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Meurtre en Montmorillonnais
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Livre électronique168 pages2 heures

Meurtre en Montmorillonnais

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À propos de ce livre électronique

Dans le sud de la Vienne, à Moulismes, se faufile la Petite Blourde. Au pont des Varennes, l’endroit est tranquille et l’automne bucolique lorsqu’on y trouve le corps d’un homme visiblement assassiné…

Dans le triangle Poitiers/Chauvigny/Lussac-les-Châteaux, le lieutenant de police François Maury et sa stagiaire Agathe Krystin mènent l’enquête, s’immergent notamment dans la vie d’un collège rural et se confrontent aux mondes des villageois, des pêcheurs et des joggeurs. Le journaliste Boisseau n’est pas en reste dans cette affaire qui n’évite ni les nuits rochelaises, ni les fausses pistes, ni les coups, ni les jalousies amoureuses, ni la chaleureuse convivialité.


À PROPOS DE L'AUTRICE

Née en 1954 à Montmorillon, Christine Ribardière, a fait l’essentiel de sa carrière de professeure d’anglais au collège Gérard-Philipe de Chauvigny.
LangueFrançais
Date de sortie19 avr. 2024
ISBN9791035324926
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    Aperçu du livre

    Meurtre en Montmorillonnais - Christine Ribardière

    De la même autrice

    Récit

    Moulismes, mes années sixties, Le Carrelet, 2022.

    Traductions de l’anglais (en collaboration avec Michelle Deperrois-Fayet)

    Brooke, Margaret : Reine à Bornéo. Souvenirs d’une vie singulière, Magellan & Cie, 2022.

    Schildt, Göran : Du Havre à Monaco, par fleuves et canaux, Bleu autour/Le Carrelet, 2018.

    Wheeler, Karen : Tout d’sweet. Ma nouvelle vie dans un village français, Le Carrelet, 2016.

    I

    Une atmosphère étrange règne dans la salle des professeurs à cette heure toujours appréciée de la récréation. Ce n’est pas la période des conseils de classe dont les jours et horaires soulèvent généralement bon nombre de mécontentements et, depuis plusieurs semaines, les tensions liées aux emplois du temps sont maintenant en partie oubliées. Ce n’est pas non plus la veille d’une grève ; les représentants syndicaux ne s’agitent nullement et aucune affiche, aucune banderole appelant à manifester n’encombre le sol et les murs. S’agirait-il alors d’un problème lié au règlement intérieur difficile à gérer ou d’un regrettable conflit avec quelque parent d’élève ? Pour une fois, les clivages gauche/droite, syndiqués/non-syndiqués, fumeurs/non-fumeurs, et hiérarchies entre les disciplines semblent effacés. Tout le monde fait bloc. Pas de clan ! Lorsque la sonnerie stridente signifiant la fin de la pause retentit, les enseignants, font mine de l’ignorer. Au même moment, apparaît à la porte l’imposante silhouette du principal, Monsieur Meunier, vêtu de son habituel costume sombre. Lui aussi semble troublé. Il s’adresse à ses collègues d’une voix légèrement cassée :

    — Mesdames, Messieurs, vos élèves vous attendent ! S’il vous plaît, je pense qu’il est encore trop tôt pour leur parler de ce drame. La police va arriver d’un instant à l’autre. Je vous réunirai pendant la coupure du déjeuner ; ceux qui ont cours à 13 h pourront laisser les enfants en récréation. Le rectorat vient de m’informer qu’une cellule psychologique sera mise en place.

    Le principal ne prête pas attention au soulagement à peine voilé des professeurs concernés par ces heures libérées. En effet, ce ne sont pas les meilleures de la journée. En pleine digestion quand retentissent les cris des camarades en train de jouer dehors et que trois ou quatre heures de cours sont encore à venir, la concentration des élèves enfermés dans leur salle de classe s’amenuise… Tout en prolongeant leurs discussions, les enseignants se dirigent lentement vers la sortie.

    À 10 h 30 ce lundi 2 octobre, à Saint-Julien-l’Ars, les élèves du collège Régine-Deforges se tiennent alignés dans la cour, prêts à remonter en classe. Ils regardent, avec une attention toute particulière, leurs profs arriver. Déjà la rumeur a fait son travail dans les rangs :

    — Seillier ? Le mec pas sympa qui nous faisait maths quand on était en 6e ?

    — Oui, c’est lui, il est mort, c’est mon père qui me l’a dit. Ils l’ont annoncé ce matin sur France Bleu Poitou.

    — Mort ? Mort de chez mort ?

