Que se passe-t-il ? Une opération antiterroriste ? Une descente contre des trafiquants de stupéfiants ? Le 12 juin 2022, à la tombée de la nuit, des policiers lourdement armés investissent un immeuble du nord de Nantes. Quelques heures plus tôt, deux hommes ont été arrêtés à un péage près d’Angers, à une centaine de kilomètres de là. Dans le véhicule, un revolver chargé et plusieurs couteaux. En consultant le portable d’un des suspects, les enquêteurs ont trouvé une adresse recherchée dans Google Maps. Celle d’un certain Mahammad Mirzali. Vite, il faut foncer chez lui. Sans doute est-il en danger. Les policiers ratissent les lieux, étage par étage. Après quinze minutes de fouille minutieuse, l’alerte est levée.
Début septembre, Mahammad Mirzali me donne rendez-vous à l’étage d’un café du centre de Nantes. L’un des hommes les plus menacés de France débarque l’air de rien, accompagné d’une escorte de six policiers avec oreillettes, mandibules serrées et regards soupçonneux. Plusieurs clients assis aux tables environnantes s’interrogent. Qui peut bien être ce beau brun de 28 ans, yeux noisette, barbe de trois jours savamment travaillée ? Un acteur iranien ? Un chanteur de pop italien ? Il vient d’Azerbaïdjan, un obscur pays du Caucase. Là-bas, il est connu comme la bête noire du gouvernement. Sur sa chaîne YouTube, suivie par plus de 300 000 abonnés, il dénonce la corruption, brocarde dans un langage cru l’oligarchie assise sur la rente pétrolière. Certaines de ses vidéos ont été vues par 2 millions de personnes, soit un cinquième de la population azerbaïdjanaise.
Revers de la popularité dans ce type de régime : il a subi trois tentatives d’assassinats en deux ans, toutes à Nantes, où il vit depuis 2018. Le rencontrer, c’est discuter avec un miraculé, un frêle trompe-la-mort. « J’ai pris un coup de couteau