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Vilparis Ou L’Otage D’Une Éternelle Controverse: (Roman)
Vilparis Ou L’Otage D’Une Éternelle Controverse: (Roman)
Vilparis Ou L’Otage D’Une Éternelle Controverse: (Roman)
Livre électronique297 pages4 heures

Vilparis Ou L’Otage D’Une Éternelle Controverse: (Roman)

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À propos de ce livre électronique

Ce manuscrit ntait pas destin tre publi. Il a t rdig pour assurer lauteur de la pertinence de ses observations portant sur lvolution des hommes et des choses Vilparis, un pays o il a sjourn durant de longues annes. En effet, la lecture assidue du roman a partag pendant plusieurs mois la solitude de lauteur, ou mieux, transform sa solitude en un plaisir rare et goste tant il pntrait son me et flattait son esprit.

Le plaisir de lauteur consistait voir les morceaux quil a ramasss et cousus, prix de patientes recherches, former un tableau exhaustif qui expose le tissu social Vilparisien, tissu dlabr prt cder sous le poids des absurdits. Vilparis, un pays o le grand nombre est en train de succomber sous la vigilance inflexible de la misre et de lignorance ; ce, sous le regard indiffrent des grands pouvoirs de lEtat. Au fil des mois, le sens profond de cette dfinition de Vilparis finira par tourmenter lauteur de son erreur davoir gard le roman dans sa chambre pour alimenter la jouissance de son plaisir narcissique. Car la dfinition de Vilparis nest pas une dnonciation branlante ou lche, mais un passage qui montre la plaie au lecteur et la lui fait toucher du doigt.

L auteur dcouvre la certitude que son roman nest pas autre chose quune lampe allume; il reconnait en mme temps quil ne peut pas se tromper. Car il nest pas sans savoir quallumer une lampe implique instinctivement lintention de lexposer, de la mettre sur le chandelier afin quelle claire tous ceux qui sont dans la maison. Alors, sous lempire de sa conscience retrouve, il sempresse de se condamner lui-mme en qualifiant de complaisance sadique son abandon au plaisir du narcissisme. Il va sans dire que son garement survint comme un contretemps utile pour le conduire aux portes de la vrit, pareil au chtiment de Jonas. En effet, le voici aujourdhui, conscient du fait que son roman, Vilparis, diffuse une trop brillante lumire pour qu il et servi de lampe de chevet, mais qu il doit tre expos a travers les rues de Vilparis, pareil la lanterne de Diogne travers les rues d Athnes. Car quelle diffrence existe til entre Vilparis daujourdhui et Athnes du temps de Diogne?
LangueFrançais
Date de sortie10 déc. 2010
ISBN9781426946257
Vilparis Ou L’Otage D’Une Éternelle Controverse: (Roman)
Auteur

Louis Brunel Brutus

Né à Trou-du-Nord, Haïti, Louis Brunel Brutus est diplômé en communication. Il a milité dans l’enseignement, domaine qu’il abandonnera après dix années d’expérience. Présentement perdu dans de sales boulots à New-York, il devient chaque jour plus conscient qu’il a mené et mène aujourd’hui encore une vie à l’envers. Alors, il prend sa plume, non pour encourager la désolation mais en tant que dépaysé, pour faire une approche intellectuelle de la question et, avec l’engagement d’un écrivain responsable, rappeler la nostalgie de sa terre natale, jadis première république nègre indépendante du monde.

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    Aperçu du livre

    Vilparis Ou L’Otage D’Une Éternelle Controverse - Louis Brunel Brutus

    Table des matières

    Prologue

    I

    Une tranche de l’histoire de Vilparis

    II

    Le colloque des petits citoyens

    III

    Quête de la genèse de l’histoire de Vilparis

    IV

    Entre la fin du monde et la fin d’un monde

    V

    Vilparis au fil des évènements

    VI

    Les volontaires du 14 août,

    Corps d’élite qui change le panorama politique

    VII

    La fin des incertitudes ou les

    incertitudes de la fin ?

