ARRÊTÉE: Mémoires de la Première Dame américaine de Nice et de la Côte
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À propos de ce livre électronique
Countess Ilene Medecin
Ilene Médecin était la Première Dame de Nice et de la Côte d'Azur, en France. Hormis Grace Kelly, elle est la seule Américaine à avoir acquis une telle notoriété sur la Riviera française. Née et élevée à Beverly Hills, en Californie, entourée de deux oncles célèbres - Max Factor, le magnat des cosmétiques, et Jake « The Barber », qui a contribué à faire la renommée de Las Vegas -, il lui a toujours semblé naturel de trouver sa place sous les feux des projecteurs. Sa vie a été décrite comme unique, captivante, glamour, excitante et dangereuse.
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Aperçu du livre
ARRÊTÉE - Countess Ilene Medecin
ARRÊTÉE
Mémoires de la Première Dame américaine de Nice et de la Côte
© 2025, Comtesse Ilene Médecin
Tous droits réservés. Ce livre, ou toute partie de celui-ci, ne peut être reproduit ni utilisé de quelque manière que ce soit sans l’autorisation écrite expresse de l’éditeur, à l’exception de courtes citations pour une critique.
ISBN imprimé 979-8-31781-551-6
ISBN e-livre 979-8-31781-552-3
REMERCIEMENTS
À mon mari, Beau, pour son extraordinaire relecture et son amour indéfectible.
À Ruth Sokol, pour sa relecture et son soutien bienveillant.
À Alizabeth James, ma fidèle productrice.
À la Ville de Nice.
Au Maestro Mathew Savery, pour son soutien
et sa compréhension pleine d’empathie.
DÉDICACES
Ce livre a été rendu possible grâce aux contributions incroyables des personnes suivantes dans ma vie.
Mes grands-parents adorés, Sam et Belle
Maman et Papa
Ma formidable et courageuse fille, TK. Ma raison d’être et le vent sous mes ailes.
Ma Lilou et mon Marcel, notre fidèle famille niçoise, et nos gardiens niçois
Jackye mouse, Nic et Jean-Claude, mes vrais amis niçois
Corky, mon mentor et sauveur
Ruth et Dennis, ma grande sœur et mon beau-frère adoptifs
Laurel et Ken, mes merveilleux piliers
DDDD, Dennis, mon beau-frère hilarant
Trish, ma copine de voyage la plus amusante
Trevor Mound, mon cher ami et confident politique
Ma petite cousine Jills
Selvan, Laxmir et Ram, ma famille indienne
Beau, mon amour qui, après seize ans, me fait toujours vibrer
Ma belle-fille Tara, toujours là pour m’aider
Bekka, ma magnifique filleule norvégienne
Le Maire Jacques Médecin, qui a réalisé tous mes rêves
Ganesh, mon trésor mystique
SOMMAIRE
INTRODUCTION
PART 1: L’incarcération
CHAPITRES 1–10
PART 2: Les influences de mes jeunes années
CHAPITRES 11–28
PART 3: Vivre sous les feux de la rampe
CHAPITRES 29–59
PART 4: UNE PENTE GLISSANTE
CHAPITRES 60–140
INTRODUCTION
En me retrouvant allongée sur la couchette supérieure d’une des cellules de la prison pour femmes la plus dure de France, je savais que j’avais de gros ennuis. Je regardais les trois autres femmes dans leurs lits : la prostituée française, la trafiquante de drogue musulmane, et la jeune fille musulmane qui avait arraché de ses dents le doigt de sa belle-mère. Je me disais que cela ferait certainement une conversation intéressante lors d’un dîner, si jamais je réussissais à sortir d’ici.
Depuis ces événements traumatisants, de nombreuses années se sont écoulées. Si les souvenirs restent vifs, je porte aussi les cicatrices de ma chute dans une course effrénée. Heureusement, j’ai pu m’en remettre suffisamment pour me relever et poursuivre ma vie sur un chemin très différent et précieux.
1ère PARTIE
L’incarcération
CHAPITRE 1
Les gens ont dit que ma vie ressemblait à un conte de fées, et c’est vrai. Un style de vie Camelot opulent avec château, jet privé, garde du corps, passeport diplomatique, et tout le tralala… Mais là, je me retrouvais en prison, sans savoir pourquoi. Une situation qui n’était absolument pas censée faire partie de mon conte de fées.
Mon arrestation et mon incarcération m’avaient prise complètement au dépourvu. C’était le lundi 22 février 1997. En l’espace d’une minute, je suis passée de femme libre, heureuse de prendre l’avion pour retrouver de vieux amis en France, à détenue. Pendant plus de dix ans, j’avais été la Première dame de Nice et de la Côte d’Azur, et j’étais maintenant en prison.