    — Oui, il a été retrouvé dans un champ, quelque part dans un bled près d’ici, la tête dans l’eau !

    — Il s’est noyé !

    — On l’a aidé à se noyer, qu’ils ont dit à la radio !

    — Non ? grave !

    — Ouais… Si on l’avait encore cette année, on aurait maintenant plein d’heures de perm !

    Rires étouffés…

    — De toute façon, il était plus prof.

    — Ah ?… Y faisait quoi Seillier, il avait été viré ?

    — Non, j’crois pas.

    Bernard Meunier est retourné dans son bureau ; c’est un chef d’établissement estimé. Les enseignants, le personnel administratif, les agents, tout le monde ou presque ne tarit pas d’éloges à son sujet. En général le principal subit le feu croisé de ses supérieurs et de l’ensemble de la communauté éducative, les tirs des deux côtés visant la même cible : lui ! Sérieux, dévoué à la cause, Bernard Meunier est le premier à arriver dans l’établissement et le dernier à en partir. Il aime à répéter que son objectif prioritaire est le bien-être et la réussite des enfants, son collège ne comptant que 250 élèves. À l’écoute de son équipe, il tient compte de l’avis de chacun et se montre toujours prêt au dialogue direct et respectueux. Tous peuvent compter sur son soutien et il a su instaurer un climat de confiance. Les élèves le craignent, mais l’apprécient pour sa disponibilité : ils savent que la porte de son bureau reste toujours ouverte.

    Cette pièce destinée à recevoir tous les acteurs du collège – parents, ensemble du personnel, élèves, élus des communes voisines – ne laisse cependant aucune place à la fantaisie ou à la rêverie. La peinture beige fadasse, le mobilier fonctionnel mais terne, les murs nus, les quelques livres, l’absence de photos de famille, rien ne prête à l’évasion. Unique concession au confort, le vaste et ergonomique fauteuil atteste du désir d’efficacité de son occupant… Ancien professeur de lettres classiques, cultivé et féru de littérature, il ne s’octroie aucune distraction au travail et semble vouloir protéger sa vie privée. Seule note personnelle, une petite statuette en ébène posée près de l’ordinateur témoigne d’une de ses passions : les arts africains.

    Il attend maintenant la visite du lieutenant de police qui vient de Poitiers. Il ne l’a jamais rencontré, et pour cause, ce n’est pas tous les jours qu’un ancien professeur se fait assassiner ! En revanche, il connaît bien le commandant de la gendarmerie de Saint-Julien-l’Ars, ayant parfois affaire à lui ou à ses subordonnés. La plupart du temps, leur présence dans l’enceinte du collège est liée aux délits mineurs supposés avoir été perpétrés par des gamins durant le week-end : petit vandalisme, bagarres, conduite pétaradante de mobylette, problèmes en général vite réglés en présence des parents et sous la menace efficace de la privation de téléphone portable, tablette et autre Switch. Mais aujourd’hui, c’est différent ; l’heure est grave, très grave.

    Perdu dans ses pensées, le principal fixe la pluie qui fouette à nouveau les vitres. Aujourd’hui, il n’a guère le cœur à l’ouvrage… Il frissonne légèrement. Cela fait plusieurs jours que la région subit de très fortes averses et l’atmosphère s’est refroidie. Il n’a pas encore donné l’ordre d’allumer le chauffage, c’est trop tôt, et jusqu’à présent, personne ne s’est plaint du froid, mais cela ne saurait tarder. Le principal aimerait bien attendre la rentrée après les vacances de la Toussaint pour prendre cette décision, ce serait toujours ça de gagné. Toute forme d’économie est bienvenue, selon les directives du rectorat… Bien sûr, il pourrait faire une exception pour son propre lieu de travail, mais ce serait très mal perçu par les collègues ! Autant abandonner cette idée.

    Des bruits de pas et des éclats de voix se font entendre. Avec son habituelle gentillesse, Noëlle, la secrétaire de direction dont le bureau jouxte le sien, vient d’accueillir le lieutenant de police.

    Le lieutenant François Maury, sujet à l’insomnie, a une fois de plus mal dormi la nuit dernière, ressassant jusqu’à l’aube son dimanche après-midi de permanence passé sur la scène d’un crime.

    Le procureur l’ayant chargé de l’enquête, il avait dû la veille abandonner toute activité en cours pour se rendre sur place, à Moulismes, où le corps d’un homme avait été découvert en fin de matinée, en partie immergé dans la Petite Blourde – en contrebas de la route, à la sortie du bourg en direction de Limoges. Parvenu au plus vite sur le site au volant de sa voiture de service banalisée, il avait constaté avec satisfaction que les gendarmes de la brigade de Lussac-les-Châteaux avaient installé un sens unique de circulation, empêchant ainsi les badauds de se masser sur le petit pont de pierre où ils auraient été aux premières loges.

