Découvrez des millions d'e-books, de livres audio et bien plus encore avec un essai gratuit

Seulement $11.99/mois après la période d'essai. Annulez à tout moment.

Brocantes et camisoles: Un conte philosophique
Brocantes et camisoles: Un conte philosophique
Brocantes et camisoles: Un conte philosophique
Livre électronique194 pages2 heures

Brocantes et camisoles: Un conte philosophique

Évaluation : 0 sur 5 étoiles

()

Lire l'aperçu

À propos de ce livre électronique

Galerie de personnages attachants

A mi-parcours de sa vie, Honoré, brocanteur de son état, est amené à jeter un regard critique sur ce qu'il en a fait jusque là. Son métier d'accumulateur d'objets anciens ne l'amuse plus. Peu à peu, sa vie change. Mais pas comme il le pouvait le penser.
Elena saura-t-elle balancer par dessus bord toutes ses vieilles plaies, résidus d'une enfance traumatisante ? Nestor oubliera-t-il travail et famille afin de se tourner résolument vers une nouvelle identité ?
Rodogune, Philastère, Goliath, Statler et Waldorf, pensionnaires de la clinique psychiatrique, cherchent la paix du cerveau sous la houlette d'un directeur torturé, Lothaire Rogaton. Affaire parfois compliquée...
Le goret d'Anatole, répondant au doux nom de Zippo et doté de talents extra-sensoriels ainsi que le livre-devin, qui prédit la vie d'Honoré, s'ingénient à pimenter le récit de ce roman en forme de conte philosophique.

Un ouvrage entre le roman et le conte philosophique qui vaut le détour !

EXTRAIT

Du premier vagissement au dernier souffle, nous emmagasinons, tels des mille-feuilles humains, moult souvenirs et vécus, mais aussi des objets. On thésaurise, on conserve quasi névrotiquement. Ces bibelots et gadgets supposés embellir notre quotidien ne font généralement que le polluer, mais en sommes-nous conscients ?
Gorgés de stimulations d'achat par les médias, inondés de mails publicitaires, nous voilà malgré nos réticences, les consommateurs d'objets de plus en plus futiles, de moins en moins utiles à nos vies confortables. Un proche disparaît, et nous voici affublés de ses joujoux, au nom de l'attachement qu'on lui portait. Peu à peu, nos maisons se remplissent presque à notre insu.
Est-ce que le bonheur est dans l'avoir ? Pression sociale qui incite à se comparer au voisin, lequel a peut être une demeure plus belle que la notre, (quand nous en avons une), une voiture plus puissante, le dernier smartphone doté des plus récentes applications à la mode... Et ensuite ?
Jusqu'où aller dans cette course infinie ?

À PROPOS DE L'AUTEUR

Un jour de 1954, un pianiste hollandais et une enseignante parisienne, tombés amoureux de la Côte d'Azur, ont interrompu un grand voyage en France dans le village de St Tropez, le temps de donner le jour à Véronique Schouten. Une vie tropézienne, bien loin des people, celle d'un village provençal plus vrai qu'il n'y paraît de prime abord.
Quand le métier de mère associé à celui de directrice d'école maternelle commencent à lui octroyer un peu de temps libre, Véronique découvre dès 1997 les joies de l'écriture.
Désormais retraitée, elle est riche des expériences de la vie qu'elle dépose dans un style qui lui est propre, sur la feuille blanche.
LangueFrançais
Date de sortie23 janv. 2017
ISBN9782374641874
Brocantes et camisoles: Un conte philosophique

Auteurs associés

Lié à Brocantes et camisoles

Livres électroniques liés

Fiction générale pour vous

Voir plus

Articles associés

Catégories liées

Avis sur Brocantes et camisoles

Évaluation : 0 sur 5 étoiles
0 évaluation

0 notation0 avis

Qu'avez-vous pensé ?

Appuyer pour évaluer

L'avis doit comporter au moins 10 mots

    Aperçu du livre

    Brocantes et camisoles - Véronique Schouten

    Un vide-grenier de fou,

    ou les mésaventures d'Honoré de Barocco

    Chapitre 1

    La porte s'ouvre en grinçant. Il est vrai qu'elle n'a pas été actionnée depuis si longtemps. Depuis que... Mais cela est une autre histoire.

    A demi-enseveli sous des toiles d'araignées dignes d'une déco halloweenesque, je l'aperçois. Le fauteuil. Tel que conservé en ma mémoire défaillante.

    Souvenirs déficients ? Sans doute ce qu'on a voulu me faire croire, en allant jusqu'à m'interner, en compagnie d'hallucinés au regard satanique. L'infirmière au sourire de gorgone en était convaincue. Jusqu'au jour béni où je me suis échappé de ce nid de coucous, fuyant à grandes enjambées.

