En débarquant à Paris, il doit d’abord gommer son accent méridional pour tuer les rires qui accompagnent toutes ses auditions
’ai connu le bonheur, mais ce n’est pas ce qui m’a rendu le plus heureux.» De cette phrase extraite du « Journal » de Jules Renard, qu’il a lu et relu et qu’il a joué sur scène, Jean-Louis Trintignant aurait pu faire une maxime: elle semble résumer sa vie. Exister fort, risquer, jouir et souffrir pour remplir une existence qui, même longue de neuf décennies, aura passé si vite entre amours et deuils, explorations et renoncements. Des malheurs pour magnifier le bonheur.
Oui, cette phrase de Jules Renard, c’est peut-être exactement Jean-Louis Trintignant, homme complexe et tourmenté qui disait : « Toute chose n’existe que par rapport à son contraire.» Alors, pour comprendre Trintignant, il faut d’abord s’intéresser à Jean-Louis, remonter à l’enfance, chercher la faille, les oppositions qui l’ont construit jusqu’à le transformer, lui, l’introverti viscéral, en charmeur, l’un des acteurs les plus sombres et lumineux de sa génération.
En 1955, le jeune inconnu snobe le patriarche Gabin
« Je viens de la Provence austère. » Jean-Louis Trintignant naît le 11 décembre 1930 à Piolenc, dans le Vaucluse, tout près d’Orange. La famille est catholique, mais la région est terre d’accueil des protestants, dont il a toujours affectionné la froideur. Durant la Seconde Guerre mondiale, ses parents sont arrêtés. Raoul, le père, emprisonné aux Baumettes, à Marseille, et libéré à la fin du conflit, sera fêté en héros de la Résistance. Claire, la mère, sera tondue parce qu’elle aurait couché avec son geôlier allemand. Ses parents sont saufs, mais le traumatisme est sévère. Il n’a que 14 ans – deux ans
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