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Les amants d'Henriette: Un roman drôle et poétique
Les amants d'Henriette: Un roman drôle et poétique
Les amants d'Henriette: Un roman drôle et poétique
Livre électronique129 pages1 heure

Les amants d'Henriette: Un roman drôle et poétique

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À propos de ce livre électronique

Dans une luxueuse maison de retraite, une vieille femme se raconte pour tromper l'ennui...

Lorsque l’on approche le crépuscule de sa vie, celle-ci peut parfois sembler longue et monotone, mais pas aux « Bleuets » : le Capitaine chapardeur de chocolat, Chantal fumeuse de mentholées au look extravagant, Léon l’amoureux des romans, Hortense la créative, sans oublier Armand le dévoué concierge toujours accompagné de sa fidèle Doliprane font de cet endroit une bulle à part.
Un coffret sculpté aux souvenirs. Une vie remplie de rencontres surprenantes. C’est ce que raconte Henriette à longueur de journée à ses colocataires de la maison de retraite cossue.
Mais les histoires d’Henriette sont-elles vraies ou sont-elles le fruit de son esprit délirant ?

Les amants d’Henriette est un voyage au fil des vies passées, une petite bulle de fraîcheur douce-amère.

EXTRAIT

On avait baptisé le domaine d’un nom de fleur pour enfouir les odeurs de formol sous une image plus légère. Depuis quatre ans qu’il travaillait aux Bleuets, Armand voyait sa vie comme une pièce de théâtre à laquelle il assistait chaque jour. Être concierge dans l’une des plus riches maisons de retraite du pays apportait son lot de personnages aussi absurdes que réels. La vieillesse avait pour lui quelque chose de touchant. Une comédie qui nous échappe alors que nous n’y échapperons certainement pas.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Et plus qu'une simple galerie de personnages, tous plus attachants les uns que les autres, ce roman, bien écrit, nous ouvre les yeux. - Croc1706, Babelio

Une tranche de vie très agréable, sur un thème particulier, peu abordé en littérature, et sans doute difficile à traiter. Un pari réussi pour cette jeune auteure, qui met en plus fin à cette histoire de façon drôle et pleine d'espoir. - Mllemalenia, Babelio

L'auteure nous dresse en toute simplicité et avec un regard amusé une galerie de portraits comme j'aime les voir. - Blog Le Bloc-notes de Carmen

À PROPOS DE L'AUTEUR

Éva Giraud, née en France en 1988, a grandi à Rouen, où elle est revenue vivre après quelques années à Toulouse. Après avoir été danseuse de feu, pigiste et bien d’autres choses, à 26 ans, elle décide de créer avec une amie une association de promotion artistique et culturelle dans laquelle elle anime des ateliers d’écriture, dont la marraine n’est autre qu’Amélie Nothomb. C’est à la Belgique qu’elle a décidé de confier son cinquième roman : Nos folies ordinaires paru en 2016.
LangueFrançais
ÉditeurLiLys Éditions
Date de sortie9 févr. 2018
ISBN9782930848198
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    Les amants d'Henriette - Éva Giraud

    1

    On avait baptisé le domaine d’un nom de fleur pour enfouir les odeurs de formol sous une image plus légère. Depuis quatre ans qu’il travaillait aux Bleuets, Armand voyait sa vie comme une pièce de théâtre à laquelle il assistait chaque jour. Être concierge dans l’une des plus riches maisons de retraite du pays apportait son lot de personnages aussi absurdes que réels. La vieillesse avait pour lui quelque chose de touchant. Une comédie qui nous échappe alors que nous n’y échapperons certainement pas.

    La charmante dépendance qui lui servait de logement de fonction donnait sur l’entrée du château. Chaque matin, il ouvrait ses rideaux pour découvrir de nouvelles pantomimes dans un décor embourgeoisé.

    Comme des centaines de matins, Doliprane, nommée ainsi à cause de sa fourrure blanche, s’en donnait à cœur joie dans un coin du salon, ronflant assez fort pour n’entendre rien d’autre que son insupportable sommeil. En principe, Armand n’était pas autorisé à avoir un chat au domaine. Mais son statut de hors-la-loi n’était rien comparé à Doliprane, compagne fidèle et réconfort indétrônable depuis plus de sept ans. Elle l’écoutait, lui répondait parfois d’un miaulement inexpressif, se frottait à ses jambes, mangeait avec lui et lui tenait bien chaud l’hiver.

    Armand passa sa journée à s’occuper du demi-hectare de jardin, rabattant les haies, s’assurant qu’aucune branche tombée à terre ne venait ternir le paysage et accessoirement, se mettre sur le chemin des pensionnaires. Certains n’y voyaient plus très clair, et rien que les marches de pierre qui descendaient au jardin constituaient déjà une aventure pour quelques-uns de ces charmants petits vieux. Il passa un coup de chiffon sur la rambarde de la terrasse, récupéra le courrier quand le facteur vint sonner, replanta quelques fleurs dans l’allée. Il vérifia aussi que celles qu’il avait déjà plantées restaient bien droites et prétentieuses, comme le lui avait conseillé son prédécesseur. Un homme charmant, au demeurant, qui n’avait pour objectif que de pester contre cet établissement pullulant de nonagénaires désagréables et beaucoup trop fortunés. En somme, il détestait l’ostentation ambiante et avait fini par postuler dans un endroit plus « dans son genre ». Certainement une maison de retraite « pour les prolos », beaucoup plus simples selon lui, et conscients des vraies valeurs de la vie.

