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Du Rififi à Hossegor: Roman
Du Rififi à Hossegor: Roman
Du Rififi à Hossegor: Roman
Livre électronique184 pages2 heures

Du Rififi à Hossegor: Roman

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À propos de ce livre électronique

« Moi quand on m’en fait trop, je correctionne plus, je dynamite, je disperse, je ventile ! », faisait dire Michel Audiard à Bernard Blier, alias Raoul Volfoni, dans les Tontons Flingueurs.
Jean, le héros de Rififi sur la Côte basque pourrait reprendre cette déclaration à son compte. C’est pourtant un jeune homme tranquille a priori, un sportif, un surfeur, un fou de l’océan. Mais la découverte du cadavre de son meilleur ami recraché par les vagues sur la plage de La Gravière, va déclencher chez lui une réaction de justicier peu soucieux des convenances.
Comme Raoul, Jean va se mettre à « ventiler » et à « disperser » sec, d’Hossegor à la Côte basque, sur les routes, dans les dunes, les villages et les bistrots plus ou moins glauques du Petit Bayonne. Ses aventures nous plongent dans une ambiance polar des années soixante, au milieu de flics et surtout de truands à la gâchette facile. Et au vocabulaire fleuri, mais très explicite.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Né à Pau, Philippe Pourxet est auteur de romans historiques et romans policiers. Après des études à l’École R. M. de Sorèze et à la faculté de droit de Pau, il a travaillé dans la publicité et dans le monde du luxe. Il est aussi membre de la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD). Il a été comédien à la Troupe du Théâtre des Loges (Paris) de 1988 à 1994.
En 1994 il crée et dirige la troupe théâtrale La Compagnie de l’Instant. Il montera trois pièces à Paris et en Province dont il est l'auteur: L'Oiseau des Tempêtes (drame), La cour des corbeaux (Comédie médiévale), La Suite (Comédie)
LangueFrançais
Date de sortie29 nov. 2019
ISBN9791097150334
Du Rififi à Hossegor: Roman

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    Aperçu du livre

    Du Rififi à Hossegor - Philippe Pourxet

    Audiard

    -1-

    Hossegor, septembre 1984

    Armé de sa planche de surf, Jean Lamarque descendait d’un pas déterminé la pente de la dune. Ses yeux légèrement plissés ne perdaient pas de vue les rouleaux qui, par séries, venaient éclater sur la plage. Si l’été, faute de vagues, n’avait pas donné entière satisfaction aux surfeurs, l’automne en revanche s’annonçait, comme bien souvent, exceptionnel.

    Hossegor, vidée de son flot turbulent de touristes, reprenait son rythme lent et apaisé. Une douceur d’été indien baignait la Côte landaise. À trente et un ans révolus, Jean appréciait ces moments privilégiés où, entre amis, il allait à sa manière défier l’océan. Durant dix années, il avait recherché les meilleures vagues sur la planète. De l’Australie à la Californie, en passant par Hawaï, l’Indonésie et la Polynésie, il avait vécu de différents petits boulots et d’expériences variées qui avaient fait de lui un homme déterminé et serein. Malgré son jeune âge, il avait décidé de s’installer sur la Côte d’Argent où la vie lui paraissait plus détendue, moins stressante... Sa connaissance des sports nautiques lui assurait de vivre tranquillement parmi ses semblables. Des gens pour la plupart simples et passionnés qui se contentaient de peu pour être heureux.

    Son regard se porta sur sa gauche et se posa bien au-delà de la plage de La Gravière, sur les bâtiments blancs qui formaient le front de mer de la station balnéaire d’Hossegor. Il ressentait un léger mal de tête ; cette vision le raviva. La veille, il avait passé une partie de la nuit à assécher des verres de houblon liquide et d’alcool de cactus au « Casa », repaire nocturne des surfeurs locaux en cette saison.

