L’enfant de Noël
Benjamin Marulaz traversait le village où il avait grandi et où il revenait s’installer en qualité de médecin généraliste. Il serrait des mains, souriait à de braves personnes, se penchait sur de vieux visages tannés par le grand air et par le vent, pour y déposer, à la mode d’ici, trois bises retentissantes.
On l’interpellait à chaque coin de rue.
– Eh, Benjamin ! vous voilà revenu au pays, et avec tout plein de diplômes pardessus le marché. Il va falloir vous appeler docteur Marulaz ! Notre nouveau toubib ! C’est à n’y pas croire !
– Il le faudra pourtant, mon cabinet ouvre demain : qu’on se le dise !
On l’aimait bien, cet enfant du pays qui n’hésitait pas à poser ses valises dans ce petit village alpin où on réclamait en vain depuis des années un praticien. Et Benjamin les aimait tous, ces gens rudes de la montagne, si attachants quand on les connaissait bien.
– Alors, Benjamin, content d’être de retour?
– Oui, mais j’ai le cœur serré quand je pense à mes parents qui ne sont plus là pour m’accueillir.
Cette fois, il venait d’être arrêté en pleine rue par une vieille dame, Marie-Jeanne, une amie de sa mère. Il l’avait embrassée avec plus de chaleur encore, parce qu’elle faisait partie des images de son enfance.
– Ta maman aurait été tellement fière de toi, mon garçon ! Tellement heureuse de ton retour au pays.
– Je sais. Et papa aussi.
Marie-Jeanne parla d’autre chose, pour dissiper la tension douloureuse que le souvenir poignant suscitait. Puis elle demanda, sans avoir beaucoup réfléchi au préalable :
– Te souviens-tu de Lily Mercadier ?
– Bien sûr !
Le cœur du jeune médecin battit un peu plus vite. Il avait été amoureux de Lily à dixhuit ans. Mais elle était réservée et ne lui avait jamais rien accordé, lorsqu’il se montrait un peu trop pressant. Puis, un jour, elle était partie. On n’avait jamais su pour quelle destination.
– Lily est de retour, elle aussi. Mais pas seule. Elle est en couple avec un drôle