    End Notes

    Prologue

    Les évènements qui traversent la société Vilparisienne ne sont pas facilement saisissables. Tels les coups d’une horloge déréglée, ils arrivent tantôt avant l’heure, tantôt après l’heure, finissant ainsi par laisser aux Vilparisiens l’illusion de mener une vie normale entre l’écoulement des contretemps. En quelque sorte, les Vilparisiens s’habituent aux discours des grandes figures de l’intelligentsia incapables depuis plus d’un siècle de satisfaire la réalité proverbiale qui ne demande qu’à voir le maçon au pied du mur. Au demeurant, n’ayant pas le prestige millénaire d’un pays témoin du passage du Christ, n’étant pas membre de l’OPEP, ses ressources minières ayant été, depuis le départ de l’occupant, l’objet d’exploitation illégale et malhonnête, Vilparis n’a pas une histoire qui puisse influencer les grandes décisions à l’échelle mondiale. Pourtant, dû au fait qu’une éducation n’est jamais complète et que l’esprit bien armé se mesure toujours à ce qui semble le dépasser, l’histoire de Vilparis se recommande par son insondable complexité qui a contraint pendant longtemps chercheurs et politologues à l’identifier comme un défi à l’intelligence.

    En effet, ceux-là qui s’estiment sur la bonne voie dans leur observation avouent que la succession en ligne brisée des évènements les dresse en un texte hermétique qu’on peut lire à plusieurs reprises, mais sans prétendre pouvoir le pénétrer. Ils consultent les discours riches en promesses fabuleuses à l’adresse du peuple et qui, plus d’un siècle durant, ne s’accomplissent jamais. C’est là une attitude qui les porte à identifier la situation comme la réapparition étrange du règne des alchimistes. Maintenant, quand on sait que les conquêtes de l’esprit sont irréversibles, qu’elles assurent le bonheur et l’avancement du genre humain, on se demande si le retour à cette pratique doit laisser indifférentes les autres nations du monde. En réalité, il est impossible d’accepter la résurgence de cette philosophie déprédatrice sans fouler aux pieds les patientes recherches de l’intelligence qui ont contraint la science mathématique à dévoiler ses secrets intimes afin de faciliter aujourd’hui l’existence de l’âge de l’espace. Chaque fois que cette réalité arrive à s’échapper, il suffit d’imaginer l’intelligence d’une tumeur maligne cherchant à tromper l’observation attentive du médecin, et l’on découvrira sous l’écharpe présidentielle toute la boîte crânienne qui assurait, au Moyen Age, la richesse de l’Alchimiste auprès du Grand Seigneur. Cela, à la faveur de la reconnaissance ridiculement tardive du nouveau système qui condamne et remplace le droit divin, lequel consacrait l’hérédité du pouvoir et investissait son détenteur d’une souveraineté incontestable. Aujourd’hui, le chef de l’Etat sait qu’il doit sa fonction à la volonté éclairée du peuple qui l’a encouragé et accompagné dans la bataille engagée sous les auspices de la sélection naturelle. Il sait également que la seule garantie pour lui de conserver le pouvoir réside dans sa capacité de matérialiser dans les faits l’objet de sa promesse à l’adresse du peuple. Car sous le ciel du nouveau système, quelle que soit l’intelligence d’un contrat politique, il reconnaît implicitement le peuple comme étant le maître souverain. Le chef de l’Etat a également peut-être la volonté de respecter son engagement; mais comment une société peut – elle satisfaire la demande d’un nouveau système adopté en dehors d’une période de transition préalable ? Comment le nouveau ciel va-t-il pouvoir déverser ses bienfaits sur une société qui conserve sa mentalité vieille de deux siècles ? En guise de réponse, on sait, de toute évidence, que le mythe et ses corollaires, la philosophie des demi- savants, commençaient longtemps à trembler devant les merveilles de la science et la technologie depuis l’atterrissage d’Apollo 11 sur le sol lunaire. D’autant que le message de Neil Armstrong aux habitants de la terre se voulait à la fois simple et édifiant: « La découverte de la lune, un pas pour l’homme, un bond de géant pour l’humanité ». Mais la grande révélation dans le domaine de l’exploration spatiale aura été la traversée de la face cachée de la lune. En effet, c’est cette mission magistralement accomplie par Apollo 8 qui a autorisé et supporté le premier atterrissage, sur le sol lunaire, d’un vaisseau ayant à son bord un équipage humain.