    Plus il s’approchait de l’eau, plus son excitation grandissait. Sa principale raison de vivre se trouvait là, pour ainsi dire à ses pieds. Il ferma entièrement sa combinaison et s’élança. Faisant corps avec sa planche, il commença à ramer. Son expérience lui permit de franchir sans encombre la première série de vagues. Il s’assit sur son board et attendit l’arrivée du rouleau qui l’arracherait de la lourdeur de l’élément liquide.

    Ayant négligé la première vague, la seconde masse de trois mètres de haut l’entraîna dans une course fulgurante. Sitôt levé, sa vitesse augmenta et avec elle ses sensations de plaisir et de liberté. Ne perdant pas de vue la lèvre de la vague qui le portait, il oublia le reste du monde et amorça une série de virages. La même expression de bonheur se lisait sur son visage et sur celui de ses amis qui nageaient en sens inverse. Arrivé à quelques mètres de la plage, Jean effectua un roller plus radical que les précédents et s’arrêta net derrière le dernier rouleau.

    Alors qu’il s’apprêtait à repartir à l’assaut de l’océan, des cris venant de la plage attirèrent son attention. Dans le vacarme sourd du shore break¹, il crut entendre son nom. Fred, un de ses meilleurs amis, agitait les bras dans sa direction. Jean, intrigué par cette excitation, abandonna ses projets. Avec regret, il scruta avec admiration les tubes qui se formaient au loin.

    ― Viens je te dis ! hurlait son ami, on a découvert un corps.

    Jean ne comprenait pas la nervosité extrême de Fred. Il n’était pas si rare de trouver sur la plage de La Gravière des corps humains rejetés par l’océan.

    ― Dépêche-toi, s’affolait Fred, on dirait que c’est… François !

    Cette annonce le glaça. Il resta un instant comme figé et laissa tomber sa planche. Il se mit à courir en direction du groupe qui entourait le cadavre. Il se fraya d’autorité un passage parmi les curieux et finit par atteindre le corps atrocement mutilé par son séjour prolongé dans l’océan.

    Hélas, tout correspondait : la taille, les cheveux, l’apparence générale et pire encore, un détail qui ne lui laissa aucun doute : au poignet gauche du noyé, se trouvait le même bracelet de cuivre dont ne se séparait jamais François. Ce dernier constat finit de l’achever. Il se trouvait bien face au corps de son meilleur ami. Le monde autour de lui sembla vaciller, se voiler, devenir irréel. La confirmation de l’identité du mort amplifia le roulement des commentaires. Tous connaissaient bien François et la consternation pouvait se lire sur les visages. Comment un athlète pareil, nageur hors pair, avait-il pu se noyer ? Il n’était pas fréquent qu’un accident si dramatique arrive à un surfeur aussi chevronné. L’effervescence autour du corps contrastait avec le calme de Jean qui ne disait plus rien. Le jeune homme prit soin de balayer une mèche de cheveux qui barrait le visage de son ami, méconnaissable. Il eut un haut le coeur et s’écarta un peu pour recouvrer ses esprits. Ses yeux se perdaient maintenant dans cet océan qu’il aimait tant et qui aujourd’hui se montrait si cruel. Qu’y cherchait-il ? Une réponse à ses questions ? Ou bien le calme apaisant des flots face à cette tragédie ?

    Il n’avait pas vu François depuis plus d’une semaine et cela n’avait rien d’extraordinaire. Depuis deux mois, son ami travaillait à Bayonne et se faisait rare à Hossegor. Ses déplacements quotidiens et aussi son emploi du temps ne lui laissaient plus autant de liberté qu’auparavant. « C’est passager, ça ne durera pas…» s’amusait-il à dire.

    Une sorte de vertige s’empara de Jean. Il ne bougeait plus.

    ― Dis, Jean, ça ne va pas ? s’inquiéta un ami en lui posant amicalement la main sur l’épaule.

    ― Fous-moi la paix ! lâcha-t-il sèchement.

    Comme revenu à la réalité, il s’en alla rapidement laissant derrière lui le cadavre de son ami, sans se retourner. Le nœud qui lui broyait les boyaux le tirait en avant et le conduisit directement à sa vieille 4L.

