Londres, avril 2024. Nous assistons à la cérémonie de remise des Sony World Photography Awards, une série de prix prestigieux qui récompensent depuis 2008 des photographes du monde entier dans de nombreuses catégories. Pour la première fois, c’est une Française, Juliette Pavy, qui se voit distinguée du titre très convoité de photographe de l’année pour sa série . Née en 1996, cette diplômée en photojournalisme de l’école EMI-CFD à Paris remporte un prix de 25 000 $, du matériel Sony et une exposition à , nous dit-elle lors de l’entretien qu’elle nous a accordé pour ce dossier. Comment rendre compte en images de faits ayant eu lieu il y a un demi-siècle, dans le plus grand secret et touchant à l’intimité ? Comment photographier le vide, l’absence ou le traumatisme ? C’est ce qui fait toute la force de ce reportage, qui parvient à évoquer les origines du programme jusqu’à ses conséquences actuelles, à travers des portraits et témoignages de victimes, mais également de médecins ayant participé à la campagne ou encore de parlementaires menant en ce moment même une enquête pour le gouvernement danois, poussé ces dernières années à faire toute la lumière sur cette réalité longtemps dissimulée. Montrant une cohérence formelle admirable, la série alterne donc portraits mais aussi plans d’ambiance, lieux liés directement ou non à cet épisode et documents d’archives (radiographies, photographies anciennes…). Ce corpus vient ainsi poser des images, des visages et des mots sur des faits autrement voués à l’oubli et au non-dit. Son reportage, remarqué et déjà publié par plusieurs médias précurseurs, trouve aujourd’hui avec ce prix un écho mondial, contribuant à donner une voix à ces communautés marginalisées, en parallèle avec d’autres travaux de journalistes sur le même sujet. Pour cette Bretonne ayant un intérêt pour les femmes autochtones de l’Arctique, tout commence par la lecture d’un article dans la presse locale. nous explique-t-elle. Ouest France À ce moment-là, Juliette Pavy avait justement l’intention de se rendre au Groenland pour effectuer plusieurs reportages personnels, notamment sur le quotidien des jeunes et le réchauffement climatique. En tant que photojournaliste, elle a l’habitude d’optimiser ses déplacements en réalisant plusieurs reportages de front, bien souvent sans commande préalable. En l’occurrence, elle est partie au Groenland sans avoir vendu aucune de ces séries en amont, et donc à ses propres frais. Mais elle était certaine de l’intérêt de ce sujet, d’un type assez nouveau pour elle. préciset-elle. Avant même de penser à l’image, cette journaliste de formation est motivée par la volonté de rassembler davantage d’informations sur place. nous confiet-elle. Préparation minutieuse en amont, enquête et prise de vue sur place, allers-retours, postproduction et editing de la série : Juliette Pavy a bien voulu détailler pour les coulisses de ce projet, qu’elle souhaite encore approfondir.
