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Gilberte
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Livre électronique258 pages3 heures

Gilberte

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À propos de ce livre électronique

Gilberte, jeune valaisanne « montée » à Lausanne pour y travailler comme serveuse, fait la rencontre de Gilbert, pilote privé excentrique, qui cultive une allure hippie. Elle est tout de suite séduite par le personnage qui va lui faire vivre des voyages et des expériences dont elle n’a même jamais osé rêver. Elle va découvrir l’Afrique, sa magie et sa misère, pour se consacrer entièrement à une mission qui lui tiendra de plus en plus à cœur.
La petite campagnarde s’avérera une maîtresse femme au destin exceptionnel dans un monde encore trop dominé par les hommes.
LangueFrançais
Date de sortie24 oct. 2015
ISBN9782312047300
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    Aperçu du livre

    Gilberte - Gérard Muller

    cover.jpg

    Gilberte

    Gérard Muller

    Gilberte

    LES ÉDITIONS DU NET

    126, rue du Landy 93400 St Ouen

    © Les Éditions du Net, 2016

    ISBN : 978-2-312-04730-0

    À Gilberte, la vraie, la seule,

    Celle qui m’a inspiré ce roman sans le savoir.

    Fais de ta vie un rêve, et d’un rêve, une réalité.

    Antoine de Saint-Exupéry

    PREMIÈRE PARTIE

    L’invitation au voyage

    Chapitre 1

    Le client de la quatre n’arrête pas de regarder mes fesses. Chaque fois que je me retourne, j’ai l’impression qu’un brasero irradie mon postérieur. Pas seulement mes fesses. Mes jambes aussi. Il paraît que ce sont les plus belles de toutes les serveuses du café. Alors le patron exige que je revête l’uniforme obligatoire : minijupe moulée à la louche. Je n’ai rien contre, sauf qu’il n’est pas très pratique de marcher pendant les huit heures réglementaires avec une gaine qui vous comprime le séant comme un étau élastique, et dont vous devez, à tout moment, vous assurer qu’elle ne remonte pas trop haut. Lorsqu’il faut se baisser pour ramasser une cuillère qu’un admirateur un peu trop voyeur fait tomber ostensiblement, je suis obligée de me soumettre à des contorsions dignes d’une acrobate. À part cela, j’aime ce métier qui m’a sortie de ma campagne valaisanne et qui me permet de rencontrer plus de personnes en une journée qu’en un mois dans le petit village où habitent encore mes parents.

    Avec sa chevelure en désordre et sa barbe hirsute, le mateur a tout l’air d’un hippy attardé, un rescapé des années soixante. Il me fait signe d’approcher. Il doit vouloir une nouvelle bière ; il en a avalé déjà trois. Ses yeux brillants en témoignent ainsi qu’une couperose prononcée qui tente de se frayer un chemin au milieu d’une toison déjà argentée par l’âge.

    – Mademoiselle, que faites-vous ce soir ?

    Il n’y va pas par quatre chemins, le bougre. Direct. D’habitude, à ce genre de proposition, je réponds par une pirouette : que j’ai rendez-vous avec mon amant ou que je dois aller voir ma mère malade. Ses yeux se plantent dans les miens. J’y lis une attraction magnétique, je me sens littéralement happée par une énergie inconnue, avant de m’entendre dire :

    – J’avais prévu d’aller au cinéma avec une amie.

    – J’ai mieux à vous proposer.

    Je vois déjà le tableau : resto romantique, une ballade au bord du lac et un petit coup chez lui. Réveil avec la gueule de bois et adieu pour la vie. Je sors à peine d’une aventure similaire, après avoir été larguée comme un sac-poubelle.

    – Je vous emmène à Nice.

    – À Nice ! Mais il faut au moins une journée pour y aller.

    De nombreuses rides viennent soudain accompagner un sourire dans lequel je ne lis aucune malice.

    – Deux heures à peine. Deux petites heures au-dessus des Alpes. Spectacle garanti avec ce beau temps.