    Tout cela pour une sombre histoire de trous de mémoire. Qui n'en a pas, après tout ? J'étais surmené, j'avais embrouillé plusieurs affaires différentes. Du coup j'avais livré un parchemin attribué à Napoléon à un collectionneur de figurines japonisantes. Facturé à une châtelaine ruinée l'achat de trente couvre-lits au style vintage ... J'avais dû ramer à contre-courant afin de trier objets et facturations.

    De loin, le fauteuil ne me semble pas changé, toujours autant de racines ondulant en direction d'accoudoirs au tissu décoloré. Oserai-je m'y asseoir ? Pour l'instant, je l'observe. Et déjà, je sens poindre comme une sourde angoisse en moi. Le pouvoir de cet objet... capable de réveiller mes souvenirs.

    Dans cette maison, habitait à l'époque un couple si uni que l'on ne pouvait imaginer possible leur malheur. Leur porte toujours ouverte pour les amis de passage ; lors de la belle saison, des rires, des sons, les échos de grandes tablées sous la pergola, il semblait que le temps s'arrêtait là, que sitôt franchi le seuil, seule comptait la joie partagée entre tous.

    Et quand l'hiver revenait, ils se retrouvaient tous deux assis au coin du feu, évoquant l'été fugitif, élaborant moult projets festifs à venir.

    C'est dans une brocante qu'elle avait dégotté ce fauteuil, adopté à l'unanimité, qui devint vite une sorte de trône installé au centre du séjour. C'était à qui s'y assoirait le premier. Dès que l'un d'eux s'y posait, il ou elle ressentait une douce chaleur l'envahir. Si agréable que l'autre n'avait de cesse de lui voler la place, sous des prétextes fallacieux.

    « Mon chéri, je boirais bien une bonne tasse de thé ! « Et sitôt l'homme dans la cuisine, frrrt ! La voilà assise.

    Peu à peu, le susdit siège devint un enjeu tel qu'ils en oublièrent de s'aimer aussi fort qu'au premier jour.

    L'été qui suivit fut moins animé, les amis plus rares autour de la grande table. Il est vrai qu'ils se lassaient de les entendre se disputer sans cesse au sujet d'un vulgaire objet.

    Banal ? Pas tant que cela. Des excroissances se mirent à pousser du bas de l'un de ses pieds. Comme des lianes, qui augmentaient chaque fois que l'un d'eux s'y posait. De plus en plus attirant, on sentait, outre la chaleur, une sorte de communication, d'empathie avec soi. Un phénomène difficile à expliquer.

    Pas très loin, une jolie statue de Giacometti se mit elle aussi à se métamorphoser, des filins lui poussèrent aux membres, en altérant ainsi la beauté. Jaloux, le fauteuil, de cette statue tricotant des pieds ?

    De même, dans le jardin d'hiver devenu glacial même à la belle saison, les arbres blanchirent et se virent reliés entre eux au moyen de câbles les empêchant désormais de croître. Les végétaux blancs ajoutèrent encore à une atmosphère qui se tétanisait, s'endormant peu à peu d'un sommeil éternel.

    Dans la maison, les disputes s'envenimaient, devenant dignes d'une guerre des Rose.

    Je me souviens de ce fait divers, dont aucun inspecteur de police ne put comprendre les circonstances. On retrouva trois personnes endormies, entièrement nues. Amnésiques. Un homme et deux femmes. Une fois réveillés, ne se souvenaient absolument de rien. Inconnus du couple en question. Allongés dans le jardin, juste devant le séjour. Sous la gouverne silencieuse du fauteuil, aux pieds duquel de nouvelles racines avaient récemment poussé.

    A l'évocation de cet épisode, mon angoisse grandit encore et j'ai surtout envie de rebrousser chemin, sortir de cette maison fantomatique.

    Un ami du couple, venu leur rendre visite de manière impromptue, et sans doute plus avisé que d'autres, leur tint un soir ce discours :

    « C'est triste de vous voir vous chicaner ainsi, le savez-vous ? Et depuis quand cette ambiance lourde ici ?

    — ... Je crois que c'est depuis l'achat de notre fauteuil.

    — Pourquoi donc tant d'enjeu autour d'un objet fort anodin ?

    — Essaie-le, tu vas nous comprendre...

    — Ce n'est pas le problème. Rien ne devrait être plus important que votre amour. Et surtout pas un meuble ! Qui de plus, a le défaut de moisir, regardez ces racines. Comme c'est laid ! »

    Baissant le nez comme des enfants pris en faute, le couple se tut.

    L'ami de passage regretta instantanément ses paroles, tenta de les atténuer, dédramatiser la situation. Mais il était trop tard.