Souvenez-vous de cette chanson d’Elvis Presley, Jailhouse Rock. Je n’avais aucune explication. Si un éléphant était tombé du ciel et avait atterri sur mes pieds, je n’aurais pas été plus surprise que lorsque les deux gendarmes se sont approchés de moi dans la zone des bagages de l’aéroport de Nice, m’annonçant sèchement : « Madame Médecin, vous êtes en état d’arrestation. Veuillez nous suivre. » Ils m’ont saisie par les bras - un grand policier de chaque côté - et ils m’ont emmenée. J’étais trop déconcertée pour leur résister, et je ne me souviens pas non plus d’avoir marché. Ils me traînaient par terre, j’avais les jambes molles comme celles d’une poupée de chiffon, mais j’étais trop bouleversée pour ressentir quoi que ce soit.
Je n’étais pas préparée à tout cela. Juste mon nom, Médecin, aurait dû me protéger contre cette indignité et cette erreur évidente. J’étais l’épouse de Jacques Médecin, ancien maire de Nice, de 1966 à 1991. Mon mari, surnommé « Roi Jacquou », était le dernier descendant d›une dynastie politique centenaire qui remontait à 1870, en commençant par son arrière-grand-père, Pierre Médecin, suivi de son grand-père, Alexandre Médecin, et de son père, Jean Médecin. Ensemble, ils ont gouverné Nice et la Côte d’Azur pendant plus de cent ans. Comment était-ce possible ?
Tout cela ne pouvait pas être réel. J’avais été la Première dame de Nice et de la Côte d’Azur. C’était mon titre, pas quelque chose que j’avais demandé, mais les médias français m’avaient attribué cette désignation en mon honneur. Jacques et moi étions amis avec le prince Rainier de Monaco et la princesse Grace Kelly. Nous avons mené une vie de luxe sur la Côte d’Azur. Notre cercle comprenait des personnalités comme Claudia Cardinale, Marcello Mastroianni, David Niven et Jeanne Moreau. Nous étions des alliés politiques et des amis proches de Jacques Chirac, alors Premier ministre de France, qui est devenu plus tard président. J’avais fait campagne pour Chirac dans les rues de Nice, lorsqu’il avait besoin de notre soutien pour les élections présidentielles françaises. J’étais à ses côtés, en train de serrer les mains et de faire de mon mieux pour le soutenir en tant que Première dame de Nice. Nous nous appelions par nos prénoms, nous étions de bons amis. Son anniversaire tombait deux jours après le mien. Chaque année, il m’envoyait mon bouquet préféré de fleurs blanches, qui remplissait quatre vases. Comme un bon Sagittaire généreux et aimant.
Alors, regardez-moi maintenant ! J’étais en taule !
Même si on m’appelait rarement par mon autre titre, « Comtesse Médecin », j’étais en réalité une véritable comtesse par mariage. La famille Médecin était une dynastie qui a gouverné Nice pendant plus d’un siècle, et Jacques portait un titre dont l’origine se rattachait à l’illustre Maison des Médicis de Florence.
J’ai vite compris que cette rencontre n’aurait rien d’amical ou de respectueux. Les gendarmes m’ont traînée jusqu’au commissariat de l’aéroport où ils m’ont enfermée dans une cellule. Ce fut le début d’une période de détention éprouvante de cinq jours avant de comparaître devant un magistrat, pour enfin entendre enfin les accusations. Mon niveau d’anxiété a atteint son sommet pendant ces cinq jours, n’étant pas informée et ne sachant pas ce qui m’attendait.
Après trois heures dans la cellule de l’aéroport, j’ai gentiment demandé à l’un des gendarmes s’il voulait bien aller au distributeur automatique pour m’acheter un sandwich et de l’eau. Mes affaires personnelles avaient été confisquées mais j’avais encore dix francs dans la poche. Je les lui ai donnés, et j’ai attendu. Il est finalement revenu pour me dire, avec un sourire moqueur, que le distributeur avait avalé mes francs. Je n’avais pas l’habitude d’être traitée de la sorte et j’avais peur. Je n’aurais jamais pu imaginer qu’ils me traiteraient comme ça - une femme qui avait été distinguée comme l’épouse du maire, et qui avait tant fait pour la ville et la région. J’avais consacré ma vie et mon énergie aux citoyens de Nice. Même si les gendarmes étaient des policiers nationaux, et non pas municipaux, ils connaissaient certainement mon nom et ma position. Ils n›ont montré aucune préoccupation, ni considération.
Après avoir été escortée jusqu’à ma cellule individuelle, où je n’avais comme literie qu’une bâche noire sur un sol de béton froid, je restais sous le choc et incapable de penser clairement. Finalement, j’ai dû aller aux toilettes. J’ai frappé à plusieurs reprises à la porte, quand un gendarme est arrivé pour me crier dessus.