    Après ses journées bien chargées, Armand profitait du couvre-feu à vingt-et-une heures tapantes pour s’enfermer dans son salon, seul, au calme et sous un plaid. Ce soir-là, le fond musical irlandais le plongea illico dans l’ambiance. Au milieu de dizaines de livres et magazines spécialisés, il soufflait sur son bol de soupe en feuilletant machinalement son ouvrage. Histoire, voyages, art, littérature, anthropologie, tout était empilé dans un bordel organisé tout à fait rassurant. En arrivant au domaine, l’ancien concierge lui avait dit de ne pas faire attention aux regards hautains et supérieurs de certains pensionnaires, tellement occupés à leur suffisance qu’ils ne prenaient pas la peine de se demander si leur interlocuteur était intéressant. Selon lui, le simple fait d’être au service des Bleuets valait preuve. Une personne au service des autres ne pouvait être qu’insignifiante et complètement inculte. Sinon pourquoi servirait-il au lieu de se faire servir ?

    Enclin à croire ces considérations peu reluisantes, Armand développa pendant quelques jours un complexe d’infériorité, qui lui fit commander des dizaines d’ouvrages de toutes sortes, et dont il s’aperçut très vite qu’il était infondé curieux et désireux de développer l’infime culture qu’il avait acquise, il aurait trouvé dommage de s’être abonné à tout cela pour rien. Ainsi, bien qu’il eut compris que richesse ne rimait pas toujours avec intelligence, il ne rougit bientôt plus devant les pensionnaires. Soir après soir, il continuait d’élargir ses horizons. Passionné par ces mondes aussi nouveaux que divers, il se laissait absorber en oubliant les regards dédaigneux, savourant chacun de ces petits moments précieux : ceux où l’on sait très bien que la dame en face nous prend au mieux pour un idiot, mais qu’on n’y prête pas la moindre attention. Sa mère avait tort : le niveau social ne justifie pas du niveau de culture.

    Il partit donc à la découverte des terres irlandaises, Doliprane à ses pieds, en boule sur son magazine spécial hors série sur la Conquête de l’Ouest. Le concierge ignorait foutrement pourquoi cette chatte l’appréciait. Toujours est-il qu’elle se l’était approprié, faisant du hors-série de l’hiver 2009 son lieu de sieste préféré.

    Après réflexion, le discours de l’ancien concierge lui inspirait beaucoup de méfiance. Mépriser les riches sous prétexte qu’ils le sont est tout aussi stupide que de ne jurer que par la pauvreté, sous prétexte qu’elle est la preuve irréfutable d’une intelligence incomprise. Les pauvres ne sont pas tous gentils, les riches ne sont pas tous méchants. Une révélation tardive dont Armand ne s’étonnait pas, et qui le poussait à prendre beaucoup de recul sur les conseils qu’on lui avait prodigués avant de travailler aux Bleuets. Mieux vaut tard que jamais.

    Chaque fois que le blues venait ternir ses heures, Armand n’avait qu’à jeter un œil sur la chatte blanche lovée à ses pieds. Il était alors sûr d’au moins une chose : il n’était pas seul. Même quand il la voyait miauler en silence, il entendait toute l’affection qu’elle ne lui disait pas. Quand elle faisait ses griffes sur le fauteuil, c’était pour lui montrer qu’elle était là, toujours avec lui. C’est dire si peu de gens pouvaient se vanter de tant de bonheur.

    2

    Même dans un décor époustouflant de raffinement, une maison de retraite reste un endroit spécial. Une sorte de mélange entre un mouroir et une cour de récréation. Quel que soit l’âge des pensionnaires, un pensionnat recèle toujours sa part de petits trésors cachés, de franche camaraderie et de disputes en tout genre. Et même, parfois, d’histoires d’amour.

    Si en voyant les jardins bien rangés du château on pouvait se dire que le domaine manquait d’une âme malgré sa joliesse, l’intérieur, en revanche, avait sa touche de caractère. Comme au-dehors, pas un pétale ne dépassait du rang. Tout était calculé, bien rangé, comme figé, mais l’impression de chaleur et de vie faisait penser à une maison de poupée. Papiers peints à fleurs, couleurs pastel, rideaux brodés et fauteuils Louis XVI conspiraient pour donner au lieu un semblant de gaieté. Un standing aussi tape-à-l’œil que les blouses bleu turquoise du personnel soignant.

    Les Bleuets comptaient une vingtaine de petits vieux, parmi lesquels quelques-unes des personnalités les plus influentes de leur génération. Artistes célèbres, hommes d’affaires, descendants d’illustres familles, chacun y finissait ses vieux jours dans la plus immuable distinction. Autant dire qu’au domaine, le vouvoiement s’imposait pour tout le monde, balayant d’un revers de politesse incontinence et sénilité.

    Un tailleur Chanel rose et gris sur le dos, Mrs Banks marchait, canne à la main, dans les allées du jardin. Ses deux jambes la portaient sans problème, mais une canne en bois sculpté ajoutait une certaine classe à son âge avancé. Quatre — vingt-quatre printemps, la tête bien droite sur ses épaules, Camélia cachait derrière ses rides et son fond de teint des airs de pimbêche. Seule et heureuse de l’être, débarrassée de son statut de femme mariée, elle portait son veuvage avec plus de fierté qu’il n’en aurait fallu.

    Klauss l’avait trompée pendant des années sans qu’elle n’en sache rien, jusqu’à ce qu’une rupture d’anévrisme l’emporte et qu’elle découvre la supercherie : son testament restait sans appel, il léguait tout à sa maîtresse.

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