    J’ai du mal à saisir ce qu’il m’annonce. Au loin, la chaîne des Aravis me fait un clin d’œil. Le soleil s’y reflète sur un glacier complice. Je comprends enfin qu’il me propose une balade en avion. Je n’ai jamais volé de mes propres ailes, a fortiori dans un tel engin.

    – Et que ferons-nous à Nice ? On a déjà tout à Lausanne : le lac, les bateaux, la promenade au bord de l’eau, les grands hôtels… et même un ciel d’azur.

    – Il manque quand même la « grande Bleue », la Promenade des Anglais, le Casino et surtout le bon restaurant où nous dînerons ce soir.

    Nous y voilà : le resto. Je croyais qu’il allait se montrer plus original.

    – Vous me proposez juste une aventure passagère avec un peu plus d’exotisme. Je vous ai dit que j’avais rendez-vous avec une copine. Et d’ailleurs, je ne sais même pas pourquoi je vous réponds.

    Son visage devient plus doux, comme si une caresse s’y était posé.

    – Parce que ma proposition vous attire. Je le vois dans votre regard… magnifique au demeurant. Imaginez-vous sur la Côte d’Azur, dans la salle du Grand-Balcon, savourant un bar au beurre en observant les palmiers et, au loin, les yachts qui se dandinent sur la mer devant un coucher de soleil comme vous n’en avez jamais vu. Fermez les yeux et transportez-vous là-bas. Après dîner, je vous promets, on rentre directement en Suisse. Parole de montagnard.

    Je ne sais plus quoi lui répondre. Je me sens devenir toute molle, comme s’il m’avait anesthésiée. Alors, pour me donner une contenance et ne pas m’affaler sur le parquet, je quitte sa table en lui disant :

    – Excusez-moi, j’ai un client qui attend sa consommation.

    – Je ne suis pas pressé, vous savez. Mais si nous voulons arriver pour le repas, il nous faut partir d’ici une petite heure. Le plein est déjà fait et le Cessna prêt à décoller.

    Cela doit être la marque de l’avion. À quoi peut-il bien ressembler ? Aucune idée, mais il ne doit pas être grand. Un frisson descend jusqu’à mes chevilles, signe d’une trouille irrationnelle. Ma fille, tu es déjà en train d’accepter, de te faire à l’idée. Toi qui voulais juste rentrer chez toi pour regarder ta série américaine préférée, te voilà plongée dans un film d’aventures. En plus, demain est mon jour de repos. Pourquoi veut-il que nous rentrions ce soir ? En outre, il va faire nuit. Voler dans l’obscurité, cela doit être angoissant. D’ailleurs, je me demande comment il peut s’y prendre. Non, le mieux est de refuser. Tout ceci n’est pas raisonnable. Je ne sais rien de lui. Si cela se trouve, il n’a pas plus d’avion que je n’ai de voiture ; il veut juste me draguer en me faisant miroiter une alouette en acier. Et puis, pourquoi aujourd’hui, pourquoi ce soir ? On pourrait attendre le week-end, se connaître un peu mieux avant que j’accepte. Quel âge peut-il avoir ? Au moins quarante ans, alors que je n’en ai que vingt-cinq.

    Un nouveau client arrive. Je me précipite sur lui, comme vers une bouée de sauvetage. Il est à peine assis que je lui demande ce qu’il souhaite boire. Il me regarde étonné, comme si j’étais une demeurée. Le feu me monte aux joues, je dois ressembler à un coquelicot isolé au milieu d’un champ de blé. Je baisse les yeux pour tenter de me cacher. Une vraie autruche.

    – Remettez-vous mademoiselle. Je veux juste un expresso et le Journal de Genève. J’ai tout mon temps.

    Je balbutie un borborygme inaudible en essuyant sa table. Le plateau que je tiens de l’autre main penche si dangereusement que mon interlocuteur doit s’en saisir avant qu’il ne tombe sur son pantalon. Mon postérieur m’indique que cette scène fait l’objet d’une attention toute particulière de la part de mon aviateur. Je suis sûre qu’il a remarqué mon trouble qui doit se voir dans la salle entière.