« Que veux-tu ? »
Je lui ai dit que je devais aller aux toilettes. Il a ri, a ouvert la porte et m’a emmenée aux toilettes et est resté devant la cabine comme si j’allais m’évader. Puis, il m’a ramenée en cellule. Étant une personne très réservée, j’ai trouvé cette humiliation insupportable. Au fil du temps, la situation s’est aggravée. Personne ne me proposait ni eau ni nourriture, et la seule chance que j’avais de manger était lorsque j’avais donné quelques francs à ce gendarme. Mais, comme je l’ai dit, il a volé mon argent.
Évidemment, ces circonstances n’étaient pas propices à une bonne nuit de sommeil. Je suis restée éveillée toute la nuit, submergée par la peur et l’angoisse.
Le lendemain, à midi, j’ai vu un magistrat qui ne m’a informée que de mon transfert dans le quartier des femmes de la maison d’arrêt de Nice, mais toujours pas de nouvelle concernant ma mise en examen. Il m’a dit que je serais placée en détention provisoire. Suite à ce séjour, il m’a été signifié que je devais être transférée au tribunal de Grenoble pour y être présentée devant le magistrat et entendre les accusations portées à mon encontre. Apparemment, la prison de Grenoble serait ma destination finale.
Ces propos m’ont laissé penser que j’irais directement en prison à l›issue de l›audience. Mon adrénaline montait en flèche et j’avais des crampes à l’estomac qui menaçaient de me paralyser, et, en plus, je me sentais presque inconsciente. J’étais pétrifiée. Ce n’était pas une bonne journée.
CHAPITRE 2
La maison d’arrêt de Nice était si vétuste qu’elle ressemblait à un donjon médiéval. Son intérieur était froid, gris et humide, avec des tons sombres, déprimants.
Le jour de mon incarcération, j’ai été photographiée, mes empreintes digitales ont été relevées et j’ai été fouillée. « Fouiller » n’est pas tout à fait le mot. J’ai été palpée par une horrible gardienne qui prenait un malin plaisir à faire son travail. À genoux, en train de fouiller mon corps tremblant, elle leva les yeux vers moi. Je voyais le plaisir dans ses yeux, et je me suis dit « merde ». Ici, ce n’était pas les États-Unis. Je n’avais aucun droit. J’ai été arrêtée et incarcérée, toujours sans avoir été informée de mon présumé crime. Ces humiliations incessantes étaient un supplice au quotidien. Par ailleurs, ne pas savoir pendant combien de temps j’allais être soumise à ces conditions était démoralisant.
J’ai serré les dents, fermé les yeux, tenté de retenir mes larmes, mais je pleurais en silence intérieurement. Ne sachant pas ce qui se tramait en coulisses et faible comme je l’étais, ma seule option était de compter sur moi-même. J’ai trouvé la force de ne pas leur donner la satisfaction de me voir pleurer.
Dès que la procédure d’enregistrement fut terminée, une gardienne m’a conduite à la salle de bain où j’ai pu prendre une douche. Je me suis séchée, et j’ai été conduite à un placard de nettoyage pour que l’on me donne deux produits spécifiques. J’avais été « désignée » pour récurer toutes les cabines de douche et les toilettes. Ils surveillaient chacun de mes mouvements. C’était de la maltraitance calculée. On souhaitait que je souffre cette indignité à cause de la personne à qui j’étais mariée. Ils ont fait des pieds et des mains pour me rendre encore plus mal à l’aise que nécessaire.
C’était le troisième jour de ma détention et je n’avais toujours pas été informée des raisons de mon arrestation ou des accusations portées contre moi. Je n’avais vu ni le procureur, ni aucun représentant du tribunal. Je n’avais pas encore vu mon avocat, mais je savais qu’il avait été contacté. Lilou, mon gouvernant, et Jackye, ma meilleure amie, auraient compris qu’il fallait le prévenir, suite à l’incident à l’aéroport. Jusqu’à présent, je n’avais vu que des gardiens, des gendarmes, des cellules de prison. Bon sang, qu’est-ce que j’avais fait ? Qu’est-ce qui se passait ?
Bizarrement, ils ne m’ont pas donné un uniforme standard, une combinaison gris terne que les autres détenues portaient. J’ai été autorisée à garder les mêmes vêtements que ceux que je portais lorsque je suis descendue de l’avion en provenance de Londres : un pantalon noir, un chemisier en crêpe blanc avec un foulard Hermès en soie, et un imperméable Fendi. Une belle tenue, mais peu adaptée à la vie en prison. J’aurais préféré qu’ils m’attribuent l’uniforme laid de la prison. Si j’avais su pendant combien de temps je serais obligée de porter cette seule tenue, j’aurais sûrement demandé qu’on m’en sorte une autre de ma valise.
