Mortelle Fête des mères

Adèle se réveilla, comme presque tous les matins, de mauvaise humeur.

Elle secoua Henri qui dormait encore, bouche ouverte.

– C’est pas permis de ronfler comme ça ! Tu vas te réveiller, oui ?

Henri grogna une dernière fois avant d’ouvrir les yeux.

Il amorça un sourire :

– Qui avait éré de faire chambre à part ? On avait une belle pièce qui ne servait à rien. Mais madame a préféré en faire un dressing. Comme si une pépiniériste avait besoin d’un dressing ! Dis-moi à quand remonte notre dernière soirée mondaine, chérie. Ce ne serait pas par hasard le repas qui a suivi les obsèques de ta tante ? Adèle était déjà passée dans la salle de bains et en claqua la porte avant qu’il ne termine sa phrase.

Il éleva alors la voix :

– Ta chère tata, qui, si je me souviens bien, ne fréquentait la haute que dans ses cuisines où elle récurait les casseroles !

Ce lundi matin, à 6 heures, après avoir rangé sa bicyclette dans la remise, Sandrine les rejoignit à la cuisine. Comme à l’accoutumée, elle partagerait avec eux leur petit déjeuner, avant de se mettre au travail.

Ce n’était pas une simple gentillesse de leur part de l’inviter ainsi, c’était pour gagner du temps. Tandis qu’elle sirotait son café et mâchouillait sa tartine beurrée, Henri lui indiquait ce qu’elle aurait à faire dans la journée. Sa femme et lui s’étaient spécialisés dans la culture des rosiers. L’année précédente ils en avaient vendu vingt mille et comptaient bien cette année augmenter de façon conséquente leur chiffre d’affaires. Après plusieurs tentatives infructueuses Henri avait enfin réussi, au moyen de greffes, à créer de nouvelles espèces de grimpants. Celles-ci s’avéraient plus résistantes et leur floraison plus longue.

Il restait trois semaines avant la fête des Mères. Mais les fleuristes s’y prenaient de bonne heure. Il fallait focaliser le client sur cet événement. Une dizaine d’entre eux avaient déjà passé commande