En décembre1941, son entrée en guerre confronte l’Amérique à une situation atypique. Non seulement deux océans la séparent de ses adversaires, mais – situation inédite – elle ne dispose d’aucun pied-àterre continental, comme dans la France de 1917. À l’ouest contre le Japon et à l’est contre l’Axe germano-italien, il va donc falloir se mouiller les pieds. Pour l’Europe, le chef d’état-major de l’US Army, George Marshall, préfère d’emblée la voie la plus directe: utiliser la Grande-Bretagne comme un tremplin pour débarquer en France et foncer vers l’Allemagne. Mais il doit bientôt déchanter: les économistes ne lui laissent pas espérer un tel projet avant 1944.
Comme il est hors de question d’attendre l’arme au pied durant deux ans et demi, tant pour des raisons de politiques étrangère et intérieure que pour ne pas voir la marine en profiter pour remettre en cause l’option « Germany First », l’Army fait donc un pas de côté pour frapper les arrières de Rommel et le bouter hors d’Afrique du Nord dès novembre 1942 (opération Torch, au Maroc et en Algérie). En outre, débarquer sur un territoire vichyste, en principe neutre, sera l’occasion d’acquérir une expérience amphibie à moindre coût. Si Torch réussit, la manœuvre fait cependant dériver la stratégie américaine sur l’axe préféré par Londres: l’attaque de l’Italie mussolinienne (voir G&H no 53, p. 46-47). De nouveau, il faut traverser la mer pour atteindre la Sicile (Husky, juillet 1943) puis la Botte ellemême (Avalanche, septembre 1943). Mais la péninsule est une impasse, et le débarquement sur les arrières allemands à Anzio (Shingle, janvier 1944) ne permet pas d’en sortir. C’est donc sur les plages de Normandie (Neptune, la phase initiale d’Overlord, 6 juin 1944), puis de Provence (Dragoon, 15 août) que sont posées les premières bornes de la victoire.
Dans le Pacifique, c’est un festival. Après un débarquement « défensif » à Guadalcanal en août 1942 pour neutraliser la poussée japonaise, qui menaçait de couper le cordon entre les États-Unis et l’Australie, les Américains s’offrent le luxe d’une double offensive transocéanique à coup de , ces « débarquements-assauts» contre les positions retranchées nippones. La première, à travers le Pacifique central, perce la ligne de défense extérieure (archipels des Gilbert et des Marshall à l’hiver 1943-1944), puis la ligne principale (Mariannes en juin 1944) avant d’attaquer les avant-postes de l’archipel nippon: Iwo Jima et Okinawa en 1945 ( G&H ). La seconde offensive vient du sud. Elle remonte le long de la nouvelle Guinée en 1944 pour libérer les Philippines durant l’hiver 1944-1945. Au total, les Américains