Deux gardiennes m’ont escortée jusqu’à ma cellule, notamment celle qui m’avait fouillée. D’un froid glacial, le sol et les murs en pierre grise étaient très anciens. Je me disais que Dieu seul pouvait connaître leur âge exact, mais qu’ils devaient avoir au moins cent ans. L’usure avait rendu les sols en pierre lisses, sans doute à cause des nombreux prisonniers qui y avaient inconsciemment fait les cent pas au fil des années. Combien d’entre eux avaient été détenus avant moi ? Plusieurs milliers, peut-être, et maintenant j’en faisais partie.
La gardienne ouvrit la porte de la cellule d’un coup sec et me poussa à l’intérieur. Les barreaux se refermèrent avec fracas, et je tremblais lorsque je me rendis compte que j’étais dans une cellule avec trois autres femmes. Elles me dévisagèrent. Je les fixai en retour. C’était un espace minuscule pour quatre femmes adultes. Il y avait deux lits superposés et des toilettes dans un coin derrière un mince rideau. Il y avait juste assez de place pour que nous puissions nous tenir debout. Rien d’autre. C’était encombré, enfumé et imprégné d’odeurs excréments humains. Les odeurs me submergèrent. L’odeur rance me gagna violemment les narines. Je pouvais sentir les murs de pierre glacés se refermer sur moi, me comprimant comme un étau.
Elles ont immédiatement perçu mon choc et ma confusion. Elles ont tout de suite compris que je n’avais pas ma place ici. À cause de ma tenue ?… Elles ont sans doute senti que je n’avais aucune expérience de la vie en prison. En bref, j’étais perdue et effrayée, exposant ma vulnérabilité.
C’était trop. Mon monde s’est soudainement brisé en mille morceaux. J’ai basculé en avant, j’ai failli m’évanouir, et j’ai eu la chance de ne pas tomber à plat ventre sur le sol de pierre glacé.
CHAPITRE 3
Je n’étais pas censée être enfermée et privée de ma liberté. À vrai dire, qui l’est ? Mais pour moi, la prison a été particulièrement difficile. Je suis une personne nerveuse et indépendante. J’aime les gens, mais je n’aime pas être dans la foule, trop près des autres ou confinée. Pour ceux qui sont nés libres, l’enfermement est un enfer. Ce n’était évidemment pas un environnement propice à mon bonheur ou à mon confort. Lol.
Inutile de dire que j’étais très malheureuse. Privée de nourriture au début, je ne pouvais toujours pas manger et sentais mon corps dépérir. Bien que je sois mince, je mange d’habitude comme un ogre. Je mange tout le temps et j’adore ça. Je sentais aussi mon âme se consumer. Je ne savais vraiment pas combien de temps je pourrais tenir là sans devenir folle ou m’effondrer physiquement.
J’étais une loque, seule et perdue dans cette situation désespérée. Dieu merci, trois femmes bienveillantes m’ont soutenue. Je leur serai toujours éternellement reconnaissante. Deux jeunes musulmanes, Sonya et Alaïa, et une prostituée française, Carmine, ont été mes sauveuses inattendues. Mon empathie pour elles et leur tendre affection envers moi ont fait toute la différence pour me faire sentir à nouveau un peu humaine.
Les gardiens m’ont maltraitée physiquement et ont été verbalement abusifs, sans aucune raison. Ils n’avaient pas besoin de me pousser dans la cellule comme s’ils jetaient les poubelles. Le gendarme de l’aéroport m’avait laissée aux « bons soins » du personnel de la prison. Les gendarmes étaient méchants, mais ils étaient de gentils chiots comparés au personnel de la prison pour femmes de Nice, et j’allais bientôt découvrir une douleur et une humiliation encore plus profondes.
Lorsque j’ai failli perdre conscience et tomber par terre, Carmine a été suffisamment rapide pour m’attraper. C’est grâce à elle que j’ai encore un visage. Ensuite, les trois jeunes femmes m’ont allongée sur l›une des couchettes inférieures et ont attendu que je revienne, en quelque sorte, à la vie. Il est devenu évident que ces femmes avaient toutes fait de la prison auparavant et qu’elles connaissaient le protocole. Sonya, enceinte de cinq mois, était là pour avoir trafiqué de l’héroïne avec son copain. Alaïa avait arraché de ses dents le doigt de sa belle-mère dans une bagarre. Vous parlez d’une dispute familiale… La plupart du temps, Carmine était une gentille prostituée. Arrêtée pour excès de vitesse par un policier, elle est descendue de la voiture et l’a tabassé.
