Alors que la forêt amazonienne est de nouveau menacée, le chef indien est venu en Europe transmettre son héritage
Devant nous, Raoni désigne ses successeurs, Tapi et Watatakalu. « C’est aux jeunes de prendre le relais ! »
Yambi ! » J’ai dit.
Alors Raoni lâche le micro dans lequel, en langue kayapo – sa tribu d’Amazonie –, il vient de transmettre l’héritage de son combat… Un combat entamé cinquante ans plus tôt, en octobre 1973, quand il délivra l’explorateur Jean-Pierre Dutilleux d’une exécution programmée par un certain Minh, mi-chef de guerre, mi-sorcier aux yeux hallucinés, qui maniait, comme un estoc, la massue de liane, bois et bambou tressés. Fait prisonnier et retenu dans une case au bord du fleuve Xingu, Dutilleux ne dut son salut qu’à une arme de paix, forcément inconnue des Indiens : sa caméra, dont le moteur à ressort se remontait à la main tel un réveil rustique. Intrigué par l’appareil insolite et bruyant, Raoni, déjà grand cacique des Kayapos, avait su calmer les guerriers que les bûcherons, les chercheurs d’or (les « garimpeiros ») et autres marchands d’illusions brésiliens avaient rendus comme enragés.
Raoni comprit vite que le jeune Belge n’était pas venu saccager la forêt et dépouiller les tribus.