    Les annales de l’histoire offrent l’avantage de saisir l’authenticité de cette découverte, en même temps qu’elles fournissent les renseignements pertinents confirmant, depuis la dernière moitié du siècle écoulé, l’existence de l’âge de l’espace. Pourtant, à Vilparis, on est encore au moyen-âge où, cette fois, le chef de l’Etat a les grandes qualités de l’Alchimiste, et où le peuple ne peut s’empêcher d’espérer. Or, également nulle part dans les registres de l’histoire il n’est fait mention de la découverte de la pierre philosophale.

    Il faut voir avec quelle adresse le chef d’Etat Vilparisien désarme les opposants à son gouvernement, avec quelle méchanceté il empoigne leurs arguments raisonnables et bien situés, pour exploiter la naïveté de ses zélés partisans. Grâce à cette habileté remarquable, il tournera à son profit plusieurs tentatives de coup d’Etat en faisant croire en l’existence d’un terme qui n’est en fait qu’un mythe : « les ennemis de la patrie ». Le feedback à ce message controversé ne tardera pas ; des scènes de sauvagerie, des dénonciations malhonnêtes pleuvront tant à la capitale que dans les villes de province. Les nombreux partisans zélés comprendront qu’il faut en effet prêter main forte au président afin de l’aider à trouver le chemin conduisant au respect de sa promesse. La progression de cette chasse aux ennemis de la patrie réveille l’attention sur l’hypothèse d’un regroupement des nostalgiques de l’ordre déchu. Mais la confirmation de cette hypothèse, autorise-t-elle un chef d’Etat à les désigner sous le terme péjoratif de « ennemis de la patrie » ? Comment l’individu peut – il être l’ennemi de la famille dont il est membre ? A tout prendre, la politique à Vilparis, c’est comme une campagne contre la propagation de la rage où les chiens atteints de rage, aussi bien que ceux accusés subissent les mêmes atrocités. Cette politique se fait, cependant, au mépris de l’esprit de tolérance et de cohabitation qui constitue la toile de fond, la philosophie même du nouveau ciel. Mais puisqu’elle réussit à étancher la soif du bas instinct, elle réussit en même temps à faire oublier la satisfaction des promesses faites avec chaleur au cours de la campagne électorale ; un véritable travesti qui donne à croire que le président est au pouvoir, mais quant au pouvoir, lui, il est au peuple. Il serait imprudent de prétendre découvrir Vilparis à partir de cette observation superficielle ; Vilparis, c’est un tas de détails qui demandent chacun un examen minutieux. Or la rapidité avec laquelle ils surgissent met quiconque en défi d’entreprendre leur examen scientifique. On songera que nombre d’observateurs ont dû jeter le manche après la cognée ; car seulement quelques pas franchis à l’intérieur de ce labyrinthe, déclarent – ils, on aperçoit déjà le cortège funèbre de la logique et de la vérité mathématique.