Elles m’ont entourée comme des mères poules qui s’occupent d’un membre blessé de leur troupeau. Lorsque j’ai repris connaissance, elles m’ont fait asseoir et m’ont offert une cigarette, que j’ai bien entendu refusée, car je n’ai jamais fumé. Je leur en étais quand même reconnaissante. Elles se sont assises à côté de moi et Sonya m›a tenu la main pour me réconforter.
CHAPITRE 4
J’avais l’air complètement perdu avec mon pantalon de créateur et le foulard en soie noué à mes cheveux blonds emmêlés. Je n’avais définitivement pas l’air d’une détenue ordinaire, ni même de quelqu’un qui devait se trouver ici. Les filles n’ont pas hésité à me demander ce que je faisais là. Elles étaient à la fois curieuses et gentilles.
« Qu›est-ce qui se passe, chérie ? » me demanda Sonya en me serrant la main. « Qu›est-ce que tu as fait ? »
« C’est là tout le problème », lui répondis-je en regardant profondément dans ses yeux marron foncé. À cet instant, je me dis que je n’avais jamais vu des yeux aussi chaleureux, sympathiques et gentils. « Je ne sais pas. Je ne sais pas ce que j’ai fait. »
Et sur ces mots, j’ai mis ma tête entre mes deux mains, j’ai craqué et je me suis mise à pleurer… vraiment pleurer. J’étais libérée des sanglots que j’avais retenus ces derniers jours. Cela n’a pas dérangé les filles qui me tenaient la main en attendant patiemment que je me calme.
L’esprit en ébullition, je me demandais comment j’allais m’en sortir. Je n’arrêtais pas de me demander quand je pourrais revoir ma merveilleuse fille, TK (The Kid), qui était en Uruguay avec son père. Qu’avais-je fait de si répréhensible ? Est-ce que je méritais vraiment tout ça ?
Évidemment, en revenant à la raison, je me suis rendu compte que tout cela était lié à Jacques. À ce moment-là, je croyais que le statut juridique de Jacques était clair, mais j’ai découvert plus tard que ce n’était pas le cas et qu’il était un fugitif en France. Je n’avais rien fait de mal. Ce n’était qu’un destin cruel, d’être la femme de Jacques en vertu de la loi française sur les conjoints. Lorsque vous êtes marié en France, chaque partenaire est responsable de ce que l’autre a pu faire. Quelle chance j’avais ! J’en pleurais.
Les deux musulmanes et la charmante prostituée française m’ont tapé sur l’épaule, ont souri et ont attendu que je sois prête à leur raconter ma version de l’histoire.
J’étais dans un tel état de choc que je ne sais plus ce que j’ai pu leur expliquer sur ce qui s’était passé. À mon insu, elles en savaient déjà plus que moi sur mon incarcération. C’était partout à la télévision, à la radio et dans les journaux. C’est à ce moment-là que mes codétenues ont décidé de me traiter avec une attention toute particulière. Sonya savait que j’avais besoin de leur protection. Alors que je gagnais en notoriété sur les chaînes d’information avec des photos et des vidéos diffusés régulièrement, les filles ne m’ont pas fait savoir que je passais à la télé. Pour mon bien, elles éteignaient ou changeaient de chaîne quand je retournais en cellule après mes interrogatoires. Elles ont tout de suite compris à quel point j›étais fragile et ont estimé qu’il valait mieux me protéger des dommages supplémentaires que les médias pourraient m’infliger.
Dans ma tête, j’essayais de comprendre la situation dans laquelle je me trouvais ce qui m’avait amenée là. Mes pensées divaguaient, mais la situation était bien réelle. J’étais en prison.
CHAPITRE 5
Quand j’étais mariée à Jacques, nous avions rénové les 1 115 m2 du palais d’été de Napoléon III pour en faire notre résidence officielle. Il s’appelait le Palais de la Préfecture, ou plus simplement « La Préfecture ». Ce palais avait aussi été l’ancienne résidence royale des monarques de Sardaigne, autrement dit des Ducs de Savoie. Ce noble bâtiment de 13 935 m2, situé dans l’ancien marché aux fleurs de la ville, face à la mer, comportait un espace personnel pour le président de la Côte d’Azur, Jacques.
Mais, pour l’instant, ma réalité était celle de la prison. Incapable de me détendre sur la couchette, j’ai passé une terrible nuit blanche sur un matelas aussi dur que des pierres, accompagnée d’odeurs nauséabondes qui ne s’atténuaient pas. Je ne pouvais non plus dormir debout, et je me suis baladée dans la cellule même si’l n’y avait pas d’espace.
