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Le Fantôme de Marie Laurencin: Une saga historique
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Livre électronique131 pages1 heure

Le Fantôme de Marie Laurencin: Une saga historique

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À propos de ce livre électronique

Plongée dans la France du début du XXe siècle, avec en filigranes le destin de Marie Laurencin...

Qui savait que Marie Laurencin, amante de Guillaume Apollinaire et peintre célèbre, plongeait ses racines dans un village proche de Montebourg ? Qui savait que Boris Vian et les siens passaient leurs vacances dans la Hague ? Maurice Lecœur est le dictionnaire vivant du Cotentin.

Un roman qui traverse les générations et au sein duquel se mêlent fiction et rélaité historique !

EXTRAIT

Dans les semaines qui suivent, un surcroît de travail à la librairie lui fait un peu oublier sa visite au Salon. C’est en rangeant des journaux de l’année précédente que son attention est attirée par un poème publié dans le Mercure de France. Féru de lettres, Augustin se tient au courant des mouvements littéraires dont l’époque est novatrice. Le texte lui plaît, qui évoque les amours malheureuses de l’auteur, dans un monde aux frontières du réel, où rêve et réalité s’entremêlent. Cela s’appelle La Chanson du mal-aimé. C’est signé Guillaume Apollinaire.
Il se souvient de cet homme assez corpulent, au regard ironique, un peu désabusé, qui a séduit Marie Laurencin. Afin d’en savoir un peu plus sur lui, il s’absente une heure pour rendre visite à Hermeline. Ne lui a-t-elle pas dit qu’elle le connaissait ? En fait, c’est un prétexte pour revoir la jeune femme.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Ce conteur émérite nous donne une saga familiale aussi passionnante qu’émouvante en même temps qu’il fait revivre des époques successives avec une puissance d’évocation remarquable fondée sur une documentation sans failles. La France de 14-18, celle des Années folles (Ah, Marie, que de folies amoureuses…), le Paris de l’Exposition coloniale, la grande crise des années trente, l’Occupation, l’Amérique des années cinquante, la guerre d’Algérie : tel est le film que l’auteur met en scène ; ce sont les vies de nos aïeux et les nôtres qui défilent sous nos yeux. - Gilles Perrault

C'est une nouvelle saga passionnante que propose Maurice Lecoeur, au lecteur. Une saga qui débute en 1910, dans le Montmartre de la Belle époque, et se termine en pleine guerre d'Algérie. - Ouest France

À PROPOS DE L'AUTEUR

Maurice Lecœur, né en 1934, à Sainte-Mère-Église, est un écrivain de la Manche.
Il grandit sur la place du village de Sainte-Mère-Église, où il assiste au parachutage des troupes alliées. Il fuit sa maison avec sa mère qui meurt sous ses yeux, touchée par un éclat d’obus. Il étudie à Institut Saint-Paul de Cherbourg puis est diplômé de l’école de notariale de Paris. Promoteur immobilier puis conseiller juridique à Paris, il revient dans la Manche lors de sa retraite.
Il est sociétaire de la Société des gens de lettres de France et de la Société des auteurs de Normandie.
Maurice Lecœur est l’auteur de différents ouvrages pour lesquels il a obtenu plusieurs prix littéraires, dont le Prix des libraires de Normandie en 1994, et le Prix littéraire du Cotentinen 1996.
LangueFrançais
ÉditeurGlyphe
Date de sortie11 oct. 2017
ISBN9782369340874
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    Aperçu du livre

