu’ils pouvaient offrir au défunt.

    Milly

    Milly regarda longuement l’estafilade qui courait sur son avant-bras. Du pus commençait à suinter des bords de la blessure, mais il y avait plusieurs jours que Julien avait trouvé la bonne combinaison de plantes à utiliser dans ces cas-là, grâce à ses capacités de Terre. Dès qu’ils auraient réglé des soucis plus immédiats, il lui fabriquerait un cataplasme de sa recette personnelle.

    En attendant de pouvoir procéder à une désinfection plus efficace, elle tira des profondeurs de la terre un filet d’eau qui vint rafraîchir sa peau boursouflée. Son cristal scintilla d’une lumière bleue qui alla en s’estompant une fois l’effort terminé. Il n’y avait que sept jours qu’ils avaient effectué le Test, mais la maîtrise de son élément était déjà devenue une extension d’elle-même.

    La question qui se posa aussitôt fut celle de leur prochain abri. Les restes calcinés de la maison ne pouvaient évidemment plus leur servir. Aucun d’entre eux n’avait envie de passer la nuit là où Quentin avait dû expirer dans d’atroces souffrances, et de surcroît à quelques pas de sa tombe.

    Ils se remirent en route, le moral au plus bas et le cœur lourd. Même Julien, dont le rôle de pitre était maintenant officiel, était plongé dans un silence morose. Après un moment d’exploration dans le dédale des ruelles de pierre, ils finirent par dénicher une autre maison dans un bon état relatif.

    La vie devait vite reprendre son cours s’ils voulaient survivre au Vitaltest. Pourtant tous s’assirent dans un silence complet, pour la plupart seuls dans leur coin. Un diaporama macabre défilait dans l’esprit de Milly qui laissa ses cheveux ébène masquer son visage pour éviter d’avoir à subir des regards scrutateurs.

    — Je ne comprends pas, lâcha Skandar d’un ton frustré.

    Seuls quelques-uns tournèrent la tête vers lui. Les autres avaient replié leurs genoux et enfoui leur visage dans leurs bras. Milly fut de ceux qui lui prêtèrent attention.

    — Ça n’a pas de sens. Il n’y a jamais eu de problème de ce genre pendant les Vitaltest. Croyez-moi, j’ai bien étudié la question. Le seul décès a eu lieu la troisième année, parce que le gouvernement n’avait pas assez sécurisé l’épreuve. C’était le tout début de l’histoire du Lâchage. Tout le monde connaît l’histoire de l’adolescente qui avait été lâchée dans le Grand Canyon. Veina Lawrence.

    Ce nom sonna aux oreilles de Milly comme un personnage de mythe, ce qu’il était devenu pour le monde entier. Une vieille histoire qu’on continuait à raconter, de temps à autre, sans qu’elle prenne une once de réalité dans les esprits cependant.

    — Elle a chuté dans le vide alors qu’elle venait de recevoir la décharge qui devait l’endormir le dernier jour pour la ramener chez elle.

    — C’est exact, approuva Kim, qui était sorti de son mutisme et venait se joindre à la conversation. Les autorités étaient tellement concentrées à ramasser tous les candidats que lorsqu’ils s’en sont aperçu, il était trop tard.

    Milly frissonna. Elle était heureuse de ses nouvelles capacités. Mais si cela signifiait perdre l’un de ses amis, elle aurait préféré ne jamais les découvrir. Machinalement, elle joua avec une goutte d’eau, la faisant rebondir sur chacun de ses doigts. C’était comme un réflexe, aussi naturel que celui de respirer. Elle était continuellement en contact avec son élément.

    — Si le Conseil n’est plus présent, cela signifie qu’il y a une faille dans leur système. Une grosse faille même.

    Pour le coup, cette phrase réveilla l’attention et la curiosité de chacun.

    — Tout va s’arranger dans les prochains jours, riposta Amélie. Ils vont se rendre compte que quelque chose cloche, si ce n’est pas déjà fait.

    — Peut-être… dit Skandar, évasif.

    Milly fronça les sourcils. Elle était la première qui avait rencontré Skandar Tarnes, au cours d’un combat particulièrement violent avec un puma. Si ses yeux ambre et son attitude mystérieuse continuaient de la troubler depuis, elle ne pouvait pour autant prétendre bien le connaître. Pendant un instant son attitude l’intrigua. Il croisa son regard. Le sourire qu’il lui adressa acheva de dissiper ses soupçons.

    Il devait être midi quand Amélie mit fin au long silence qui planait sur le groupe.

