Le poivre est universel. À travers le monde, sur toutes les tables, il fait partie de notre quotidien. Si bien que l’on a tendance à oublier combien il est précieux », regrette Olivier Derenne, propriétaire du Comptoir des Poivres. Pourtant, son parfum à lui seul est une invitation au voyage. Un voyage sensoriel qui nous transporte à l’époque où les navires bravaient les flots, les cales chargées d’épices et du précieux or noir.
Le roi des épices
Originaires du Kerala, sur la côte de Malabar, au sud-ouest de l’Inde, ces petits grains colorent notre cuisine de leurs arômes envoûtants et nous soignent de leurs multiples vertus depuis l’Antiquité. Mais ce poivre, qui transforme nos plus humbles plats en un tour de moulin, n’a pas toujours été accessible. Au Moyen-Âge, on employait même l’expression « cher comme poivre » tant son prix était exorbitant. En plus de conserver les mets, soulager la toux ou stimuler l’appétit et la digestion, le poivre a longtemps servi de monnaie d’échange. Rien d’étonnant donc, si ce dernier déchaîna les passions au fil des siècles, donnant lieu aux grandes expéditions de la route des épices. Des marchands arabes au Moyen-Âge, à Vasco de Gama au XVsiècle, jusqu’aux flottes hollandaises du XVIsiècle, le roi des épices n’a cessé de fasciner. Aujourd’hui encore, le poivre inspire les explorateurs modernes à l’image d’Erwann de Kerros, chercheur d’épices et fondateur de la marque Terre Exotique : « En voyageant, on découvre que chaque peuple a son poivre de tous les jours », s’émerveille-t-il. Ainsi, les Malgaches cuisinent avec le poivre voatsiperifery, uniquement récolté sur l’île de Madagascar, tandis que la tribu congolaise des Baka assaisonne ses viandes avec le poivre sauvage de la Likouala, qui pousse dans une forêt équatoriale au nord du pays.