James ne s’attendait pas à ce que Jack Smith évoque le passé de Rosalie. Étonné d’une telle entrée en matière, il reprit, impassible :
– Rosalie n’a rien omis, je sais ce qu’elle a traversé… Vous espériez peut-être me faire chanter ?
– J’avoue que l’idée m’a traversé l’esprit. Mais mon ami Conrad avait bien deviné que vous n’étiez pas le genre de bonhomme à capituler devant de tels arguments pour me céder vos biens.
– Que voulez-vous, Smith ? Je commence à perdre patience. Vous devez bien comprendre que je ne me laisserai pas spolier de ma propriété sans me battre !
– Je suis persuadé que quelques individus ont assuré vos arrières. J’ai misé sur le fait que vous ne laisseriez que peu de personnel au ranch. Préoccupé par notre entrevue, vous avez emmené vos meilleurs tireurs pour veiller sur vous.
James sentit un grand froid le pénétrer. Effectivement, il n’avait laissé chez lui que très peu d’hommes, certain que Jack Smith l’attirait dans un traquenard ! Même si ceux qui assuraient la protection de Rosalie et Capucine étaient de bons éléments, ils étaient peu nombreux pour faire face aux desperados de son voisin.
Ce dernier continuait :
– Conrad et ses acolytes sont en ce moment même chez vous. Si tout se passe comme prévu, votre femme et son amie sont mes prisonnières à l’heure actuelle… Vous avez jusqu’à minuit pour faire votre choix : votre dulcinée ou votre ranch.
James serra les poings.
– Qui vous dit que mes hommes n’ont pas réussi à déjouer vos bandits ?
Smith éclata d’un rire moqueur :
– Vous savez que l’un de vos vachers s’est laissé acheter ? Il n’a pas pu résister à mon offre… Ce qui a grandement facilité l’intervention de mes hommes. Bien, je vous laisse maintenant. Réfléchissez et n’oubliez pas, les actes de la propriété doivent m’être remis avant minuit, sinon je crains que votre épouse et l’autre fille ne soient ramenées dans la plantation d’où elles n’auraient jamais dû partir. Il se peut aussi que Conrad s’amuse un peu avant s’il découvre qu’elles sont responsables de la mort de son cher frangin.
James fit volte-face et éperonna son cheval. Le cœur étreint par l’angoisse, il galopait à vive allure.
Saul le vit passer. Nul besoin d’explications. Sans hésiter, il fit signe à ses compagnons et ils s’élancèrent aussitôt à la suite du rancher.
Rosalie et Capucine avaient disparu. James et son frère trouvèrent la maison vide. Les employés étaient morts. Un seul manquait à l’appel, le traître qui certainement avait fui. Les deux femmes avaient lutté. Tout était renversé dans le salon.
