Cent ans pour accoucher de la guerre moderne
Depuis quelques décennies, les spécialistes de l’histoire militaire de l’époque dite « moderne », qui s’étend grosso modo, de la Renaissance à la chute de Louis XVI, s’écharpent à l’envi autour de ce que l’on nomme LA « révolution militaire » dont émergent, chapeautés et baïonnettes au canon, les régiments de Louis XIV. Quand a-t-elle eu lieu? En quoi a-t-elle consisté? Où s’est-elle produite? Peut-on seulement parler de « révolution »? Ces questions à tiroirs multiples – et à réponses infinies – ont fourni la matière à un passionnant débat qui balaye l’intégralité de l’histoire militaire européenne et même mondiale. Mais, depuis quelques années, la discussion remonte de plus en plus dans le temps: il semblerait bien que ce soit avant la période moderne, dans les deux derniers siècles de cette époque floue appelée arbitrairement « Moyen Âge » que les choses ont commencé de bouger
Le grand tremblement de terre militaro-civilisationnel, qui donne naissance au monde dans lequel nous vivons encore, se met en effet à ébranler l’univers médiéval dès le XIIIe siècle. C’est là que se construit la matrice du gigantesque conflit franco-anglais appelé « guerre de Cent Ans » par les historiens du XIXe siècle — quand bien même les chronologies en mesurent cent seize (voir encadré p. 111). Une fois de plus se vérifie la loi historique: les guerres opèrent comme des accélérateurs. Et ce conflitlà amorce un processus qui va structurer toute l’histoire militaire jusqu’à nos jours, en voyant deux armes s’imposer sur les champs de bataille: l’infanterie et l’artillerie.
Infanterie, le retour de la Reine
Omniprésente tout au long de l’Antiquité classique, l’infanterie n’a jamais totalement disparu du paysage guerrier européen après la chute de l’Empire romain d’Occident. Malgré tout, le cliché reste globalement vrai: le Moyen Âge est essentiellement l’époque de la
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