    ― Mais qu’est-ce que j’ai dit ? s’étonna l’autre en direction de Fred.

    ― Laisse tomber et va plutôt prévenir les gendarmes, ça t’évitera de poser des questions idiotes.

    -2-

    La porte de la maison grinça sinistrement. Cette petite villa sans étage avait été bâtie dans une impasse calme qui donnait d’un côté sur le Canal d’Hossegor et de l’autre sur l’avenue du Tour du Lac. Au milieu des pins, elle semblait être posée sur une couche épaisse de sable. Tout autour n’était que calme et ambiance bucolique. Ici, on entendait les rouleaux de l’océan se déchaîner sur la côte les jours de grand vent d’Ouest. Ce jour-ci seule une légère brise balayait la cime des arbres centenaires.

    Jean hésita à franchir le pas. À l’intérieur, une musique californienne, malgré sa douce mélodie, l’agressa. Nerveusement, il pressa sur le bouton-STOP du lecteur de cassette. Cette musique confirmait la présence de Sophie, la fille qui partageait depuis trois années sa vie. Il l’avait rencontrée avec François à Hawaï. Entre lui et son ami, une compétition s’était engagée pour séduire la jeune femme. C’était Jean qui l’avait emportée. De justesse, mais cette victoire, n’avait pas longtemps affecté les deux amis. François s’était peu à peu effacé et l’épisode n’avait laissé aucune trace apparente entre eux.

    Sophie lisait un magazine, assise confortablement dans un large fauteuil. Ses cheveux blonds, soigneusement attachés, laissaient apparaître un visage gracieux et de magnifiques yeux verts. Depuis quelques jours déjà, une sorte de mélancolie l’accablait et son moral chutait à tel point que ses proches craignaient la déprime. Quand on la questionnait à ce sujet, elle se contentait d’évoquer l’arrière-saison avec son calme... Rien de très précis en somme.

    ― Les vagues n’étaient pas bonnes ? demanda-t-elle.

    Jean ne put répondre tout de suite. Un silence s’installa rendant l’atmosphère pesante. Durant le trajet, il avait essayé de mettre en forme cette nouvelle terrible, mais aucun mot ne réussissait à farder une réalité cruelle, brutale. Lui-même avait du mal à se rendre réellement compte… D’un coup, malgré lui, il laissa échapper, plus sèchement qu’il ne l’aurait souhaité :

    ― François est mort… On a retrouvé son corps sur la plage de La Gravière

    Cette fois-ci, le moral de Sophie trouva une excellente raison pour s’effondrer complètement. Une voix mêlée de pleurs posa une série de questions. Tout son corps s’agitait. La pièce autour d’elle se resserrait, elle était au bord de la crise de nerfs. Jean la prit dans ses bras et tenta de la consoler. Rien n’y fit, elle ne cessait de répéter :

    ― C’est impossible… Ce n’est pas vrai !!

    ― Je n’en sais pas plus… C’était horrible… On ne pouvait même plus le reconnaître… Son visage… Je ne comprends pas ce qui s’est passé… Peut-être l’hélice d’un bateau…

    ― L’océan était très fort ces derniers jours… articula-t-elle avec peine.

    ― Justement, il ne s’y serait jamais risqué.

    ― Que veux-tu dire ? Je ne comprends pas.

    ― Je ne sais pas… Je ne m’explique pas tout… Il y a quelque chose qui cloche…

    ― Je t’en prie, même un excellent nageur peut se laisser surprendre et se faire entraîner par les courants… Il aimait surfer quand personne n’osait se mettre à l’eau, tu le sais bien…

    ― Mais bon sang ! Ce n’était pas le premier vacancier venu ! Il connaissait parfaitement son spot ! Et puis, il portait sur lui les restes de son t-shirt australien, celui qu’il adorait… Jamais, il ne serait allé à l’eau avec.

    ― Mais que veux-tu dire à la fin ?

    ― Je ne sais pas, mais il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans tout ça !