    Enfin dans le souci de divulguer le résultat de leur expérience, des observateurs continuent de présenter des conférences sur la situation Vilparisienne. Ils joignent l’honnêteté à leur science dans un dernier effort de rassurer l’auditoire que le malheur du peuple vilparisien provient de son incapacité à réclamer le bien-fondé de la citation de Molière : « Je vis de bonne soupe et non de beau langage ». Pour honnête qu’il semble, ce résultat soulèvera l’objection d’un groupe d’observateurs avancés. On ne peut pas recourir à la métaphysique, disent ces derniers, pour expliquer l’échec de la science, si échec il y a. L’observateur doit savoir qu’il est au service de l’histoire, et que l’histoire, elle, est une science. Il est d’ailleurs ridicule d’interpréter une vérité qui a droit de cité, une vérité qui commande et règne. En effet, Qui n’est pas au courant de la situation sociopolitique de Vilparis depuis l’adoption ouverte du nouveau système ? D’ailleurs, le peuple l’appelle «Le règne de la soutane ». Oui, tout le monde sait que Vilparis est devenue un pays où l’homme qui porte la soutane jouit d’un plus grand prestige que le disciple d’Hippocrate.

    Le jour de son investiture, le premier président élu de ce système avait proclamé haut et fort : « c’est la victoire de la soutane du prêtre sur la blouse du médecin. » Alors, tout le monde s’attendait à voir s’opérer des miracles au bénéfice des estropiés de la société, que les boiteux allaient retrouver l’usage de leurs jambes, les aveugles allaient recouvrer la vue, les malades en général recouvrer la santé à travers la guérison divine. On croyait même que les maladies causées par la malnutrition allaient disparaître parce que la manne du ciel allait tomber ; d’autres dues à l’usage d’eau polluée n’allaient exister que de souvenir, car à chaque coin de rue, il y aurait des sources d’eau vive, et un réservoir de Siloé. L’observateur qui avoue ne pas pouvoir procéder à l’examen de ces évènements à cause de leur prolifération avoue inconsciemment en même temps avoir pris des vessies pour des lanternes. Pour entreprendre une observation de cette envergure, il faut croire en l’invulnérabilité de la logique et la conserver comme boussole. Qu’en est – il exactement ? Vilparis en est arrivée là parce que, contrairement au règne de la panacée tant attendue, une longue famine, en lieu et place, sévissait sur le territoire durant tout le mandat du premier président élu du nouveau système.

    « C’est la victoire de la soutane du prêtre sur la blouse du médecin » Cette citation du premier élu est, en son genre, une question, parce que prononcée avec humour entre le cric et le crac le jour de son installation. Le cric et le crac, dans le folklore Vilparisien, est un dialogue humoristique où celui qui dit cric possède toujours la réponse à la question qu’il pose, mais attend que celui qui dit crac réponde. Cric crac, véritable jeu qui amuse les enfants avant le coucher. Pour la même raison, depuis lors, tous les journaux étrangers présentent les nouvelles de Vilparis sous la rubrique intitulée «  Du plaisant au sévère ». Mais, que le premier élu ait possédé la réponse, ou que celle-ci se soit amusée de son intelligence, la réalité reconnaît que le peuple Vilparisien se trouve aujourd’hui dans la situation des grenouilles qui demandaient un roi. Les évènements se succèdent avec intelligence. Des gens qui, dans le passé, cachaient avec précaution leur cécité afin d’éviter l’attitude méprisante de la haute société, se sentent aujourd’hui à l’abri. Sortent en nombre imposant pour aller suivre des séminaires sur la foi et l’espérance où ils trouvent la jouissance de la dignité humaine et le goût du bonheur convoité. Souvent, quand l’attente du jour de l’accomplissement des miracles leur paraît être une éternité, ils s’en prennent à la clientèle du médecin. Comme si des clients à la solde du médecin auraient travaillé dans l’ombre pour conduire à la catastrophe le règne du premier élu. Il s’ensuivra, en l’occurrence, toute une série d’évènements dans la défense du règne en question connu également sous le nom de « règne du miracle possible ». L’observateur inexpérimenté se perd facilement dans cette suite d’évènements inextricables, arrive souvent à oublier que dans une armée l’ordre vient toujours d’en haut et qu’il est injuste de condamner la barbarie des soldats et de faire silence sur la consigne lancée par le général.