    Le Fantôme de Marie Laurencin - Maurice Lecoeur

    1

    C’est sur une note sombre que s’ouvre pour le vieil Augustin cette journée du lundi 11 juin 1956. Les enterrements n’ont jamais été sa tasse de thé. À l’approche de ses soixante-quinze ans, les relents d’encens et le chant plaintif du Dies irae sont pour lui comme des rumeurs de sa vie en fuite. Tout le week-end, il a plu. Il n’aime guère le climat parisien, trop prévisible à son goût, loin de celui de sa presqu’île natale, avec les brumes qui l’emmitouflent, la douceur des premiers jours d’automne qui contrefont l’été. La messe de funérailles est bien entamée quand son petit-fils le dépose devant l’église de la rue Saint-Dominique. Du beau monde en occupe les travées, peintres, écrivains, artistes anonymes à la négligence étudiée. Il s’installe dans un des bas-côtés. Au milieu du chœur, le catafalque est entouré de gerbes, leur parfum se mêle à l’odeur des cierges. Le maître de cérémonie invite l’assistance à bénir le cercueil. À l’agitation des croque-morts, il sait que la cérémonie touche à sa fin. Après avoir chargé la bière dans le fourgon mortuaire, on va s’acheminer vers le cimetière du Père-Lachaise, dernière demeure de Marie Laurencin, la petite-fille du forgeron de Vaudreville.

    Si Augustin Hardy n’a fait que croiser Marie, il se souvient de ses grands-parents, Joseph Laurencin, le maréchal-ferrant, et Marie-Henriette, la couturière. C’est aux confins de Vaudreville, un petit village du Cotentin, qu’Augustin a grandi, dans une famille de cultivateurs où l’argent ne coulait pas à flots mais où l’on vivait décemment. Avec son père, il allait régulièrement faire ferrer leur cheval à la forge de Laurencin. Il en aimait le bruit de l’enclume, l’odeur de corne brûlée.

    Le maître d’école avait bien vanté les dispositions d’Augustin pour apprendre, mais un bras de moins à la ferme et le coût des études s’avéraient une charge supplémentaire pour les parents. Finalement, à la demande du curé, une voisine aisée avait permis qu’il poursuive jusqu’au brevet à la toute proche abbaye de Montebourg, un collège tenu par les Frères des Écoles chrétiennes.

    À l’exemple de Mélanie, la fille du couple Laurencin qui, dans sa jeunesse, était ressortie de cet établissement avec un bon bagage culturel. Élégante, la mise soignée, bien que d’allure un peu austère, elle pouvait évidemment espérer mieux que s’unir à un petit paysan de Vaudreville ou à un marin-pêcheur de Saint-Vaast-la-Hougue. L’année de ses dix-huit ans, avec l’accord de son père, Mélanie avait pris le train pour la capitale dans l’espoir d’y trouver un emploi, peut-être dans une maison bourgeoise. Elle donnait de temps à autre de ses nouvelles, heureuse de son travail de brodeuse où elle excellait, et qui lui permettait de gagner sa vie. On la disait sérieuse, voire dévote, et la surprise des siens n’en fut que plus grande quand ils apprirent, trois ans plus tard, qu’elle avait fauté et donné naissance à une enfant naturelle.

    Celui qui l’avait mise enceinte était un monsieur fraîchement élu député de la Somme. Cet Alfred Toulet, déjà marié, ne pouvait reconnaître sa bâtarde adultérine, ni a fortiori lui donner son nom. Et c’est ainsi que le mercredi 31 octobre 1883, au numéro 63 de la rue de Chabrol, Mélanie avait accouché d’une petite fille. Sur l’acte de naissance libellé à la mairie du Xe arrondissement de Paris, l’enfant avait été déclarée sous le nom de Marie Laurencin.

    Soixante-douze ans se sont écoulés depuis.

    Trois jours plus tôt, terrassée par une crise cardiaque, l’artiste est morte à son domicile. Son cœur fatigué s’est arrêté dans la quête des créatures évanescentes de ses aquarelles.

    Anthony se félicite d’avoir trouvé une place devant l’église. Bien calé dans sa 4 CV Renault, il écoute Europe numéro 1. Les informations font état de la lune de miel de Grace Kelly et de Rainier de Monaco, de la sortie en salles du film de Cousteau Le Monde du silence, Palme d’or à Cannes. L’annonce de la parution chez Gallimard d’un nouveau livre d’Albert Camus le ramène à une réalité plus prosaïque, son départ pour l’Algérie à la fin du mois. L’appel sous les drapeaux lui est parvenu trois jours plus tôt sous forme d’une convocation pour rejoindre la base de transit de Marseille, avant son embarquement sur le Ville d’Alger.