Finalement, Carmine, la prostituée, descendit de la couchette supérieure en face de la mienne, et me regarda dans les yeux. D’une voix aimable, mais ferme, elle me dit en français : « Ma chère, même ceux qui sont en prison doivent dormir. Vous êtes en train d’aggraver votre cas. Il faut accepter que vous soyez ici et que vous ne puissiez rien y changer, mais vous pouvez vous battre. Il faut simplement imaginer comment vous allez le faire, et ce que vous pouvez faire maintenant pour vous aider. »
Ses mots m’ont donné du courage. Elle avait raison. Je n’allais pas les laisser m’opprimer et j’étais déterminée à garder espoir. Je me demandais sans cesse où était mon avocat et ce qu’il faisait pour obtenir ma libération. J’étais sûre que Lilou et Jackye, qui étaient venues me chercher à l’aéroport, l’avaient contacté. Je me suis alors recouchée et j’ai finalement réussi à m’endormir, épuisée, tombant dans un sommeil profond.
En me réveillant, j’avais toujours peur, me sentant profondément malheureuse. Je me sentais faible et pas prête pour la journée qui s’annonçait, compte tenu de mon état physique et émotionnel. Au moins j’avais trouvé en moi la force de croire que je pourrais affronter les événements à venir.
Le temps semblait s’écouler à la vitesse d’un escargot. Tant de choses avaient changé au cours des deux derniers jours. Tout ce que j’avais considéré comme normal dans ma vie ne l’était plus. On nous a servi une sorte de gruau dégoûtant pour le déjeuner, passé par une fente étroite dans la porte. Je ne pouvais rien manger, et même si j’avais eu faim, je n’aurais probablement pas mangé cette bouillie. Je pensais que la cuisine dans une prison française serait meilleure. Lol.
Après le déjeuner, c’était l’heure de la « prom ». Il fallait aller dans la cour pour notre quota d’exercice quotidien. Pour moi, tout était nouveau et j’étais intimidée par cet environnement. J’aurais préféré rester dans ma cellule derrière une porte bien fermée et laisser les autres filles y aller. Je ne voulais vraiment pas faire de l’exercice. L’adrénaline me courait dans les veines et mon cœur s’affolait de manière incontrôlable. L’exercice était pourtant obligatoire, et consistait simplement à marcher en cercle autour de la cour. Les prisonnières étaient obligées de participer à la promenade. Si j’avais refusé, les gardiens m’auraient attrapée pour me traîner dehors, que je le veuille ou non.
Nous sommes donc sorties… Sonya, Alaïa, Carmine et moi. La cour était un grand carré en terre battue. De la poussière s’élevait avec les pas, mais au moins je pouvais voir le ciel et sentir le soleil. Je dois avouer que j’ai bien apprécié le soleil. Ses rayons me semblaient glorieux, m’enveloppant de leur chaleur. Sa belle lumière ne m’a pas libérée, mais elle m’a fait sentir mieux pendant un moment. Ce fut un bref instant avant que la gravité de ma situation ne s’installe de nouveau.
Mes trois codétenues se sont regroupées autour de moi pour me protéger. Dans la cour, 30 femmes à l’air méchant me fixaient. Tout le monde se déplaçait lentement en cercle autour de l’espace ouvert. Nous devions marcher dans une seule direction car c’était la règle pour que les gardiens puissent nous contrôler plus facilement. Bien qu’essayant d’éviter le contact visuel, je ressentais leurs regards. J’ai seulement jeté un coup d’œil à ces corps qui se déplaçaient en cercle et j’ai vu que les prisonnières portaient un uniforme pénitentiaire ou des vêtements de travail. Le comble de l’inconfort. Moi, je portais toujours la même tenue que celle que j’avais sur moi à l’aéroport de Nice. Trois jours plus tard, elle était un peu collante. Je n’étais pas du tout à ma place.
CHAPITRE 6
La scène dans la cour m’a rappelé le film Midnight Express, avec les prisonniers abattus qui marchaient en rond dans la cour poussiéreuse. Ces visages maussades appartenaient à des filles perdues qui calculaient le temps qui leur restait avant d’être libre. Hormis leurs regards vides, j’ai remarqué que ces visages étaient distraits par quelque chose de très unique parmi eux… Moi.
Plusieurs de ces prisonnières, toutes de jeunes femmes, commençèrent à venir vers moi. Sans un mot, je sentis Sonya, Alaïa et Carmine se resserrer autour de moi. Elles ont assumé le rôle de mes gardes du corps de facto, et n’hésiteraient pas à me défendre si nécessaire. Mais il y avait un problème. Elles n’étaient que trois, et il y avait au moins trente autres femmes dans la cour. Au fur et à mesure qu’elles avançaient, il n’était pas difficile de distinguer leur apparence. Ces femmes étaient redoutables et tout à fait capables de réduire en miettes quiconque ne leur plaisait pas.