    ― Et la police, que dit-elle ?

    ― Je n’en sais rien, je suis parti avant qu’elle n’arrive.

    Jean s’énervait. Aucune de ses questions ne trouvait de réponse. Il restait debout devant son amie, contrôlant avec peine ses gestes. Sophie parvint à lui prendre la main.

    ― Chéri, serre-moi dans tes bras… J’ai froid… J’ai peur…

    Ses yeux fiévreux se posaient sur chaque meuble et objet constituant leur univers cossu, sans pouvoir se fixer. La panique l’étreignait. Son souffle court, bruyant, se confondait avec ses pleurs. Avec un temps de retard, Jean la rejoignit sur le canapé. Son regard dur, déterminé, contrastait avec l’hystérie de son amie. Il en était convaincu, tout dans cette mort n’était pas aussi simple qu’il y paraissait.

    Le lendemain, les premiers rayons, bien que timides, arrivèrent avec difficulté à chasser les cauchemars d’une nuit sans sommeil. Jean en était persuadé, François n’avait pu se noyer accidentellement, c’était impossible. Mais alors, que s’était-il réellement passé ? Et s’il ne s’agissait pas d’un accident ? Le jeune homme avait du mal à formuler ce qu’il ressentait. Oui, si ce n’était pas un accident alors, ce ne pouvait être qu’un… meurtre ! Mais pourquoi ? Et qui ? La sonnerie du téléphone retentit. Il sursauta et décrocha aussitôt :

    ― Allô ! lâcha-t-il avec agressivité.

    ― C’est Fred… Je voulais te dire que…

    ― Laisse tomber… Je te remercie… Sais-tu ce qu’ont dit les flics sur tout ça ?

    ― Accident… Noyade… Il serait ensuite passé sous un bateau… Rien de plus.

    ― Les cons !

    ― C’est vrai qu’à première vue, c’est curieux… Surtout quand on connaissait François… Moi, à mon avis…

    ― Écoute, coupa net Jean, excuse-moi, mais ce n’est pas le moment. Merci de ton appel.

    ― D’accord, je comprends… Allez, à la prochaine.

    Jean raccrocha et resta un moment immobile devant le combiné. Durant toute sa vie, il avait toujours été motivé par cette volonté farouche d’aller au fond des choses, de ne pas se laisser abattre au gré des difficultés. C’était dans les pires situations qu’il se montrait le plus efficace, qu’il s’engageait à fond.

    À quinze ans, il avait perdu ses parents dans un effroyable accident de la route et, plutôt que de ressasser l’injustice de ces événements, il avait quitté le lycée pour travailler dans un surf shop. Poncer à longueur de journée des planches ne lui faisait pas peur. Au contraire.

    Sa vie d’alors était simple : travailler dur, apprendre, surfer et oublier… Une fêlure lézardait son cœur, mais il ne voulait pas sombrer dans une mélancolie qui ne mènerait nulle part. Ce qui était, était, et rien ne changerait le cours du passé. Aller de l’avant, quoi qu’il arrive, c’était son objectif, sa façon de vivre. Au bout d’une année, il avait mis suffisamment d’argent de côté pour se rendre dans le Queensland, sur la côte Est de l’Australie. Il y rejoignit une communauté de surfeurs qui lui firent découvrir les meilleurs spots du pays. C’était sa nouvelle famille. Quand il manquait d’argent, il convoyait alors des autos entre Brisbane et Sydney ou réparait les planches de ses nouveaux amis.

    Après deux années de cette existence, il retourna en France avec trois de ses compagnons partis faire le tour des meilleurs spots de la planète. Lui s’arrêta à Hossegor pour faire une pause, retrouver les plages de son enfance. En fait de pause, on lui rasa la tête et son pays l’envoya dans les Alpes, rejoindre le régiment des Chasseurs alpins. La glisse y était moins fun, mais son caractère s’y affirma davantage encore. Après douze mois au sein d’un groupe commando où il apprit l’abnégation et le maniement des armes,

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