Devant le petit bureau de change d’Elie à Dekouané, dans la banlieue de Beyrouth, les clients font la queue jusque sur le trottoir. « Au suivant! » lance le garde de sécurité en fixant chaque nouvelle personne. Avec son arme à la ceinture bien en vue, cet homme chétif veut être pris au sérieux. La vitre qui sépare le comptoir de son patron et la clientèle ne pourrait à elle seule dissuader les voleurs… Car derrière le plexiglas, Elie brasse des liasses de livres libanaises et de dollars, qu’il fait passer dans ses compteuses de billets.
En quelques années, les changeurs comme lui sont devenus des nababs de quartier. La livre libanaise a perdu près de 98 % de sa valeur, dépassant la barre symbolique des 100 000 livres pour 1 dollar en mars, contre 1 500 avant la crise.