    A ce niveau, force est de remémorer la fameuse citation du cric crac. Heureusement, elle n’est pas longue, et dans sa forme concise, elle exprime l’ensemble des promesses qui faisaient le poids de la campagne électorale du premier élu. A bien comprendre la citation, elle rejette le pouvoir de la science et en appelle à celui de la métaphysique. En effet, et en général, les fidèles conçoivent des désirs, des vœux, des souhaits de changement profond. Mais ils les déposent sous les ailes de la foi à qui il appartient de les couver en vue de leur éclosion. Et les réalisations de la foi sont indestructibles. L’esprit domine la matière. A propos, la sagesse du temps a dû se mêler de la question pour apprendre aux alchimistes que certaines recherches, quels que soient leurs fondements, leur tentation, n’aboutissent point quand elles cherchent à défier les lois de la nature.

    Il en est autrement à Vilparis. Quand la foi n’a pas la chaleur qu’il faut pour faire éclore un vœu, on expose celui-ci au pouvoir des muscles. D’ailleurs, il existe à Vilparis un troupeau d’estropiés, de faméliques livrés à la mendicité, par conséquent, vulnérables à l’exécution des basses besognes. A Vilparis, quand un candidat fait l’éloge du peuple, quand il dit:« Peuple Vilparisien » il s’agit de cette catégorie, ces êtres qui sont là, mais qui n’existent pas ; ces êtres qui sont visibles seulement durant la campagne électorale et chaque fois que le fauteuil présidentiel menace d’échapper à son occupant : ces déshérités du sort, ce bétail humain, ces chairs à canon. Ces êtres, ils croient fermement en Dieu, parce que comme eux, Dieu est invisible; ils sont des fervents disciples de Christ, car comme eux Christ a été maltraité, méprisé, oublié. Ces êtres, 80 % de la population.

    Le renversement de l’ordre ancien n’était pas une chose facile. Il a fallu l’émergence de ce candidat messianique qui manie avec autorité la langue des pauvres et des démunis, et qui possède aussi bien leur langage. Il a fallu le déchaînement de ces hordes. Voilà comment la victoire de ce candidat a été proclamée avant même le dépouillement du scrutin qui n’était qu’une farce. Car il s’agissait plutôt de la lutte des plus aptes. C’est pourquoi aussi jusqu’à présent, se référant à cette journée historique, on dit de préférence qu’elle a épousé la démarche de la sélection naturelle. Aujourd’hui, malgré l’absence du premier président élu, malgré la succession de plusieurs gouvernements depuis, rien n’a changé ; toujours les mêmes rituels. Evidemment, il reste et demeure certain que, indépendamment du gouvernement au pouvoir, le nouvel ordre reconnaît le pouvoir au peuple et lui fait obligation de veiller à sa sécurité et à sa conservation. C’est au nom de ce pouvoir que ces derniers temps, à l’issue du séminaire sur la foi et l’espérance, des participants improvisent des manifestations sous forme de procession. Au devant de la scène, deux grandes bannières ayant, l’une une peinture consistant en un lionceau et un aspic, l’autre un lion et un dragon. Les commerçants et les industriels comprendront bien vite qu’il s’agit du psaume 91, slogan qui a fait couler beaucoup d’encre et beaucoup de sang lors de la campagne électorale. Slogan qui a dépouillé et fait tomber à genoux nombre de gens de la haute société et les a obligés à prendre le chemin de l’exil. « Nous autres, les commerçants et les industriels », comprennent ils, « nous sommes des lions et des dragons, et le peuple aujourd’hui, sous l’abri du Très Haut, a le droit et le pouvoir de nous marcher dessus, de nous écraser la tête, de nous incinérer. »