    — Pour ma part, il est hors de question que je me terre comme un lapin dans son repaire. On va finir par découvrir ce qui se passe vraiment. En attendant, j’ai faim !

    Lauryn

    Le ciel s’était à peine assombri, mais déjà tous étaient de retour dans leur nouvel abri. Ils mangèrent sans grand enthousiasme les plantes comestibles qu’avaient réussi à rassembler Ève et Julien en un après-midi. Au bout de six jours entiers de ce régime, Lauryn aurait donné n’importe quoi pour pouvoir engloutir un vrai repas chaud.

    Pas mal de choses lui manquaient, depuis leur arrivée au milieu des montagnes. Sa famille lui manquait. Mérince lui manquait. La simple sensation de la brosse dans ses cheveux courts lui manquait. Mais la vraie nourriture, consistante et savoureuse, était encore ce qui lui faisait le plus défaut.

    Après un moment, l’atmosphère finit par se détendre légèrement. Trystan improvisa un spectacle humoristique que Julien commenta avec un faux dédain comique à voir.

    La soirée s’acheva sur une valse assez approximative. Trystan invita Kim sur sa scène improvisée, encouragé par des applaudissements enthousiastes. Ève siffla dans leur direction et Milly entama une chanson, bientôt reprise par tout le groupe. Lauryn rit avec les autres, heureuse que le spectre de Quentin se soit éclipsé des esprits, du moins pour cette soirée.

    Du coin de l’œil, elle vit Skandar se glisser discrètement dehors. Elle applaudit une dernière fois le couple qui venait de s’écrouler à terre sous les rires et les huées générales après avoir trop tourné, puis sortit à la suite du jeune homme. Au détour d’une ruelle, elle finit par le repérer. Il s’était assis, les jambes repliées, adossé contre un muret partiellement écroulé. Elle vint le rejoindre. La seule lumière qui lui permettait de voir ses traits était celle de la lune, dont le visage blafard baignait d’argent les alentours.

    — Je te dérange ?

    Il secoua imperceptiblement la tête. Elle s’installa à ses côtés et leva les yeux pour contempler les étoiles, mais après la vive clarté du feu de camp elle dut battre un instant des paupières pour les distinguer. Un léger soupir s’échappa de ses lèvres. Elle détestait ne rien pouvoir faire pour améliorer la situation. Lauryn Gueniant avait appris à être maître de sa vie. Le simple fait de dépendre de quelqu’un d’autre, même si c’était le Conseil des toutes-puissantes autorités de Tairfeau, l’irritait.

    — Tu crois qu’on peut s’en sortir ? lâcha-t-elle soudain.

    — Bien sûr, c’est…

    — Ne me sers pas le même discours qu’aux autres, s’il te plaît. Je ne suis pas Théo, tu ne pourras pas me rassurer avec deux ou trois mots réconfortants.

    — Les chances sont minces, au vu de la situation, déclara-t-il avec une expression indéchiffrable.

    — Je m’en doutais.

    Le silence s’installa de nouveau. Lauryn arracha nerveusement une poignée d’herbe et la dissémina dans les airs en créant une légère brise. Maintenant qu’elle était au calme, seule, hormis la présence de Skandar, la frustration l’envahissait, aussi poignante que le désespoir ou la haine.

    — Toi non plus, tu n’aimes pas ça.

    Surprise, elle cligna les yeux, sans savoir que répondre. La phrase du garçon était plutôt inattendue, mais elle pensait saisir ce qu’il voulait dire. Néanmoins, elle joua la carte de l’incompréhension.

    — Personne n’aime ça.

    — Tu sais que ce n’est pas ce que je voulais dire, soupira Skandar. J’ai eu assez le loisir de t’observer pour voir que tu détestes être à l’écart des décisions. Tu feins d’être l’incarnation de l’optimisme, mais tu ne fais confiance qu’à toi-même et dès que quelqu’un tente de connaître tes pensées, tu te fermes comme une huître. C’est pour ça que parfois Milly et toi ne vous comprenez pas.

    — Milly est ma meilleure amie. Je lui confierais ma vie.

    — Peut-être. Mais elle aussi ferme son âme à tous ceux qui lui veulent du bien.

    — Elle n’a pas toujours été comme ça. Elle a changé après… après…

    — Après Chris.

    Le fait que Skandar soit au courant ne l’étonna même pas. Elle haussa les épaules.

    — Je n’aime pas penser que sans les moyens du Conseil nous sommes condamnés.

    — C’est pourtant partiellement

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