La dernière séance
Franck était serveur dans un restaurant du centre-ville de Chicago et s’y plaisait bien. Le patron était cool, les collègues sympas.
Il avait quitté quatre mois plus tôt, au printemps 1934, la ferme familiale du Milwaukee. Sa principale activité y avait été l’élevage laitier et la culture du maïs. On ne chômait pas. A 23 ans, il rêvait d’échapper à cette vie austère qu’il était a priori condamné à connaître jusqu’à la fin de ses jours.
La ville l’attirait. Il y avait bien Madison, tout près de leur ranch, mais Chicago, une vraie grande ville à ses yeux, où il avait eu l’occasion de se rendre une fois, avait eu sa préférence.
Son père l’avait laissé partir sans s’émouvoir. Il faisait partie de ces êtres durs à la tâche qui ne laissaient pas les sentiments les envahir. Le maigrichon du clan, comme il le surnommait, ne lui manquerait pas. Il lui restait trois fils : trois grands gaillards qui ne rataient jamais une occasion de rappeler à Franck leurs différences physiques.
Il était le dernier-né d’une mère, sans doute épuisée par les travaux à la ferme et trois précédentes couches, qui était morte peu de temps après sa naissance.
Franck n’était pas de taille à se rebeller contre ses frères et au fil des ans il s’était refermé sur lui-même. Il ne se sentait pas à sa place dans cette famille. Il se faisait l’effet d’un importun.
C’est ce que devait ressentir son père qui lui avait souhaité bonne chance de telle façon qu’il avait plutôt entendu « bon vent ».
Le jeune fermier s’en était allé sans regret. Il ne partagerait pas le conséquent héritage avec ses frères, mais il s’en fichait. Il ne resterait pas toujours serveur. Il comptait bien, rapidement, devenir à son tour patron d’un restaurant : un grill.
Au ranch, c’était lui qui s’occupait de cuire la viande. Ses frères le trouvaient doué
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