    L’actuel gouvernement n’y va pas de main morte ; à la faveur de l’ignorance, des progrès considérables seront réalisés dans l’achèvement de l’ouvrage entrepris par son prédécesseur : « arracher pour de bon la destinée de la nation à la science du médecin pour la confier à l’intelligence superstitieuse du demi-savant ». Demi- savant qui donne l’assurance de posséder le secret du salut de l’âme, mais qui parvient au contraire à détruire à la fois et l’âme et le corps. Il prend son règne pour le jour de la moisson ; alors lui, le maître, il ordonne de brûler l’ivraie et d’amasser le blé dans le grenier. Mais les 20% de la population qu’il enregistre délibérément à l’actif du médecin ne  l’entendent point de cette oreille. La politique étant une science, disent ces derniers, ne peut pas prêter ses services à l’accomplissement d’une parabole discriminatoire. Pour leur part, ils sont tenus de respecter l’équation relevant de la pratique de la profession médicale: Mens sana in corpore sano. Leur comportement de sourds- muets, depuis laps de temps, est loin d’être une soumission à l’ascension prétentieuse et menaçante de la nouvelle classe d’hommes au pouvoir. « Ce comportement est conseillé par la prudence », disent ils, «  afin d’éviter que notre engagement dans la lutte ne prenne la direction d’une initiative suicidaire, étant donné les ramifications du pouvoir avec les trafiquants de toute nature. La Vilparis d’aujourd’hui est un pays où rien n’arrive par hasard. Les protagonistes du nouveau système, ses propres fils, embrassent le culte de la violence et de l’indignité pour faire briller l’incapacité du peuple Vilparisien de mener la barque de sa destinée. »

    « Notre comportement nous a permis de saisir le comportement de la nouvelle classe d’hommes au pouvoir comme nous mettant au pied d’un défi à la hauteur duquel nous n’avons pas le luxe de nous élever ; car nous ne savons pas l’art de démolir l’homme, de le diminuer, de le dépouiller. Notre comportement, période d’observation intelligente qui nous permet de comprendre que toute attaque contre cette nouvelle classe d’hommes au pouvoir soulèvera certainement la colère du peuple contre nous. En effet, le simple fait par ces hommes d’avoir assis leur campagne électorale sur la personnalité incorruptible du prêtre leur vaut l’incontestable mérite d’avoir réalisé avec succès ce qu’aucun penseur ni homme politique de ce pays n’a jamais essayé auparavant. En d’autres termes, ils ont exploité la moralité de l’homme de Dieu pour bâtir leur capital politique. Dès lors, nul doute que la philosophie du régime est solidement implantée dans notre société car elle est d’abord ancrée dans l’âme du peuple. Et tout sociologue Vilparisien est à même de reconnaître que, à Vilparis, il vaut mieux être un mauvais prêtre qu’un grand général. Pourtant, nous sommes également loin de nous complaire dans notre comportement de sourds-muets; d’autant que, dans une éloquente affirmation, Voltaire rappelle à notre attention que nos prêtres ne sont pas ce qu’en vain peuple pense. Notre crédulité fait toute leur science »

    « Il faut comprendre que notre formation d’hommes et de citoyens nous défend de rendre Dieu responsable de l’éternité du règne des charlatans. De son coté, l’histoire ne fera silence sur l’irresponsabilité de quiconque aura répondu avec précipitation aux provocations du pouvoir dont on ignore le dessein caché. Il va sans dire que nous sommes confiants dans l’exactitude de nos observations qui reconnaissent l’infaillibilité de toute action raisonnable dictée par la maturité du temps nécessaire pour achever la chute d’un pouvoir politique. Quant à présent, il convient de laisser aux hommes au pouvoir l’impression, relativement à notre sujet, d’une opposition délabrée, démissionnaire ; ce faisant, nous les laisserons se perdre davantage dans l’illusion d’un pouvoir sans bornes. L’effet de l’alcool est une farce, comparé à l’ivresse du pouvoir. Quant au dossier de l’actuel gouvernement, il est déjà un livre ouvert. En effet, le triomphe même du nouveau système dépassait, dès le début, les prévisions de ses protagonistes, tout comme il continue de dépasser leur niveau d’éducation politique ; aujourd’hui, il prête même à des dérives alarmantes, depuis le trafic illicite de produits dangereux jusqu’à la culture de la violence à la faveur de l’absentéisme de l’Etat. La presse internationale s’est longuement étendue sur la crise entre les mains de la nouvelle classe politique qui n’arrive jusqu’à présent à exploiter les possibilités et les avantages offerts par le nouveau système pour infirmer ou balayer le résultat négatif des enquêtes et analyses entreprises sur la santé politique et administrative des gouvernements antérieurs. Ces enquêtes et analyses révèlent que les Vilparisiens se sont débarrassés du carcan de l’esclavage pour avoir à choisir, pendant deux siècles, entre le suicide collectif et la honte de l’incompétence et du manque de civisme des différents gouvernements. »