    Cette nuit-là, ayant joué un air de violon afin de leur redonner sourire aux lèvres et joie de vivre, il s'endormit sur le canapé du salon, brusquement lourd de fatigue.

    Le lendemain, descendant prendre le petit-déjeuner, choc de découvrir le musicien figé, violon en main, pétrifié en une posture éternelle. Face à lui, au milieu de la pièce, le fauteuil.

    Effrayés, ils comprirent enfin les pouvoirs malfaisants de cet objet de brocante. Et décidèrent d'un commun accord de s'en débarrasser au plus vite. Le brûler peut-être ? Pas une mauvaise option.

    Chuchotant comme pour ne pas être entendus depuis le séjour, ils optèrent pour la hache. Le trancher menu, déchiqueter l'objet, la bonne idée ! Puis brûler les morceaux.

    Assis l'un contre l'autre, enfin réunis en une gestuelle aimante, ils s'endormirent devant le feu, soulagés d'avoir trouvé la solution. Le fauteuil en face d'eux.

    Je sais bien que sous les toiles d'araignées, leur éternelle statue est encore là, cette seule idée m'effraye tant que je repars rapidement de cette maison à la porte grinçante... L'état des lieux, une autre fois. Pas urgent finalement.

    Retraverser la forêt aux arbres immenses, cathédrale végétale qui en d'autres circonstances, m'eût ravi. Troncs de large circonférence, s'élançant vers un ciel partiellement caché de hautes branches alourdies de feuillage dense. Le chemin serpente, longe parfois de sages végétaux alignés le long du fossé, découvre quelques clairières inondées de lumière, où l'on voudrait s'arrêter.

    Comment je connais cette histoire ? Je ne sais si je dois le révéler...

    Je suis brocanteur. J'adore battre la campagne à la recherche d'objets rares. La chance, ou le flair, font que je trouve souvent des objets d'exception. Ils ont parfois une histoire…

    Ce fauteuil venait d'un château soi-disant hanté, dans lequel j'avais trouvé une mine de raretés. J'y avais organisé un vide-grenier. Comme souvent lors d'un décès, les héritiers avaient bradé ce qui ne les intéressait pas. Leur père, un magicien d'origine roumaine, venait de disparaître en laissant des dettes faramineuses. Il était donc vital de réaliser un maximum de ventes afin d'apurer la situation. Et ce fauteuil n'attirant personne, (de plus, les héritiers l'avaient sous-évalué) je l'acquis pour peu de frais. Je sentais du potentiel en lui. Du danger aussi, que je devinai l'unique fois où je m'y asseyais.

    Je le vendis donc rapidement à cette femme attachante. Allai jusqu'à le livrer (afin d'être bien certain d'en être débarrassé, les affaires sont les affaires...) dans la maison perdue au milieu des bois.

    Chaque dimanche matin, lors du vide-grenier, il m'était narré les derniers lamentables épisodes de la saga du fauteuil. Je compris assez rapidement que le magicien l'avait doté à la fois d'un pouvoir malfaisant et d'une sorte d'association avec le milieu végétal. Pour le moment, je ne m'inquiète pas trop car la maison est inhabitée depuis de longues années. Mais viendra le jour où leur fils unique rentrera d'Asie et là... Je ne veux même pas y penser.

    Chapitre 2

    Je préfère me souvenir du dernier vide-grenier de la saison... ou plutôt, en l'occurrence, un vide-mots, spécialité rarissime n'existant que dans un triangle défini par trois villages du Sud-Ouest, Carambar, Monteton et Condom. En vacances dans la région, j'avais envie de traîner dans ce coin-là.

    Comme d'habitude en début de matinée, je me livrais à mon occupation favorite, visiter la concurrence. Bien étalés sur l'herbe grassouillette, les voilà. Les mots dont personne ne voulait plus. Liquidés pour un euro symbolique, tracés sur leur carton aux couleurs surannées. Ce vide-mots m'attirait, et je lus, l'un après l'autre, les candidats au rachat.

    « Paletot » : Tiens, ma grand-mère l'utilisait souvent ; il se tenait discret sur un carton rose décoloré. Non, pas envie de celui-ci.

    « Omnibus » : omnibus, omnibus... étymologiquement simple mais pas très agréable sur son carton bleu-nuit. Omnibus de nuit ? Je poursuivis ma lecture.

    « Rutilant » : Sur son carton doré, trop clinquant à vouloir attirer le chaland. Non, pas celui-ci non plus !

    « Chaland » : justement, ce que je feignais d'être en cette jolie matinée. Je parierais que bien peu de mes compatriotes soient capables de définir ce chaland déposé sur son carton jaune vif... Fuite de la belle langue française ?

