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En 1954, Robert Capa, âgé de 41 ans, est une figure de proue du photojournalisme. D’origine hongroise, naturalisé américain, il a déjà couvert quatre conflits : la guerre d’Espagne, la guerre sino-japonaise, la Seconde Guerre mondiale et la création de l’État d’Israël. Sacré “meilleur photographe de guerre du monde” par le Picture Post en 1938, il a réalisé des images élevées au rang d’icônes, cristallisant la mémoire des événements historiques. Dès 1947, il raconte à la radio que pour prendre de bonnes photographies, il faut passer beaucoup de temps sur le terrain, au plus près du danger, dans les tranchées : “une habitude que j’aimerais bien perdre”, conclut-il sur le ton humoristique qui le caractérisait.
Lassé par la photographie, il envisage de mettre fin à sa carrière de reporter pour se fixer à Paris, composer un roman ou lancer une entreprise. Mais début 1954, le groupe de presse écrite Mainichi l’invite à voyager au Japon en vue de la sortie d’un nouveau magazine. Ce reportage de trois semaines, tous frais payés, marque le départ d’un enchaînement de circonstances qui vont le ramener sur un théâtre d’opérations armées.
Un accident au goût amer
À la fin du mois d’avril 1954, le photographe Howard Sochurek, qui couvre la guerre, apprend que sa mère vient de subir une crise cardiaque qui met ses jours en danger. Il requiert d’être remplacé pour se rendre à son chevet. À New York, l’éditeur de chargé des commandes, Ray Mackland, déjeune le jour même avec John Morris, de l’agence Magnum, cofondée par Capa en 1947. Il en profite pour lui demander si ce dernier serait intéressé par l’opportunité, puisqu’il se trouve non loin, au Japon. Morris pense que Capa refusera mais que cela ne coûte rien d’essayer. envoie donc un télégramme à Capa et autorise Sochurek à quitter l’Indochine en passant par Tokyo, pour lui parler en personne. Rendez-vous est pris au bar du Tokyo Press Club le 29 avril. Capa arrive avec une heure et demie de retard, hésite mais finit par donner son accord le lendemain. Sochurek l’a averti des dangers présents sur le terrain, Morris lui a rappelé qu’il n’avait nulle obligation. Mais Capa a besoin d’argent, a renoué avec le plaisir de la prise de vue au Japon et se montre enclin à tenter l’aventure.