    Augustin sort de l’église le premier. Il contourne la voiture des pompes funèbres, se dirige vers la Renault. Il marche à petits pas rapides, comme s’il avait une tâche importante à accomplir.

    Anthony lui ouvre la porte :

    – Monte, grand-père, il recommence à pleuvoir.

    – Merci, mon petit.

    – Alors, c’était bien ? Il y avait des gens connus ?

    – Comme je suis arrivé en retard, je n’ai pas vu grand-chose, seulement des mondains sans intérêt. Et je n’ai pas attendu la fin pour assister à leurs ronds de jambe. Allez, reconduis-moi là-haut.

    Là-haut, c’est Montmartre.

    Depuis un demi-siècle, Augustin Hardy vit sur la Butte. Après son service militaire dans la région parisienne, il a succombé aux attraits de la capitale et a trouvé un emploi dans une librairie de la rue Caulaincourt. Bien sûr, il revient à Vaudreville, de temps à autre, pour rendre visite à sa famille. Toujours avec plaisir, mais heureux d’avoir pu élargir son horizon en quittant la centaine d’habitants de son village natal. Comme l’avait fait vingt ans plus tôt Mélanie Laurencin. Mais, avec l’âge et la disparition des siens, ses retours au pays sont devenus plus rares.

    Arrivés rue Norvins, Anthony arrête sa voiture devant l’immeuble de son grand-père. Celui-ci en profite pour lui faire d’ultimes recommandations :

    – Prends garde à toi. En Algérie, même s’ils appellent ça maintien de l’ordre, c’est la guerre. J’ai connu les deux précédentes, et crois-moi, j’en ai trop vu partir la fleur au fusil et revenir entre quatre planches.

    – Sois tranquille, je n’ai pas l’intention de faire du zèle. Et dix-huit mois au soleil, c’est mieux que de moisir dans une caserne de Pontoise.

    – Dieu t’entende. Et passe chez moi avant ton départ, j’ai un cadeau à te faire.

    – Promis. J’en profiterai pour revoir ton joli tableau de Marie Laurencin.

    – Ah, cette peinture, c’est toute une histoire.

    – Tu me raconteras.

    Ce soir-là, Augustin veille tard.

    Si ce n’est son arthrose, une vieille ennemie avec laquelle il s’est habitué à vivre, il se porte plutôt bien. Sa fille, attachée au quartier de sa jeunesse, habite à deux pas. Attentive à pourvoir à ses besoins, elle lui rend visite régulièrement. Louise est le seul enfant qu’il a eu avec Hermeline, son épouse décédée six mois plus tôt. Mariée une première fois à un journaliste américain, disparu en 1944 en lui laissant la garde d’Anthony, leur fils, né le jour de la victoire du Front populaire aux législatives.

    Par une fenêtre ouverte, des sons d’accordéon lui parviennent d’une terrasse de la place du Tertre. Un rayon de lune inonde la pièce, projette une lueur blafarde sur le tableau accroché au mur. Un portrait de femme au visage vaporeux, rehaussé de rose, le cou cerné d’une écharpe verte. D’une beauté éthérée, avec cette vivacité qui caractérise les Laurencin d’avant les Années folles.

    Chaque fois qu’il contemple la toile, des souvenirs enlisés lui reviennent en mémoire. Comme il n’a pas sommeil, il entreprend le rangement de vieux papiers, de photos jaunies. Jalons d’une vie douce-amère, avec des vertiges amoureux, des joies, des chagrins, une passion sans faille pour la peinture et la poésie qu’il pense capables d’influer sur le cours des choses et le destin des êtres.

    2

    C’est au Salon des indépendants de 1910 qu’il a rencontré sa femme.

    Comme chaque année, Augustin Hardy s’y est rendu le jour de l’ouverture. L’exposition se tient dans les baraquements du Cours-la-Reine. Deux mois plus tôt, la pluie est tombée plusieurs jours sans discontinuer. Paris a connu l’une des plus importantes crues de son histoire. La moitié de la ville a été inondée, avec des dizaines de milliers de Parisiens sinistrés, les rues envahies par une eau glacée.

    Avant de parcourir les allées du Salon, Augustin veut se procurer un

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