    – Mademoiselle, nous sommes en Suisse, pas à Paris. Comme on dit chez nous : on prend son temps, on n’est pas aux pièces.

    Il me rend le plateau avant que je m’enfuie pour me réfugier derrière le comptoir. La machine à café m’est d’un grand secours ; elle permet de me dissimuler. Nicolas qui effectue le service de l’après-midi comme moi m’observe, la commissure des lèvres amusée.

    – Qu’as-tu Gilberte ? Tu ne m’as pas l’air dans ton assiette. C’est le client de la quatre ? Il n’arrête pas de te mater, le vieux pervers.

    – Je suis juste un peu fatiguée. Je n’ai pas beaucoup dormi cette nuit.

    – Un homme ? Encore un chanceux !

    Mon collègue ne m’a jamais caché les vues qu’il avait sur moi, sans toutefois en faire trop. Je pense que sa tactique consiste à attendre que je craque, et que je me réfugie dans ses bras par lassitude ou un soir de solitude dépressive. Il est charmant, un assez beau garçon ressemblant à Romain Duris, mais j’ai jusque-là résisté à ses avances. Je ne souhaite pas mélanger le travail avec mes amours, fussent-elles occasionnelles. En outre, il est un peu trop jeune pour mon goût. J’ai toujours préféré les hommes murs. Le besoin d’être protégé sans doute.

    – Non, juste une insomnie.

    – Comment il s’appelle cette insomnie ?

    – Arrête. Tu sais bien que tu n’es pas mon genre. Je retourne à mon taf.

    Je fais très attention à ne pas glisser sur le plancher trop huilé du bar. J’ai l’impression que tous les regards convergent vers moi, attendant la chute que mon comportement précédent laisse présager. Je me concentre sur ce fichu plateau que je ne manie pas encore assez bien, surtout lorsqu’il est chargé par de trop nombreuses boissons comme c’est le cas. Le journal demandé est coincé sous mon aisselle gauche. Je me dirige d’abord vers mon dernier client, lui tends son quotidien et dépose son café devant lui, sers les deux femmes d’âge mur qui m’ont commandé un thé au citron, avant de me diriger vers mon aéronaute qui continue de m’observer avec une lueur de malice cachée sous sa barbe.

    – Voilà votre bière, monsieur.

    – Gilbert. Pas monsieur. Je me nomme Gilbert.

    Je reste figée, la bouche ouverte comme les carpes qui attendent les morceaux de pain que je leur tends chaque soir en rentrant chez moi. Il a dû se renseigner sur mon prénom et me fait le coup de l’homonymie.

    – Alors, vous avez réfléchi ? Prête pour la balade au-dessus des Alpes ?

    Mes cuisses refusent de me soutenir plus longtemps. Je me cramponne à mon plateau qui ne m’est d’aucune aide. Il menace même de chuter lourdement. Le pilier central qui trône dans la salle vient alors à mon secours. Il reçoit mon dos comme le bâton de vieillesse qui soutenait mon grand-père. Je sens mes tremblements vibrer contre le ciment recouvert de cette peinture jaune délavée que le patron a choisi pour égayer les lieux. Mon interlocuteur attend sereinement ma réponse, sans aucune impatiente manifeste. Mon cerveau est complètement vidé. Les quelques pensées qui essayent d’éclore se fracassent dans un combat d’édredons. Seules quelques plumes virevoltent dans mon champ visuel. Je ne sais plus où je suis. Le regard du pilote reste planté dans le mien comme l’aiguille d’une seringue anesthésiante. Plus j’observe son sourire, plus je trouve qu’il ressemble à celui de mon père. Alors, sans aucune préméditation, sans que rien de définitif ne me soit venu à l’esprit, je m’entends dire :

    – C’est d’accord. Je pars avec vous à la fin de mon service.