J’ai regardé autour de moi, désespérée. Pas de gardienne en vue. Il y en avait eu une dans le coin à notre arrivée, mais je ne la voyais plus. Ma paranoïa et ma panique s’emparèrent de moi, principalement parce que je ne comprenais pas comment j’avais pu offenser ces femmes que j’allais bientôt rencontrer. Visiblement, elles ne s’approchaient pas pour s’asseoir et prendre le thé avec moi.
Tout à coup, l’une d’elles cria, « Madame Médecin ! » Elles coururent vers moi, les bras étendus, des sourires jaillissant de leurs visages tristes. Je me rendis compte qu’il s’agissait de fans. Elles me connaissaient. Ces filles des rues et des quartiers pauvres étaient des habitantes de Nice qui m’aimaient, car j’avais travaillé très dur pour les aider. Elles savaient que je me souciais d’elles. Pendant la campagne de Jacques, j’avais cherché du soutien non seulement auprès des plus hautes sphères de la politique, mais aussi auprès des gens ordinaires dans les rues de Nice. J’avais travaillé avec des vendeuses ambulantes, de petites commerçantes et, oui, des prostituées aussi comme Carmine. Elles m’aimaient parce que je les aimais. Je ne les avais jamais regardées de haut, comme beaucoup d’autres gens. Elles étaient mes égales en tant que femmes, mais malheureusement, elles avaient connu des moments difficiles.
J’étais la Première dame de Nice et mon engagement personnel était d’améliorer la qualité de vie des citoyens niçois. J’étais connue comme « La Comtesse de Cœur ». On disait que j’avais le contact facile. À vrai dire, je n’avais aucun sens du relationnel. J’aimais simplement les gens et je faisais de mon mieux pour aider tous ceux qui étaient réellement dans le besoin. J’ai fait ce que j’ai pu. La politique, l’idéologie et les différences de classe ne définissaient pas les gens à mes yeux. Je défendais simplement les besoins des bons citoyens de Nice.
Les filles étaient maintenant près de moi. Je pensais pouvoir reconnaître un ou deux visages. Leurs cheveux foncés, leurs yeux brillants, un mélange de sang français, italien, corse et arabe constituaient ce groupe éclectique. J’avais déjà vu ces visages auparavant et ils m’étaient très chers. Bien que j’avais quitté Nice depuis six ans - depuis 1991 lorsque Jacques et moi avons été obligés de fuir pour sauver nos vies -, ces femmes ne nous avaient pas oubliés et nous soutenaient toujours.
Elles se précipitèrent vers moi, me serrant de près, riant, ricanant, souriant, et tendant leurs bras. Elles voulaient un autographe. « Madame Médecin ! », criaient-elles, « Madame Médecin, signez-nous un autographe. S’il vous plaît. S’il vous plaît. Signez votre nom sur nos bras. » Elles sortirent de leurs uniformes des journaux, des magazines, des pages arrachées de livres et même des emballages de barres chocolatées, me suppliant de les signer.
Elles étaient si contentes de me voir, comme une vieille amie qui était revenue dans leur vie. En mon absence et celle de Jacques, un nouveau régime socialiste avait pris le pouvoir à Nice. À vrai dire, malgré leur hypocrisie habituelle quant à l’amour qu’ils portent aux citoyens, les gens ordinaires ne se portaient pas si bien sous cette nouvelle administration socialiste. En fait, ils avaient été 100% mieux lotis et respectés par Jacques et moi-même, les capitalistes.
J’étais touchée et des larmes commencèrent à couler sur mon visage. Les filles se bousculaient autour de moi, les bras tendus. Je ne pouvais pas y croire, et j’ai saisi chaque bout de papier, chaque page déchirée, chaque emballage pour y griffonner mon nom. Ma main tremblait, et ma signature était approximative. Ce n’était pas important. Mes codétenues sont restées là à regarder, en applaudissant, le sourire aux lèvres. J’étais à la fois étonnée, reconnaissante et extrêmement soulagée devant tant d’affection.
CHAPITRE 7
Comme les filles me paraissaient différentes maintenant ! Elles étaient des amies et non une menace. Cela démontre à quel point les attentes mal placées peuvent brouiller les perceptions et comment la peur peut tordre l’esprit.
Il y avait beaucoup trop de rires et de plaisir pour une cour de prison. Bien sûr, après quelques instants, plusieurs gardiennes sont sorties en courant, dont la salope qui aimait bien me tripoter. Elles se sont précipitées dans la foule, bousculant les filles et en faisant tomber plusieurs. Elles se dirigeaient vers moi. Tout naturellement, les gardiennes pensaient que tout cela était de ma faute et que j’étais responsable du désordre dans la cour.