    Et puis... le voici, le mot que je souhaitai emmener chez moi. Elégamment tracé en calligraphie latine sur un carton blanc, il me jeta un coup d'oeil malicieux, me susurrant à l'oreille : « Achète -moi ! Achète-moi ! ». Côtoyant un « ensorcelé » sur carton rouge, le voilà, « grimoire » !

    Grimoire et moi, c'est pour la vie ; solidement tenu dans la main, je le ramenai chez moi. Et le déposai sur l'appui de la cheminée.

    Une exception car en général mes acquisitions restent dans le garage, bien plus simple pour ensuite les vendre. Ou les brader quand les objets débordent.

    Cette nuit-là, mes rêves me transportèrent dans un univers de brouillard âcre, ceignant une chaumière moyenâgeuse où poules et canards régnaient en maîtres. Je prélevais plumes et bave de crapaud pour élaborer une potion censée stopper du temps les terribles outrages.

    Puis le matin. L'un de ceux dont je me souviendrai longtemps. A côté du carton « grimoire » , une petite coupelle emplie d'un liquide saumâtre. Que je renifle, méfiant. Odeur de chocolat chaud à la cannelle, typiquement le genre de fragrance à laquelle je ne peux résister longtemps. J'avale le contenu du récipient.

    Direction la salle de bains. Regard machinal à mon reflet dans le miroir. On ne peut être et avoir été, évidemment. Quoique... en y regardant de plus près, je me trouve le teint rose et la peau lissée de frais. Moral ragaillardi par cette constatation, je passe une journée fort joyeuse... Eh oui, l'on peut être brocanteur et néanmoins coquet, foi d'Honoré !

    Cette nuit-là, mes rêves, un peu épais, me parlent de jeunesse retrouvée, d'un corps redevenu alerte grâce à une pâte à la recette maison faite d'excréments de canard colvert et de feuilles de saule écrasées.

    Petite appréhension en ouvrant un œil... Lequel aperçoit une nouvelle coupelle sur la cheminée, à côté de « grimoire » le carton. La curiosité est la plus forte. Une étrange bouillie noire trône dedans. Va falloir se l'appliquer sur le visage ? L'ingérer ? Dans le rêve, elle était répandue en tant que gommage corporel. Je hume. Puissant arôme de vanille. Irrésistible !

    Mais tout de même, elle est noire. La couleur des gousses, mais tout de même... Haussant les épaules, je pars derechef l'étaler dans la salle de bains. Pause de quinze minutes puis rinçage. Heureusement que je vis seul !

    Un effet visible ? Pas vraiment, par contre j'ai très envie d'aller faire un petit jogging autour de l'immeuble. Le temps d'enfiler la tenue ad'hoc, et je suis parti.

    Deux heures de footing plus tard, je rentre à peine essoufflé. Et maintenant ? Un p'tit cours de boxe française ? Je me rends dans une salle voisine de chez moi, non sans avoir pris rendez-vous via leur site internet ; leur coach veut bien me dispenser les bases de la boxe. Nous nous échinons de concert durant deux heures. Je rentre légèrement fatigué, très affamé cependant.

    Ce « grimoire » commence à m'être bien sympathique, qui dynamise ma vie de nouveau jeune…

    Est-ce l'effet du sport ? Cette nuit-là, pas de rêve ensorcelé. Juste un sommeil de plomb. Suivi d'un réveil de pierre. Pas la pêche, là. Et pourtant, une coupelle m'attend sur la cheminée. Emplie d'un liquide bleu lagon au parfum d'agrumes. Un jus d'orange matinal, voilà qui pourrait me faire du bien...

    J'hésite. Aucune idée de l'effet possible de cette potion-cadeau. Que me réserve mon nouvel ami « grimoire » ?

    Prudent, j'attends quelques heures. Le liquide bleu s'orne peu à peu d'une rondelle de citron, d'un petit palmier brillant et même d'un glaçon. Déguisé en cocktail des îles façon mojito.

    Comme par un fait exprès, la température extérieure, en ce milieu de journée, a augmenté... Je l'avale rapidement, presque sans y penser.

    Tout à coup mes ongles s'écartent de mes doigts, pour choir l'un après l'autre. Mes cheveux tombent un peu, puis par poignées. Cils et sourcils disparaissent aussi.

    Je me sens épuisé, probablement envoûté par un grimoire calligraphié.

    Ensorcelé... Ce mot côtoyait de près le « grimoire ». Ai-je eu raison de les séparer ? Ou fais-je l'objet d'une basse vengeance linguistique ?

    Incapable de raisonner davantage. Cependant les jours suivants, « grimoire » me sert des breuvages colorés, chatoyants et odorants, coupelles alignées sur la cheminée. Que je refuse

    Vous aimez cet aperçu ?
    Page 1 sur 1