    Chapitre 2

    L’aéroport de Lausanne. Mes parents m’y avaient amené un dimanche lorsque j’avais treize ans. Nous étions descendus des montagnes pour visiter l’exposition universelle qui célébrait les vertus de la Suisse dans le monde. J’avais pu découvrir un concentré de mon beau pays réparti sur quelques hectares, au bord du lac. Une fierté nouvelle m’avait habitée : nos terroirs savaient faire autre chose que du fromage et du chocolat. Pris par la modernité ambiante, papa avait voulu, dans la foulée, m’offrir un baptême de l’air. Devant la ronde des avions, j’avais pris soudain peur. Un pressentiment, car quelques jours plus tard, j’avais appris qu’un aéroplane s’était écrasé après son décollage. La passagère qui, comme moi, devait effectuer son premier vol, avait saisi le manche à balai avec une telle force que le pilote n’avait rien pu faire, sinon percuter la rangée d’arbres qui se trouvaient au bout de la piste. Trois morts. On avait retrouvé la responsable du crash encore cramponnée à la commande fatale.

    Curieusement, l’alignement des peupliers est toujours là. Il me saute aux yeux, comme les souvenirs de cette journée. Une angoisse perlée vient lécher mes pensées : les végétaux ont certainement beaucoup grandi depuis douze ans. Pourquoi personne n’a-t-il coupé cette barrière naturelle qui remplit l’horizon comme le mur d’une prison ? Les écologistes ont encore certainement frappé. Plutôt favoriser des drames humains que couper quelques pauvres arbres. Je me jure de ne pas toucher le manche à balai ; à condition de savoir à quoi cela peut bien ressembler. Je me promets de le demander à mon mentor avant de partir.

    Le quatre-quatre de mon pilote se dirige vers un hangar en tôle ondulée du plus mauvais goût. Il mène sa voiture un peu nerveusement, ce qui ne me semble pas un bon présage. Il est vrai que la conduite helvète est souvent un exercice de patiente, mais de là à franchir la ligne blanche à la moindre occasion il y a quelques crispations. J’ai serré mon sac à main pendant le périple comme s’il pouvait me protéger. Je n’ai pas prononcé un mot tout au long du trajet, continuant à me demander ce que je faisais là, dans cette automobile, en compagnie d’un homme que je ne connaissais pas deux heures auparavant, en attendant de m’envoler vers l’inconnu. Gilbert, puisque cela semble son vrai prénom, n’a pas cessé de parler sans jamais me questionner : il doit avoir l’habitude des angoissées dans mon genre, et sait qu’il faut endormir leurs craintes par un babillement sans relief. Je ne me rappelle absolument pas ce qu’il m’a dit. Seules quelques bribes de mots techniques résonnent dans mon inconscient, accompagnées par une description décousue de ce qui nous attend.

    Une autre inquiétude vient arroser mes pensées : je n’ai rien pris pour me changer. Aucune affaire de toilette, aucun vêtement de rechange. Pas même une culotte. Un jean usé et un chemisier dont la blancheur vire sur le gris demeurent mon seul équipage. En guise de chaussures : des escarpins au cuir défraîchi. Tout ceci pour dîner dans le meilleur restaurant de Nice ! On ne me laissera jamais entrer. Mon compagnon est à la même enseigne. Pire même. Avec son pantalon en velours aux plis incertains, sa chemise canadienne qui peluche et ses godillots crottés, il tient plus du baroudeur de grands chemins que du millionnaire ailé qui vient déguster un bar dans un deux étoiles. En guise de palace, nous allons finir dans une gargote au fond du port, en compagnie de pêcheurs avinés et d’une odeur de saumure insistante.

    – Voilà la bête.