    Aucune intrusion sur les lieux n’était plus possible ; un gendarme en faction interdisait l’accès à l’unique chemin pentu conduisant à la rivière. Les techniciens de la police scientifique étaient déjà à l’œuvre ; reconnaissables à leur combinaison blanche, à leur masque chirurgical, leurs gants et surchaussures en plastique, ils passaient l’endroit au peigne fin, parlementaient, prenaient des photos, mesuraient, prélevaient, notaient. Pas question de perdre un seul indice d’autant plus que de gros nuages noirs chargés de pluie s’amoncelaient à l’horizon. Le médecin légiste, également vêtu de blanc, attendait patiemment que les constatations de la police scientifique soient terminées pour examiner le corps qui reposait sur la berge, la face dans l’eau et l’arrière du crâne fracassé. C’est à lui qu’incombaient les premières constatations sur le cadavre.

    Maury avait hâte d’entendre le premier rapport de ce professionnel. Resté légèrement à l’écart pour ne pas contaminer la scène du crime, il avait patienté, profitant de ce moment de répit pour prendre quelques renseignements auprès des gendarmes. Il se demandait qui pouvait bien être l’individu qu’on avait repêché dans ce paisible affluent de la Vienne, en plein milieu de cette campagne aux couleurs automnales, évoquant un tableau de Gainsborough, sans les petites maisons au toit de chaume.

    Le policier s’était empressé de demander à Lionel Farat, l’homme qui, le premier, du haut du pont, avait aperçu le mort, de rester à disposition de la Police. L’identification de la victime avait été facile, grâce à sa carte d’identité trouvée dans une des poches de sa ceinture de course. Il s’agissait d’un certain Seillier, inspecteur de l’Éducation Nationale et ancien professeur au collège Régine-Deforges.

    Maury était resté sur place jusqu’à ce que le corps, mis dans une housse, soit emporté à l’Institut médico-légal de Poitiers.

    10 h 45, ce lundi. Le chef d’établissement lève les yeux vers la porte laissée entre-ouverte ; un homme se tient là, droit comme un i.

    D’un rapide regard, les deux quinquagénaires, se jaugent mutuellement. La vigoureuse poignée de mains que les deux hommes viennent d’échanger les met toute de suite en confiance l’un envers l’autre.

    — Lieutenant de police, Maury.

    — Bernard Meunier, principal. Je vous en prie, asseyez-vous.

    Le lieutenant, alerte, petit, corpulent, les cheveux poivre et sel, les yeux vifs, ne semble troublé ni par la carrure ni par la fonction sociale de son interlocuteur. D’une manière générale, la hiérarchie ne l’impressionne pas. D’un tempérament enjoué, ce fin observateur n’a pas froid aux yeux. Il s’implique totalement dans son travail, négligeant sa vie privée et même parfois Martine, sa petite amie. Il n’en est pas moins grand lecteur de Simenon et amateur de randonnées, de bonne chère, ayant pour habitude de déjeuner au restaurant et de fréquenter les bars. Il aime le contact avec les gens, trait de caractère bien utile dans sa profession. Dans ces contrées réputées calmes, les meurtres ne sont pas légion et il ose à peine s’avouer content d’être chargé d’une enquête qui va briser son train-train quotidien, la majeure partie de son travail étant consacrée à des charges administratives peu captivantes (rapports, procès-verbaux rendant compte de ses diverses missions). Il aime se rappeler les vers d’un ancien poète local, Raoul Jozereau : « Et c’est rare comme tout de voir bouger en Poitou » !

    Le policier entre directement dans le vif du sujet :

    — Vous savez ce qui m’amène ici… Pouvez-vous me parler de ce Monsieur Seillier ?

    — Eh bien, il a passé une grande partie de sa carrière dans notre établissement en tant que professeur de mathématiques. Ce n’est qu’après son divorce, il y a deux ans, qu’il a abandonné son poste pour devenir inspecteur.

    — Avait-il des enfants ?

    — Non, pas à ma connaissance.

    — Quel genre de relations entretenait-il avec ses élèves et avec ses collègues ?

    — Il était très sévère, peu communicatif.

    Encore heureux que l’époque des coups de règle sur les doigts et le tirage des oreilles soit révolue, pense Maury, qui se rappelle son père parlant des brimades exercées sur les élèves dans les années 20.

    — Et avec ses collègues ?

    — Peu de contacts. La

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