    « Au contraire, pour la première fois dans l’histoire de ce pays, la progression de la criminalité et le commerce illicite de produits dangereux inspirent aux autres peuples de la caraïbe la crainte de se trouver soumis, eux aussi, à une quarantaine de sécurité dans le cours de leurs relations internationales. Malgré la présence de troupes étrangères depuis plus de deux ans, la France, les Etats-Unis et le Canada demandent à leurs ressortissants de lutter contre toute tentation de fouler le sol Vilparisien, pays qui accuse les signes évidents d’un pays à risques. Autant d’arguments qui portent les analystes politiques du grand monde international à reconnaître que cette nouvelle génération d’hommes au timon des affaires de l’Etat a mis tout en œuvre pour river le clou de l’incapacité de ce peuple de s’affirmer sous la bannière de la liberté et l’auto-détermination. Nous autres, que le pouvoir identifie comme formant la clientèle du médecin, nous nous interrogeons sur la provenance de ces analyses, selon le principe qui reconnaît le messager comme faisant partie du message. A juste titre, nous cherchons à rassembler les éléments d’un équilibre naturel capable de nous éviter, le cas échéant, le chemin de la médiation où la sagesse du partage fait briller de mille feux la majesté incontestable du lion.

    *

    * *

    En dépit de la soif intenable qui condamne les multimillionnaires à une course sans répit, les progrès réalisés dans l’avancement de la société humaine consacrent la lecture et l’écriture comme formant le socle sur lequel repose la jouissance des plaisirs de la vie. La lecture et l’écriture, deux éléments qui ouvrent les yeux de l’esprit pour lui permettre de dévorer avec une curiosité insatiable les mille et une possibilités de solution dans toute leur nudité dans la profondeur de la réflexion. Nul doute que « Controverses» trouvera, grâce à cette consécration, toute la pitié suscitée par la situation de Vilparis, ce pays situé dans le continent, jadis la perle des Antilles.

    En effet, suite à l’incapacité de ses habitants de se reconnaître depuis la chute d’une dictature de trente ans, Vilparis traverse aujourd’hui la plus grande crise de son histoire. Il se trouve que l’échec de tant de tentatives de renverser la dictature n’a réussi qu’à forcer les auteurs de ces tentatives à se réfugier dans les misères de l’exil. Car l’exil vaut mieux que la fusillade sur la place publique, que mourir dans la puanteur des cachots réservés aux rebelles, aux traitres à la patrie. Il résulte de tout cela un déficit d’hommes préparés capables de gérer la période post dictatoriale. D’autant que le renversement de la dictature résultait d’un mouvement inattendu sous le leadership de Thermidor.

    Mais qui est Thermidor ? Bien ! Thermidor, un voyant et guérisseur, qui reçoit dans son temple toutes les couches de la société ; partant des cireurs de bottes jusqu’aux proches collaborateurs du chef de l’Exécutif. Egalement, voulant éviter l’étiquette de réfractaires au respect de la culture populaire, et surtout pour tromper la croyance dans la réalité d’une barrière sociale, les grands commerçants de la capitale et les industriels se décident, eux aussi, à rechercher les bienfaits de sa science. Même quelques petits pasteurs protestants menacés d’éviction, dû à l’assistance trop fréquemment clairsemée dans le temple du Seigneur, s’y rendent à la recherche d’une solution. Ils sont acculés au point d’y venir rechercher protection contre la persécution du mauvais génie.

    Au fil du

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