    Je découvre l’avion qui occupe l’intégralité du hangar. Rouge et blanc, il me paraît trop petit pour nous emporter aussi loin. Construit visiblement en tôle, il semble aussi fragile qu’une 2CV, cette voiture qui a fait le bonheur de mes parents et de mon enfance. Notre première automobile. Mon hôte fait le tour du propriétaire pour vérifier que tout est là ; du moins le pensé-je tant il met d’application à tâter la carcasse et à manœuvrer des plaques de métal qui pivotent sous sa pression. Je le suis bêtement, ne sachant pas quoi faire de mes mains ni quoi dire, tant j’ai peur de paraître aussi gourde qu’ignorante. Pour me donner une contenance, j’effleure le bout de l’aile. Il est encore plus fragile que je ne le pensais. Je retire aussitôt ma main, de peur d’enfoncer l’appendice.

    Un flash illumine mon cerveau. Il est encore temps de renoncer, de fuir en courant. Après tout, l’homme est assez vieux, je dois galoper plus vite que lui. Comme s’il avait deviné mes pensées, il me prend la main en ouvrant la porte droite de l’appareil.

    – Voici votre siège. C’est de là que vous allez découvrir les Alpes… et tout leur mystère.

    – Et là, entre mes jambes, qu’est-ce cette sorte de poignée au bout d’un bâton.

    – Le manche à balai. Il sert à piloter l’avion, à le faire monter ou descendre. À le faire tourner aussi, en s’aidant des pédales que vous voyez au bout du plancher.

    – Mais pourquoi je vais avoir ces trucs ? Je ne vais pas conduire quand même !

    Il part d’un grand éclat de rire dans lequel je devine une surprise amusée.

    – Rassurez-vous, j’ai les mêmes de l’autre côté. On ne dit pas conduire, on dit piloter. Une fois arrivés en altitude, je vous montrerai comment cela marche, et vous pourrez faire vos premières manœuvres.

    Moi qui ne possède pas encore mon permis de conduire.

    – Il n’est pas question que je touche à quoi que ce soit !

    – Vous verrez, c’est très facile, et même enfantin. Une fois là-haut, on ne risquera rien. Vous pourrez faire toutes les bêtises que vous voudrez.

    Une soudaine envie de faire pipi me saisit. J’ai beau regarder alentour, je ne vois pas les prémices de quelconques toilettes. Il faut que je me libère. Je ne vais pas passer deux heures dans cet engin sans pouvoir me délivrer. Le comble serait que j’arrose le beau siège en cuir, et que je me retrouve à Nice avec un pantalon et une culotte aussi mouillée que la Grande Bleue. Gilbert qui, décidément, semble avoir un don divinatoire, me propose :

    – Avant de partir, allons uriner. Une fois dans l’avion, nous ne pourrons plus. Avec toutes les bières que j’ai bues, il faut que je me décharge. Venez, je vais vous montrer les WC.

    Il me conduit derrière le hangar qui cachait des toilettes assez propres et, luxe suprême, non-unisexes. Il est vrai que nous sommes en Suisse.

    Je remplis la cuvette d’au moins un litre avant de retourner près de l’avion qui semble nous attendre comme un cheval trop longtemps resté à son box. Gilbert revient à son tour, l’air totalement apaisé.

    – Bon maintenant, vous allez m’aider à sortir le Cessna. Chacun va se positionner derrière une roue avant de le pousser dehors.

    En plus, je dois travailler. Moi qui pensais effectuer un voyage de star, me voilà en train de me transformer en employé d’aéroport. Finalement, j’en suis rassurée, sans trop savoir pourquoi. L’impression d’être enfin utile, d’occuper mes mains et en même temps, mes pensées. Une fois une première impulsion donnée, l’avion roule très facilement, sans effort particulier de ma part.

    – Voilà, c’est bon. Nous allons pouvoir nous installer. Le plan de vol a été déposé ce matin. Je vais pouvoir mettre le moteur en route.

    – Le moteur ? Il n’y a qu’un seul moteur ?

    – Vous voyez bien. Il n’y a qu’une seule hélice.

    – Et si, le…

    – S’il a une panne ? Pas de problème, on atterrit dans un champ.

    – Dans un champ, au milieu des montagnes !

    Il se tourne vers moi. C’est encore mon père qui me parle, comme lorsque j’étais une petite fille

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