Les filles ne les laissèrent pas s’approcher de moi. Ces femmes niçoises étaient de mon côté. Elles se regroupèrent autour de moi pour me protéger. Dès lors, j’avais bien plus que mes trois codétenues. En signe de solidarité, elles m’ont toutes protégé du mieux qu’elles pouvaient des gardiennes.
Je les appréciais énormément, mais je me suis rendu compte qu’elles allaient avoir des problèmes si elles continuaient à me défendre. Je ne pouvais pas laisser cela se produire. J’ai créé un chemin à travers elles, me dirigeant vers l’une des gardiennes. Je lui ai expliqué que ceci était de MA faute. J’avais perturbé l’heure de la promenade et les filles n’y étaient pour rien. J’acceptais de payer les pots cassés.
« Ramenez-moi dans ma cellule ! », ai-je crié.
Eh bien, cela a étonné les salopes ! Elles ne pouvaient pas refuser ma demande, alors elles m’ont saisie par les manches et m’ont ramenée à mon prétendu logement. Je savais que les gardiennes n’allaient pas me faire du mal. Pas avec 30 Niçoises en furie derrière moi ! Sonya, Carmine et Alaïa m’ont suivie jusqu’à la cellule. On nous y a poussées, la lourde porte en fer claquant derrière nous. Nous quatre, codétenues, avons commencé à rire si fort que nous en avons pleuré, jusqu’à ce que nous revenions à la réalité : nous étions toujours derrière les barreaux.
« Merde alors ! » cria Carmine. « Vous êtes incroyable, Madame Médecin. Je n’ai jamais rien vu de tel. Vous avez bien remis ces gardiennes à leur place ! »
Mais la journée n’était pas encore finie et l’excitation n’était pas terminée.
Tout d’un coup, une gardienne est arrivée pour dire que le consul américain était venu me voir. Putain, il était temps ! J’allais pouvoir enfin venir à bout de tout cela. J’ai suivi la gardienne dans le couloir jusqu’à la salle d’attente. Une fois de plus, en rentrant dans la pièce, je fus fouillée comme si je cachais quelque chose, quelque part. Les gardiennes avaient retrouvé leur calme après la débâcle dans la cour et avaient besoin de rétablir leur contrôle. Elles voulaient me montrer qui était le patron. Je me suis tenue prête pendant que la gardienne tournait autour de moi, me tapotant ici et là, tripotant mon pantalon et gonflant les manches de mon chemisier.
Elle m’a touché les seins, les hanches et le cul. Comment aurais-je pu cacher quelque chose en venant de ma cellule ? On m’avait fouillée de fond en comble à l’aéroport de Nice et à chaque lieu de détention.
J’en avais assez. J’ai craqué. J’étais très en colère et j’ai crié à cette sinistre femme de cesser de me toucher là où elle m›avait déjà examinée. Je m’en foutais, il fallait que ça cesse immédiatement. J’ai hurlé : « Éloignez-vous de moi ! Enlevez vos foutues mains de mon corps ! Vous m’avez fouillée de la tête aux pieds quatre fois aujourd’hui, il n’y a plus rien à trouver ! »
Elle sursauta comme si le ciel lui était tombé sur la tête. Elle me siffla et recula en grognant. Au fil du temps, je pris conscience que ma situation se détériorait, les mauvais traitements s’intensifiant. Les socialistes étant désormais au pouvoir, leur influence me torturait, de l’administration pénitentiaire jusqu’aux gardiens. Bien sûr, c’était politique de faire de moi un exemple, car j’étais Madame Jacques Médecin.
CHAPITRE 8
Dès que j’ai compris que ma situation difficile faisait toujours partie des représailles, je me suis souvenu de l’acharnement des socialistes, quelques années plus tôt, à détruire Jacques. L’une de ses plus grandes craintes était toute tentative d’arrestation sur des accusations dans le cadre d’un complot visant à le renverser. Il craignait qu’on fasse de lui un exemple. Cette peur était fondée sur le fait qu’il était favorable à la peine de mort et qu’il pourrait bientôt partager des locaux avec des criminels qui étaient opposés à cette politique. Jacques était un conservateur qui tenait la barre ferme. Certaines personnes en dehors de Nice lui en voulaient. Maintenant qu’un régime socialiste était au pouvoir en France, c’était l›heure de se venger pour quiconque était de droite. Jacques n’était pas en France, mais moi, oui, et j’ai pris pleinement conscience que leur colère allait s’abattre sur moi en son absence. Je déteste la politique. Elle fait ressortir ce qu’il y a de pire chez les gens, quel que soit leur camp.
Tout cela avait commencé des années auparavant, lorsque Raymond Barre, politicien et économiste français, avait initié une campagne de diffamation contre Jacques pour tenter de le détrôner et de le remplacer
